Le point de vue de l examen EMG dans les affections neuromusculaires

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Transcription:

Le point de vue de l examen EMG dans les affections neuromusculaires Emmanuel Fournier Département de Neurophysiologie clinique Hôpital La Salpêtrière, Paris

Introduction Une enquête sémiologique Recherche d un substrat électrique aux signes cliniques Recherche d anomalies électrophysiologiques qui puissent rendre compte des plaintes fonctionnelles et les objectiver Enquête «explicative», subordonnée aux plaintes du patient Examen sémiologique approfondi avec un appareillage et non «passer un malade en machine» Prolongement de l examen clinique avec des outils plus performants Permettant de dissocier des pathologies cliniquement semblables Recherche d arguments électrophysiologiques en faveur ou à l encontre des hypothèses diagnostiques initiales Poser des questions, hypothèses et stratégies diagnostiques Stratégie d examen non standardisée (mais les techniques oui) Jeu d hypothèses et d interprétation : recherche d anomalies = de signes à interpréter

Panoplie des techniques et divisions de l examen EMG Techniques de stimulo-détection : par électrodes de surface visent à apprécier le nombre global de fibres fonctionnelles dans un muscle ou un nerf Étude de la conduction nerveuse motrice Étude de la conduction proximale : ondes F, réflexes H Étude de la conduction nerveuse sensitive (Étude de la transmission neuromusculaire) Techniques de détection : à l aiguille visent à étudier l organisation fonctionnelle des unités motrices dans une petite région du muscle EMG proprement dit (Électromyographie en fibre unique ou SF-EMG)

Étude de la conduction nerveuse motrice

Principes d étude de la conduction motrice Stimulation du nerf ulnaire (cubital) au poignet : supramaximale pour pouvoir évaluer le nombre de fibres nerveuses fonctionnelles Enregistrement de la réponse musculaire : diff. de potentiel entre deux électrodes : active sur le muscle référence sur le tendon réponse motrice = PAMC = potentiel d action musculaire composé : somme des pot d action musculaires provoqués par la stimulation nerveuse

Stim. proximale S2 Stim. distale S1 Paramètres mesurés LD : latence distale VCM : vitesse de conduction motrice A1 : amplitude (par stimulation) distale A2 : amplitude (par stimulation) proximale d (mm) Amplitude distale (N : 6-10 mv) Réduction : dégénérescence axonale Rapport d amplitude A2/A1 (N : 100%) Réduction : bloc de conduction Latence distale (N : 3-4 ms) Augmentation : démyélinisation distale dt (ms) VCM = d / dt (N : 50-60 m/s) Réduction : démyélinisation segmentaire

Bloc de conduction nerveux Paralysie radiale BC : 80% Notion liée au déplacement du point d application du courant le long des nerfs La lésion fonctionnelle est suffisante pour suspendre pendant quelques mois la conduction de l'influx nerveux au niveau du point comprimé sans dégénérescence ni altération des capacités de réponse du segment périphérique du nerf Notion longtemps négligée (ne s intègre pas dans une pensée anatomo-clinique) Changement de place dans les années 80 : explication du déficit moteur dans des affections comme le syndrome de Guillain-Barré individualisation d entités patho. nouvelles, telles que les NP sensitivo-motrices à blocs persistants et les NP motrices multifocales Compréhension physiopathologique : bloc par démyélinisation ou inexcitabilité membranaire

Illustration de diagnostics différentiels

Étude étagée normale A 1 LD A 2 /A 1 VCM = d 2 /dt 2 dt 2 A VCM = d 3 /dt 3 /A 2 3 dt 3 A 4 /A 3 VCM = d 4 /dt 4 d 1 (standardisée) dt 4 A 5 /A 4 VCM = d 5 /dt 5 dt 5 d 2 d 5 Limite : pas d étude plus proximale (racines) d 3 d 4

Stimulation monopolaire

Atteinte du cubital au coude Ralentissement 38 m/s et bloc de conduction 44% Fournier, E.M.Inter 2008

Atteinte plexique inférieure défilé cervico-brachial (côte cervicale, apophysomégalie C7) plexite radique envahissement cancéreux neuropathie à blocs 1 2 3 4 5 Ralentissement 35 m/s et bloc de conduction 81 % Fournier, E.M.Inter 2008

Perte axonale Atteinte proximale : radiculaire ou motoneuronale (SLA) Mais aussi atteinte tronculaire ou distale avec dégénérescence Droite Gauche 5,2 mv 22,3 mv Réduction d amplitude - 77%

