Étude longitudinale sur la restructuration des soins de santé et les soins communautaires Février 2002 Margaret J. Penning, Ph.D. Leslie L. Roos, Ph.D. Neena L. Chappell, Ph.D. Noralou P. Roos, Ph.D. Ge Lin, Ph.D. Partenaires décideurs : Régions de la santé Capital, Interlake et Upper Island/Central Coast, Colombie-Britannique Administrations régionales de la santé de Burntwood, d Eastman et d Entre-les-Lacs, Manitoba Financement fourni par : Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé Ministère de la Santé et ministère chargé des personnes âgées de la Colombie-Britannique Région de la santé Capital, Colombie-Britannique Administrations régionales de la santé d Eastman et d Entre-les-Lacs, Manitoba
Chercheuse principale : Margaret J. Penning, Ph.D. Directrice, Université de Victoria Centre on Aging Sedgewick Building Salle A106 Case Postal 1700, Stn. CsC Victoria, BC V8W 2Y2 Téléphone : (613) 728-2238 Télécopieur : (613) 728-3527 Courriel : mpenning@uvic.ca Ce document est disponible sur le site web de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé (www.fcrss.ca). Pour obtenir de plus amples renseignements sur la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, communiquez avec la Fondation : 1565, avenue Carling, bureau 700 Ottawa (Ontario) K1Z 8R1 Courriel : communications@fcrss.ca Téléphone : (613) 728-2238 Télécopieur : (613) 728-3527 This document is available on the Canadian Health Services Research Foundation Web site (www.chrsf.ca). For more information on the Canadian Health Services Research Foundation, contact the Foundation at: 1565 Carling Avenue, Suite 700 Ottawa, Ontario K1Z 8R1 E-mail: communications@chsrf.ca Telephone: (613) 728-2238 Fax: (613) 728-3527
Étude longitudinale sur la restructuration des soins de santé et les soins communautaires Margaret J. Penning, Ph.D. 1 Leslie L. Roos, Ph.D. 2 Neena L. Chappell, Ph.D. 1 Noralou P. Roos, Ph.D. 2 Ge Lin, Ph.D. 3 1 Centre du vieillissement et Département de sociologie, Université de Victoria 2 Centre manitobain des politiques en matière de santé, Département des sciences de la santé communautaire, Faculté de médecine, Université du Manitoba 3 Département de géographie et de géologie, Université de la Virginie occidentale Remerciements : Ce projet a bénéficié des contributions de nombreuses personnes. En particulier, nous aimerions remercier les bailleurs de fonds et les partenaires décisionnels de leur soutien et de leur aide dans le projet. Nous souhaitons aussi remercier le ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, le Centre for Health Services and Policy Research de l Université de la Colombie-Britannique, de même que le personnel de recherche du Centre du vieillissement de l Université de Victoria et du Centre des politiques en matière de santé de l Université du Manitoba de leur aide aux chapitres de l accès aux données et de l analyse des données.
