dans le respect de la personne

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Reconnaître la valeur sociale de la recherche dans le respect de la personne Banques de données et banques de matériel biologique Pour un nouveau cadre éthique et légal Fonds de la recherche en santé du Québec

Le Fonds de la recherche en santé du Québec (FRSQ) a la responsabilité d établir des standards sur l éthique de la recherche et l intégrité scientifique 1. À la demande des chercheurs, le FRSQ et le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) se sont penchés sur la question de l encadrement des banques de données et des banques de matériel biologique à des fins de recherche en santé. Ils ont décidé de confier cette tâche à un groupe-conseil, coprésidé par la D re Marie-France Raynault et M. Claude Dussault. M e Michel Giroux a réalisé la recherche et la rédaction du rapport du groupe-conseil. Le présent document présente les recommandations du groupeconseil. Pour plus de détails, le rapport complet est disponible dans le site Web du FRSQ. Le FRSQ a l intention de prendre les mesures qui s imposent à la lumière de ces recommandations, notamment en révisant ses Standards sur l éthique de la recherche et l intégrité scientifique, et en faisant les représentations nécessaires auprès des acteurs concernés. Ces recommandations intéressent notamment les sujets de recherche, les chercheurs, les comités d éthique de la recherche (CER), les responsables des banques, les établissements, les administrateurs et toutes les autres personnes impliquées dans la collecte, le traitement, l utilisation, la conservation et la gestion des données et du matériel biologique. 1. En vertu du Plan d action ministériel en éthique de la recherche et en intégrité scientifique du ministère de la Santé et des Services sociaux (1998).

L e s b a n q u e s a u c oe u r d e l a r e c h e r c h e e n s a n t é Les banques de données et les banques de matériel biologique se trouvent au cœur des pratiques en matière de recherche. Cependant, les façons de faire ont évolué : la convergence entre le développement de l informatique et celui des méthodes de conservation de matériel biologique permet aujourd hui l entreposage à grande échelle et la recherche de pointe sur les tissus humains. Le couplage des données entre elles et avec le matériel biologique multiplie les moyens d acquérir des connaissances. Par contre, la possibilité technologique de procéder aisément à de multiples couplages amplifie les risques déjà existants de compromettre le respect de la vie privée et de l autonomie personnelle. D e s r e c o m m a n d a t i o n s p o u r r e c o n n a î t r e l a v a l e u r s o c i a l e d e l a r e c h e r c h e d a n s l e r e s p e c t d e l a p e r s o n n e Reconnaissant la valeur sociale de la recherche, le groupe-conseil recommande de moderniser le cadre législatif des banques et d adapter le consentement à leur contexte. Il propose aussi de réaffirmer la culture éthique et la notion de responsabilité dans les milieux de recherche, de renforcer le rôle des comités d éthique de la recherche ainsi que d assurer un consentement libre et éclairé, afin de mieux protéger l autonomie et les droits des sujets de recherche. Les recommandations du groupe-conseil s adressent tant au milieu de la recherche qu au législateur. Le milieu de la recherche aura à modifier ses pratiques et l on devra adapter le cadre législatif à la réalité contemporaine des banques de données et des banques de matériel biologique. La plupart des recommandations proposées ne peuvent être appliquées isolément. C est l adoption de l ensemble des recommandations qui permettra de créer un cadre normatif acceptable et équilibré. Elles sont regroupées ici en six catégories. 1 Moderniser le cadre législatif applicable aux banques 2 Adapter le consentement au contexte actuel des banques 3 Réaffirmer la culture éthique et la notion de responsabilité dans les milieux de recherche 4 Renforcer le rôle des comités d éthique de la recherche (CER) 5 Protéger adéquatement les sujets de recherche 6 Définir les concepts de «projet de recherche», «expérimentation» et «soins innovateurs» ou modifier l article 21 du Code civil du Québec

