Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance. SCOR inform - Novembre 2012



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Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance SCOR inform - Novembre 2012

Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance Auteur Laure de Montesquieu Responsable Centre de R&D Dépendance SCOR Global Life Responsable de Rédaction Bérangère Mainguy Tel: +33 (0)1 58 44 70 00 Fax: +33 (0)1 58 44 85 17 life@scor.com Éditeur Gilles Meyer Novembre 2012 - ISSN : demande en cours - Il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l Éditeur. SCOR fait ses meilleurs efforts pour assurer l exactitude de l ensemble des informations fournies et décline toutes responsabilités en cas d imprécision, inexactitude ou omission.

SCOR inform - Novembre 2012 Introduction La problématique de la dépendance, des personnes âgées mais également des plus jeunes, se pose dans la plupart des pays développés comme corollaire du vieillissement de la population, de l augmentation de l espérance de vie et de l éclatement de la cellule familiale. Comment faire face à ce nouveau défi? Les différents Etats ont mis en place des programmes pour venir en aide aux personnes dépendantes mais ces programmes ne permettent pas, en général, de couvrir la totalité des besoins des personnes concernées. Afin de pallier une partie des insuffisances constatées, l assurance dépendance est apparue dans certains des pays confrontés à ce problème. Le développement de l assurance dépendance ces dernières années n aurait pu être réalisé sans la réalisation d un modèle de tarification, généralement un modèle de Markov, associé à des bases biométriques. En effet, la majorité des modèles de tarification de l assurance dépendance suppose qu un assuré, valide au moment de la souscription, sera valide, dépendant ou décédé «t» années après la souscription. 3

Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance Plusieurs lois sont donc indispensables à la tarification et au pilotage d un contrat d assurance dépendance, que les garanties soient exprimées forfaitairement ou sur la base de remboursements : La loi de survie des assurés autonomes ou loi de longévité des assurés autonomes qui permet de déterminer si l assuré en état d autonomie à la date «t» sera décédé à la date «t+1» sans passer par un état de dépendance. La loi de résiliation des contrats, ou loi de chute des contrats qui correspond à la probabilité qu un assuré en vie et non dépendant arrête de régler les cotisations. La loi d incidence de la dépendance qui correspond à la probabilité pour un assuré autonome à la date «t» d être dépendant à la date «t+1». La loi de survie en état de dépendance qui permet de déterminer si l assuré dépendant à la date «t» sera encore dépendant à la date «t+1». Si plusieurs niveaux de dépendance sont envisagés, des lois de transitions entre les divers états de dépendance peuvent également être établies. En fonction des spécificités de l assurance dépendance dans chaque pays, il est important de tenir compte de la définition de la dépendance, à la fois dans les termes déterminant la gravité de l état, par exemple la perte d «AVQ» (Activités de la Vie Quotidienne), en faisant attention à leur nombre et à la définition de chaque AVQ et dans sa dimension temporelle (franchise, dépendance temporaire ou définitive) : chaque loi dépend évidemment de l ensemble de ces définitions. On constate que l âge et le sexe sont les facteurs les plus discriminants pour l établissement de ces lois. Toutefois, il peut également être utile de disposer de certaines de ces lois en fonction de la pathologie à l origine de la dépendance : ainsi l incidence de la dépendance est différente si celle-ci est un cancer ou une démence, il en est de même pour la durée de survie en état de dépendance. Notons également que les probabilités de transition entre les divers états de dépendance varient en fonction non seulement de l âge atteint, mais également de l âge d entrée en dépendance dans le premier état, l influence de la pathologie à l origine de la dépendance se faisant là encore sentir. En fonction des spécificités du produit dépendance, d autres segmentations devront être réalisées (fumeur/non-fumeur, type de sélection médicale, réseau de distribution ). L ensemble des lois à déterminer est donc important et il faut disposer d un très grand nombre de données individuelles pour en faire une étude exhaustive. Par ailleurs, ces lois se doivent dans la majorité des cas, d être établies jusqu à un âge très élevé (120 ans pour la plupart des pays développés), cet âge étant généralement fonction de l espérance de vie des habitants du pays concerné. Fort de plus de 25 années de présence sur le marché de l assurance dépendance avec 50 traités de réassurance en vigueur, SCOR Global Life a ainsi établi des lois d expérience sur un grand nombre de portefeuilles d assurés. Les données d expérience Certains portefeuilles d assurés apportent suffisamment d in for mations crédibles permettant d établir des lois. D autres, de taille et d ancienneté plus modestes, fournissent cependant un ensemble non négligeable d informations. Comme pour tout maniement de données à visées statistiques, si plusieurs sources d informations sont agrégées une attention toute particulière devra être portée aux divers paramètres influençant l appréciation du risque, paramètres qui peuvent varier d une source à l autre. Il s agit notamment : de la définition retenue pour le risque de dépendance, de paramètres comme la franchise (existence ou non, différenciée ou pas selon la cause de la dépendance, franchise relative ou absolue, durée ), des délais de carence éventuels, de la sélection du risque à l entrée dans l assurance dans le cas de données d assurance, de la gestion des sinistres, des caractéristiques de la population retenue, du contrat d assurance en lui-même dans le cas de données d assurance (par exemple : antisélection connue sur ce contrat, mode de distribution) etc. Certaines données pourront parfois être agrégées pour construire des lois d expérience lorsque les paramètres auront été analysés en profondeur et le niveau de biais statistique en découlant évalué. 4

