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Transcription:

Janvier 2012 ANIL HABITAT ACTUALITE Comment empêcher l érosion du parc locatif privé?

L existence d un parc locatif privé de taille suffisante est une nécessité pour faire face aux besoins en logement, d une part parce que la location convient mieux que la propriété aux ménages mobiles 1, d autre part parce que tous les ménages n ont pas les moyens d accéder à la propriété. Le rôle de ce parc dans l accueil des ménages mobiles a été trop souvent souligné, chiffres à l appui, pour qu il soit nécessaire d en refaire ici la démonstration. On se bornera à rappeler que le taux de mobilité des locataires du privé est bien supérieur à celui des locataires du parc social et plus encore à celui des propriétaires-occupants. La question de la capacité financière à accéder à la propriété, et surtout de son évolution, appelle davantage d attention. La part des propriétaires-occupants, après avoir fortement progressé au cours des années 1970-1980, n augmente plus que très lentement, et cette augmentation pourrait bien prendre fin dans un avenir proche. Elle a régressé, au cours des années récentes, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Espagne 2. Certes la France n a pas connu, comme les deux premiers de ces pays, un rationnement du crédit consécutivement à la crise des subprime, ni une crise de surproduction comme le troisième. Toutefois, l accès au crédit n est pas le seul facteur à l œuvre dans cette évolution, qui tient également, sans doute, à l augmentation du coût de l accession et à ce que l écart entre propriétaires et locataires du secteur libre tend à se creuser. En France, G. Fack montre qu entre 1988 et 2006, l augmentation du taux de propriétaires-occupants est le fait des ménages les plus aisés ; à l inverse, la part de locataires du secteur libre a augmenté parmi les ménages des quatre déciles inférieurs de niveau de vie. "Ces évolutions s expliquent en partie par des changements sociodémographiques, les ménages les plus modestes étant de plus en plus jeunes et citadins et donc généralement moins souvent propriétaires de leur logement. Mais ces changements n expliquent pas la totalité de la baisse et il semble que les ménages qui deviennent propriétaires connaissent une évolution plus favorable de leurs revenus que les ménages qui restent locataires." 3 Si cette évolution se poursuit -et rien ne donne à penser que tel ne sera pas le cas- la question de l offre locative pourrait bien devenir cruciale dans les années à venir. L augmentation de la production de logements locatifs sociaux est un élément de réponse, si tant est qu elle soit possible, mais elle ne suffira pas. Qu en est-il du secteur locatif privé? Une aide efficace pour concourir au développement d une offre nouvelle De 1988 à 2006, le parc locatif privé s est accru d environ un million d unités, passant de 4,6 à 5,7 millions de logements. Cette augmentation fait suite à une régression brutale dans la première moitié des années 1980, due au désengagement des investisseurs institutionnels. Elle est généralement attribuée à l effet des dispositifs fiscaux d incitation à l investissement locatif dont le premier (le Quilès) vit le jour en 1984. Il est vrai qu aucune évaluation scientifique de l impact de ces mesures n a pu être réalisée, faute de données statistiques 4. Il reste que 1 Cf. J. Bosvieux et B. Coloos, "Accession à la propriété, mobilité résidentielle et emploi", ANIL, Habitat actualité, février 2011. 2 "Owner-occupier rates set to fall further on both sides of the Atlantic", RICS, décembre 2010. 3 "L évolution des inégalités entre ménages face aux dépenses de logement (1988-2006)", Gabrielle Fack, informations sociales 2009/5 - N 155. 4 Extrait du magazine Challenges, 8/11/2011 : "Le 7 novembre, en annonçant son second plan de rigueur, François Fillon a signé l acte de décès de la loi "Scellier", la niche fiscale favorisant l investissement locatif, qui sera supprimée fin 2012. Pourtant, l évaluation des effets de ce dispositif très coûteux pour l Etat - 950 millions d euros en 2011- n a pas pu être menée à son terme. Dans son rapport sur les niches fiscales, publié en août dernier, l Inspection générale des finances (IGF) jugeait cette dépense 2