1 M o d e r n i s e r l e c a d r e l é g i s l at i f a p p l i c a b l e a u x b a n q u e s Certaines banques sont dédiées uniquement à la conservation et à l exploitation de données. Par ailleurs, l existence de banques de matériel biologique ne comportant pas de données est peu vraisemblable de nos jours. En effet, pour être utile, le matériel biologique doit se trouver en relation étroite avec des données, que celles-ci servent à l étude du matériel ou qu elles proviennent de cette étude. La constatation de ce rapport intime permet au groupe-conseil de conclure à la nécessité que les normes légales et administratives applicables à la conservation et à l exploitation des données s harmonisent avec celles touchant le matériel biologique. Le législateur devrait adopter une loi établissant un encadrement unique s appliquant à la fois aux banques de données et aux banques de matériel biologique. L autorisation de la Commission d accès à l information, celle du directeur des services professionnels et le consentement de l usager de services de santé et de services sociaux interviennent conformément à un cadre juridique conçu pour une recherche réalisée dans le contexte d un projet précis et devant se dérouler au cours d une durée prévue ou prévisible. Or, ce cadre juridique est peu adapté à la réalité et à la finalité des banques de données et des banques de matériel biologique dont l utilisation maximale n est désormais possible que si elles sont ouvertes à des projets nouveaux et susceptibles d être réalisés à une époque inconnue au moment de la mise en banque. Que les lois contenant des dispositions sur la protection des renseignements personnels soient adaptées aux tendances émergentes de la recherche en santé, de manière à ce qu elles reconnaissent la validité juridique des banques de données et des banques de matériel biologique et la recherche portant sur des thèmes plutôt que sur des hypothèses précises.

Le groupe-conseil propose aussi l adoption d un cadre de gestion des banques de données et des banques de matériel biologique afin de guider les acteurs de la recherche dans la mise sur pied et l exploitation de ces banques. D une part, la législation et les normes administratives actuelles se révèlent obsolètes par rapport à la réalité actuelle des banques, qui constituent maintenant de véritables infrastructures de recherche. D autre part, les normes de l éthique en recherche ont été élaborées dans le passé pour des chercheurs qui agissaient le plus souvent dans le contexte de projets précis et ayant une durée limitée. Ces normes ne traitent pas adéquatement des questions relatives à la vie privée, questions que soulève la recherche au moyen des banques d aujourd hui. Une législation fournissant un encadrement aux banques de données et aux banques de matériel biologique devrait contenir un cadre normatif qui aborde les douze objets suivants : Rôle de fiduciaire de la banque Responsabilité Formation continue des membres du personnel Approbation obligatoire d un CER compétent Détermination des objectifs de l initiative Détermination de la nécessité d obtenir le consentement libre et éclairé Obtention du consentement libre et éclairé si nécessaire Conservation et protection de la confidentialité des données et du matériel biologique Transparence dans la gestion des données et du matériel biologique Accès aux renseignements personnels Possibilité de porter plainte Partage et protection de la confidentialité

2 A d a p t e r l e c o n s e n t e m e n t a u c o n t e x t e a c t u e l d e s b a n q u e s Selon le droit civil québécois, la participation de sujets à des expérimentations requiert leur consentement libre et éclairé. Dans le contexte des banques, la nécessité que ce consentement soit éclairé est d autant plus pertinente que les données et le matériel biologique sont susceptibles d être utilisés dans le cadre de plusieurs projets (utilisation secondaire) et sur une longue période de temps. Le groupe-conseil utilise les concepts de «consentement spécifique» et de «consentement général». Un consentement spécifique se limite à un objet et à une durée de recherche déterminés. La formulation spécifique de ce type de consentement a pour effet de limiter les possibilités de la recherche aux objets et à la durée qui y sont mentionnés. À l inverse, un consentement général porte sur une durée et des objets indéterminés. Ce type de consentement permettrait au chercheur d utiliser la banque de données et la banque de matériel biologique à d autres fins que celles de l initiative de recherche initiale décrite dans le formulaire de consentement. Le consentement général pourrait aussi avoir pour objet une banque ou infrastructure de recherche dont on ne connaît pas toutes les utilisations éventuelles au départ. Aux yeux du groupe-conseil, le consentement exprimé paraît valide si la personne concernée connaît les grands thèmes des initiatives de recherche éventuelles, ainsi que les objectifs généraux de l infrastructure de recherche. Lorsque l utilisation secondaire des données ne permet pas d identifier le sujet parce qu elles ont été rendues anonymes, les risques à l égard de la vie privée sont virtuellement nuls. Toutefois, l approbation préalable d un CER est requise, car une évaluation indépendante et objective du risque est nécessaire. Que la législation autorise l utilisation secondaire des données qui ne permettent pas d identifier le sujet, sans qu il soit nécessaire d obtenir un nouveau consentement du sujet. Toutefois, l approbation préalable d un CER compétent serait requise. La situation se présente autrement lorsque l utilisation secondaire des données permettra l identification des sujets. Ici, les risques à l égard du respect de la vie privée sont réels. La législation devrait autoriser l utilisation secondaire des données qui permettent d identifier le sujet, lorsque le consentement ou l autorisation prévoit la possibilité que de telles données soient utilisées pour d autres recherches. Toutefois, l approbation préalable d un CER compétent serait requise.