Principales implications pour les décideurs Les questions abordées dans cette étude revêtent une importance toute particulière pour les gestionnaires et les décideurs à tous les échelons : régional, provincial et fédéral. À l heure actuelle, on se préoccupe beaucoup de faire une réforme de notre système de santé qui soit rentable et qui permette de répondre aux besoins actuels et futurs de soins de santé et en santé d une population qui vieillit. On a adopté la régionalisation comme moyen d atteindre ces objectifs. L examen de ses répercussions peut donc orienter la prise de décisions, car elles esquissent les orientations futures et les modifications nécessaires. Voici certains des messages s adressant aux décideurs qui découlent de ce programme de recherche : Les tendances de l accessibilité et de l utilisation des services de santé, qui semblent plutôt uniformes immédiatement avant et après la régionalisation, révèlent des baisses dans les services, des augmentations de l intensité des soins et la réorientation de services précis. Il reste encore à accorder plus d importance et de ressources à un modèle de soins axé davantage sur les dimensions sociale et communautaire. Il faut que les réductions de ressources et d accès aux soins hospitaliers et institutionnels s accompagnent d une augmentation des ressources pour les services communautaires comme les services d aide et de soins infirmiers à domicile de même que de l accroissement de l accessibilité de ces services. Dans l affectation des ressources, il importe de se pencher sur d autres facteurs que les seuls besoins médicaux. Cette pratique désavantage certains groupes (comme les personnes âgées de moins de 85 ans), car un grand nombre de leurs besoins en santé ne sont pas de nature médicale et font appel à des soins de soutien communautaire. Le transfert de la responsabilité des soins préventifs du cabinet du médecin à la collectivité pourrait augmenter le nombre de personnes en bénéficiant et atténuer les différences, au chapitre de l utilisation, entre les différents milieux socio-économiques et entre les régions rurales et urbaines. Par exemple, les programmes de dépistage peuvent être offerts dans des établissements permanents en régions urbaines, tandis que des programmes itinérants pourraient permettre de mieux desservir les régions rurales et éloignées. On ne connaîtra pas le véritable effet de la régionalisation au Canada avant plusieurs années, lorsque les effets à long terme auront été étudiés. i
Sommaire Contexte Au cours de la dernière décennie, les gouvernements provinciaux et territoriaux du Canada ont lancé un processus de réévaluation de leurs politiques de la santé, de restructuration de leur système de santé et de réaffectation de leur budget de la santé. Le besoin d accorder plus d importance et de ressources à un modèle de soins axé davantage sur les dimensions sociale et communautaire s est trouvé au cœur de la réforme de la santé, et la régionalisation a été adoptée comme moyen d atteindre ce but, entre autres. Ceci dit, on ne sait pas grand-chose de la mesure dans laquelle la régionalisation permettra d atteindre ces objectifs. Compte tenu de l importance que revêtent ces questions, des chercheurs du Centre du vieillissement de l Université de Victoria et du Centre manitobain des politiques en matière de santé de l Université du Manitoba ont collaboré avec trois régions de la santé de la Colombie-Britannique et trois régions de la santé du Manitoba dans le cadre de ce projet de recherche, qui a porté sur l effet de la régionalisation sur les soins communautaires. Le projet portait avant tout sur le lien entre la réforme de la santé et la restructuration par la régionalisation et les changements qui se sont opérés au fil du temps (1990-1999) dans l affectation des ressources de la santé, dans l utilisation des services de santé et dans les résultats pour la santé. Au moyen de données administratives et d autres sources de renseignements, des comparaisons ont été effectuées entre les trois régions de la santé de chacune des provinces et parmi certains groupes à risque dans la population générale. Le présent rapport expose certaines des constatations en découlant. Constatations L étude a révélé certains des changements qui se sont opérés dans les régions et provinces au cours des années qui ont précédé et suivi la régionalisation des services de santé, en avril 1997. Colombie-Britannique Les chercheurs de la Colombie-Britannique ont constaté de nombreux changements aux chapitres des ressources de la santé, des services de santé et de la santé de la population au cours de la période qui a précédé la régionalisation (1990-1991 à 1996-1997). En général, le nombre de lits d hôpitaux en soins actifs et prolongés a fléchi au cours de la période, de même que l utilisation des services aux patients hospitalisés. L offre de soins infirmiers a aussi fléchi quelque peu. Néanmoins, ils ont observé de légères augmentations aux chapitres de l accessibilité et de l utilisation des services parallèles de soins de santé, comme la naturopathie et la chiropratique, des services médicaux et des soins hospitaliers en clinique externe. Il y a aussi eu une certaine augmentation de l utilisation des soins de longue durée en établissement et des soins infirmiers communautaires à domicile, de même ii
