Quelques spécificités de la logistique au Japon Le système logistique japonais est l un des terrains d investigation les plus riches pour des professionnels européens cherchant à améliorer l efficacité de leur Supply Chain. Il offre des perspectives nouvelles ainsi que des clés d optimisation. Pas de recette miracle néanmoins et pas de transférabilité évidente, tant il est vrai que la haute efficacité du système logistique japonais repose certes sur la qualité des solutions techniques, mais aussi et peut-être surtout! sur une organisation particulière de l espace urbain et sur des caractéristiques spécifiques de la société japonaise. Diana Diziain Kyoto University Le Japon logistique nous apprend des choses, mais surtout nous fait réfléchir, nous bouscule dans nos habitudes et dans nos certitudes. Si en termes de performance logistique offerte au client, les takkyubin et les konbini sont des modèles qui feraient rêver tout Directeur Supply Chain en Europe, des marges de progrès existent en termes de performance environnementale. Sur un plan social aussi ces modèles nous interpellent. Ce pays où la flexibilité est la norme, et où le taux de chômage plafonne à 4,7 % (mai 2011) et ne dépasse pas les 6 %, même les très mauvaises années, abrite une réalité nuancée : à peine plus de la moitié des femmes mariées ont un emploi, un tiers de la population active est à temps partiel et un chômeur sort des statistiques après 330 jours d indemnisation. Des solutions logistiques imaginatives et pragmatiques Sur un plan spatial, la rareté et la cherté du foncier ont amené à des solutions logistiques imaginatives et pragmatiques. Avec une densité moyenne de la population (personnes/km²) de 6.017 dans la Préfecture de Tokyo, un peu plus de 14.000 dans Tokyo intra muros et 343 en moyenne pour l'ensemble du Japon contre 113 en moyenne pour la France, 8.500 pour la petite couronne parisienne et 21.060 pour Paris, la logistique japonaise a su se faire discrète et économe en espace. Moins d industries, plus d entrepôts! C est la tendance au Japon. La délocalisation d industries a induit une intensification des importations et donc des besoins accrus en surfaces et prestations logistiques ; elle a par ailleurs favorisé la montée en puissance des prestataires logistiques. L immobilier logistique professionnalisé est né au Japon en 2002, avec l arrivée de Prologis, qui dès le début a construit des bâtiments multi-étages, seule manière, conjointement à des loyers dépassant les 200 euros/ an/m² de rentabiliser des fonciers logistiques qui peuvent frôler les 7.000 euros le m². Aujourd hui, quasiment tous les programmes neufs sont multi-étages. Le consommateur japonais a des habitudes et des exigences différentes du consommateur européen. Par exemple, il fait ses 78
Espace de distribution de quartier de Yamamoto, Kyoto. achats de nourriture en petite quantité, tous les jours, pour manger frais. Et il attend que tout soit fait pour que la vie quotidienne lui soit simplifiée. Les services logistiques participent amplement à cette «praticité» de la vie urbaine. Voici quelques focus sur des spécificités de la logistique, surtout urbaine, au Japon : les takkyubin, les konbini, les distributeurs automatiques et showrooms, des petits espaces de distribution qui s insèrent dans le paysage urbain, une part modale proche de la France, de petits véhicules toujours propres et une aptitude à gérer les risques Takkyubin, des services de messagerie express B2B ou C2C Les takkyubin sont des services de messagerie express de B2B, B2C voire C2C. Trois principaux réseaux se partagent le marché : le leader Yamato, spécialiste du BtoC, 38 % de parts de marché, reconnaissable à son enseigne représentant une maman chat portant son chaton avec autant de soin que les colis de ses clients ; Sagawa, qui met l accent sur le BtoB est détenteur de 33 % de parts de marché et Nippon Express, issu de l opérateur historique, 10 % de parts de marché. Ils traitent une grande diversité de marchandises de moins de 30 kg, qui est en général la dimension standard maximale. Ici le chat noir ne porte pas malheur, les livraisons arrivent en