Bulletin CCH juriste de septembre 2010, Volume 12, No 9 Le Bulletin CCH juriste de septembre 2010, Volume 12, No 9, comprend les articles suivants: La renonciation au partage des acquêts non publiée au registre des droits personnels et réels mobiliers Majoration de la pension alimentaire résultant du non exercice des droits d accès: fardeau de preuve Comment s acquiert une servitude? Contrat de courtage immobilier: formation et extinction tacite Publié par CCH à 08:33 La renonciation au partage des acquêts non publiée au registre des droits personnels et réels mobiliers Par Me Murielle Drapeau, avocate Droit de la famille 10828, 2010 QCCS 1509, juge Pierre Journet. Le Code civil du Québec stipule à l article 467 qu après la dissolution du régime de la société d acquêts, chaque époux a la faculté d accepter le partage des acquêts de son conjoint ou d y renoncer. Dans le cas de la renonciation, l article 469 précise qu elle doit être faite par acte notarié en minute ou par une déclaration judiciaire dont il est donné acte. Cette renonciation doit être inscrite au registre des droits personnels et réels mobiliers (RDPRM), à défaut d inscription dans un délai d un an à compter du jour de la dissolution, l époux est réputé accepté. L article 472 ajoute que l acceptation ou la renonciation est irrévocable. Toutefois, la renonciation peut être annulée pour cause de lésion ou pour toute autre cause de nullité des contrats. La présomption d acceptation en cas de défaut d inscrire la renonciation dans le délai prescrit prévue à l article 469, a été analysée dans l affaire Droit de la famille 10828, 2010 QCCS 1509. Nous verrons qu une inscription tardive de la renonciation au partage des acquêts n a pas la conséquence que semble laisser croire l article 469. Voici le contexte de cette affaire. Alors que le jugement de divorce des parties contenait une ordonnance prévoyant que «dans le cas où la demanderesse demanderait le partage des acquêts du défendeur ou ne renoncerait pas à ce partage de la façon prévue au Code civil, elle devra lui payer la somme de 12 653,50 $ avec intérêt au taux légal et l indemnité additionnelle à compter du 4 mars 2003». Or dans les faits, la demanderesse a renoncé au partage des acquêts le 18 juin 2007, mais a enregistré cette renonciation que le 1er mars 2010, donc au-delà du délai d un an prévu à l article 469 C.c.Q. Considérant que par ce défaut d inscription la demanderesse n avait pas renoncé au partage de la société d acquêts, le défendeur a procédé à une saisie-exécution pour obtenir le paiement de la somme de 12 653,50 $, plus intérêts. La demanderesse a déposé une opposition à la saisie invoquant qu elle a renoncé à la société d acquêts. Pour solutionner ce litige, le juge Pierre Journet devait décider si la renonciation aux acquêts non publiée dans le délai d un an prévu à l article 469 C.c.Q. était opposable à l ex-époux. Dans son analyse, le juge Journet a référé à l opinion : du juge Pierre Boily dans Dugas c. Langis, [1987] R.J.Q. 1267 (C.S.), qui était d avis que la sanction du défaut d inscription d une renonciation au partage des acquêts doit être évaluée en tenant compte des droits des tiers.
