Cours n 3 Valeurs informatiques et propriété (2) - Les Bases De Données - Le multimédia - Les puces et topographies - La création générée par ordinateur 1 LES BASES DE DONNEES Depuis 1998, les Bases De Données bénéficient enfin d une protection juridique adaptée à leur mode de constitution, à leur nature et à leur structure. 1 1 Qu est-ce qu une Base De Données au sens de la loi? La loi du 1 er juillet 1998, transposant dans le système légal français la Directive européenne du 11 mars 1996, a instauré les règles de protection juridique des Base De Données qui sont définies comme suit : «Recueil d œuvres, de données ou d autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen». Depuis l entrée en vigueur de la loi du 1 er juillet 1998, la protection des Bases De Données peut s effectuer de la manière suivante : - par le droit d auteur, lorsque la structure de la Base De Données est originale ; - par le droit des producteurs, lorsque le contenu de la Base De Données révèle des investissements matériels et humains ; - par l action en concurrence déloyale. Ces voies sont cumulatives si les conditions exigées par leurs régime juridiques respectifs sont réunies. 1
1 2 s Bases De Données 1 2 1 La protection par le droit d auteur : la protection de la structure La protection des Bases De Données par le droit d auteur relève du droit commun de la propriété littéraire et artistique. Il suffit que la structure de la Base De Données, par le choix des données ou leur disposition, révèle l empreinte de la personnalité de l auteur, c est-à-dire traduit son originalité, condition impérative à la protection par le droit d auteur. Par exemple, une décision rendue par la Cour d appel de Paris en 1992 a jugé qu un catalogue de logiciels médicaux organisé sous forme de fiche complétées par les éditeurs des logiciels et compilées par ordre alphabétique constituait une Base De Données originale qui traduisait l empreinte de son auteur. A l inverse, un organigramme, un carnet d adresse ou un simple répertoire, s ils ne sont pas organisés d'une manière originale révélant un travail intellectuel particulier, ne bénéficieront pas de la protection par le droit d auteur. Conformément au droit commun, les droits des auteurs et des utilisateurs dûment autorisés sont décrits de la manière suivante : Catégorie de droits Nature des droits Définition des droits divulgation décider de la divulgation et de ses modalités Droits moraux de l auteur Le droit à la paternité de l œuvre Le droit a faire figurer le nom de l auteur Droits patrimoniaux de l auteur Le droit à l intégrité de l œuvre reproduction Le droit d utilisation d adaptation s opposer aux modifications qui porte atteinte à la Bases De Données au point de la dénaturer procéder ou d autoriser la reproduction de la Base De Données, en tout ou partie, par tous moyens et sous toute forme Le droit d autoriser l utilisation de la Base De Données traduire, de modifier, de faire évoluer, de corriger, d adapter distribution procéder ou d autoriser la mise sur le marché de la Base De Données à titre onéreux ou gratuit 2
représentation diffusion dans le public sous quelque forme que ce soit Droits de l utilisateur= celui qui bénéficie d une licence d utilisation, c est-à-dire d une cession du droit d utilisation copie privée copie privée est autorisée pour les Base De Données non électroniques, sinon toute reproduction est interdite Le droit d accès procéder aux actes nécessaires à l accès au contenu de la Base De Données électronique pour les besoins et dans les limites de l utilisation prévue au contrat Les droits moraux sont en principe inaliénables. La cession des droits patrimoniaux doit respecter des conditions de fonds et de forme. La cession doit être opérée par écrit. Attention, les droits qui ne sont pas visés dans l acte de cession ne sont pas cédés, l auteur bénéficiant d une présomption de réserve de ses droits en sa faveur, en l absence de dispositions écrites précises : - quant à leur nature ( reproduction, utilisation, distribution.) - quant à leur mode d exploitation (quel support, quels types de modification ) - quant à leur lieu d exploitation (territoire) - quant à la durée de la cession. La durée de protection des droits d auteur est de 70 ans à compter du décès de l auteur. 