L intervention par laquelle on effectue un prélèvement sur le corps d une personne nécessite son consentement libre, éclairé et spécifique. Ce principe s applique pleinement s agissant d un prélèvement réalisé à des fins de recherche en santé. Un tel consentement spécifique se limite à un objet et à une durée déterminés. Par contre, le sujet de recherche devrait pouvoir permettre, sous la forme d un consentement général, la mise en banque et l utilisation du matériel prélevé à des fins de recherche en santé. La législation devrait autoriser l utilisation secondaire du matériel biologique lorsque le consentement prévoit la possibilité que ce matériel soit utilisé pour d autres recherches. Toutefois, l approbation préalable d un CER serait requise. Dans le cas de recherches épidémiologiques ou sociales, par exemple, la collecte de données est souvent réalisée auprès d un grand nombre de sujets et sur une longue période de temps, parfois même de manière rétrospective. La réalisation de ce type de recherches nécessite de reconnaître une variété de modes de consentement. Il existe présentement un grand nombre de moyens pour communiquer l information à la personne concernée, que ce soit dans un contexte thérapeutique ou de recherche. La reconnaissance de ces moyens de communication doit être maintenue. L article 24 du Code civil du Québec devrait être modifié de manière à exprimer les attentes du législateur non pas en termes de moyens, mais en termes de résultats à atteindre. Le nouvel article 24 devrait être rédigé suivant cinq préoccupations : continuer de favoriser le caractère libre du consentement ; continuer de favoriser le caractère éclairé du consentement ; maintenir le consentement écrit comme règle générale ; que le chercheur ait accès à des alternatives s il démontre au CER que l obtention d un consentement écrit constituerait un obstacle majeur et que les mesures alternatives proposées assurent que le participant pourra exprimer lui-même sa volonté et que l on sera en mesure de la documenter ; autoriser une preuve documentaire aussi large que le permet une gestion sûre, simple et efficace de la preuve du consentement.

Alors que les recommandations précédentes avaient pour but principal de reconnaître la valeur sociale de la recherche menée à l aide de banques de données et de banques de matériel biologique, celles qui suivent visent à renforcer la protection des sujets de recherche lorsqu ils consentent à participer à un projet de recherche en général, et plus spécifiquement, lorsque le projet est lié à la constitution et à l exploitation d une banque de données ou d une banque de matériel biologique. Le principal moyen à privilégier dans la protection des sujets de recherche est le maintien et le développement d une culture éthique chez les artisans de la recherche. Par ailleurs, la protection des sujets comporte deux mécanismes fondamentaux : l approbation de tout projet de recherche par un comité d éthique de la recherche (CER) et l expression d un consentement libre et éclairé de la part des sujets.

3 R é a f f i r m e r l a c u lt u r e é t h i q u e e t l a n o t i o n d e r e s p o n s a b i l i t é d a n s l e s m i l i e u x d e r e c h e r c h e Il apparaît au groupe-conseil que, dans l ensemble, les chercheurs exercent leurs activités comme des personnes responsables et respectueuses de la dignité et des droits de leurs semblables. Le moyen le plus efficace de protéger les sujets de recherche est de continuer à encourager une culture éthique au sein du milieu de la recherche en santé. Que le FRSQ adopte une politique exigeant que les étudiants diplômés qu il soutient reçoivent une formation convenable en éthique de la recherche. Le FRSQ devrait en outre évaluer les besoins des milieux de recherche (chercheurs, étudiants et personnel de recherche) en matière de formation de base répondant à ces besoins. Cette formation de base devrait être poursuivie par une formation continue. Par ailleurs, les établissements de santé devraient n accorder des privilèges de recherche et l accès aux dossiers d usagers qu à des personnes qui démontrent un minimum de connaissances en éthique. Certains formulaires de consentement contiennent des clauses qui tentent de diminuer ou d éliminer la responsabilité des chercheurs, des établissements et des promoteurs du projet de recherche. Ces clauses sont parfaitement inacceptables. La législation devrait exiger que les formulaires de consentement ne contiennent aucune clause de réduction ou d élimination de quelque responsabilité que ce soit. Par ailleurs, le paragraphe qui suit devrait apparaître dans les formulaires de consentement : «Si vous deviez subir quelque préjudice que ce soit par suite de l administration d un médicament ou de toute autre procédure reliée à l étude, vous recevrez tous les soins médicaux nécessaires, sans frais de votre part. En acceptant de participer à cette étude, vous ne renoncez à aucun de vos droits ni ne libérez les chercheurs (le cas échéant : les organismes, les entreprises) ou les institutions impliqués de leurs responsabilité légales et professionnelles.»