Entre les parties, la renonciation même non inscrite reçoit sa pleine valeur. du juge Georges Taschereau dans K.V. c. C.G., [2005] R.D.F. 251 (C.S.), qui était d avis que même non publiée, la renonciation au partage des acquêts lie les parties. La présomption d acceptation résultant de ce défaut ne pourrait être invoquée que par les tiers. Partageant l avis de ses collègues, le juge Journet conclura aussi que la demanderesse est liée par sa renonciation même publiée tardivement. Il ajoutera que «cette tardivité dans la publication de la renonciation ne peut être invoquée que par des tiers et non pas par Monsieur qui est créancier de l obligation au cas de non-renonciation.» De cette jurisprudence, retenons que la présomption d acceptation du partage des acquêts stipulée en cas de défaut de publication d une renonciation dans le délai d un an prescrite à l article 469 C.c.Q. signifie que la renonciation non publiée n est pas opposable aux tiers, mais malgré tout lie les parties. Publié par CCH à 11:16 Libellés : Droit de la famille Majoration de la pension alimentaire résultant du non exercice des droits d accès: fardeau de preuve Par Me Murielle Drapeau, avocate Droit de la famille 101022, 2010 QCCS 1899, juge Martin Bureau. Il arrive malheureusement qu une partie doive demander au tribunal de majorer la pension alimentaire payable aux enfants parce que l autre parent n exerce pas les droits d accès. Le droit à cette majoration est reconnu si ce non exercice de droit d accès cause des difficultés excessives au parent gardien. Mais attention au fardeau de preuve. Dans ces cas semblables, le parent gardien dénonce au tribunal que l assumation de la garde exclusive des enfants à 100 % du temps, lui occasionne des coûts supplémentaires non couverts par la pension calculée en fonction du barème des pensions alimentaires pour enfants. Cette preuve de coûts supplémentaires n est pas suffisante en soi pour automatiquement obtenir une majoration de la pension alimentaire. Le parent gardien doit aussi prouver que le non exercice du droit d accès lui cause des difficultés excessives, tel que l exige l article 587.2, al. 3 C.c.Q. C est ce que rappelle le juge Martin Bureau dans l affaire Droit de la famille 101022, 2010 QCCS 1899, où il précise que pour obtenir une majoration de pension alimentaire pour enfant en raison du non exercice des droits d accès, le parent gardien doit démontrer au tribunal que cette situation lui cause des difficultés excessives. Il ajoute que bien que la demanderesse ait probablement des dépenses supplémentaires, telles nourrir l enfant, ici âgée de 17 ans, lui payer des activités sociales ou culturelles et lui fournir de l argent de poche pendant ces périodes de non-accès, bien que la demanderesse ne devrait pas normalement assumer ces dépenses supplémentaires, elle n a pas en l espèce, fait la preuve de difficultés excessives. La simple preuve de dépenses supplémentaires ou de difficultés n est pas suffisante. Publié par CCH à 08:08 Libellés : Droit de la famille Comment s acquiert une servitude?
Par Me Mario Naccarato Morneau c. Aubert, 2010 QCCA 822, juges Robert, Rochette et Bouchard. Nature de la cause Il s agit d un appel d un jugement de la Cour supérieure qui a accueilli un recours introductif d instance en reconnaissance d une servitude de passage sur la propriété de l appelant. Les faits Dans le cadre d un acte de vente, Aubert aurait obtenu de Pouliot l engagement de lui consentir une servitude de passage conformément aux exigences énoncées au Code civil. N ayant jamais donné suite à cet engagement de manière formelle, il se voyait poursuivi par Aubert en reconnaissance d un droit de servitude en faveur de son terrain. Jugement de la Cour supérieure Le premier juge en vient à la conclusion que l engagement contenu dans l acte de vente constitue une servitude d accès au lac avec passage sur le lot de Pouliot. Question en litige Est-ce que le juge de première instance a erré en reconnaissant en faveur d Aubert une servitude (réelle) de passage sur le terrain de Pouliot? Arrêt de la Cour d appel La Cour d appel accueille l appel, infirme le jugement de première instance et rejette le recours introductif d instance en reconnaissance de servitude. Motifs La Cour d appel est d avis que l engagement de consentir une servitude n est pas égal à la création proprement dite d une servitude. Ainsi, l engagement de consentir une servitude dans l acte de vente constituait tout au plus en un droit de passage temporaire et personnel avec un engagement «à signer sous peu (mais dans un délai maximum de quatre (4) mois)» un acte de servitude comportant notamment une «servitude de passage perpétuelle contre le lot 762 afin de se rendre au lac Retenue dont l assiette sera déterminée». C est ainsi que la Cour d appel en vient à la conclusion que cet engagement ne constitue pas une servitude réelle mais bien un engagement personnel d en accorder une. En conséquence, lorsque le lot a été revendu, aucune servitude ne l affectait car les acquéreurs seraient des tiers au contrat. De surcroît, la Cour ajoute que faute de publication au registre foncier, toute prétendue servitude est inopposable. Enfin, le tribunal cite un arrêt de la même Cour dans lequel il a été jugé que des tiers acquéreurs sont des tiers au sens propre des mots de sorte que l absence d enregistrement d une servitude, s il en est, rend celle-ci inopposable à tout acquéreur
