Hémovigilance et sécurité transfusionnelle : incidents, accidents



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Transcription:

Le Congrès Infirmiers. Infirmier(e)s anesthésistes diplômé(e)s d état 2013 Sfar. Tous droits réservés. Hémovigilance et sécurité transfusionnelle : incidents, accidents E. Peynaud-Debayle 1, C. Trophilme 2 1 UF d Hématologie Biologique et Transfusion, Louis-Mourier, CHU Lois-Mourier, 178 Rue des Renouillers, 92700 Colombes, 2 Hémovigilance, Bichat Hôpitaux Universitaires Paris Nord Val de Seine (HUPNVS), AP-HP, France Auteur correspondant : Edith Peynaud-Debayle Tel : 01.46.60.64.76. Fax : 01.46.60.64.32. edith.peynaud@lmr.aphp.fr POINTS ESSENTIELS Importance de l implication du médecin prescripteur qui dépiste les sujets nécessitant une prise en charge biologique ou clinique spécifique. Les problèmes d identification du patient sont à l origine des incidents graves de la chaîne transfusionnelle les plus fréquents et de retards voire d accidents transfusionnels. La formation répétée des équipes de l établissement aux procédures transfusionnelles, en dehors de l urgence et en situation d urgence vitale est indispensable pour prévenir toute erreur de destinataire de produit sanguine labile (PSL) et éviter des retards à la transfusion. La rapidité du dépistage et de la prise en charge des incidents transfusionnels par les équipes infirmières et médicales est déterminante pour favoriser une issue favorable de l incident. Certains incidents graves doivent être évités par l équipe soignante en respectant strictement les procédures, d autres peuvent être prévenus par le médecin par des mesures simples. HÉMOVIGILANCE Définition et outils d analyse L hémovigilance est un des éléments contribuant à améliorer la sécurité transfusionnelle. Elle a pour objet la surveillance, l'évaluation et la prévention des incidents et des effets indésirables survenant chez les donneurs ou les receveurs de produits sanguins labiles (PSL). Sont concernés tous les incidents ou les effets indésirables de la chaîne transfusionnelle, allant de la collecte des PSL jusqu'au suivi des receveurs, y compris le suivi des donneurs. Seuls les effets indésirables et les incidents graves concernant les receveurs seront traités ici. Principales données de l hémovigilance en France 1- Les incidents transfusionnels ou effets indésirables Receveurs (EIR)

Chaque année 3 millions de PSL sont transfusés à 500.000 receveurs avec environ 2,5 événements indésirables (soit plus de 7000 par an) de gravité variable : 91 % non sévère (grade 1); 6,5 % sévères (grade 2) ; 2 % avec menace vitale immédiate (grade 3) et 0,5 % amenant au décès du receveur (grade 4) [1]. Les 3 effets indésirables les plus fréquents sont l allo-immunisation antiérythrocytaire (36%), la réaction fébrile non hémolytique (RFNH : 29 %) et les allergies (18%). Ils sont généralement bénins et exceptionnellement à l origine du décès du receveur. Les effets indésirables les plus graves, pouvant entraîner une menace vitale immédiate (avec environ 10 à 15 décès par an) sont par ordre de fréquence décroissante les œdèmes aigus du poumon (OAP) de surcharge ou TACO (pour Transfusion-associated circulatory overload, 39%), les allergies (25%), les OAP lésionnels ou TRALI (pour Transfusion associated acute lung injury, 12%), les accidents hémolytiques (par incompatibilité ABO ou autre, 6%) et les infections bactériennes transmises par transfusion (IBTT). Les TACO sont à l origine de 2/3 des décès, les autres incidents étant responsables de zéro à un décès chaque année. Le tableau 1 fait la synthèse des EIR selon leur gravité et les moyens de prévention disponibles pour les équipes soignantes. 2- Incidents graves de la chaîne transfusionnelle (IG) Il s agit de tout incident susceptible d affecter la sécurité ou la qualité des PSL et d entrainer un EIR. La majorité d entre eux survient dans les établissements de santé (71 % dont seulement 11 % au dépôt de sang). Elles concernent l identification du patient (23%), les erreurs de délivrance par l ETS ou le dépôt (16%), le non-respect des procédures transfusionnelles (9,5%) et enfin les erreurs dans le processus de prélèvement pour une analyse de groupage sanguin (7%). Description des principaux effets indésirables receveurs 1- Mécanismes Le tableau 2 présente les principaux EIR immédiats ou retardés selon leur mécanisme. On peut distinguer 4 mécanismes principaux : (1) les incidents de surcharge ; (2) les incidents en rapport avec un conflit immunologique antigène/anticorps donneur/receveur avec ou sans hémolyse; (3) les incidents en relation avec un élément indésirable apportée par le PSL : agent infectieux ou produits biologiques actifs tels que cytokines ou protéines responsables de réactions d hypersensibilité et enfin (4) les incidents dont le mécanisme est mixte : immunologique et/ou d hypersensibilité : incidents allergiques, TRALI. 2- Prise en charge Les signes cliniques associés aux incidents survenant au cours ou au décours de la transfusion sont peu spécifiques de la nature de l incident : fièvre, frissons, dyspnée, hypo ou hypertension, tachypnée, tachycardie, angoisse, sueurs, douleurs abdominales, prurit, urticaire, etc. L apparition de tels signes implique l arrêt de la transfusion avec maintien de la voie veineuse (en attendant l avis du médecin), suivie de l intervention rapide du médecin responsable de la transfusion (le plus souvent le médecin prescripteur) et d une prise en charge clinique adaptée à l orientation étiologique avec prescription d un bilan biologique si nécessaire. Lorsque le PSL doit être débranché, il est nécessaire de respecter un mode opératoire précis (cf. Annexe B fiche technique IBTT Agence Nationale de sécurité du médicamente et des produits de santé (ANSM) [2]) Par souci pédagogique, la description de la prise en charge des effets indésirables transfusionnels 1

