PRODUCTIVITÉ DANS LES ÉLEVAGES OVINS ALLAITANTS Comparaison France, Union européenne, Océanie

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Transcription:

> Les synthèses de FranceAgriMer septembre 2014 numéro19 ÉLEVAGE / VIANDES PRODUCTIVITÉ DANS LES ÉLEVAGES OVINS ALLAITANTS Comparaison France, Union européenne, Océanie 12 rue Henri Rol-Tanguy / TSA 20002 / 93555 Montreuil cedex Tél. : +33 1 73 30 30 00 / Fax : +33 1 73 30 30 30 www.franceagrimer.fr www.agriculture.gouv.fr

>

Depuis 2000, le cheptel de brebis a diminué de 24 % (recul respectivement de 3 % et 29 % des cheptels laitiers et allaitants). Sur la même période, la production française d agneaux issus des filières laitière et allaitante, a elle reculé d environ 30 %, la production a donc régressé plus vite que les effectifs. Cet écart est lié à une baisse de productivité 1 de 1 % par an en moyenne, de 2000 à 2013 dans la filière ovin viande. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette érosion : une modification des systèmes de production, un recul des performances techniques, une dégradation des conditions sanitaires suite à des épizooties fréquentes au cours des vingt dernières années (FCO, virus de Schmallenberg, etc.) ou encore une hausse des coûts de l alimentation. Ces facteurs sont susceptibles d affecter différemment les pays producteurs de viande ovine en fonction des systèmes de production dominants dans chacun d entre eux. La productivité des brebis est un des déterminants de la compétitivité de la filière. Orientée à la baisse, elle a réduit le potentiel de production français, toutes choses égales par ailleurs, fragilisant d autant l offre nationale dans un contexte de baisse de la consommation française de viande ovine qui a atteint son niveau le plus bas en 2013, à environ 180 000 tec 2 (3,1 kg/hab./an). Devant ce constat, la filière ovine française a fait de l amélioration de la productivité un point clé de sa stratégie afin de préserver un potentiel de production dans un contexte de diminution du nombre d éleveurs, d agneaux engraissés et de recul des installations. Cette synthèse vise à fournir des éléments d interprétation de l évolution de la productivité en France au cours des dernières décennies. Elle s attachera également à restituer les performances de la filière française par rapport à ses principaux concurrents sur le marché européen et mondial. Figure 1 - Évolution du cheptel de brebis et de la productivité numérique en France de 1990 à 2013 Cheptel de brebis (1000 têtes) 8 000 1,20 7 000 1,00 6 000 5 000 4 000 3 000 2 000 1 000 0,80 0,60 0,40 0,20 Productivité numérique apparente agneau/brebis 0 0 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2013 productivité numérique apparente cheptel de brebis en début d'année (hors agnelles) 0,00 source : FranceAgriMer d'après Eurostat jusqu'en 1997 puis SSP et Douanes 1. Productivité numérique, entendu ici au sens de nombre d agneaux par brebis et par an. 2. Pour plus d informations sur la consommation de viande ovine en France, lire la synthèse N 14 La consommation de viande ovine : une baisse difficile à enrayer LES SYNTHÈSES de FranceAgriMer 2014 / ÉLEVAGE / 1