1 2 2 La protection par le droit des producteurs : la protection du contenu Le producteur d une base de donnée est la personne qui prend l initiative et les risques liés à des investissements substantiels d ordre financier, matériel et humain au titre de la constitution, de la présentation ou de la vérification du contenu d une Base De Données. Cette protection est sui generi, c est-à-dire qu il s agit d une protection spécifique aux Bases De Données et qui n exige pas l originalité du contenu. Ainsi, pour que le contenu d une Base De Données bénéficie de la protection par le droit des producteurs, il est nécessaire que sa constitution, sa présentation ou sa vérification aient été réalisées par des investissements importants (jours/hommes de prestation de saisie, opérations de télémarketing, opérations de recherche et de collection d informations). Le producteur est celui qui a engagé les investissements. Il possède les droits suivants : - le droit d interdire l extraction par transfert permanent ou temporaire, quel qu en soit le moyen, de tout ou partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base ; 3
- le droit d interdire la réutilisation de la Base De Données par la mise à disposition du public, quelle qu en soit la forme de tout ou partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base. Ces droits doivent être exercés dans le cadre d'un contrat papier ou en ligne, lorsque les Bases De Données sont intégrées aux sites Web. L utilisateur de la Base De Données dispose quant à lui des droits suivants : - le droit d extraire ou de réutiliser une partie non substantielle qualitativement ou quantitativement du contenu de la base ; - le droit d extraire à des fins privées une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d une base non électronique. Attention, en toutes hypothèses, l utilisateur qui exercera ce droit devra respecter les droits d auteur des œuvres incorporées à la Base De Données. S agissant des cessions de droit de producteur, la loi n exige pas de forme particulière, mais il est fort recommandé de le faire dans le cadre d un contrat très explicite sur la teneur de ces droits. En outre, en l absence de définition légale de la notion d extraction qualitativement ou quantitativement substantielle, il y a lieu dans le contrat, en ligne ou papier, d en définir le périmètre, par exemple par un volume, une catégorie de donnée, et ce afin de prédéfinir en cas de litige, les «zones interdites» à l extraction par les utilisateurs. Une décision rendue par le Tribunal de Commerce de Paris le 7 mai 1999 a fait application de la loi du 1 er juillet 1998 sur le droit des producteurs. En l espèce, l exploitant d un site Web, qui proposait des informations bibliographiques, mettait en ligne des données extraites en partie d une Base De Données éditée sur un CD-ROM dont il avait acquis les droits d utilisation, son contrat d utilisation interdisant formellement la diffusion de ladite Base De Données à des tiers. L'exploitant tenta en vain de soutenir que les extractions auxquelles il avait procédé au sein de la Base De Données/CD-ROM ne portaient pas atteinte aux droits d auteurs afférents aux œuvres décrites au sein de ladite base. Le tribunal a condamné l exploitant du site au titre d une extraction illicite parce qu interdite par contrat. 4
2 LE MULTIMEDIA A travers un unique medium (la numérisation), on peut accéder à toutes sortes d œuvres. Il associe des apports de genres différents Il s agit du secteur qui pose le plus de problèmes en jurisprudence (hétérogène). Il y a des qualifications différentes possibles toujours dans le cadre du droit d auteur : - Base De Données - œuvre audiovisuelle - œuvre «ordinaire» sans statut particulier. Puisqu il réside des différences d un régime à l autre et que la qualification n est pas certaine, il convient donc de recourir largement au contrat pour pallier ces incertitudes. Là où la solution légale peut être mal assurée, le contrat rétablit la sécurité, toujours dans la limite de l ordre public. En aucun cas le multimédia ne se limite à la dimension logicielle. Si le multimédia est qualifié de Base De Données, cela impliquera la protection seule de l architecture. S il est qualifié d œuvre audiovisuelle, la protection s étendra au-delà de l architecture.