PRATIQUE DE L IMAGERIE DU RACHIS Morlaix le 17 septembre 2015 Frédéric Busson Ronan Bourlès
Préambule De quelle technique d imagerie disposonsnous? 1. La radiologie standard 2. La tomodensitométrie ou scanner 3. L IRM 4. La scintigraphie et plus rarement la TEP
La radiologie standard C est la méthode classique de débrouillage dans la rachialgie ou la rachi-radiculalgie commune. Elle est facilement lisible, permet de visualiser rapidement des lésions dégénératives et de faire un bilan statique. Un rachis lombosacré + bassin sont côtés 100 euros, un rachis cervical 50 euros. Pour les cabinets de ville de Morlaix et Carhaix, la radiologie du rachis représente 2000 examens par an.
La tomodensitométrie C est l imagerie en coupe de proximité, que l on peut obtenir dans un délai raisonnable: 7 à 10 jours à la Clinique de la Baie. Le rachis représente 20 % de l activité du scanner de la clinique, un examen lombosacré ou cervical est côté 133 euros, L irradiation est 7 fois celle délivrée lors d un bilan radiologique standard. C est le «gold standard» pour le rachis dégénératif et le canal lombaire étroit, les articulaires postérieures sont parfaitement visibles et permettent d évaluer la sténose transverse contrairement à l IRM. Les disque et donc les hernies sont parfois plus difficile à visualiser, notamment dans les surcharges pondérales.
L IRM C est l imagerie de référence du disque mais aussi des processus inflammatoires et tumoraux, les processus arthrosiques sont moins bien évalués qu au scanner. Les délais sont problématiques et empêchent son utilisation à bon escient. Un examen rachidien est côté 69 euros plus 173 euros de forfait technique. Il n existe pas d irradiation. La scintigraphie et le TEP scan ont des indications très spécifiques notamment en cancérologie.
Plusieurs pressions s exercent sur le médecin prescripteur Le patient veut savoir et les radiologies standards vont lui paraître ringardes, surtout quand le radiologue va lui dire qu il ne voit pas les disques dans son idée plus l examen est sophistiqué plus il est rentable. Les tutelles veulent limiter la réalisation d examens onéreux et inutiles.
Le propos de cette soirée est de donc de tenter de vous proposer un guide-line simple, adapté aux situations les plus fréquentes de pratique quotidienne. Les participants se regroupent en plusieurs tables avec un rapporteur.
Contextes cliniques ou l imagerie s impose d emblée
La lombalgie fébrile : suspicion de spondylodiscite L imagerie de référence est l IRM du fait de l absence de traduction radiologique et scanographique.
Antécédent de néoplasie connu On suspecte un(des) tassement(s)secondaire(s) La technique de référence est l IRM, le scanner risquant de sousestimer les lésions.
3 - Traumatisme vertébral Même mineur chez la personne âgée. Le bilan radiologique standard est souvent suffisant. Une imagerie en coupe peut être secondairement prescrite en cas de suspicion d atteinte neurologique ou dans un contexte de néoplasie connue.
La sciatique d emblée compliquée avec déficit moteur ou sensitif. La sciatique de l enfant. Corticothérapie prolongée. Âge supérieur à 55 ans?
Dans les autres cas Hiérarchiser sa stratégie n est pas si simple : Mr Yves Prigent, commercial de 45 ans, soulevant un carton de son coffre, ressent une violente douleur lombaire s accompagnant de tiraillements de la fesse gauche et de quelques fourmillements du talon. Il souhaite être rapidement guéri, d autant que son voisin a selon lui trainé; son médecin lui ayant parlé de sciatique alors qu après une IRM on a mis en évidence une «volumineuse hernie discale avec conflit disco radiculaire nécessitant un avis neuro-chirurgical». Que faites-vous?
Préambule illustré: rappel sur l évolution naturelle de la hernie discale Stade rachialgique : émergence de la hernie, l annulus fibrosus se fissure et le nucléus pulposus commence à s extérioriser.