4 R e n f o r c e r l e r ô l e d e s c o m i t é s d é t h i q u e d e l a r e c h e r c h e ( C E R ) En vertu de l article 21 du Code civil du Québec, les projets de recherche qui doivent être approuvés et suivis par un comité d éthique de la recherche (CER) sont ceux qui comportent une expérimentation visant des mineurs ou des personnes inaptes. Aucune législation québécoise ne requiert qu un projet de recherche visant des majeurs aptes soit approuvé et suivi par un CER. Or, le standard fondamental du FRSQ en éthique de la recherche et en intégrité scientifique est que tout projet de recherche sur des sujets humains doit être approuvé et suivi par un CER. Ce standard doit s appliquer aux banques de données et aux banques de matériel biologique. Tout projet de recherche réalisé sur des sujets humains devrait recevoir au préalable l approbation d un CER. La législation en vigueur devrait être modifiée en conséquence. Cette mesure étant universelle, elle s appliquerait aux initiatives de recherche en santé requérant une autorisation de la Commission d accès à l information du Québec ou d un directeur des services professionnels. L approbation que donne un CER à un projet de recherche peut avoir de nombreuses implications sur l intégrité et la vie privée des sujets, d autant plus que ceux-ci s engagent avec confiance, sachant qu un CER veille sur eux. En outre, le groupeconseil propose dans l ensemble de son rapport des mesures qui augmentent les responsabilités confiées aux CER, particulièrement en ce qui concerne la forme du consentement et l accès à des données et à du matériel biologique. Ces éléments militent pour la reconnaissance obligatoire des CER. Une loi portant sur la réglementation de la recherche en santé devrait implanter un régime de reconnaissance obligatoire des CER établis au Québec ou se prononçant sur des initiatives de recherche qui seront réalisées au Québec. Le régime de reconnaissance comporterait les éléments suivants : le CER compétent au sein de tout établissement est le CER reconnu par le conseil d administration de cet établissement ; la reconnaissance délivrée par le ministre pourrait correspondre à l une ou l autre catégorie : une première catégorie de reconnaissance, destinée aux CER publics et privés, reconnaît au CER la compétence d approuver tout projet de recherche auprès des sujets humains majeurs et aptes. Une seconde catégorie, destinée aux CER des établissements publics, comporte tous les éléments de la première, auxquels s ajoute l expérimentation sur les mineurs et les personnes inaptes ; le Comité d éthique de la recherche central serait maintenu, avec les mêmes fonctions.

5 P r o t é g e r a d é q u at e m e n t l e s s u j e t s d e r e c h e r c h e Le principe de la juste répartition des bénéfices et des inconvénients trouve une application particulièrement souhaitable concernant la protection des participants contre la discrimination dans les secteurs de l assurance et de l emploi. La législation devrait protéger efficacement les données sur les sujets de recherche ainsi que le matériel biologique prélevé sur ceux-ci afin d éviter toute discrimination, particulièrement dans ces secteurs. Que la législation pertinente établisse les deux normes suivantes concernant la participation à la recherche : la participation à un projet de recherche en santé est confidentielle et toute demande d informations à ce sujet formulée dans un contexte d assurance ou d emploi est illégale ; une réticence ou une omission de déclarer ou de fournir de telles informations est sans conséquence juridique. Les risques posés par les banques se rapportent essentiellement à la confidentialité des renseignements personnels. Si les instances et les procédures proposées par le groupe-conseil sont en place pour bien protéger le caractère confidentiel de l information, le consentement général peut être envisagé avec assurance. Dans ce contexte, la personne concernée sera informée des grandes lignes du cadre de gestion gouvernant la banque, elle recevra l assurance que les données et le matériel biologique ne seront utilisés qu aux fins de la recherche en santé, et on lui garantira qu un CER verra à la protection de sa dignité et de ses droits. 10 La législation devrait exiger que les banques transmettent les informations et les assurances suivantes au sujet : les grandes lignes du cadre de gestion gouvernant la banque ; l assurance que les données et le matériel biologique ne seront utilisés qu aux fins de la recherche en santé ; la garantie qu un CER verra à la protection de sa dignité et de ses droits.