plusieurs indices conduisent à penser qu elles ont été efficaces : la croissance continue du parc locatif à partir de la fin des années 1980, en rupture avec l évolution antérieure ; l intérêt porté par les investisseurs potentiels aux économies d impôt générées par les dispositifs, au détriment parfois de l évaluation du rendement locatif, attesté par les vendeurs aussi bien que par les ADIL, et que confirme le développement d une véritable "industrie de la défiscalisation" ; enfin, les excès mêmes que ces mesures ont pu engendrer, qui démontrent à eux seuls leur effet déclencheur 5. Graphique 1 : 5500 Evolution du parc locatif privé Nombre logements (milliers) 5000 4500 4000 3500 3000 1963 1968 1970 1973 1978 1984 1988 1992 1996 2002 2006 Source: enquête logement Notons toutefois que si l effectif du parc locatif privé croît, sa part dans l ensemble des résidences principales était en 2006 légèrement inférieure à son niveau de 1984. fiscale peu efficace mais précisait qu une "évaluation de l impact du dispositif sur l offre de logements" avait été confiée à l Ecole d Economie de Paris, avec pour objectif "de mesurer les effets d aubaine, de substitution et d éviction, afin d isoler l impact net des dispositifs". Le problème, c est que cette évaluation n a jamais vu le jour. Après avoir signé une convention de recherche avec l IGF, l Ecole d Economie de Paris a répondu, après une étude préliminaire, que cette étude n était pas possible. "Les données statistiques sont insuffisantes", nous a confirmé Gabrielle Fack, l économiste en charge du dossier. L effet causal entre l avantage fiscal et l offre de logements était donc difficile à établir", ajoute-t-elle. " 5 Et qui ont conduit parfois à investir dans des localisations où la demande locative était faible, les investisseurs étant obnubilés par l espoir de payer moins d impôts. Quelle meilleure illustration de l impact sur les décisions que d inciter des agents à réaliser des opérations contraires à leur intérêt? Il n y a pas, dans ce cas, d effet d aubaine et la puissance publique en bénéficie, les retombées fiscales (TVA et TFPB) dépassant largement le coût de la dépense fiscale au détriment des investisseurs malavisés. Ces dérives, largement médiatisées, ont toutefois été marginales et limitées par la subordination de l avantage fiscal à un agrément administratif pour les investissements en zone C. 3

Impact probable de la suppression du Scellier Après avoir été "raboté" en 2011, le régime Scellier est de nouveau revu sensiblement à la baisse en 2012 et sa fin est programmée le 31 décembre prochain. Tableau 1 : Régime Scellier : taux de réduction d impôt en 2010, 2011 et 2012 Année Scellier Scellier intermédiaire 25% sur 9 ans 2010 25% sur 9 ans = 37% sur 15 ans Puis 6% sur 3 ans renouvelable une fois 22% sur 9 ans BBC : 22% sur 9 ans = 32% sur 15 ans puis 5% sur 3 ans renouvelable une fois 2011 13% sur 9 ans Non BBC : 13% sur 9 ans = 23% sur 15 ans puis 5% sur 3 ans renouvelable une fois 13% sur 9 ans 2012 BBC : 13% sur 9 ans = 21% sur 15 ans puis 4% sur 3 ans renouvelable une fois L impact négatif sur l investissement de cette disparition progressive n est guère douteux, si l on se réfère au passé : le passage du régime Périssol au Besson, dont le rythme d amortissement était moins favorable et les conditions plus contraignantes, s est accompagné d une forte diminution des ventes aux investisseurs. Si les mêmes causes produisent les mêmes effets, il en sera de même en 2012, puis en 2013. Cette baisse programmée des investissements dans le neuf soulève deux questions : cet impact négatif se traduira-t-il par une réduction du parc locatif privé? Quel sera son effet sur l évolution globale de l offre nouvelle? L investissement dans le neuf conditionne l évolution du parc locatif La taille du parc locatif privé évolue en fonction des mouvements qui l affectent : les entrées et les sorties de logements. Les entrées se composent d une part des acquisitions de logements neufs, d autre part de la mise en location de logements précédemment affectés à un autre usage (occupation personnelle, résidence secondaire) ou vacants. Dans le second cas, il peut s agir soit d acquisitions à titre onéreux ou gratuit (héritages et donations), soit de la mise en location par son propriétaire, à la suite d un déménagement, du logement qu il occupait précédemment. Les sorties se font par le biais des ventes ou de la récupération de logements par les bailleurs pour les occuper personnellement où y loger un membre de leur famille. Aucune source ne permet de chiffrer avec précision ces différents flux. Cependant, le rapprochement de l évolution du parc, connu par l enquête logement de l INSEE, du nombre de logements neufs destinés à la location, montre que l accroissement du parc entre 1996 et 2006 (+ 520 000 logements) correspond approximativement au total des ventes des promoteurs et des investissements "directs", c est-à-dire les maisons individuelles construites par des particuliers en vue de la location, au cours de la même période. Selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), 440 000 logements ont été vendus par des promoteurs à des investisseurs de 1994 à 2004 (on peut considérer de façon très approximative qu un décalage de deux ans sépare la vente - le plus souvent une réservation est faite alors que le chantier n est pas commencé - de la mise en service du logement). Si l on ajoute les investissements "directs", dont le nombre n est pas 4

