Associations membres : ACEF de la Péninsule ACEF de l'outaouais ACEF de Québec ACEF des Basses-Laurentides Pour éviter d être «Dans la marge jusqu au cou» ACEF des Bois-Francs ACEF du Haut-St-Laurent ACEF du Sud-Ouest de Montréal ACEF Rimouski-Neigette et Mitis ACEF Rive-Sud de Montréal APIC Côte-Nord CRIC de Port-Cartier CIRCCO GRAPE SAAB de Charlevoix-Est Recommandations présentées dans le cadre de la consultation publique du Groupe de travail sur la littératie financière par la Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ) SB Lac-Saint-Jean-Est SBC de Chicoutimi SBC de Jonquière SBP de La Baie/Bas Saguenay SBP des Sources Rédigé par le comité déréglementation Avril 2010 SBP de Saint-Félicien Solutions Budget Plus 1
La Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ) est un regroupement de plus d une vingtaine d associations de consommateurs, réparties à travers tout le Québec, qui vise la promotion et la défense des intérêts des consommateurs. La Coalition porte entre autres, depuis quelques années, une revendication auprès du gouvernement du Québec afin que soit adoptée une loi pour interdire la sollicitation et la publicité sur le crédit. 1.Contexte L augmentation faramineuse de l utilisation du crédit a considérablement contribué au phénomène du surendettement des consommateurs. Quotidiennement, les intervenants des associations membres de la Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ) rencontrent des consommateurs aux prises avec de graves problèmes financiers. Ils constatent que ces personnes sont en possession d un instrument financier puissant dont ils ne maîtrisent pas les rouages. En effet, l utilisation excessive du crédit et la méconnaissance de son fonctionnement sont les raisons les plus fréquemment évoquées lorsqu une personne déclare faillite. Fortes de ces constats, les associations de consommateurs croient que les consommateurs ont besoin d être mieux informés sur les différentes formes de crédit et les risques inhérents à une utilisation irréfléchie du crédit, ainsi que des outils qui leur permettent de reprendre le contrôle sur la gestion de leurs finances personnelles. L éducation des consommateurs et l instauration de bonnes habitudes budgétaires permettent d exercer un contrôle sur les dépenses et de créer des habitudes d épargne. Toutefois, la CACQ est convaincue que les solutions doivent aller au-delà des responsabilités individuelles dans la mesure où les émetteurs de crédit ont aussi leur part de responsabilité en facilitant l accès au crédit. Nombre de chercheurs sont également d avis qu il faut privilégier la protection plutôt que l information : «Sans renoncer aux mécanismes de protection du consommateur de type informationnel, et tout en plaidant [ ] pour une responsabilisation accrue des professionnels du secteur, la priorité doit [ ] être accordée à une approche de type réglementaire ayant pleine force décisoire» 1 Conséquemment, la Coalition des associations de consommateurs du Québec croit que la solution à ce problème doit privilégier deux axes d action : L éducation et la sensibilisation des consommateurs en matière de finances personnelles La réglementation du crédit 2. De l information objective sur les finances personnelles 2.1 Favoriser l apprentissage des outils budgétaires Nous vivons dans une société de consommation où nous sommes constamment sollicités par la publicité et diverses techniques de vente pour acheter davantage de biens et services. Trop souvent, 1 Bourgoignie, Tierry : Pour une approche globale et intégrée de la protection du consommateur surendetté, dans «Endettement des consommateurs. Chronique d une catastrophe annoncée», actes du colloque : Colloque international sur la consommation les 12 et 13 mars 2009, Éditions Yves Blais, 2010 2
le niveau de consommation dépasse la capacité financière des consommateurs. Or, les consommateurs manquent d outils pour évaluer de façon réaliste l impact de l utilisation du crédit sur leurs finances personnelles. Le budget est un outil puissant d éducation et de sensibilisation pour prévenir ou remédier au surendettement des consommateurs. Il leur permet de : connaître leurs habitudes de consommation ; prioriser leurs besoins ; garder le contrôle de leurs finances ; connaître leur capacité d emprunt ; se doter d une stratégie de remboursement réaliste. Idéalement, l apprentissage des connaissances budgétaires devrait débuter à l école pour être conséquemment approfondi dans d autres phases de la vie. Or, au Québec, l enseignement sur les finances personnelles ne fait plus partie du cursus scolaire. Les associations de consommateurs donnent des cours sur le budget à la population, en présentant différents outils budgétaires, adaptés à la situation des consommateurs. Et ce, à la fois dans leurs locaux mais également dans une multitude d organismes, tels que des groupes de femmes, d immigrants, en santé mentale, pour des personnes aînées, bénéficiaires de l aide sociale, en réinsertion au travail, etc. Par contre, leur niveau de financement souvent très faible ne leur permet pas de répondre à la demande. 