Neuropathies démyélinisantes 1 héréditaires CMT 1 ou acquises IgM anti-mag Allongement de latence distale 9 ms Ralentissement 19 m/s Ralentissement 19 m/s

Neuropathies démyélinisantes 2 Polyradiculonévrites Neuropathies multifocales sensitivo-motrices (Lewis-Sumner) ou motrices pures Ralentissement 13 m/s et bloc de conduction 91 % Bloc de conduction 100 % Fournier, Lavoisier 2013

Bloc/dispersion temporelle anormale Durées doublées (+95%) Amplitudes réduites Médian Surf -73% : BC Réduction d amplitude et de surface > 20 % Cubital Surf -3% : disp. Réduction d amplitude > 20 % Réduction de surface < 20 %

Étude de la conduction proximale Ondes F, réflexe H

Réponses tardives : ondes F, réflexes H Etude de la conduction motrice recueil musculaire corps-tendon stimulation nerveuse Mise en évidence de réponses tardives amplification intensité de stimulation amplification

Réflexe H : circuit du réflexe tendineux H : Hoffmann 1922

Réflexe H : caractéristiques M Max Apparition à faible intensité Disparition à forte intensité collision Forme et latence constantes H Max

Onde F F : décharge antidromique de 1 (ou 2) UM

Onde F : caractéristiques Apparition à forte intensité faible probabilité d apparition Décharge d une (ou 2) UM Forme et latence variables Répéter la stimulation Choisir la plus précoce pour les mesures

Paramètres mesurés Latence F M F F - M Latence F à partir d un point distal? Peu sensible : fonction de la longueur du membre (x 2) Non spécifique de la conduction proximale : n importe quel ralentissement distal (canal carpien ) allonge la latence F Redondant avec l étude de la conduction motrice (qui est plus précise) En pratique : peu utile au diagnostic Préférer une F par stimulation proximale et mesurer plutôt l intervalle F-M Spécifique de la conduction proximale En amont des ralentissements distaux Plus sensible (plus courte distance) Transformer la latence en vitesse de conduction proximale (VCP) pour s affranchir du facteur distance

Conduction F C8-D1 médian-thénariens LD VCM F M d x 2 F - M VCP Calcul d une VC proximale (VCP) amplifier la F sur une piste 3 (=2 bis) Mesurer la distance d : stimulation au coude - épineuse C7 VCP = d x 2 / (F M) Moyenne : 62 m/s, Normale > 52 m/s LD VCM Comparaison aux VCM dans les segments plus distaux VCP > VCM de 2-3 m/s Plus gros calibre des fibres Température plus élevée

Conduction F L5 SPE-pédieux d : distance creux poplité point de réflexion médullaire (myotome L5 = niveau D12-L1) d x 2 = taille du sujet (en mm) x 0,8 VCP = d / (F M) S 3 S 2 Moyenne : 55 m/s, Normale > 45 m/s S 1 VCP > VCM de 2-3 m/s

Réflexe H S1 SPI-soléaire d : distance creux poplité point de réflexion médullaire (myotome S1 = niveau D12-L1) d x 2 = taille du sujet (en mm) x 0,8 VCP = d / (H M) Moyenne : 57 m/s, Normale > 50 m/s VCP > VCM de 2-3 m/s

Diminution de VCP : PRN VCM : 38 m/s VCM : 28 m/s VCP : 28 m/s VCP : 22 m/s

Étude de la conduction nerveuse sensitive

Étude de la conduction sensitive Amplitude (N : 10-20 μv) Réduction : dégénérescence axonale 38 μv dt 9 μv VCS = d / dt (N : 50-60 m/s) Réduction : démyélinisation distale Ralentissement de conduction et diminution d amplitude Limite : étude des grosses fibres (pas des fibres fines)

Position de l électrode de stimulation 22 μv 6 μv

Anomalies des potentiels sensitifs VCS = 51 m/s VCS = 52 m/s Ampli = 38 μv VCS = 38 m/s VCS = 31 m/s Ampli = 9 μv Diminution de VCS Diminution d amplitude L amplitude reste normale dans les cas suivants : Atteinte radiculaire préganglionnaire Bloc de conduction proximal Atteinte des petites fibres

Examen EMG de détection (à l aiguille)

EMG normal - 1. Repos Unité motrice : un motoneurone et toutes les fibres musculaires qu il innerve Repos du motoneurone = repos des fibres musculaires Normal : pas d activité EMG de repos