Stade rachi-radiculalgique : la hernie s est extériorisée et entraine une compression radiculaire.
Stade radiculalgique : le nucléus pulposus (fragment discal exclu) s extériorise dans l espace péridural en continuant à exercer une compression radiculaire sus ou sous jacente en fonction de sa migration. Disparition des symptômes progressive : le fragment discal est progressivement phagocyté et disparaît.
Nous devons tenter de répondre aux questions suivantes: Existe-t-il un parallélisme entre intensité des symptômes et importance des lésions radiologiques? Quelle est la fréquence des anomalies asymptomatiques? Quelle est la fiabilité diagnostique de l interrogatoire et de l examen clinique? Quelle différence de rentabilité entre scanner et IRM? Faut-il une imagerie spécialisée avant des infiltrations?
Existe-t-il un parallélisme entre intensité des symptômes et importance des lésions radiologiques? Quelle est la fréquence des anomalies asymptomatiques? E. Legrand (Angers) a suivi plus de 300 femmes atteintes d un cancer du sein. Les radiographies initiales retrouvaient plus de 93% de lésions dégénératives (discarthrose, arthrose articulaire postérieure ). Dans les 3 ans suivants, plus de la moitié des femmes déclaraient un ou plusieurs épisodes lombalgiques sans aucune relation entre lésions radiologiques et plainte douloureuse et aucune différence radiographique entre lombalgiques et non lombalgiques. JBJS 1990 : IRM de patients asymptomatiques 20 à30 % avec hernie discale 20 % avec canal lombaire étroit 35 % avec dégénérescence discale
Autio (Spine 2004) a suivi par IRM, le volume discal de 74 hernies discales: à 24 mois leur volume moyen avait diminué de 66 % (certaines avaient disparues, d autres persistaient sans rapport direct avec l évolution clinique, les grosses hernies et/ou exclues rétrocédant plus que les autres)
Quelle est la fiabilité diagnostique de l interrogatoire et de l examen clinique? L interrogatoire et quelques signes simples (raideur et Lasègue) sont très évocateurs d une sciatique d origine discale et prédisent à 74 % l existence d une hernie discale (Vucetic Clin Orth Res 1996).
Différence de rentabilité entre scanner et IRM Le scanner facilement disponible (7 à 10 jours de délai, 0 à 24 h si demande médicale urgente) Irradiant Parfois difficile d interprétation dans la pathologie strictement discale avec possibilité de méconnaître un fragment discal exclu (surcharge pondérale) Moins cher que l IRM Examen de référence dans la pathologie dégénérative pour rechercher un canal lombaire étroit ou une sténose canalaire latéralisée L IRM Demande un délai important d obtention N entraine pas d irradiation Examen de référence dans la pathologie discale et/ou inflammatoire Minore les sténoses canalaires Plus cher que le scanner
Faut-il une imagerie spécialisée avant des infiltrations? ANAES 2000 : «Les examens d imagerie permettant la mise en évidence du conflit discoradiculaire ne doivent être prescrits que dans le bilan précédant la réalisation d un traitement radical.» «Il n y a pas lieu de demander d examen d imagerie sauf quand les modalités du traitement (manipulation et infiltration) nécessitent d éliminer une lombalgie symptomatique dans les 7 premières semaines d évolution d une lombalgie ou lombo-sciatique commune.»
Conclusion
Finalement : à quoi servent les examens complémentaires dans la pathologie rachidienne?
A rien Ou pas grand chose!!
Hormis dans les cas «graves»
Ils peuvent vous rassurer en confortant votre diagnostic (ou le réorienter) Ils rassurent également (parfois) le patient
Mais les anomalies rencontrées Ne sont pas forcement symptomatiques N ont pas de valeur pronostic Ne commandent pas la stratégie du traitement médical, leur évolution «anatomique» n est pas parallèle à la clinique
Accessoirement A enrichir toujours plus les radiologues
Et surtout les rhumatologues!