2.2 Consultations pour les gens surendettés gratuites et objectives Dans les associations de consommateurs, les consommateurs aux prises avec un surendettement ont accès à des consultations budgétaires. Ces consultations sont conçues dans le but d aider un consommateur à prendre le contrôle de sa situation financière et l accompagner dans la recherche de solutions aux problèmes d endettement. À la rencontre, la première étape consiste à dresser un portrait réaliste de la situation (revenus, dépenses, surplus, déficit). Partant de cette évaluation, de l information est donnée sur les avantages et les inconvénients des solutions disponibles. S il y a lieu, un plan d action est établi. Contrairement à d autres organismes, les consultations dans les associations de consommateurs sont gratuites et il n existe aucun lien financier entre les associations et les créanciers. L information fournie est neutre et aucune option n est traitée de façon privilégiée. L année dernière, les consommateurs québécois ont pu constater l arrivée des organismes de «credit counceling» établis ailleurs au Canada depuis plusieurs années. Dans un rapport publié en 2006, l Union des consommateurs soulevait des questionnements très pertinents par rapport à l objectivité de leurs conseils et leur financement : «Le fait que des entreprises aient l opportunité de se présenter aux consommateurs comme des intervenants désintéressés oeuvrant à les aider à surmonter leurs problèmes d endettement, quitte à semer la confusion sur le travail qu ils tentent vraiment d accomplir, ne devrait pas être toléré. Le fait que la rémunération d un prétendu conseiller en budget familial soit fonction d une commission ou d une prime au rendement laisse pour le moins perplexe. La vente de produit (crédit, hypothèques [ ]) sous couvert de consultation budgétaire nous apparaît éthiquement et socialement inacceptable. [ ] Idéalement, en vue de garantir que ces consultations sont totalement désintéressées, il peut sembler problématique que la survie des organismes qui offrent ces consultations soit liée à un financement qui puisse dépendre directement des sommes qui sont susceptibles d être versées aux créanciers dans le cadre, par exemple, de plans de gestion de remboursements. 2 2 Union des consommateurs : Pratiques et éthique de la consultation budgétaire, Rapport final du projet de recherche, présenté au Bureau de la consommation d'industrie Canada, Novembre 2006 3
2.3 Information financière objective Pour les consommateurs, il n est pas facile de trouver de l information financière fiable et facile à comprendre. Pour combler cette lacune, la Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ) mène, en collaboration avec les associations de consommateurs du Québec, une vaste campagne de sensibilisation au phénomène du crédit à la consommation intitulée «Dans la marge jusqu au cou!». Cette campagne se tient à la fin du mois de novembre de chaque année et se déroule partout à travers la province de Québec. Avec divers moyens, elle vise à sensibiliser et informer les consommateurs aux dangers potentiels liés à certains comportements à risque, tel que l utilisation excessive du crédit pouvant mener à l endettement. Cette campagne se veut un contrepoids à la rareté de l information financière objective et accessible ainsi qu à l'omniprésence de la publicité qui incite les citoyens à consommer toujours davantage, par le biais du crédit. Les institutions financières, quant à elles, font de plus en plus d éducation sur les questions financières que ce soit sur leur site internet, par le biais de brochure ou par des activités d éducation dans les écoles (par exemple par le Mouvement Desjardins ou les retraités de l Association bancaire canadienne). Toute la question de l objectivité peut alors se poser : les compagnies émettrices peuvent-elles à la fois poursuivre l objectif de vendre leurs produits financiers tout en assumant objectivement un rôle d éducation aux finances personnelles? Ces compagnies font des millions de dollars de profit grâce aux produits du crédit. Une partie de ces profits ne devrait-elle pas servir à l éducation des consommateurs aux finances personnelles? Toutefois, pour assurer une certaine neutralité aux activités éducatives, le gouvernement ne devrait-il pas créer un fonds pour l éducation aux finances personnelles, financé à même un pourcentage des profits des compagnies et donner la responsabilité de l éducation aux organismes qui n ont aucun intérêt pécuniaire? La CACQ recommande le maintien d un cours en éducation aux finances personnelles dans les écoles ; LA CACQ recommande une stratégie de financement des organismes à but non lucratif leur permettant d informer les consommateurs de façon objective et désintéressée ; La CACQ recommande l encadrement de la pratique et l éthique de la consultation budgétaire au Canada en vue de s assurer que les consommateurs disposent d un niveau de protection adéquate en la matière. 