EMG normal - 2. Contraction faible Tracé simple un potentiel d unité motrice battant à faible fréquence 14 Hz Mesure du PUM amplitude (mv) durée (ms) forme 0,5 à 1,5 mv 1,8 à 2,3 ms

EMG normal - 3. Contraction forte Recrutement temporo-spatial accélération des PUMs nouveaux PUMs Tracé interférentiel

EMG d un muscle neuropathique

Atteintes neuropathiques - 1. Repos Fibrillation : potentiels de fibre musculaire fibres musculaires coupées de leur innervation Dépolarisation, insertion de canaux Na+ dans les atteintes aiguës (trauma...) après un délai Pointes positives ou Potentiels lents de dénervation (PLD)

Atteintes neuropathiques 2. Contraction volontaire Tracé «neurogène» pauvre simple accéléré manque d unités motrices fonctionnelles avec accélération compensatoire

Atteintes neuropathiques Signification d un tracé pauvre Tracé pauvre = manque d unités motrices fonctionnelles Dégénérescence axonale (+/- fibrillation et réduction d amplitude des réponses motrices en stimulo-détection) Bloc de conduction (+/- blocs en stimulo-détection)

Atteintes neuropathiques - 3. Analyse des PUMs Récupération par réinnervation collatérale Potentiels polyphasiques Grands potentiels > 5 mv Potentiels géants > 10 mv Augmentation de taille des PUMs amplitude et durée augmentation du nombre de fibres musculaires par unité motrice parfois sans amyotrophie ni réduction d amplitude des réponses motrices 13 mv 3,8 ms

EMG d un muscle myopathique

EMG myopathique -1. Repos Fibrillation potentiels de fibre musculaire dans les atteintes aiguës ou évolutives myosites, rhabdomyolyse

Autres activités de repos spontanées Salves myotoniques dysfonction des canaux ioniques membranaires provoquées Salves pseudo-myotoniques fibrillation rythmique dans les atteintes chroniques

Atteintes myopathiques (1) Contraction volontaire Tracé «myogène» microvolté trop riche pour la force (compensatoire du désordre initial) conséquence indirecte du manque de fibres fonctionnelles

Atteintes myopathiques (2) Réduction de taille des PUMs durée (et amplitude) manque de fibres musculaires fonctionnelles par unité motrice 0,8 à 1,2 ms

Place et indications des différentes techniques Stratégies générales d exploration 18

Trois situations principales de diagnostic EMG Troubles moteurs et sensitifs localisés : atteinte d un nerf ou d une racine Troubles moteurs et sensitifs étendus : neuropathies Troubles moteurs purs : myopathies, syndromes myasthéniques ou atteinte des motoneurones

I. Atteinte d un nerf ou d une racine Signes cliniques moteurs (faiblesse) et sensitifs (anesthésie, fourmillements ) localisés dans le territoire du nerf ou de la racine Questions : lequel? où? à quel degré? Rôle de l EMG : localisation de l atteinte évaluation du degré d atteinte (perte axonale?) indications chirurgicales Causes : Mécaniques : traumatisme, compression (hernie discale), étranglement canalaire Vasculaires : ischémie, vascularite Autres : tumeur, lèpre

Exploration d une atteinte d un élément nerveux (nerf ou racine) Étude de la conduction nerveuse motrice 3 nerfs au moins Nerf touché : diminution VCM au site de lésion (localisation) + ou diminution d amplitude (si perte axonale : gravité) Nerf voisin : normal Nerf controlatéral Étude de la conduction nerveuse sensitive 3 nerfs au moins Idem Nerf touché : diminution VCS au site de lésion (localisation) + ou diminution d amplitude (si perte axonale : gravité) Examen EMG (à l aiguille) 2 muscles au moins Muscle en aval de la lésion : pauvreté en PUM (+ fibrillation si dénervation) Muscle en amont : tracé normal (localisation)

II. Neuropathies : atteintes de plusieurs nerfs Signes cliniques, troubles moteurs (faiblesse) et sensitifs (fourmillements, engourdissements ) dans des territoires nerveux multiples ou diffus Causes : Métaboliques : diabète Toxiques : alcool, chimiothérapie, médicaments Infectieuses : diphtérie, sida, lèpre Immunitaires : syndrome de Guillain-Barré, CIDP Vasculaires : vascularites Héréditaires : CMT Buts de l EMG Topographie de l atteinte : multi-tronculaire (certains troncs nerveux seulement = neuropathies multiples), symétrique (tous les troncs nerveux = polyneuropathies, PRN ) Évaluation de la gravité (perte axonale) Physiopathologie de l atteinte primitive : axonale/démyélinisante Indications de traitements médicaux