> Une productivité française en baisse depuis 20 ans Historique d évolution de la productivité en France La productivité numérique apparente en France est passée de 1,1 agneau produit par brebis en 1990 à 0,66 agneau par brebis en 2013. En 20 ans, elle n a cessé de reculer avec une période de forte baisse de 1990 à 1999 (- 30 %). Durant cette décennie, la concurrence des autres pays producteurs s est accrue du fait de : > la libéralisation des échanges internationaux suite aux accords du GATT de 1994 a placé la filière française en concurrence accrue avec des pays comme la Nouvelle Zélande et l Australie plus compétitifs ce qui s est traduit par un développement des importations de viande ovine en provenance de ces pays concurrents. Il en est résulté une diminution de la production française d agneaux (- 6 % entre 1993 et 1995), mais paradoxalement cela n a pas induit d amélioration de la productivité moyenne comme on aurait pu s y attendre (par cessation d activité des élevages les moins performants). > la réforme de la PAC de 1992 et la fin des prix garantis dont l une des conséquences fut la variabilité accrue du prix des aliments. Pour diminuer l impact de cette volatilité, certains éleveurs ont recherché une plus grande autonomie fourragère et ont choisi une conduite moins intensive des cheptels qui a induit une baisse de productivité. Par la suite la productivité s est stabilisée légèrement au-dessus de 0,7 agneau par brebis jusqu en. Cette année là marque le début de la hausse du prix des matières premières incitant les éleveurs à limiter l apport d aliments composés, ce qui a conduit à une baisse du poids des agneaux et à un recul de la prolificité des brebis (moins bon état corporel). À cette même période, en, l OCM unique et le découplage partiel de la prime compensatrice ovine sont mis en place. La France maintient une aide couplée à 50 % pour les ovins et les caprins, mais cette réforme de la PAC, qui uniformise les niveaux d aides pour toutes les filières agricoles, les place en concurrence entres elles. Ce contexte a accéléré la décapitalisation ovine notamment au profit des productions végétales, devenues plus avantageuses dans les régions spécialisées grandes cultures. Depuis, la productivité est restée à son niveau le plus bas, inférieur à 0,7 agneau par brebis, malgré une légère amélioration en - 3 peut être liée à la revalorisation de la prime à la brebis qui a pu favoriser un accroissement des apports de concentrés. La France est passée à un découplage total de la prime compensatrice ovine lors du bilan de santé de la PAC en. Une prime à la brebis est maintenue, à travers l article 68, mais elle n est soumise à aucune condition sur la productivité et ne constitue pas une incitation à améliorer celle-ci dans les élevages. 3. Attention, l enquête cheptel du SSP se fait sur la base d un échantillon réévalué tous les 10 ans. Le dernier rebasement a eu lieu en. Les données de cheptel de 2000 à doivent donc être interprétées avec prudence au fur et à mesure que l on se rapproche de du fait du risque de dérive de l échantillon. Ainsi, la hausse du cheptel et l amélioration de la productivité en / ont pu être surévaluées. Méthodologie Il existe différents indicateurs de productivité, pour cette synthèse le choix s est porté sur des indicateurs synthétiques, pouvant être suivis dans le temps et pouvant être calculés pour l ensemble des principaux pays producteurs d ovins. Trois indicateurs ont été retenus : > La productivité numérique apparente annuelle = nombre d agneaux produits (abattus importés + exportés) / nombre de brebis présentes en début d année (hors agnelles) > La productivité pondérale apparente annuelle = volume d agneaux produits (abattus importés + exportés) / nombre de brebis présentes en début d année (hors agnelles) > Le poids moyen des agneaux produits À noter qu il s agit d indicateurs économiques, qui ne tiennent pas compte de la mortalité des agneaux, des agneaux destinés au renouvellement et des agneaux commercialisés hors circuits traditionnels qui sont nombreux notamment au moment des fêtes de l Aïd. Ces indicateurs ont donc tendance a sous estimer la réalité ce qui n empêche en rien la comparaison entre pays et l analyse des évolutions dans le temps. Systèmes de production et productivité Les systèmes extensifs et pastoraux en ovins viandes, ayant moins de 0,7 UGB/ha de surface fourragère, sont dominants en France et représentent plus de 40 % des exploitations. Cependant, les systèmes intensifs en bergerie et fourrager représentent plus de 20 % des élevages français. Ces systèmes ont une faible autonomie fourragère qui les rend dépendants des évolutions du coût de l alimentation. Il en résulte que les élevages français sont assez sensibles au coût de l alimentation et font varier leur consommation de concentrés. Les coûts de l énergie et des engrais ont également pesé. Tableau 1 - Système fourrager des exploitations françaises ayant plus de 150 brebis (70 % du cheptel) Système fourrager Nombre d exploitations % Total Bergerie 372 4 % Fourrager (>1,4 UGB/ha) 1 374 16 % Herbager (0,7-1,4 UGB/ha) 2 943 35 % Extensif (< 0,7 UGB/ha) 381 5 % Pastoraux 1 904 23 % Pastoraux avec collectifs 1 398 17 % Total 8 372 Source : Institut de l élevage d après Recensement agricole 2 / Productivité dans les élevages ovins allaitants> ÉDITION septembre 2014. /