connu mais que l on peut estimer grossièrement à 10 000 par an 6, on doit en conclure que l investissement en logements neufs joue un rôle essentiel dans le développement du parc locatif privé. Ce jugé est corroboré par une autre source, le fichier FILOCOM (tableau 2), pour la période 2001-2009. Entre ces deux dates, le parc locatif privé s est accru de 633 500 logements, alors que 784 000 logements locatifs privés neufs sont apparus. Tableau 2 : flux nets affectant le parc locatif privé entre 2001 et 2009 Propriétaires occupants Locatif privé -170 500 Locatif social Locatif privé -15 000 Autre statut Locatif privé +53 000 Résidences secondaires Locatif privé -27 000 Logements vacants Locatif privé -119 000 Logements neufs +784 000 Logements issus de restructurations +354 000 Disparitions -226 000 Total +633 500 Source : FILOCOM, exploitation CETE Nord-Picardie Lecture : entre 2001 et 2009, le parc locatif privé a perdu 170 500 logements au profit du parc des propriétaires. Il en a gagné 53 000 en provenance des "autres statuts". Il découle de ce constat que les sorties de logements existants du parc locatif sont légèrement inférieures aux entrées. Au sein de celles-ci, les investissements sont minoritaires. En 2002, selon une enquête la seule à notre connaissance sur le sujet effectuée en complément de l enquête logement, les achats en vue de la location ne représentaient que 42 % du parc. Les bailleurs "inadvertants" occupaient une place prépondérante (tableau 3). La moitié d entre eux a hérité du logement loué, l autre l a mis en location après l avoir occupé, notamment à la suite d une mobilité professionnelle. Tableau 3 : Les bailleurs selon l origine de propriété en 2002 Origine de propriété Part du parc Type de bailleurs locatif privé Achats locatifs 42% Bailleurs "volontaires" : 42% Achats pour autre motif 29% Héritage 29% Bailleurs "inadvertants" : 58% Au vu de cette analyse, quels peuvent être les effets des changements, récents ou annoncés, de la fiscalité des logements locatifs? L effet négatif de la diminution, puis de la suppression de la réduction d impôt Scellier sur les investissements en logements neufs ne fait aucun doute, nous l avons vu. Toutefois, une part croissante des investissements pourrait, à partir de 2013, s orienter vers l ancien. En l absence d incitations fiscales, l ancien pourrait retrouver un certain attrait en termes de rentabilité locative, du fait de la décote de prix par rapport au neuf. L écart en termes de prix de vente est généralement estimé autour de 15%, en moyenne, sans doute plus dans certains cas en 6 Estimation Caron marketing 5

raison de la marge supplémentaire des réseaux de commercialisation. C'est dire que le prix de revient pour l acheteur, qui comprend les frais de mutation, est sensiblement inférieur à celui du neuf. Or cet écart ne se retrouve pas dans les mêmes proportions dans les loyers. L alourdissement de l imposition des plus-values immobilières n affectera sans doute guère les investissements, dont le but n est en général pas spéculatif. En dehors des préoccupations d optimisation fiscale, l objectif des investisseurs est avant tout de se constituer pendant leur vie active un patrimoine générateur de revenus futurs, notamment en vue de la retraite. La perspective de devoir abandonner au fisc jusqu à 32% de la plus-value pourrait en outre inciter les détenteurs de logements locatifs à les conserver. A contrario, elle pourrait pousser les héritiers de logements à les vendre immédiatement plutôt qu à les mettre en location. De même, les propriétaires- occupants qui déménagent pour des motifs professionnels auront intérêt à échapper à cet impôt en les mettant immédiatement en vente, plutôt qu à les mettre en location. Difficile de dire, donc, quel sera l effet global de cette mesure. Agir sur la fiscalité des bailleurs? Si le flux entrant de logements neufs diminue, comment faire pour éviter l érosion du parc locatif privé? Une possibilité pourrait être d alléger la fiscalité des bailleurs. Ceux-ci sont en effet lourdement taxés : les impôts s appliquent aux mutations (TVA ou droits d enregistrement lors de l acquisition, impôt sur les plus-values immobilières lors de la revente), à la détention du bien (taxe foncière sur les propriétés bâties), à son exploitation (impôt sur le revenu qui inclut les revenus fonciers). Relativement à ce dernier impôt, le bailleur est défavorisé par rapport au propriétaire-occupant dont le revenu fictif (le loyer qu en tant qu occupant, il se verse à soi-même en tant que propriétaire) n est pas imposé. L allègement pourrait prendre la forme d un amortissement de plein droit de la valeur du bien, à l instar de ce qui se pratique en Allemagne (2% par an pendant 50 ans). Loin de constituer une niche fiscale, une telle mesure ne ferait que considérer la location de logements comme ce qu elle est : une activité de production d un service de logement, et lui appliquer un régime analogue à celui des autres investissements productifs. En améliorant de façon significative la rentabilité locative, elle renforcerait les raisons d investir et contribuerait à diminuer les sorties du parc. Certes, au moins à court terme, elle n aurait guère d effet sur l offre nouvelle dont la baisse est attendue, du fait de la restriction des aides à la pierre qui porte aussi bien sur l accession à la propriété que sur l investissement locatif. Elle contribuerait toutefois à éviter l alourdissement des dépenses de logement des ménages les plus modestes que ne manquerait pas d entraîner l aggravation des tensions sur le marché locatif. Date de publication : 20/janvier/2011 N ISNN : 09996-4304 Directeur de la publication : Bernard Vorms Comité de rédaction : Isabelle Couëtoux du Tertre, Emmanuelle Bily, Jean Bosvieux, Lucy Clec h, Béatrice Herbert, Nicole Maury, Sylvie Merlin, Marie-Aude Quintin, Antonin Ollivier, Sandrine Zerbib 6