Stratégie d exploration d une neuropathie Étude de la conduction nerveuse motrice 8 nerfs Membres supérieurs : 2 nerfs médians (sus coude) avec étude F 2 nerfs cubitaux (sus clavicule) Membres inférieurs : 2 nerfs SPE (sus col) avec étude F 2 nerfs SPI (poplité), avec étude H Étude de la conduction nerveuse sensitive 8 nerfs Membres supérieurs : 2 nerfs médians Au moins 1 nerf cubital et 1 radial Membres inférieurs : 2 nerfs musculocutanés 2 nerfs suraux Examen EMG proprement dit (à l aiguille) 4 muscles Membres supérieurs : 2 muscles interosseux Membres inférieurs : 2 muscles jambiers

Gravité et physiopathologie de la neuropathie Gravité : signes de perte d axones fonctionnels Réduction d amplitude des réponses motrices Réduction d amplitude des potentiels sensitifs Signes EMG de dénervation - réinnervation Présence d altérations de conduction dans les neuropathies démyélinisantes Blocs de conduction, dispersions temporelles Ralentissements de conduction focaux ou diffus Allongement des latences distales Interprétation de la perte axonale? Neuropathies primitivement démyélinisantes avec perte axonale secondaire Neuropathies primitivement axonales = diagnostic par défaut quand l examen n a pas mis en évidence de signes de démyélinisation primitive

II. 1 Neuropathies avec perte axonale

Neuropathies avec perte axonale Syndrome EMG Signes de perte d axones fonctionnels Réduction d amplitude des réponses motrices, quel que soit le point de stimulation Réduction d amplitude des potentiels sensitifs Réduction du nombre de PUMs sur les tracés EMG (Signes EMG de dénervation - réinnervation) Réduction minime et homogène des VCM VCM > 35 m/s aux membres supérieurs VCM > 30 m/s aux membres inférieurs Absence d altérations de conduction focales

Corrélations conduction/lésions anapath. Répartition des VC des fibres dans un nerf VC des fibres les plus rapides : 57 m/s Mb Sup 50 m/s Mb Inf VC des fibres les plus lentes : 40% au-dessous des plus rapides Une perte axonale majeure peut réduire les VCM de 40 % : 35 m/s Mb Sup 30 m/s Mb Inf Critères de démyélinisation Ampli. distale Mb Sup Mb Inf Normale < 40 m/s < 35 m/s Nb < Normale < 35 m/s < 30 m/s 36 m/s 60 m/s VC (m/s)

Neuropathies axonales primitives (sans altérations de conduction visibles ) Asymétriques, multi-tronculaires : Neuropathies multiples axonales Vascularites (PAN, cryoglob ), Lymphome Sarcoïdose, cryoglobulinémie (hépatite C) Lèpre, Diabète, Symétriques : Polyneuropathies sensitivomotrices axonales Acquises : diabète, alcool, iatrogènes (chimiothérapies), paranéo., Héréditaires : CMT axonal (type II), mitochondriopathies Aiguës : Guillain-Barré axonal, porphyrie, amylose, PAN, lymphome, myélome, POEMS, métaux lourds,

Questions de stratégie

Neuropathies axonales sensitives pures (sans altérations de conduction visibles ) Ganglionopathie Paranéoplasique (Ac anti-hu) Sd de Gougerot-Sjögren, maladie coeliaque, cirrhose biliaire primitive Toxiques : cisplatine, vitamine B6 Friedreich, cytopathie mitochondriale Dysimmunitaire anticorps anti-gd1b Neuropathie sensitive axonale Diabète Amylose Lèpre Héréditaire : Thévenard, Tangier, Fabry Carentielle : alcool Ciguatera Gougerot-Sjögren

II. 2 Neuropathies avec ralentissement de conduction homogène

Neuropathie avec ral. de conduction homogène Diagnostic EMG Ralentissements de conduction Réduction marquée des vitesses de conduction VCM < 35 m/s aux membres supérieurs VCM < 30 m/s aux membres inférieurs Allongement des latences distales Absence d altérations de conduction focales Absence de signes de perte d axones fonctionnels (sauf si perte axonale secondaire) Amplitudes motrices distales normales Absence de pauvreté en PUMs des tracés EMG Absence de signes EMG de dénervation - réinnervation