L indice IPAMPA ovin viande qui reflète le coût de production n a cessé d augmenter depuis. Cette hausse s explique principalement par la hausse des prix des matières premières végétales notamment en et plus récemment en 2013. Le prix de l énergie est également responsable d une partie de cette hausse. Figure 2 - Évolution de l indice IPAMPA ovin viande synthétisant les coûts de production en France 180 160 140 120 100 80 80 60 60 janv. janv-05 base 100 : janv. janv-06 janv. janv-07 janv. janv-08 janv. janv-09 Dans ce contexte, les éleveurs ont intérêt à limiter l utilisation d intrants et à réduire la consommation de concentrés entraînant une baisse du nombre d agneaux par brebis et une baisse du poids des agneaux produits. C est ce qui s est passé par exemple en /2013 après un hiver froid et des coûts de production particulièrement élevés, les éleveurs ont limité l apport d aliments conduisant à un retard dans la finition des agneaux. Les agneaux trop légers ont été reportés début 2013. Les prix à la production, élevés en 2013, n ont pas été suffisamment incitatifs, au regard des coûts, pour encourager les éleveurs à augmenter les apports de concentrés et conduire à une amélioration de la productivité en France. Productivité numérique et pondérale évoluent simultanément Tout comme la productivité numérique, la productivité pondérale apparente en France suit une tendance décroissante depuis plus de dix ans. En 2003, une brebis française produisait en moyenne 13,66 kilogrammes d agneau dans l année contre 13,01 en 2013, soit une baisse de 650 grammes. L évolution de la productivité pondérale apparente est parallèle à celle de la productivité numérique, avec une période de légère janv. janv-10 janv. janv-11 janv. janv-12 janv. janv-13 IPAMPA-Ovins viande Aliments achetés IPAMPA-Ovins viande janv. janv-14 Energie IPAMPA - ovins et lubrifiants viande IPAMPA-Ovins viande Engrais engrais et et amendements IPAMPA IPAMPA aliments achetés IPAMPA-ovins viande énergie et lubrifiants IPAMPA-ovins viande Source : Institut de l Élevage d après INSEE et AGRESTE hausse de 2003 à puis une chute des volumes produits par brebis. Ils restent très faibles depuis à l exception des années / qui ont été plus favorables (production stable pour un cheptel en baisse). Il n y a donc pas de compensation d une baisse du nombre d agneaux par brebis par une hausse du poids des agneaux. Ces deux indicateurs évoluent en fait simultanément. Cette baisse de la productivité pondérale n est pas directement liée à une baisse du poids des agneaux, en effet celui-ci est relativement stable depuis 2000, voire en légère hausse, autour de 17 kg pour les agneaux produits en France et 18 kg pour les agneaux abattus en France. La hausse de presque un kilogramme du poids des agneaux observée de 2000 à 2013 ne contrebalance pas la baisse du nombre d agneaux produits par brebis. Le nombre d agneau produit par brebis recule plus vite que la hausse du poids moyen des agneaux d où une baisse du volume d agneaux produits par brebis. Figure 3 - Évolution de la productivité par brebis en poids et en tête, en France productivité pondérale apparente (kg/brebis) 15,50 15,00 14,50 14,00 13,50 13,00 12,50 12,00 11,50 11,00 2001 2002 2003 2004 productivité numérique apparente productivité pondérale apparente 0,80 0,70 0,60 0,50 0,40 0,30 0,20 0,10 Enfin, la productivité pondérale apparaît directement corrélée aux variations de coûts de l alimentation. En période de hausse des prix des matières premières la baisse du poids des agneaux produits constitue une forme d ajustement pour optimiser le revenu de l exploitation et les éleveurs retardent la sortie des agneaux trop légers. Source : FranceAgriMer d après SSP et Douanes 4 2013 productivité numérique apparente (agneau/brebis) 4. Les douanes ne fournissent plus les importations et exportations d animaux vivants en poids. Les volumes échangés en vifs ont donc été estimés à partir du poids moyen des animaux à l abattage. LES SYNTHÈSES de FranceAgriMer 2014 / ÉLEVAGE / 3