SCOR inform - Novembre 2012 Les lois issues de l expérience Après avoir rassemblé des données homogènes, une estimation des taux de décès ou d incidence est à réaliser. Pour cela, les méthodes classiques utilisées dans le domaine de la longévité/mortalité pour estimer les taux de décès bruts sont reprises : calcul de l exposition au risque en étant attentifs aux données incomplètes puis calcul des taux bruts. Si toutes les observations étaient complètes et s il n existait pas de sortie autre que par décès pour l estimation de la loi de décès des autonomes ou des dépendants, ou par entrée en dépendance pour l estimation de l incidence du risque, l estimation du taux cherché relèverait du modèle binomial classique. L estimateur correspondant est non seulement l estimateur du Maximum de Vraisemblance, mais aussi celui de la méthode des moments. Toutefois, on est rarement dans le cas d observations complètes. C est pourquoi cet estimateur est ensuite étendu aux données incomplètes par approche de type Bernoulli (la seule variable étant la réalisation ou non de l évènement) ou en tenant compte également de l âge à la réalisation de l évènement (estimateur de Kaplan Meier). Le calcul de l intervalle de confiance est utile pour vérifier la crédibilité des résultats obtenus. Les taux âge par âge résultant de ces estimations sont ensuite lissés pour obtenir des taux cohérents. Pour cela, le lissage de Whittaker-Henderson - parmi d autres méthodes pouvant bien évidemment être également employées - est aisément programmable et donc utilisable. La prolongation des lois dans le cadre de l assurance individuelle Les données d expérience d assurance dépendance sont, sauf en de très rares cas, concentrées sur une tranche d âge restreinte : de 50 à 90 ans, voire 95 ans. Ceci est inhérent à l histoire même du risque : si les premiers contrats d assurance ont été souscrits à partir des années 1980 (années 1970 pour les premiers d entre eux en Israël, mais sans grand succès de distribution) et que l on constate un âge moyen de souscription de 60 à 65 ans pour des souscriptions dans un cadre individuel en France par exemple, l âge maximum atteint par les assurés sera de 90 à 95 ans. Par ailleurs, le trop faible nombre de souscriptions à des âges inférieurs à 50 ans dans le cadre de l assurance individuelle ne permet pas d obtenir des lois fiables pour des âges relativement jeunes. Il est donc nécessaire de prolonger les lois, notamment pour les âges élevés, ce qui est indispensable si le versement de la prestation garantie au contrat intervient tant que l assuré est en état de dépendance (donc en vie) ce qui est le cas dans le cadre des rentes dépendance viagères. Là encore, les méthodes utilisées dans le cadre des études de longévité sont retenues : ainsi la méthode de Kannisto permettra d obtenir la prolongation des lois aux âges élevés. Un point d attention particulier sera bien évidemment porté au calibrage des calculs puisque retenir une grande plage d âge (supérieure à 10 ans par exemple) conduira à des taux manifestement trop faibles si l on considère les données que l on peut obtenir par ailleurs (enquêtes publiques, contrats permettant d obtenir certaines estimations à des âges élevés, données démographiques générales ou d assurance ). La vérification de la cohérence des lois obtenues Une fois chaque loi estimée individuellement, il est indispensable de projeter un portefeuille d assurance selon ces lois puis de confronter les résultats obtenus, notamment à des données de prévalence du risque ou à des tendances démogra phiques propres au pays étudié. Ainsi, la projection du portefeuille ne doit pas conduire à une prévalence de la dépendance lourde de 10 à un âge de 100 ans car ceci ne serait pas réaliste. Par ailleurs, le comportement global du portefeuille (assurés dépendants au sens de la définition retenue et assurés autonomes selon cette même définition) doit suivre les lois démographiques communément admises. Par exemple, même s il est utile à un niveau calculatoire de «fermer» (à 120 ans par exemple) les différentes lois obtenues, il est indispensable de 5

Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance vérifier auparavant que la mortalité globale du portefeuille suit une loi de mortalité cohérente avec les lois de mortalité observées sur des portefeuilles d assurance (la mortalité observée sur des portefeuilles d assurance étant très largement inférieure à la mortalité de la population générale). Un cas pratique : les bases de la dépendance lourde en assurance individuelle - France Le portefeuille de SCOR Global Life est né à la fin des années 80. Il comprend 1,3 million de personnes en France et 3 millions dans le monde. En France, l exposition est de plus de 15 millions assurés-années, pour environ 25 000 sinistres enregistrés depuis l origine. L expérience est significative et fiable jusqu à plus de 90 ans. Elle croît d année en année. Ces données homogènes ont permis de construire des lois non-paramétriques, notamment en assurance individuelle pour une garantie de dépendance totale définie par l impossibilité de réaliser au moins 3 actes de la vie quotidienne sur 4, cette impossibilité devant être consolidée et reconnue par le service médical de l assureur. Pour prolonger les lois au-delà des données disponibles, la méthode de Kannisto a été utilisée tout en comparant avec d autres données disponibles, dont des observations sur des portefeuilles d assurance obligatoire qui permettent d avoir une vision sur le comportement des lois à des âges supérieurs à 90 ans. Les lois déterminées ont ensuite permis : de déterminer la mortalité de la population résultante et de la confronter à la réalité des portefeuilles. de vérifier la prévalence obtenue : ainsi les observations sur le terrain et les différentes enquêtes disponibles, notamment PAQUID (Personnes Agées Quid), menée en partenariat avec le Groupe SCOR, et HID (Insee Enquête Handicap, Incapacité, Dépendance), donnent de bonnes indications de la prévalence du risque qui sont comparées à celles issues de la combinaison des lois déterminées. Ces vérifications ont conduit à ajuster les lois obtenues par le simple procédé calculatoire, remettant en cause certains paramétrages afin d obtenir un modèle global en adéquation avec la réalité constatée «sur le terrain». 1. L incidence de la dépendance totale L incidence croît avec l âge et n est pas la même pour les hommes et les femmes. On constate que l incidence est plus forte pour les hommes aux âges jeunes, que la situation s inverse par la suite avant de s inverser de nouveau aux grands âges. Contrairement à ce que nous pensions autrefois, l incidence de la dépendance n est pas exponentielle mais, à partir d un certain âge, sa croissance ralentit. Incidence de la Dépendance Totale 2 Incidence hommes Incidence femmes 1 70 75 80 85 90 95 6 Agreed cash flows Actual annuities

SCOR inform - Novembre 2012 2. La mortalité des assurés dépendants Cette loi est complexe. Une table de mortalité classique dépend de l âge et du genre. La loi de mortalité d une personne dépendante nécessite de tenir compte de l âge d entrée dans l état de dépendance car la durée de vie dans ce cas varie selon la cause de dépendance, elle-même corrélée à l âge d entrée en dépendance. Les principales causes de dépendance ont des durées assez variables : relativement courtes (cancers ), moyenne (rhumatismes, maladies cardiovasculaires ) ou beaucoup plus longues, jusqu à dix ans (problèmes neurologiques, démence sénile). Dans ce cadre, la loi de maintien en dépendance est différente en fonction du nombre d années passées en dépendance. Les taux de mortalités de première année en dépendance ne croissent pas strictement avec l âge mais décroissent jusqu à un âge d environ 75 ans. De fait, jusqu à 75 ans, il est constaté une prépondérance de pathologies de type Cancer, à déroulement assez court, alors qu après cet âge, les pathologies ont des déroulements plus longs. Ceci se reflète dans l intensité des taux mensuels de mortalité qui est plus élevée pour les âges jeunes lors des premiers mois de dépendance : Mortalité de 1 ère année en dépendance 2 Hommes 2 Femmes 1 65-69 ans 75-79 ans 85-90 ans mois 1 mois 2 mois 3 mois 4 mois 5 mois 6 mois 7 mois 8 mois 9 mois 10 mois 11 mois 12 Au cours de la deuxième année, il est intéressant de constater que les courbes de mortalité des hommes et des femmes reprennent une forme plus classique et se rapprochent des courbes des tables réglementaires, démontrant ainsi que le facteur «Âge» reprend le dessus. Au fil des années passées en dépendance : 1 Agreed cash flows Actual annuities 6 4 mois 1 65-69 ans 75-79 ans 85-90 ans mois 2 mois 3 mois 4 mois 5 mois 6 mois 7 mois 8 mois 9 mois 10 mois 11 mois 12 Mortalité de 2 e année en dépendance en fonction de l âge Mortalité hommes Mortalité femmes Mortalité générale des assurés hommes Mortalité générale des assurés femmes Agreed cash flow Actual annuities les courbes de mortalité s aplatissent ; l influence de l état de dépendance diminue au profit de celle de l âge ; les pathologies à déroulement long prennent une place prépondérante ; la mortalité se rapproche de la mortalité générale. 2 70 75 80 85 90 95 7 Agreed cash flows Actual annuities

Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance 3. La mortalité des assurés autonomes au sens de la dépendance totale Cette loi s applique aux assurés non dépendants et non décédés. La longévité en état d autonomie s apparente donc à l espérance de vie sans incapacité, même si cette dernière s étend sur toute la vie de la personne alors que dans le cas présent, la définition de l incapacité ne porte que sur la perte d autonomie considérée comme permanente à la date de reconnaissance. La mortalité en état d autonomie est inférieure à la mortalité générale. Il apparaît que les assurés vivent longtemps en état d autonomie et que les abattements peuvent atteindre 5 par rapport aux tables réglementaires. On constate également que les populations concernées peuvent soutenir la comparaison avec les rentiers et ont une longévité supérieure à celle des rentiers. Parallèlement, en fonction des tables réglementaires de mortalité des assurés, dans nos portefeuilles, il apparaît que l espérance de vie d une personne autonome est nettement supérieure à l espérance de vie de l ensemble de la population au même âge. Ce phénomène est intuitif : en effet, la population générale est composée non seulement d assurés autonomes, mais également d assurés dépendants dont la mortalité est supérieure à celle des assurés autonomes. 4. Le comportement général du portefeuille Le portefeuille en termes de mortalité et de prévalence du risque a pu être modélisé à partir des lois ainsi définies. Son comportement général doit être confronté aux données externes disponibles et notamment à des données de portefeuilles d assurance obligatoire fournissant des informations sur un spectre d âges plus large et à des données de population générale disponibles. Ceci permet d ajuster les différents paramètres constitutifs des lois puisqu elles ne sont pas indépendantes les unes des autres : les contraintes de mortalité globale du portefeuille et de prévalence du risque doivent être satisfaites. Pour les femmes, la prévalence atteint presque 10 à un âge de 120 ans. La mortalité globale du portefeuille est nettement inférieure à la mortalité générale et nous constatons systématiquement une sous-mortalité dans les portefeuilles d assurance quel que soit le risque couvert. Jusqu à 105 ans, la prévalence des femmes est supérieure à celle des hommes. La tendance s inverse par la suite, en pourcentage et non en nombre (la cohorte de femmes atteignant les âges élevés est en effet beaucoup plus nombreuse que celle des hommes). Les hommes deviennent plus rapidement dépendants. Prévalence de la Dépendance Totale 10 8 Prévalence hommes Prévalence femmes 6 4 2 85 95 105 115 8

SCOR inform - Novembre 2012 Mortalité d un Portefeuille général d assurés v.s. Portefeuille Autonomes + Dépendants 6 Mortalité autonomes + dépendants hommes Mortalité générale des assurés hommes 4 2 85 95 105 115 Mortalité d un Portefeuille général d assurés v.s. Portefeuille Autonomes + Dépendants 8 6 Mortalité autonomes + dépendants femmes Mortalité générale des assurés femmes 4 2 85 95 105 115 9

Construction de bases biométriques pour l assurance dépendance 10

SCOR inform - Novembre 2012 Conclusion Un certain nombre de mises en garde concernant à la fois les méthodologies et la cohérence des résultats obtenus ont été soulignées dans le présent document. Malgré tout, il n a pas encore été évoqué que les lois obtenues, aussi cohérentes soient elles, doivent être mises en regard du modèle utilisé : ainsi, il ne sert à rien d utiliser des lois conditionnelles dans un modèle qui n utilise que des probabilités simples et l on se doit de mettre en avant le caractère conditionnel des lois obtenues. Un soin particulier devra donc être apporté à l étude des liens entre modélisation du risque et résultats issus de l expérience, y compris dans la vérification de la cohérence des lois. Il ne sert à rien d élaborer des lois qui ne seront pas en adéquation avec l utilisation qui en est faite. Le SCOR Global Risk Center (www.scorglobalriskcenter.com) met à disposition un certain nombre d articles traitant du sujet de la dépendance dans le monde entier, notamment le SCOR Papers n 15 sur les contrats d assurance dépendance que nous vous invitons à consulter. Le SCOR Global Risk Center rassemble et analyse les ressources les plus pertinentes sur le risque et les questions liées à l assurance et la réassurance. Il comporte à la fois des documents internes et des ressources externes sélectionnées par SCOR. 11

SCOR Global Life 5, avenue Kléber 75795 Paris Cedex 16 France www.scor.com