est présentée selon l un des 4 symptômes dominant le tableau : hyperthermie (A) ; signes respiratoires (B), signes allergiques (C), signes hémodynamiques prédominants (D). A- Hyperthermie (et frissons) IBTT : Physiopathologie : signes cliniques en rapport avec un choc endotoxinique (présence de toxines bactériennes). Signes cliniques : ils surviennent dans les 90 minutes qui suivent le début de la transfusion avec augmentation de la température basale 2 C, des frissons, augmentation de la fréquence cardiaque 40/min, baisse de la PAS 30 mm Hg pouvant aller jusqu au choc. Conduite à tenir initiale : après arrêt de la transfusion : traitement d un éventuel choc septique. Bilan biologique étiologique : deux hémocultures seront réalisées à 1 heure d intervalle pour le patient et seront adressées au laboratoire de l ES alors que le PSL sera adressé dans un laboratoire de microbiologie référent pour examen direct et mise en culture [2]. Hémolyse aiguë par incompatibilité immunologique. Physiopathologie : conflit immunitaire entre les antigènes apportés par les Concentrés de Globules Rouges () et les anticorps du receveur. Signes cliniques : fièvre (80% des cas) associée ou non à des frissons, douleurs (lombaires), hypotension, dyspnée, angoisse. La mortalité survient dans moins de 10% des cas et son taux est lié à la quantité de sang incompatible transfusé. Bilan biologique : Recherche d une hémolyse, d une inefficacité transfusionnelle et du mécanisme immunologique de l hémolyse. Traitement : arrêt immédiat de la transfusion en cours, surveillance et prise en charge en réanimation si nécessaire. Prévention : la majorité de ces incidents est due non pas à une défaillance de laboratoire, mais au non-respect des règles et des vérifications pré transfusionnelles, aboutissant à la transfusion à un patient d un PSL incompatible qui ne lui était pas destiné [3]. Réaction fébrile non hémolytique. Physiopathologie : présence de cytokines pyrogéniques accumulées dans le PSL pendant son stockage, en particulier et concentrées plaquettaires (CP). Diagnostic : apparition pendant la transfusion ou dans les quatre heures qui suivent d au moins un des signes suivants : augmentation de la température 1 C de la valeur prétransfusionnelle, frissons. Il s agit d un diagnostic d exclusion, d évolution toujours bénigne. Le bilan biologique permet d éliminer un incident d un autre mécanisme [4]. B- Signes respiratoires TACO: épidémiologie : 250 cas/an déclarés en France (sous-déclaration) avec 2% de décès. Physiopathologie : OAP lié à une augmentation brutale de la volémie chez un sujet présentant une insuffisance ventriculaire gauche (IVG). Signes cliniques : polypnée associée à une cyanose, toux, expectoration rosée et mousseuse. Râles crépitants bilatéraux à l auscultation pendant ou au décours d une transfusion de. Traitement : il s agit d une urgence vitale. Selon la pression artérielle systolique, on prescrira en première intention du Furosémide (PAS < 140 mmhg) ou des dérivés nitrés (PAS > 150 mmhg) [5]. Prévention : (1) Identifier les sujets à risque : âge > 70 ans, porteur d une HTA ou d une cardiopathie, transfusé () pour une anémie chronique ; (2) Prescription médicale chez ces patients : transfusion lente (2 à 5 ml/kg), en position semi-assise, fractionnée (évaluation après chaque ) ; (3) Surveillance attentive de la fréquence respiratoire et de la tension artérielle, le pronostic dépendant de la précocité de la prise en charge, la transfusion de nuit doivent être évités [6]. 2