Le sujet qui consent au prélèvement et à la conservation de matériel biologique effectue un don à la recherche. Il en va de même pour celui dont le consentement porte sur un accès à des renseignements personnels. Cependant, le sujet conserve un droit de retrait à l égard du matériel biologique et des renseignements qu il a confiés à une banque, à moins que ceux-ci aient été rendus anonymes. Enfin, la personne à laquelle on confie des données et du matériel biologique n en est pas propriétaire, mais fiduciaire. La législation devrait contenir la notion de don à des fins scientifiques dont voici les caractéristiques : le don à des fins scientifiques concerne des renseignements personnels ou du matériel biologique confiés à des personnes pour les fins de la recherche en santé ; le sujet conserve un droit de retrait à l égard de ce qu il a confié ; l exercice de ce droit de retrait devient impossible lorsque ce qui a été confié est anonyme ou a été rendu anonyme ; la personne à laquelle on confie des données et du matériel biologique n en est pas propriétaire, mais fiduciaire. 11

6 D é f i n i r l e s c o n c e p t s d e «p r o j e t d e r e c h e r c h e», «e x p é r i m e n tat i o n» e t «s o i n s i n n o v at e u r s» o u m o d i f i e r l a r t i c l e 2 1 d u C o d e c i v i l d u Q u é b e c La recommandation qui suit peut être appliquée indépendamment de toutes les autres. Elle ne se limite pas à l utilisation des banques de données et des banques de matériel biologique, et concerne les projets de recherche en général. Elle vise à définir certains concepts de manière à clarifier l application de la loi à la recherche auprès des personnes mineures ou inaptes. Le dispositif de l article 21 du Code civil du Québec se réfère à trois concepts : «projet de recherche», «expérimentation» et «soins innovateurs». En droit, les concepts d «expérimentation» et de «soins innovateurs» occupent une fonction charnière, puisque l intervention projetée obéira à des normes juridiques différentes selon qu elle est qualifiée comme appartenant à la catégorie de l expérimentation ou à celle des soins innovateurs. Or, aucune loi ne définit ni ne décrit les concepts de «projet de recherche», d «expérimentation» et de «soins innovateurs». Les différents acteurs de la recherche en santé, particulièrement les membres des CER, éprouvent des difficultés considérables avec la définition et l application de ces concepts. Ces distinctions juridiques comportent des conséquences majeures concernant l expression du consentement de la personne visée, l évaluation du risque et la nécessité qu un projet de recherche approuvé par un CER encadre l expérimentation visant des personnes inaptes ou des mineurs. Le MSSS ou, à défaut, le FRSQ devrait prendre l initiative de confier à une personne le mandat de produire un document qui rende intelligibles les trois concepts suivants, que contient l article 21 du Code civil du Québec : «projet de recherche», «expérimentation» et «soins innovateurs». La personne mandatée procédera à une consultation des organismes intéressés et suggérera aussi les modifications appropriées à l article 21. 12

www.frsq.gouv.qc.ca Ce document fait état des recommandations du Rapport final du Groupe-conseil sur l encadrement des banques de données et des banques de matériel biologique à des fins de recherche en santé (décembre 2006), disponible dans le site Web du FRSQ. Le genre masculin est utilisé dans le seul but d alléger le texte. Fonds de la recherche en santé du Québec 500, rue Sherbrooke Ouest, bureau 800 Montréal (Québec) H3A 3C6 Téléphone : 514 873-2114 communications@frsq.gouv.qc.ca Mai 2007