> Union européenne : Disparités entre les pays producteurs du nord et du sud Les pays producteurs d ovins dans l Union européenne se répartissent entre les pays du nord, plutôt orientés vers la production de viande (Royaume-Uni, Irlande, Allemagne), et les pays du sud plutôt orientés vers la production de lait de brebis (Grèce, Italie, Bulgarie). Trois pays européens ont une production mixte lait/viande : la France, l Espagne et le Portugal. Figure 4 : Cheptel de brebis et d agnelles saillies en 2013 dans l Union européenne Part du cheptel de brebis allaitantes dans le cheptel total plus de 80 % de 50 à 80 % moins de 50 % Cheptel total de brebis et d'agnelles saillies (1 000 têtes) Source : FranceAgriMer d après Eurostat Tableau 2 - Comparaison des indicateurs de densité entre les principaux pays producteurs de l UE, Nombre de brebis reproductrices Part des brebis allaitante / Cheptel total brebis/exploitations brebis/ha SPF Part du cheptel compris dans des exploitations de l OTEX 48 Allemagne 1 338 010 99,0 % 60 2,5 78 % Autriche 213 890 99,9 % 15 1,9 69 % Espagne 14 853 250 78,3 % 215 8,2 78 % France 6 533 870 71,2 % 116 5,2 77 % Grèce 6 796 320 4,0 % 74 14,6 64 % Irlande 2 449 550 100,0 % 76 3,5 81 % Italie 6 223 110 17,0 % 122 6,6 90 % Portugal 1 900 410 79,3 % 37 4,6 70 % Royaume-Uni 14 054 650 100,0 % 200 3,2 74 % Source : FranceAgriMer d après Eurostat 4 / Productivité dans les élevages ovins allaitants> ÉDITION septembre 2014. /

L évolution des indices de productivité montre qu en Europe, seules l Allemagne et l Autriche, petits pays producteurs de viande ovine, ont réussi à améliorer leur productivité numérique apparente depuis. Le nombre moyen de brebis par exploitation en Allemagne et en Autriche est parmi les plus bas d Europe (cf. tableau 2). De plus, ces pays ont des taux de spécialisation faibles (part du cheptel détenu par les exploitations spécialisées de l OTEX 48 «ovins, caprins et autres herbivores»). Lorsque la production ovine est associée à une autre activité les résultats économiques sont souvent meilleurs et les éleveurs disposent de marge de manœuvre en cas de hausse des coûts de production pour ne pas affecter leur productivité. C est le cas en Allemagne et en Autriche où l atelier ovin est souvent une activité secondaire de l exploitation. Figure 5 - Indice d évolution de la productivité numérique apparente depuis dans l UE 5 base 100 : 120 110 100 90 80 70 60 50 40 90 80 70 60 50 40 Allemagne France Italie Autriche Grèce Portugal Espagne Irlance Royaume-uni Deux autres groupes de pays se distinguent, ceux qui ont réussi à stabiliser leur productivité numérique depuis à l instar de l Irlande et du Royaume-Uni et ceux qui ont vu leur productivité chuter, la France, l Espagne, le Portugal, la Grèce et l Italie. Les chutes de productivité les plus fortes concernent les pays à orientation laitière alors que les pays mixtes enregistrent une baisse légèrement plus modérée. Les pays spécialisés en ovins viandes dont les systèmes de production sont les plus extensifs (moins de 4 brebis par hectare de surface fourragère) sont également les plus performants. C est le cas de l Allemagne, l Autriche, l Irlande et le Royaume-Uni. En effet, ce sont les systèmes les plus économes en intrants et donc les moins sujets aux variations de coûts de production qui peuvent impacter la productivité des élevages. Source : FranceAgriMer d après Eurostat et Douanes 2013 De à, une baisse de la productivité numérique apparente est observée pour l ensemble des pays producteurs européens. L indice de productivité a perdu entre 1 point pour l Autriche et 60 points pour l Italie qui enregistre la plus forte chute. Cette baisse s explique par une combinaison de plusieurs facteurs. La hausse du prix des matières premières due à la crise de a affecté la productivité dans les pays les plus intensifs notamment ceux à orientation laitière ou mixte. À cette même période, l Europe est touchée par plusieurs épidémies : la fièvre aphteuse au Royaume-Uni en et la fièvre catarrhale ovine en France, Espagne, Grèce, Italie et Portugal. Les prix européens de l agneau lourd étaient en hausse en et mais n ont pas été une incitation suffisante pour améliorer la productivité à cette période. La production européenne semble plus sensible à une hausse des coûts qu à un signal positif envoyé par le marché à travers une hausse des prix de vente. Figure 6 : Prix moyen à la production de l agneau dans l UE 700 650 600 550 500 450 400 350 300 /100 kg 2004 Prix agneaux lourds UE 28 Source : FranceAgriMer d après Commission européenne 2013 Prix agneaux légers UE 28 Depuis, la productivité semble évoluer moins rapidement et se stabiliser à des niveaux différents selon les pays. Le bilan de santé de la PAC en et le passage au découplage total a entraîné une baisse voir un arrêt de la production pour les exploitations les moins compétitives de l Union européenne. Cette baisse de la production a pu être compensée en partie par un gain de productivité chez les producteurs restant. Cependant le renchérissement du prix des intrants à cette période a freiné les efforts des éleveurs. Par ailleurs la saisonnalité de la production est différente selon les pays européens. Certains pays ont choisi de dessaisonner leur production à Pâques au moment où la demande et le prix sont les plus élevés. C est le cas de la France, l Espagne, la Grèce et l Italie. La 5. Cet indice représente l évolution de la productivité numérique apparente des différents pays mais ne présume en rien des niveaux réels de productivité dans chaque pays. LES SYNTHÈSES de FranceAgriMer 2014 / ÉLEVAGE / 5