que de l intensité des soins offerts. D autre part, il y a eu une diminution de l accessibilité des services de soins à domicile, tandis que l intensité des soins offerts aux patients qui recevaient les services a aussi augmenté. Enfin, l état de santé général de la population a semblé s améliorer. Bon nombre de ces tendances ont été observées au cours de la période de deux ans qui a suivi la régionalisation (1997-1998 et 1998-1999). En revanche, tandis que le taux d utilisation des soins prolongés, de la chirurgie de jour, de l hospitalisation en clinique externe et des soins infirmiers à domicile a augmenté dans une certaine mesure au cours des années qui ont précédé la régionalisation, il a fléchi dans tous les cas au cours des deux années qui l ont suivie. La diminution de l utilisation des services parallèles de soins de santé, qui a aussi fléchi au cours de cette période, s est inscrite dans la continuité d une tendance établie peu avant la restructuration. Les tendances variaient quelque peu entre les groupes d âge. Même si les augmentations sur le plan des consultations médicales, des visites en clinique externe et des services de soins infirmiers à domicile étaient quelque peu supérieures chez les sujets plus âgés, les diminutions qui ont été observées au fil du temps sur le plan des hospitalisations, des services de soutien à domicile et des soins infirmiers à domicile étaient généralement moindres dans ces groupes d âge. Par ailleurs, les comparaisons opposant les quintiles de revenu n ont guère révélé de différences relatives à ces tendances entre les divers groupes, mais les comparaisons opposant les régions ont révélé des similitudes et des différences à ce chapitre. Manitoba Les chercheurs du Manitoba ont examiné l utilisation, par les Manitobains, de tous les principaux types de soins de santé au fil du temps, y compris le recours aux médecins, aux hôpitaux, aux foyers de soins infirmiers, aux soins à domicile, aux services de santé publics et aux médicaments d ordonnance. Compte tenu du nombre croissant de personnes de 75 ans et plus au Manitoba, l étude a aussi examiné l état de santé et l utilisation des soins dans cette cohorte. Au cours de la période d étude, le nombre de médecins disponibles et de consultations médicales n a guère changé. Au Manitoba, le nombre de médecins pour 1 000 habitants n a guère augmenté entre 1990 et 1997 (0,3 %), tandis que le nombre de consultations médicales pour 1 000 habitants a fléchi de 1,5 % entre 1990 et 1998. Plus particulièrement, les taux de consultation en médecine générale ajustés selon l âge et le sexe pour 1 000 habitants ont baissé de seulement 0,6 % au cours de la période d étude, et le taux de consultation des spécialistes a diminué de 1,8 %. Au cours de cette période, le taux d hospitalisation a augmenté légèrement (7,2 %), tandis que les admissions en foyers de soins infirmiers des personnes de 75 ou plus se sont passablement maintenues. En dépit de ces constatations, dans les faits, le séjour à l hôpital des Manitobains était plus court. Cette diminution correspond à une baisse de 20 % du nombre moyen de jours d hospitalisation. Contrairement à la croyance populaire, cette iii
baisse ne semblait pas attribuable à un manque de lits d hôpitaux. Les fermetures de lits ont commencé en 1992, tandis que le fléchissement de l utilisation des services hospitaliers a débuté dans les années 80. En fait, la moitié de la diminution du nombre de jours d hospitalisation s est produite avant 1992. De même, encore qu un plus grand nombre de personnes de 75 ans et plus aient été admises ces dernières années, le séjour moyen dans les foyers de soins infirmiers s est écourté, ce qui indique que les aînés vivent plus longtemps chez eux parce qu ils sont en meilleure santé ou que les services de soins à domicile sont plus disponibles. De 1991 à 1998, les taux de pratique de quatre types de chirurgies (genoux et hanches, pontages coronariens et cataractes) réputées améliorer la qualité de vie des adultes plus âgés se sont accrus considérablement (183 %, 49 %, 76 % et 66 %, respectivement, en tenant compte du nombre accru de Manitobains âgés). Le taux de mortalité des personnes de 75 ans et plus a passé de 95 pour 1 000 en 1990 à 92,1 pour 1 000 en 1998. Par conséquent, l état de santé général des Manitobains âgés s est amélioré au cours de la période, à l instar de la santé de l ensemble de la population de la province. Enfin, les chercheurs du Manitoba se sont aussi penchés