Complications de la pancréatite chronique calcifiante (PCC) et leur prise en charge ( à l exception des pseudo-kystes)



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Transcription:

Complications de la pancréatite chronique calcifiante (PCC) et leur prise en charge ( à l exception des pseudo-kystes) Anne STAUB Tursac 19 octobre 2007

PLAN PCC : définition Complications des 10 premières années Complications après 10 ans Prise en charge de la douleur Conclusion Références

Définition Destruction progressive du parenchyme pancréatique progressivement remplacé par de la fibrose Phénomènes inflammatoires Faisceau d arguments cliniques, d imagerie ( ASP, échographie, TDM, CPRM, écho-endoscopie) et histologiques. Étiologies : alcool (90%), héréditaire (familiale, mucoviscidose), auto-immune, hyperparathyroïdie, tropicale, associée aux MICI, post-radiothérapie, idiopathique.

ECHOENDOSCOPIE Normal CP CP advanced (Nattermann et al., Endoscopy 1993; Buscail et al., Pancreas, 1995 Catalano et al, Sahai et al. Gastrointest. Endosc. 1998)

LES IMAGES encore

Histoire naturelle 0 à 5 ans : pancréatites aiguës ( 40 à 50%) douleurs 5 à 10 ans : pseudo-kystes (20 à 40%) compression VBP (10 à 40%) encore douleurs 10 à 15 ans :calcifications diabète insuffisance exocrine

COMPLICATIONS DANS LES 10 PREMIERES ANNEES

Pancréatite Aiguë (40%) Pseudo-kystes (25-35%) Compression voie biliaire principale (5-20 %) Compression duodénale ( 6 %) Hémorragies Épanchement des séreuses (8%) Syndrome de Weber Christian

Pancréatite Aiguë Mode d entrée dans la PCC : homme de 38 ans, consommation alcoolique >20 g/j, >11 ans chez l homme( >8 ans chez la femme). Calcifications présentes dans 30% des cas. Pseudo-kystes Formation liquidienne par rétention (après rupture canalaire) ou nécrotique. Complications : infection, rupture, hémorragie, pseudo-anévrysmes, compression.

Compression voie biliaire principale 5-20% PCC (VBP) Associée dans 20% des cas à une compression duodénale. Diagnostic : douleur, cholestase (PAL>3N pendant 3 mois) (25%),ictère (25%), absence de prurit.

Compression VBP (2) Para clinique: aspect en queue de radis à la cholangiographie, dilatation des VBIH (64-100%). Complications : angiocholite+/- abcès hépatiques (10%), cirrhose biliaire secondaire (5%).

Compression VBP (3) Traitement endoscopique : dilatation sténose +mise en place de une à plusieurs prothèses plastiques pour calibrer la sténose. Complication : obstruction prothèse par «sludge», échec de la PEC si lésions canaux pancréatiques associées. Traitement chirurgical : dérivation biliodigestive.

Compression duodénale 6% PCC Associée dans 50% des cas à une compression de la VBP. Clinique : douleurs abdominales,vomissements. Compression exercée par un pseudo kyste, l hypertrophie de la tête du pancréas, fibrose avec engainement du duodénum,dystrophie kystique paroi duodénale.

Compression duodénale (2) Dystrophie kystique de la paroi duodénale : pancréas aberrant. Douleur (60%), vomissements (30%), ictère (8%),ulcère hémorragique (5%). Endoscopie : sténose inflammatoire franchissable. Écho-endoscopie :cavités kystiques en dedans de la musculeuse duodénale. Traitement : médical, endoscopique, chirurgical.

Hémorragies Étiologies : pseudo-kystes, hypertension portale segmentaire (HTPS) (15-25%), ulcère gastroduodénal (17%), wirsungorragie. Pas d indication de résection pancréatique. HTPS : pas de traitement prophylactique, sclérose endoscopique en cas d hémorragie digestive par des varices cardio-tubérositaires, indication chirurgicale si pseudo-kyste de la queue du pancréas associé.

Fistules pancréatiques Avec la grande cavité péritonéale et la plèvre : épanchement des séreuses. Avec la circulation veineuse portale : syndrome de Weber-Christian : lésions cutanées crête tibiale, lésions osseuses et articulaires, lipasémie >20N.