> France a commencé à dessaisonner sa production d agneaux dans les années 90. Ainsi en 1975 les abattages d agneaux de janvier à avril représentaient moins de 18 % des abattages annuels alors qu en 2013, les quatre premiers mois de l année comptabilisent presque un quart des abattages annuels. Or, le dessaisonnement est une pratique couteuse en intrants (compléments alimentaires, mise en place d éponges, etc.), il peut avoir des effets négatifs sur la prolificité. Ces quatre pays sont également ceux pour lesquels la productivité a le plus chuté depuis. De part ce mode de production, les éleveurs ovins de ces quatre pays sont plus sensibles à une hausse du prix des intrants. Cela est d autant plus vrai que la plus-value réalisée à Pâques grâce à des prix de vente élevés semble de moins en moins évidente du fait d une hausse des disponibilités sur le marché à cette période. En 2013 par exemple, le prix moyen pondéré des agneaux lourds en Europe est resté très élevé jusqu à la fin de l été, moment où l offre est la plus basse, à l avantage des productions saisonnées. Figure 7 - Saisonnalité des abattages d ovins caprins dans l UE - abattages mensuels moyen entre et 2013 1000 tec 35 30 25 20 15 10 5 5 0 0 janvier janvier février février Allemagne France mars mars avril avril mai mai juin juin Italie Autriche Source : FranceAgriMer d après Eurostat juillet juillet aout août septembre septembre Grèce Portugal octobre octobre novembre novembre décembre décembre Espagne Irlande Royaume-Uni Le cas à part de la filière française La productivité infra systèmes en France semble suivre la tendance inverse de ce que l on observe à l échelle européenne : les systèmes de production les plus intensifs bénéficient d une productivité supérieure. D après les réseaux d élevage, en 2013, les élevages ovins viande fourragers intensifs avaient une productivité numérique de 1,32 agneau/brebis alors que les systèmes herbagers enregistraient une productivité moyenne de 1,21. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette différence : > En France, les élevages ovins intensifs, notamment en bâtiment, sont plus favorables à une surveillance efficace au moment de la mise bas. De plus ces éleveurs se sont tournés vers des races moins rustiques et plus prolifiques. Ces élevages restent très sensibles aux prix des concentrés et même si leurs niveaux de productivité sont supérieurs, ils sont les premiers affectés par une hausse des coûts de production comme en et 2013. > En France, les systèmes extensifs bénéficient de montants d aide supérieurs à travers l ICHN (Indemnité Compensatrice du Handicap Naturel), la PHAE, prime à l herbe, et les DPU «herbe» du premier pilier. Ces aides ne sont soumises à aucune condition sur la production et imposent un taux de chargement maximum. Elles pourraient induire un décrochage entre la production et le revenu perçu par le producteur, n incitant pas à une amélioration de la productivité dans les systèmes extensifs. Or le poids de ces aides est, historiquement, plus important en France qu en Irlande et au Royaume-Uni. Cela pourrait expliquer que les systèmes extensifs des autres états membres européens restent dépendants d une plus grande productivité afin d assurer un revenu satisfaisant. Le découplage total des aides ovines a été instauré dès dans les pays anglo-saxons et la tradition libérale a orienté les éleveurs, même les plus extensifs, vers une recherche d une meilleure productivité sur un marché concurrentiel fort. Enfin, l identification électronique ovine est devenue obligatoire en juillet. On ne dispose pas, pour l instant, d assez de recul pour analyser les effets de cette mesure. Le coût supplémentaire engendré par l achat des boucles électroniques pourrait entraîner une baisse voire un arrêt de la production, notamment dans les élevages mixtes pour lesquelles l activité ovine était secondaire et/ ou dans les élevages les plus petits. Les autres pourraient utiliser cet outil pour un meilleur suivi des animaux permettant d améliorer leur productivité. 6 / Productivité dans les élevages ovins allaitants> ÉDITION septembre 2014. /