sur l effet qu ont eu les changements qui se sont opérés dans la prestation des services de mammographie au cours des années 90 sur les régions desservies et les inégalités dans l utilisation des soins préventifs. Au nombre des changements mis en œuvre, on a ôté aux médecins la responsabilité de la prestation de ces services, désormais offerts par l intermédiaire d établissements permanents de dépistage en régions urbaines et de véhicules dans les régions rurales et éloignées. Étant donné qu il n y a pas eu de changement au chapitre de la vaccination des enfants ou du dépistage du cancer du col utérin au cours de cette période, les données longitudinales sur ces services ont servi de témoins dans une comparaison les opposant aux données sur la mammographie. Les constatations ont révélé que le programme de dépistage du cancer du sein mis en œuvre peu de temps après la régionalisation a eu des répercussions importantes : les taux de services ont augmenté de façon spectaculaire tandis que les disparités (socio-économiques et entre les régions rurales et urbaines) qu on observait depuis longtemps sur le plan de l utilisation ont disparu. On n a pas constaté de changements semblables dans le dépistage du cancer du col de l utérus ou dans la vaccination des enfants. Comparaison opposant la Colombie-Britannique et le Manitoba Enfin, on a conduit des analyses comparatives pour évaluer les différences entre les changements qui se sont opérés au cours de la période de neuf ans englobant la régionalisation. Les constatations provisoires révèlent des différences importantes entre les deux provinces, avant et après la restructuration. En général, la population de la Colombie- Britannique a utilisé davantage les services offerts par les omnipraticiens et les cliniques externes tandis que la population du Manitoba a utilisé davantage les services offerts par les spécialistes de la médecine ainsi que les services aux patients hospitalisés. Avant la iv
régionalisation, la durée des séjours dans les services de soins actifs avait tendance à être un peu plus longue en Colombie-Britannique. Il semble aussi y avoir une certaine différence entre les deux provinces sur le plan des taux de variation. Les taux de variation des consultations médicales ajustés selon l âge et le sexe étaient relativement faibles dans les deux provinces. Néanmoins, les différences entre les provinces semblaient plus importantes dans le secteur hospitalier. Tandis qu en Colombie- Britannique, les fléchissements ont été plus importants pour ce qui est des services aux patients hospitalisés et de la durée des séjours, au Manitoba, l augmentation sur le plan des visites en clinique externe était plus importante. Sommaire Dans l ensemble, notre recherche confirme qu il y a eu des changements importants au chapitre des ressources de santé et de l utilisation des services de santé au cours de la dernière décennie. Néanmoins, au nombre des constatations recueillies par les chercheurs de la Colombie-Britannique, rien n indique clairement qu on délaisse le modèle avec prédominance de soins médicaux au profit d un modèle de soins plus vaste, axé sur les dimensions sociale et communautaire. Si les diminutions observées dans les ressources pour les soins actifs semblent s inscrire dans le droit fil de cette tendance, les récentes diminutions dans les soins en clinique externe, les services parallèles de soins de santé, les services de soutien à domicile et les soins infirmiers à domicile semblent moins harmonisées. La priorité a été accordée aux baisses dans les services, tant dans les secteurs des soins médicaux actifs et des services hospitaliers que pour ce qui est des services communautaires. Les fléchissements semblent s accompagner d une augmentation de l intensité des soins et d une réorientation des services au profit des personnes plus âgées. Même si les changements dans les ressources et les services de santé sont manifestes dans les provinces, des constatations indiquent aussi que la Colombie-Britannique et le Manitoba recourent à des stratégies différentes de réforme de la santé. En Colombie- Britannique, on a accordé la priorité à la mise en application de réductions au chapitre des hospitalisations tout en maintenant les soins en clinique externe. Au Manitoba, les augmentations dans les soins en clinique externe ont compensé les réductions sur le plan des hospitalisations. Enfin, il convient de noter que bon nombre des changements observés ont été enclenchés bien avant la régionalisation, qui a été lancée en bonne et due forme en 1997, et se sont poursuivis par la suite. Les recherches effectuées dans les deux provinces indiquent que la régionalisation n a pas modifié considérablement l évolution du changement, à tout le moins au cours de cette période de courte durée. Il faudra que les recherches à venir confirment, étoffent et peaufinent ces analyses à plus longue échéance. v