Épanchements des séreuses 8,2% des PCC Physiopathologie: rupture d un pseudo kyste ou d un canal pancréatique avec constitution d une fistule. Épanchement riche en protides, riche en enzymes pancréatiques ( amylase>3 fois l amylase sanguine). Ascite+++ Pleurésie, plus rarement péricardite

Prise en charge des fistules pancréatiques Nutrition Analogues de la Somatostatine Fermeture de la fistule Chirurgie D. O Toole, P. Lévy Hôpital Beaujon Gastroenterol Clin Biol 2007;31;686-693 «Diagnostic and management of pancreatic fistulae resulting in pancreatic ascitis or pleural effusions in the era of helical CT and magnetic resonance imaging» 16 patients, 13 hommes, 15 PC OH, 42 ans De Mars 2001 à Décembre 2003

COMPLICATIONS APRES 10 ANS

Insuffisance pancréatique exocrine (30%) Insuffisance pancréatique endocrine (75%) Maladie hépatique associée ( 20%) Adénocarcinome pancréatique (5%)

Insuffisance pancréatique exocrine (IPE) Apparaît en moyenne 8 ans après le début de la PCC alcoolique, 15 ans non alcoolique. Révèle 38% des PCC non alcooliques. Définie par une stéatorrhée>7 g/24 heures, corrigée ou partiellement diminuée par la prise d extraits pancréatiques per os. Physiopathologie : malabsorption des graisses,des vitamines liposolubles, du cholestérol,de l amidon, des protéines, de la vitamine B12 (par l intermédiaire du déficit en trypsine).

Insuffisance pancréatique exocrine (2) Corrélation inverse entre la douleur et l IPE. Pas de corrélation entre l apparition de calculs et l IPE. Clinique : diarrhées, syndrome anémique, tétanie, hémorragie. Traitement :régime hyperprotéiné, extraits pancréatiques per os à prendre pendant les repas, 25000 unités de lipase pancréatique par repas +/- IPP.

Insuffisance pancréatique endocrine Troubles glycorégulation : 25% à 5 ans 65% à 10 ans 80% à 15 ans Diabète : 12% à 5 ans 24% à 10 ans 36% à 15 ans Physiopathologie : diabète pancréatoprive

Insuffisance pancréatique endocrine (2) Clinique : accidents hypoglycémiques fréquents (alcool++), rares acidocétoses ( rôle du glucagon). Traitement : régime normocalorique normoglucidique puis antidiabétiques oraux puis insuline. Complications : rétinopathie et néphropathie = diabète I, incidence microangiopathie <diabète I. Facteurs de risque d apparition du diabète : pancréatectomie distale(>dpc), calcifications précoces.

Adénocarcinome pancréatique Probabilité de développer un adénocarcinome pancréatique en cas de PCC : 2% à 10 ans, 4% à 20 ans Risque relatif/population générale=22 à 5 ans, 16 à 10 ans, 1 à 15 ans Aucun bénéfice à l organisation d un dépistage de masse chez les PCC Rôle confondant du tabac

Maladie hépatique associée Durée de consommation alcoolique cirrhose>pcc 13 à 30% PCC présentent une cirrhose associée 9 à 16 % des hépatopathies présentent une PCC

PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR

Étiologies Pancréatite aiguë Sténose du Wirsung ou duodénale Calcul Inflammation péri-neurale Pseudo-kystes Ulcère gastro-duodénal Artérite mésentérique

Prise en charge Arrêt définitif de l alcool. Enzymes pancréatiques pendant 8 semaines + IPP. Antalgiques. Endoscopie : prothèse pancréatique, biliaire, extraction de calculs. Neurolyse : radiologique, sous écho-endoscopie. Chirurgie de dérivation pancréatique, digestive, biliaire.

Comparaison endoscopie/chirurgie 1 étude randomisée New England Journal of medicine, Djuna L.,Marco J. Bruno,feb 2007;356:676-84 Patients : endoscopie (CPRE) : 19 chirurgie(pancréato-jéjunostomie) : 20 Suivi prospectif sur 24 mois. Supériorité significative de la chirurgie sur le score de douleur de Izbicki, la santé physique, le nombre de procédures.

CONCLUSION Les deux problèmes principaux que posent la PCC sont la poursuite de l intoxication alcoolique et la prise en charge de la douleur. Décision thérapeutique multi-disciplinaire. Ne pas négliger la prise en charge socioprofessionnelle du patient.

REFERENCES Encyclopédie médico-chirurgicale :»Histoire naturelle de la pancréatite chronique» P. Lévy,P. Ruszniewski, service de gastro- entérologie et pancréatologie Hôpital Beaujon HGE, MASSON,S. Naveau, A. Balian, G. Petermuter HGE médicale, VERNAZOBRES A. Balian