temps et en heure et dans des délais record. Vous faire livrer votre valise de 20 kg depuis l aéroport, situé à plus de 100 km d Osaka ou Tokyo, avant le soir si vous arrivez par un vol du matin, vous coûtera une quinzaine d euros (service Airport Takkyubin). Un service spécifique de messagerie à température dirigée de -18 C à +3 C est également disponible, il est très courant de s envoyer des colis de nourriture au sein de la famille par exemple, d un endroit à un autre du Japon (service Cool Takkyubin pour Yamato et Hikyaku Cool Express pour Sagawa). Six plages horaires, même le dimanche De la même façon des services spécifiques sont disponibles pour la livraison de skis ou de clubs de golf en national, ou pour envoyer des marchandises et documents à l international. Une panoplie de six plages horaires est offerte au client : avant 12h, 12h-14h, 14h-16h, 16h-18h, 18h-20h et 20h-21h. Y compris le samedi et le dimanche. Les plates-formes où se passent les opérations classiques de groupagedégroupage de ces colis, mais aussi d autres opérations classiques de picking et stockage, accueillent aussi d autres activités allant du post-manufacturing et assemblage à du service après-vente et réparations. La frontière entre la petite activité productive, le service et la logistique est très ténue. Le développement de ces services de distribution spécialisée est dû notamment à la demande de livraison à domicile des particuliers japonais. Au Japon, plus de la moitié des adultes japonais ont acheté sur Internet en 2009 et Rakuten, géant du e-commerce, Distributeur : livraison de nouveaux produits, vérification de l appareil et enlèvement des déchets. a enregistré des commandes de plus des deux tiers des 90 millions d utilisateurs japonais d Internet. Le chiffre d affaires du e-commerce au Japon augmente en moyenne d environ 17 % par an depuis 2005 (The Economist) et la croissance devrait se poursuivre selon un rythme de 10 % par an dans les années à venir. Malgré le ralentissement de l économie, les besoins en distribution urbaine devraient donc continuer à croître et la fertilisation croisée entre ces services de distribution et l e-commerce se poursuivre, l un favorisant l autre et réciproquement. A chacun son schéma Les schémas des deux géants du marché, Yamato et Sagawa, sont quelque peu différents, sans que l on puisse en comparer l efficacité économique ou environnementale, les données étant bien entendu impossibles à obtenir. Yamato met l accent sur la massification sur des terminaux en périphérie reliés à de petits espaces très urbains, souvent en pied d immeuble, d où les livraisons sont faites avec de tout petits véhicules ou bien à vélo et à pied. Sagawa adopte un schéma plus proche de ceux des expressistes européens, avec des plates-formes périurbaines, moins d espaces logistiques urbains et des tournées de livraison en camion ou camionnette. Les takkyubin s appuient aussi sur un réseau très dense de points relais. Votre commande Amazon vous sera livrée en maximum trois jours, y compris le Dernier kilomètre en vélo par Yamato, Takatsuji Dori Kyoto. Distribution à vélo, un métier assez féminisé! OCTOBRE 2011 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE N 58 79
7 Eleven. Konbini Familly Mart, mise en rayon des produits après livraison, il est minuit. dimanche chez un commerçant de votre quartier ou bien dans les konbini Lawson. Konbini, des concentrés de services Sur le modèle des Convenience Stores américains, les konbini sont des magasins de quartier, devenus depuis plusieurs décennies maintenant un élément structurant de la vie urbaine au Japon. Ouverts 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, ils offrent une gamme standardisée de produits mais aussi de services. Les produits (plus de 3.000 références par magasin) vont des produits frais à l épicerie, en passant par les produits de beauté mais aussi des vêtements de première nécessité. En termes de services, on peut y payer ses factures (d électricité, téléphone, assurance ), déposer son colis à envoyer, recevoir et envoyer de l argent, imprimer ses photos, envoyer des fax, faire des photocopies, réserver