TRALI. Physiopathologie complexe : OAP lésionnel inflammatoire d origine transfusionnelle avec lésion de la membrane alvéolaire, pouvant mener à un syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA). Diagnostic : installation rapide entre 1 et 6 heures après la fin de la transfusion de signes cliniques à dominante respiratoire (dyspnée, toux, saturation en O 2 < 90 % en air ambiant, infiltrats pulmonaires à la radio), associés à une fièvre quasi constante ; peuvent s y associer des signes cardio-vasculaires (hypotension, tachycardie). Traitement : c est celui du SDRA : oxygénothérapie, ventilation mécanique parfois associés à des médicaments vasopresseurs. Les traitements diurétiques ou vasodilatateurs sont sans intérêt, les traitements immunosuppresseurs (corticoïdes) n ont pas fait la preuve de leur intérêt. Bilan biologique : voir recommandations ANSM : double enquête immunologique leucoplaquettaire donneur / receveur [7]. C- Signes allergiques Physiopathologie : le terme «allergique» est ici attribué par excès aux réactions d hypersensibilité de mécanismes immunologiques ou non immunologiques (présence de cytokines ou autres protéines dans les PSL à l origine de réactions d hypersensibilité). Signes cliniques : essentiellement signes cutanés (urticaire localisé ou généralisé, érythème généralisé, prurit) ou respiratoires (œdème de Quincke) survenant pendant la transfusion et jusqu à 4 heures après. Bilan biologique : Tout tableau clinique sévère doit conduire à réaliser précocement et de façon répétée des dosages de tryptase et d histamine. Traitement : réactions peu sévères : glucocorticoïdes et antihistaminiques ; choc anaphylactique : réanimation, adrénaline IV + remplissage. Prévention : il s agit avant tout d éviter la récidive des allergies graves lors de futures transfusions par l utilisation de PSL déplasmatisés et/ou de CP conservées en solution de conservation. Diagnostic différentiel : TRALI, choc hémolytique par incompatibilité ABO ou autre, choc septique [8, 9]. D- Signes hémodynamiques prédominants : réaction hypotensive transfusionnelle (RHT) Physiopathologie : souvent en rapport avec la présence de bradykinine dans le PSL. Signes cliniques : chute de 30 mmhg de la pression systolique ou diastolique, s accompagnant parfois de signes en rapport avec cette hypotension (dyspnée, angoisse, hypothermie, sueurs, tachycardie, etc. Il s agit d un diagnostic d exclusion, une fièvre doit faire rechercher une infection bactérienne, une hémolyse une incompatibilité immunologique, une dyspnée un TRALI, etc. Bilan biologique : non nécessaire. Prise en charge : arrêt de la transfusion et utilisation de PSL issus d un don différent si les transfusions doivent être poursuivies [9]. Prévention des incidents : les points critiques Implication du médecin prescripteur Sa connaissance du dossier transfusionnel du patient et de son histoire clinique le met en situation d anticiper les problèmes (patient susceptible de s immuniser, à protéger, groupe sanguin rare, patient déjà allo-immunisé, antécédents transfusionnels) et de dépister les patients nécessitant une surveillance particulière (en évitant les transfusions de nuit et/ou en fractionnant la transfusion des PSL). Le médecin doit aussi indiquer sur une prescription écrite le débit transfusionnel, le rythme de la surveillance et les éléments de surveillance souhaités. Il doit enfin pouvoir intervenir à tout moment pendant l acte transfusionnel afin de réaliser une évaluation clinique et la prise en charge 3