Océanie : Des gains de productivité du fait d un basculement de la production de laine vers la production de viande Une productivité néo-zélandaise sensible aux disponibilités fourragères et aux aléas climatiques Depuis les années 50, la Nouvelle-Zélande opère un glissement de la production de laine vers la production de viande ovine. Suite à l effondrement du marché de la laine, les producteurs néo-zélandais se sont tournés vers des races plus prolifiques permettant un alourdissement des agneaux et une valorisation bouchère de ces derniers. Cela s est traduit par une augmentation de la productivité importante au cours des dernières décennies. Conséquence de la fin des aides publiques à l agriculture dans les années 80, le cheptel de brebis a diminué fortement pour se stabiliser dans les années 2000 aux alentours des 30 millions de brebis. Parallèlement, les éleveurs ont opéré des gains de productivité jusqu en pour atteindre 0,95 agneau par brebis en moyenne sur l ensemble du pays. Figure 8 - Évolution de la productivité en agneaux en Nouvelle-Zélande de 2003 à 2013 1 1 0,95 0,95 agneau/brebis 0,9 0,9 0,85 0,85 0,8 0,8 0,75 0,75 0,7 0,7 2003 2004 2003 2004 2013 productivité numérique agneaux (dont hoggets) productivité pondérale poids moyen à l'abattage 20 20 18 18 16 16 14 14 12 12 10 10 8 6 4 2 0 De à, divers aléas climatiques ont affecté la production. En effet, les systèmes d élevage ovins néo-zélandais sont plus extensifs que les systèmes européens et donc beaucoup plus sensibles aux épisodes de sécheresse notamment. Un indicent climatique entraine un retard dans la pousse de l herbe et donc dans la finition des agneaux ou dans la prolificité des brebis si cela intervient au moment de la gestation. Depuis 2013, la productivité numérique est de nouveau en hausse, en lien avec l extensification du cheptel suite aux épisodes de décapitalisation. La Nouvelle-Zélande a atteint aujourd hui une Source :FranceAgriMer d après New Zealand Statistics 2013 kg agneau/brebis productivité supérieure à la productivité française (0,96 agneau par brebis en 2013 contre 0,66 en France). La productivité pondérale est aussi en hausse en Nouvelle-Zélande et atteint 17,4 kg d agneaux produits par brebis en 2013. Cela s explique par une hausse du poids moyen des agneaux à l abattage qui est passé de 16,95 kg à 18,13 kg 6 entre 2003 et 2013 du fait à la fois des améliorations génétiques et d une meilleure gestion de l alimentation. Les systèmes à l herbe néo-zélandais permettent de limiter fortement les coûts de production qui peuvent être aussi un frein à la productivité comme cela peut être le cas en période de sécheresse. Les variations de productivité sont liées avant tout au climat et aux disponibilités fourragères. Les tailles de cheptel peuvent être ajustées d une année sur l autre de manière à optimiser le revenu en cas de manque de fourrage ce qui se répercute sur la productivité l année suivante. Les éleveurs néozélandais disposent ainsi de plus de souplesse dans la gestion de leur troupeau sans trop affecter la trésorerie de leur exploitation. Australie : une réorientation de la production encore en cours Figure 9 - Productivité des élevages ovins en Australie depuis 10 ans agneau/brebis 60% % 50% % 40% % 30% % 20% % 10% % 00% % 2002 2003 2004 Productivité pondérale Productivité numérique Source : FranceAgriMer d après FAOSTAT et DAFF-ABARES Poids moyen des agneaux 25 20 15 10 En Australie, la situation est similaire à la Nouvelle-Zélande. Depuis 20 ans une réorientation de la production ovine en faveur de la viande est en cours. Ce phénomène a été encouragé par une chute du prix de la laine et une hausse du prix de la viande d agneaux. 5 0 kg agneau/brebis 6. La Nouvelle Zélande et l Australie produisent certaines années des animaux de reports, appelés «hoggets», pouvant dépasser les 20 kg, quand les conditions climatiques ont entrainé un retard de croissance. LES SYNTHÈSES de FranceAgriMer 2014 / ÉLEVAGE / 7