3. Augmenter l encadrement réglementaire du crédit L expérience acquise auprès des consommateurs endettés démontre que deux facteurs sont déterminants dans l utilisation excessive du crédit : L octroi du crédit trop souvent sans analyse de la réelle capacité de remboursement du consommateur. L abondance de la sollicitation et de la publicité sur le crédit est un élément déterminant menant à l augmentation de l endettement. Il est donc primordial que certaines règles régissant la pratique du crédit soient révisées afin de renforcer la protection du consommateur. 3.1 Analyse de la capacité de remboursement L octroi du crédit (notamment du crédit variable) se fait trop souvent sans examen de la capacité financière du consommateur. Le consommateur peut donc se voir accorder de multiples cartes de crédit en plus d une marge et le montant de remboursement mensuel de l ensemble de ses créances dépasse donc souvent la capacité de payer du consommateur. 4
En Europe, on parle de plus en plus de responsabilité sociale des institutions financières et l on instaure des mesures visant à lutter contre l endettement telle l obligation de vérifier la solvabilité du consommateur avant d octroyer du crédit. Plusieurs pays européens (Suisse, Pays-Bas, Belgique) appliquent le concept du «prêt responsable» dans leur législation, ce concept fait également partie de la nouvelle directive en matière de crédit de l Union européenne. Un prêt responsable suppose essentiellement que le prêteur soit capable de démontrer qu il a évalué soigneusement la capacité de remboursement de l emprunteur avant de lui accorder le prêt. Lorsque le prêteur ne respecte pas son obligation d étude préalable de la solvabilité de l emprunteur, il perd le droit de réclamer les frais de crédit. 3.2 La sollicitation et la publicité sur le crédit Les consommateurs sont inondés de sollicitations personnalisées. Toutefois, les offres ne contiennent pas l'information nécessaire à la compréhension du crédit permettant une utilisation judicieuse. Les émetteurs de crédit diront que les consommateurs sont assez intelligents pour faire des choix qui conviennent à leur situation financière. Le problème, c est que les sollicitations et les publicités sur le crédit ne s adressent pas à l intelligence des consommateurs, mais bien à leurs émotions et à leur impulsivité. En effet, les sollicitations et les publicités sur le crédit s adressent beaucoup aux jeunes par leur façon d associer le crédit à une façon de vivre (style de vie), tel le prestige, les loisirs, l enthousiasme, la vitalité, le risque ou l audace. Dès l âge de 18 ans, les jeunes sont très sollicités par les banques. Selon Marie Lachance, professeure au Département d économie, agroalimentaire et science de la consommation de l Université Laval, «Les jeunes grandissent dans une société où le crédit est omniprésent. Leurs propres parents sont plus endettés que jamais! Ils sont d ailleurs très sollicités par les banques, jusque sur le campus» 3. Les institutions émettrices de crédit sollicitent régulièrement les jeunes, en s installant sur des campus de CÉGEP et d universités et en offrant des cartes de crédit aux jeunes sans historique de crédit. La CACQ recommande que la responsabilité des prêteurs d argent soit engagée en créant une obligation pour les prêteurs de vérifier la capacité de remboursement avant l octroi d un prêt. La CACQ recommande : qu il soit interdit de faire de la sollicitation personnalisée de crédit par la poste, par téléphone, par Internet ; qu il soit interdit de faire de la sollicitation sur le crédit auprès des jeunes âgés de moins de 18 ans ; qu il soit interdit de faire de la sollicitation sur le crédit auprès des jeunes dans les lieux qu ils fréquentent, notamment les établissements scolaires. 3 Lachance, Beaudoin et Robitaille, Les jeunes adultes québécois et le crédit : Connaissances, attitudes et endettement, Dossier consommation no 15, Département d économie agroalimentaire et des sciences de la consommation, Université Laval, 2005 5