selon les éléments d orientation [10]. Transfuser le bon patient Les problèmes d identification du patient sont à l origine des incidents graves de la chaîne transfusionnelle les plus fréquents et de nombreux retards voire d accidents transfusionnels par incompatibilité ABO. Une charte d identification avec mention obligatoire du nom de naissance (sujet de sexe féminin) est nécessaire et doit être prise en compte par les serveurs d identité utilisés. Une procédure d identification active du receveur doit être systématiquement utilisée lors des prélèvements sanguins et avant une transfusion. Enfin, l identité biologique du receveur nécessite le respect des procédures de groupage du receveur : deux déterminations de groupe à deux moments différents. Formation des équipes de l établissement aux procédures transfusionnelles La connaissance des procédures transfusionnelles, tant par les équipes des services de soins que par le personnel du dépôt de sang le cas échéant, est indispensable pour prévenir toute erreur de destinataire de PSL et éviter des retards à la transfusion dommageables pour le patient. La situation particulière de transfusion en urgence vitale doit faire l objet d une procédure parfaitement connue, associant l ensemble des acteurs (y compris les transporteurs). Les nouveaux arrivants doivent bénéficier d une formation incluant le rappel des bonnes pratiques transfusionnelles et des informations pratiques sur les circuits locaux d analyses biologiques et de commandes de PSL. REFERENCES [1] Rapport d activité hémovigilance 2011 ANSM Juillet 2012 [2] Infection bactérienne transmise par transfusion, Fiche technique effets indésirable Receveur - 12 juin 2012. ANSM [3] L'incompatibilité immunologique érythrocytaire (12/06/2012). Fiche technique effets indésirables receveur ANSM [4] Réaction fébrile non hémolytique - Fiche technique effets indésirables receveur (12/06/2012) ANSM [5] Œdème pulmonaire de surcharge - Fiches techniques effets indésirables receveurs (12/06/2012) [6] Ozier Y, Mouquet F, Rieux C, Mertes PM, Muller JY, Caldani C, Boudjedir K, Carlier M; groupe de travail œdèmes aigus pulmonaires post-transfusionnels de la Commission nationale d hémovigilance. Transfusion-associated circulatory overload. Transfus Clin Biol. 2012 Nov ; 19 (4-5) : 263-9. [7] Mise au point sur le TRALI - Argumentaire- (17/06/2006) [8] Allergie - Fiche technique effets indésirables receveur ANSM (22/06/2012) [9] Mertes PM, Boudjedir K. Allergie et transfusion.transfus Clin Biol. 2013 May ; 20(2) : 239-42. [10] La Réaction hypotensive transfusionnelle (RHT) - Fiche technique effets indésirables receveur ANSM (12/06/2012) [11] Circulaire DGS/DHOS/Afssaps n 2003-582 du 15 décembre 2003 relative à la réalisation de l'acte transfusionnel - Bulletin officiel du ministère chargé de la santé n 2004/2 p. 573 4

Les plus graves Évolution le plus souvent favorable Evitables Prévention possible Non évitables Accident par incompatibilité ABO (respect des règles et vérifications) TACO (respect des recommandations de bonne pratique) Hémolyse immunologique (bonnes pratiques de laboratoire et respect des règles et vérifications) Hémosidérose (traitements chélateurs du fer) Allo-immunisation anti érythrocytaire (transfusion de de phénotype compatible) Allergie (prévention des récidives d EI graves) TRALI IBTT Thrombopénie réfractaire RHT RFNH Séroconversion hépatite B (prévention par vaccination) Tableau 1.- Incidents transfusionnels selon leur gravité et les moyens de prévention disponibles pour les équipes soignantes. 5

Incident PSL Mécanisme Dépistage ou diagnostic SURCHARGE TACO Augmentation brutale de la volémie Incident retardé : Hémosidérose Surcharge en fer CONFLIT IMMUNOLOGIQUE Dyspnée survenant sur un sujet avec terrain favorisant : IVG, HTA, âge > 70 ans ; Ferritinémie 1000 ng/ml après transfusion d au moins 20 hors contexte hémorragique Hémolyse aiguë par incompatibilité ABO Conflit Ag A ou B / Ac anti-a ou B Vérification des concordances Hémolyse aiguë par incompatibilité érythrocytaire autre qu ABO Conflit Ag GR / Ac anti-gr, autre que ABO Biologie sur prélèvements pré et post transfusion et sur : RAI Test direct à l antiglobuline Phénotype Épreuves directes de compatibilité. Incident retardé : Apparition d un anticorps irrégulier Ac anti-gr RAI post-transfusionnelle Purpura post-transfusionnel CONTENU INDÉSIRABLE DU PSL IBTT Incident retardé : Séroconversion virale RHT RFNH Tout type et CP Ac anti plaquettes ou anti- HLA / Ag Bactéries Thrombopénie majeure Recherche d Ac anti plaquettes et/ou anti- HLA 2 Hémocultures à une heure d intervalle + culture du PSL : positives, même bactérie identifiée Tout type Virus Sérologies en fonction du contexte clinique Tout type et CP Produits biologiques actifs - Cytokines MIXTE : CONTENU INDÉSIRABLE +/- CONFLIT IMMUNOLOGIQUE TRALI surtout Ac anti HLA et/ou cytokines + Diagnostic d'exclusion Enquête biologique selon Fiche Technique ANSM Allergène +/- réaction CP - Enquête biologique selon Fiche Technique ANSM : Allergie médiée par IgE +/- plasma si EIR sévère : dosages précoces histamine, tryptase médiateurs allergie Tableau 2. - Mécanisme des principaux effets indésirables receveur 6