> Depuis 2002, la productivité numérique n a cessé d augmenter passant de 0,32 agneau par brebis à 0,53 agneau par brebis en 2013. Pour cela, les éleveurs australiens ont à la fois sélectionné des races plus prolifiques, réduit le nombre de béliers et d animaux castrés dans leurs troupeaux afin de libérer des disponibilités fourragères. Les éleveurs australiens ont aussi amélioré la qualité des pâturages et de l aliment composé afin d améliorer la fertilité des brebis. La productivité pondérale a également fortement augmenté grâce à un poids des agneaux qui est passé de 19,9 kg en 2000 à 22,16 kg en 2013. La baisse de la productivité observée en Nouvelle-Zélande de à semble moins marquée en Australie même si on observe un ralentissement. La part de la production de laine reste importante en Australie. 8 / Productivité dans les élevages ovins allaitants> ÉDITION septembre 2014. /

Conclusion et perspectives pour la productivité de la filière ovine La productivité de la filière ovine française a d abord été affectée par la hausse des coûts de production notamment lors de la flambée du prix des matières premières en et plus récemment en 2013. La filière ovine française est parmi les filières européennes les plus sensibles à la volatilité du prix des intrants du fait de systèmes de production dessaisonnés et fortement dépendants de l utilisation de concentrés. Dans l Union européenne, la France et l Espagne sont les pays producteurs de viande ovine dont la productivité a le plus diminué depuis. A l inverse, l Autriche, l Allemagne, le Royaume-Uni et l Irlande ont vu leur productivité s améliorer légèrement au cours des dix dernières années. Ce dynamisme est porté par des systèmes de production plus extensifs plus ou moins spécialisés. L ensemble des producteurs européens ont vu leur productivité ralentir lors des épisodes de crises sanitaires et de crise sur les marchés des matières premières de à. Les réformes successives de la PAC allant vers un découplage des aides et une uniformisation des soutiens entre les filières ont accéléré la décapitalisation dans les élevages les plus vulnérables sans que l on puisse observer de compensation par des gains de productivité chez les producteurs européens restants. En Océanie, le contexte est différent, l amélioration de la productivité au cours des dernières décennies a été portée par la réorientation de la production ovine vers la production de viande. La Nouvelle-Zélande a ainsi atteint des niveaux de productivité apparente similaires à ceux des gros producteurs européens, au-dessus de 0,9 agneau par brebis. Le facteur les plus limitant en Océanie reste les aléas climatiques comme ce fut le cas de à. Les causes du recul de la productivité en France sont donc multiples avec des spécificités régionales. La particularité de la filière ovine française étant une forte sensibilité aux coûts de production même dans un contexte favorable de prix à la production élevés. LES SYNTHÈSES de FranceAgriMer 2014 / ÉLEVAGE / 9

Productivité dans les élevages ovins allaitants / LES SYNTHÈSES de FranceAgriMer / édition 2014 FranceAgriMer / 12 rue Henri Rol-Tanguy / TSA 20002 / 93555 Montreuil cedex tél. : +33 1 73 30 30 00 / www.franceagrimer.fr/ www.agriculture.gouv.fr / Directeur de la publication : Éric Allain Rédaction : unité Produits animaux, pêche et aquaculture / Laurène Jolly Conception et réalisation : FranceAgriMer, service de la Communication et de l information, studio PAO Impression : atelier d impression de l Arborial / Fin de rédaction : août 2014 Sources principales : FranceAgriMer établissement national des produits de l agriculture et de la mer Crédits photos : Pixtal / Droits réservés tous droits de reproduction réservés, sauf autorisation expresse de FranceAgriMer / ISSN 2257-929X