et acheter des billets de concerts ou événements sportifs. Ils font aussi office de «sanisette» gratuite. Le secteur, très concurrentiel, est structuré par trois grandes chaînes issues de groupes américains mais devenues plus puissantes que les compagnies d origine. Seven Eleven (née au Texas, mais contrôlée depuis 2005 par des capitaux japonais), Lawson (née dans l Ohio mais aujourd hui également japonaise) et Family Mart (née au Japon). D autres enseignes (Daily, Circle K, Ministop spécialisée dans les sandwichs, snacks et plateauxrepas obento...) sont présentes sur le marché mais avec un réseau bien moins dense. Des partenariats efficaces entres les acteurs logistiques permettent de démultiplier les services : Seven Eleven sous-traite par exemple à Yamato la livraison des plateaux-repas commandés sur son site Internet et Yamato utilise les magasins Seven Eleven comme points relais livraison pour ses colis. Les konbini sont une véritable infrastructure urbaine jouant un rôle social de sécurisation de l espace, à travers une présence humaine permanente et rassurante. Dans les espaces ruraux, le maintien du konbini devient un enjeu politique majeur pour la communauté car ce «concentré de services» joue un rôle dans la vie quotidienne d une population âgée non motorisée pour qui cette infrastructure est le seul recours. Des technologies d information très avancées La performance logistique des konbini et des takkyubin repose sur des technologies d information très avancées : outils de communication très intégrés, pour optimiser et tracer. Chaque magasin d une chaîne de konbini est relié à un réseau de fibre optique permettant le partage global des informations. Ainsi, la commande des produits par chaque magasin peut être passée en temps réel, ainsi que l information sur les produits à renvoyer. Les horaires de livraison sont connus avec précision. Un konbini est livré plusieurs fois par jour et par nuit. La caisse enregistreuse des konbini est également un outil d étude de marché informant en temps réel sur le goût des consommateurs et pouvant sortir des statistiques pour ajuster la gamme de produits à la demande. En revanche, les remboursements ne sont pas possibles dans la très grande majorité des konbini. Des distributeurs automatiques omniprésents L une des choses qui étonne le visiteur étranger arrivant pour la première fois au Japon, c est le grand nombre de distributeurs automatiques de produits de toute sorte dans les gares, sur les quais de métro, à l entrée des immeubles, sur les trottoirs, aux entrées des temples : des boissons (y compris alcoolisées) aux sous-vêtements, des cigarettes aux journaux et magazines et jusqu aux glaces! Les appareils sont toujours en étant de marche et les produits toujours disponibles. Cette qualité de service a pour support une prestation logistique de grande qualité, appuyée par des véhicules adaptés, des personnels formés et un processus de «Reverse Logistics» adapté. En effet, pour les boissons par exemple, c est le même véhicule qui livre les produits neufs (situés dans la caisse frigorifique d une camionnette de moins de quatre tonnes) et ramasse les déchets dans les poubelles de tri prévues à côté des distributeurs (et correctement utilisées par les consommateurs!) pour les remiser sur le toit du véhicule. Le livreur assure aussi la vérification et la maintenance des machines, ce qui réduit Livraison nocturne au konbini Lawson 23 h 30 Horikawa Dori Kyoto. Distributeur de glaces. 80
Osaka, centre commercial accueillant majoritairement des showrooms. les coûts et peut-être, accroît l intérêt du poste pour le livreur. Des showrooms très répandus Une autre spécificité à noter serait le recours, plus répandu qu en Europe, aux showrooms. Le quartier de Ginza à Tokyo est connu pour accueillir, dans des bâtiments griffés, signés de grands noms de l architecture, des showrooms (Nissan, Sony, Shiseido ). Mais les showrooms pour des articles d usage courant (meubles, divers produits pour la maison ) sont également très répandus, comme le montre l image ci-dessus d un centre commercial à Osaka accueillant en grande majorité des espaces