(écriture de l œuvre, scénario, enchaînement des séquences). L article L 113-7 al. 2 et 3 précise l œuvre audiovisuelle : «Sont présumés, sauf preuve contraire, coauteurs d une œuvre audiovisuelle réalisée en collaboration : - l auteur du scénario - l auteur du texte parlé - l auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l œuvre - le réalisateur ( )». Il s agit d une présomption qui peut être renversée et qui ne limite pas le nombre d auteurs. Dans les contrats doivent impérativement apparaître : - l identification de l œuvre (finale) - l objet précis de la prestation de l auteur en cas d œuvre de commande (un contrat par auteur) - la nature des droits cédés par l auteur et notamment pour l œuvre multimédia résultante, au-delà des seuls droits de reproduction et de représentation, des droits de 5
transformation, d arrangement, d adaptation et de traduction des œuvres composantes - la durée de la cession consentie par l auteur - l étendue géographique de la cession - l ensemble des modes de diffusion de l œuvre finale - le niveau et le mode de rémunération de l auteur Le titulaire des droits d auteur (patrimoniaux et moraux) dispose de l action en contrefaçon (et donc de la même saisie-contrefaçon spécifique aux logiciels et Bases De Données art 332-4 du C. propr. Intell.) 3 LES PUCES Depuis 1989, il existe une réglementation spécifique de protection des topographies de semiconducteurs (intégration de la directive européenne du 16 déc 1986). Les puces relèvent de la création technique et donc de la création intellectuelle. Elles sont appelées «firmware» associant «hardware» (microprocesseur) et «software» (logiciel). Un produit semi-conducteur est défini comme : - composé d un substrat comportant une couche de matériau semi-conducteur - constitué d une ou de plusieurs autres couches de matières conductrices, les couches étant disposées conformément à une configuration tridimentionnelle prédéterminée - destiné à remplir, exclusivement ou non, une fonction électronique. Il ouvre largement la voie au brevet (nouveauté, activité nouvelle, d application industrielle). «La topographie d un produit semi conducteur est définie comme une série d images liées entre elles, quelle que soit la matière dont elles sont fixées ou codées, représentant la configuration tridimentionnelle des couches qui composent un produit semi-conducteur, dans laquelle chaque image reproduit le dessin ou une partie du dessin d une surface de produit semi-conducteur à n importe quel stade de sa fabrication» (directive européenne du 16 déc 1986). Une protection juridique spécifique est accordée au créateur de la topographie (reproduction, exploitation commerciale et importation avec limites quand le tiers agit à titre privé à des fins non commerciales et fins scientifiques). MAIS : le déposant de la topographie est supposé être le créateur (un délai de 3 ans court à compter de la publication du dépôt de topographie pour contester et revendiquer la propriété). La topographie doit traduire un effort intellectuel du créateur, ne pas être courante, être déposée à l INPI dans le délai de 2 ans à compter du début de son exploitation. Outre d agir respectivement sur le fondement du régime du logiciel et celui du régime du matériel, le créateur peut utiliser les moyens de droit que lui offre le secret : responsabilité civile délictuelle ou contractuelle du tiers, concurrence parasitaire 6
4 LA CREATION GENEREE PAR ORDINATEUR La Conception Assistée par Ordinateur (CAO), Fabrication Assistée par Ordinateur (FAO), les Conception et Fabrication Assistées par Ordinateur, la Création Assistée par Ordinateur (CrAO), le Dessin par Ordinateur (DAO). Les difficultés se situent au niveau de la responsabilité et des droits générés par l œuvre finale (pas ceux du logiciel conçu pour générer l œuvre). Pour que la Création Générée par Ordinateur (CGO), il faut que l œuvre soit reconnue comme autonome. 3 protections : - droit des brevets pour la création industrielle - droit d auteur pour la création artistique - protection des logiciels, droit des topographies pour la création de puces 3 titulaires de droits : - titulaire du brevet - le titulaire du droit d auteur est celui «qui a imprimé sa marque à l œuvre». Il faut donc sécuriser ce point et l organiser contractuellement - celui qui dépose la topographie avec les contestations éventuelles à organiser contractuellement 7