subséquent, ce qui serait le cas en l espèce. Commentaires Il est difficile de distinguer entre l engagement de consentir une servitude et le consentement proprement dit d une servitude dans la mesure où l article 1181 C.c.Q. dispose que «la servitude doit être consentie par contrat» sans préciser selon que le contrat doit être verbal ou écrit. Ainsi, une servitude pourrait être consentie verbalement. Elle existerait dès le moment de la prononciation des mots «je consens en faveur de votre lot une servitude de passage sur mon lot». Donc, en l espèce, est-ce que l engagement de reprendre cet engagement sous forme notariée suivi de publication diffère de l acte notarié dûment publié créant une servitude? Nous ne le croyons pas, bien que la question se complique dans la mesure où, faute de publication, le terrain serait revendu à un nouvel acquéreur qui, aux termes d un arrêt de la Cour d appel, serait considéré comme un tiers et non lié par un acte verbal de servitude consentie par son auteur. Voilà qui complique davantage le portrait mais avec lequel nous ne sommes pas d accord car, la servitude étant consentie, contrairement à la portée de l arrêt Cyr c. Brossard, J.E. 93-1840 (C.A.) la servitude, constitutive d un droit réel, devrait à notre avis engager les propriétaires subséquents. Publié par CCH à 10:13 Libellés : Droit immobilier Contrat de courtage immobilier: formation et extinction tacite Par Me Mario Naccarato Immeuble Toron Canada inc. c. Capreit Apartments inc., 2010 QCCA 803, juges Chamberland, Morissette et Dufresne. Nature de la cause Il s agit d un appel d un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté la réclamation des appelants pour le paiement d une rétribution aux termes d un contrat de courtage immobilier. Les faits Pour l essentiel des faits, les appelants, courtiers en immeuble, auraient participé de manière importante à la recherche d immeubles pour les deux parties de la transaction en cause. Les intimés sont les vendeurs et acheteurs d un complexe immobilier. Les appelants soutiennent qu à la lumière des faits, ils se voyaient confier un contrat de courtage par les intimés. Jugement de la Cour supérieure L action des appelants a été rejetée car, selon la Cour, les services de courtage n avaient pas été retenus pour vendre le complexe immobilier et que de toute façon le courtier n aurait pas été la «cause efficiente» de la vente. Arrêt de la Cour d appel La Cour d appel rejette l appel et maintient le jugement de première instance, rejetant l action en réclamation de
rétribution. Motifs Le contrat qui serait intervenu entre les parties est un contrat de service au sens de l article 2098 C.c.Q. lequel peut être express ou tacite, à titre exclusif ou non exclusif. La preuve révèle que, bien que n ayant pas signé de contrat formel de courtage ni même convenu d un taux de rétribution, les agissements des parties démontrent qu il est bien intervenu entre les parties un contrat de courtage tacite. Les vendeurs ont, au cours des discussions, fourni tous les détails nécessaires à la recherche d un acheteur comme le font d ailleurs les parties qui confient un contrat de courtage. Mais, de toute façon, même si est né un contrat tacite de courtage, en tout temps pertinent, les appelants et les intimés sont demeurés inactifs et silencieux depuis la naissance du contrat tacite de sorte que ce contrat tacite s est éteint tacitement tout comme il est né. Commentaires La Cour d appel confirme que l entente qui intervient entre un client et un courtier pour la vente d un immeuble relève, en vertu du Code civil du Québec des dispositions sur le contrat de services. À cela il importe d ajouter que les dispositions applicables en matière de contrat de services n excluent pas l existence d un contrat tacite ou express de mandat entre le client et son courtier. Aussi, la possibilité de conclure un contrat tacite de courtage s applique lorsque l immeuble visé n est pas compris dans les situations visées par l article 23 de la Loi sur le courtage immobilier qui disposent, entre autres, que lorsqu il s agit d un immeuble résidentiel de cinq unités ou moins, le contrat de courtage doit être conclu selon les formalités prévues par la Loi et ses règlements d application (1). Hormis les situations prévues à l article 23 de la Loi, aucune forme ou condition sacramentelle n est prévue pour l intervention d un contrat de courtage. Aussi, comme c est le cas pout tout contrat, celui-ci peut naître tacitement mais l inaction ou le silence des parties permet, selon les circonstances, de conclure que celles-ci ont voulu mettre un terme au contrat lequel terme intervient tacitement. 1. À ce sujet, voir Claude Barsalou, Le courtage immobilier; vente d un immeuble résidentiel de moins de cinq logements, Montréal, Wilson & Lafleur, 1996. Publié par CCH à 09:33 Libellés : Droit immobilier Inscription à : Messages (Atom)