LD : 9,8 ms VCM : 20 m/s CMT 1A LD : 12 ms Neuropathie avec ralentissements de conduction homogènes Neuropathies primitivement démyélinisantes Aiguës : certaines formes de Sd de Guillain-Barré (15 jours ou plus) Dysimmunitaires : gammapathie IgM anti-mag Héréditaires : CMT 1 (PMP-22, P0 ), leucodystrophies Axonales ou axono-myéliniques VCM : 29 m/s IGM anti-mag métaboliques : IRC (dialyse), diabète Paranéoplasique avec Ac anti-cv2/crmp5 POEMS chloroquine Éventuellement sans faiblesse musculaire

II. 3 Neuropathies avec altérations de conduction multifocales

Neuropathies avec alt. de conduction multifocales Syndrome EMG Présence d altérations de conduction Bloc de conduction focal, avec tracés EMG pauvres en PUMs en aval Dispersion temporelle focale Ralentissement de conduction focal (hétérogénéité) Présence de signes de dégénérescence axonale (si perte axonale secondaire) Réduction des amplitudes motrices et sensitives distales Signes EMG de dénervation - réinnervation

Neuropathies avec alt. de cond. multifocales Polyradiculoneuropathies démyélinisantes Inflammatoires aiguës : Guillain-Barré, diphtérie Chroniques : CIDP, prolifération lympho-plasmocytaire Waldenström, myélome, POEMS, lymphome Neuropathies sensitivo-motrices multiples Altérations de conduction en dehors des points de compression : inflammatoires (Lewis et Sumner), lymphomes, lèpre, Recklinghausen, Altérations de conduction aux points de compression : Hypersensibilité à la pression (HNPP, délétion PMP-22) Limite : invisibilité des blocs si perte axonale évoluée

III. Troubles moteurs purs : myopathies, syndromes myasthéniques ou atteinte des motoneurones

III. Atteintes motrices pures Signes cliniques moteurs (faiblesse) sans troubles sensitifs touchant des muscles diffus ou localisés Rôle de l EMG : topographie de l atteinte : proximale, distale physiopathologie de l atteinte : atteinte des motoneurones, des muscles ou de la jonction neuromusculaire? indications de traitements médicaux Exemples d atteintes motrices neuropathiques : Dysimmunitaires : NMM Infectieuses : polio Métaboliques : saturnisme Génétiques : CMT spinal Dégénératives : SLA

Exploration d une atteinte motrice pure Étude de la conduction nerveuse motrice 4 à6 nerfs Réduction d amplitude des réponses motrices Sans altérations de conduction focales, sauf +++ NP motrices à blocs Étude de la conduction nerveuse sensitive 2 à 4 nerfs Normale (sauf neuropathie infraclinique) Examen EMG proprement dit (à l aiguille) 4 à 8 muscles Pauvreté des tracés et grands potentiels : atteinte des motoneurones Richesse excessive des tracés et réduction de taille des PUM : myopathies Épreuves fonctionnelles 3 à8 couples nerfs/muscles Décrément à la stim. répétitive 3 Hz : syndromes myasthéniques Décrément aux tests d effort : canalopathies musculaires

Neuropathies motrices et motoneuronopathies manque d unités motrices fonctionnelles NP motrices avec atteinte centrale associée Sclérose latérale amyotrophique (SLA) NP motrice avec atteinte sensitive infraclinique Maladie de Kennedy (Atrophie bulbo-spinale liée à l X ) NP motrice multifocale avec blocs de conduction NP motrice sans bloc ni atteinte sensitive associée NP motrice aiguë : Guillain-Barré axonal moteur (AMAN) NP motrices post-radiques, toxiques (saturnisme), métaboliques (gangliosidoses à GM2) Atteinte médullaire focale : ischémie médullaire, syringomyélie, maladie de Hirayama Séquelles de poliomyélite Amyotrophies spinales proximales (maladie de Werdnig-Hoffmann, ) ou distales (CMT spinal)

Place de l examen EMG dans la prise en charge des neuropathies Principaux objectifs et apports Asseoir le diagnostic suggéré par l examen clinique Typer la neuropathie et orienter le diagnostic étiologique Enquête sémiologique, avec un point de vue électrophysiologique Techniques propres, interprétations spécifiques et combinées Évaluer la gravité de l affection et suivre leur évolution au fil des différents traitements mis en œuvre Limites Le trop peu (question des valeurs normales) Le trop tard (après dégénérescence axonale) Le trop près (blocs de conduction très proximaux : PES) Le trop petit (neuropathies à petites fibres : PE laser, biopsie peau)

Pour en savoir plus Vol. 1 Vol. 2 3 e éd. 2013 : Vol. 3 Vol. 4