de showroom. Une logistique en symbiose avec les autres fonctions urbaines En dehors des axes principaux des grandes villes, où la congestion du trafic et l agitation sont présents de jour comme de nuit, la ville japonaise est en général étonnamment paisible. La logistique y trouve naturellement sa place, dans une symbiose souvent réussie avec les autres fonctions urbaines. On peut trouver des espaces logistiques par exemple : en rez-de-chaussée d immeubles, sous forme d espaces de 20 à pas plus de 200 m², avec un pragmatisme s encombrant peu de critères esthétiques dans des immeubles R+10 aux façades aveugles en cœur de ville, majoritairement occupés par des parkings mais accueillant parfois des niveaux dédiés à la distribution dans des secteurs péricentraux, sous forme de petits entrepôts anciens ou bien d immeubles très modernes multi-étages. Des espaces urbains de qualité, des aménagements de voirie permettant des livraisons et enlèvement faciles, des revêtements silencieux, des véhicules en bon état et avec des bonnes performances en termes de niveau sonore, tout cela contribue à une efficience des livraisons. Dans la mesure où posséder une voiture coûte cher (car il faut avoir une place de stationnement, souvent aussi chère qu un petit appartement), ce sont souvent des taxis, bus et véhicules de livraison que l on voit rouler sur la voirie. Les trottoirs sont partagés entre piétons et vélos, la cohabitation se passant très correctement. Partage modal, comme en France Des contextes géographiques très différents, d un côté un espace «îlien», fermé, et de l autre un territoire ouvert, à la croisée des flux logistiques européens Nord-Sud. Et pourtant des parts modales identiques : 90 % / 6 % / 4 % (route, mer, fer). Si l espace urbain est fortement marqué par les réseaux ferroviaires, le mode routier est très majoritairement utilisé pour le transport de marchandises. Le ferroviaire, en perte de vitesse, représente 4 % de parts de marché (en tonnes x kilomètres) contre 18 % dans les années 1970. Le coastal shipping totalise en 2008 un peu plus de 6 % des trafics, et bien plus en tonnage car il est quasi exclusivement dédié au transport de minerai, pétrole (pas d oléoducs au Japon), métaux, Espace de distribution en rez-de-chaussée, Horikawa Dori Kyoto. matériaux, ciment, produits chimiques. Les 122 gares de marchandises accueillent un trafic annuel de 22 millions de tonnes, très majoritairement constituées de conteneurs. Le service de wagon isolé survit pour quelques utilisateurs industriels. Le takkyubin Sagawa utilise un train de conteneurs par jour, cinq jours par semaine entre Tokyo et Osaka. De nombreux sites ferroviaires bien situés ont muté vers des fonctions plus valorisées. La JR Fret (opérateur historique) ou JR Settlement Corporation (équivalent de RFF, mais dissoute en 1998) ont valorisé en bureaux ou logements de nombreux sites ferroviaires, à travers des projets d aménagement portés, pour le compte de collectivités, par des outils opérationnels aux noms évocateurs tels que l Agence pour la Renaissance Urbaine. Parfois, le projet d aménagement de l espace public a gardé la mémoire du passé ferroviaire en mettant en scène les rails. Un mode routier prédominant Le mode routier est prédominant. Les conditions structurelles du marché routier favorisent l efficacité logistique. La déréglementation a été introduite plus tard qu en Europe. En 2001, certaines contraintes, par exemple sur les prix des services de transport, ont été assouplies, voire supprimées. Les entreprises de transport routier de marchandises doivent posséder au moins cinq véhicules, contre 20 avant la dérégulation. La Japan Trucking Association estime qu il Livraison d un commerce de proximité, essentiel pour les personnes âgées. Immeuble logistique de six étages à Osaka (racheté par GLP à Prologis). OCTOBRE 2011 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE N 58 81
Entrepôts Sumitomo Baie d Osaka. faudrait revenir sur la dérégulation, car elle a produit des effets pervers. Selon la JTA elle a déstabilisé le marché en y introduisant de petits opérateurs fonctionnant en sous-traitance et cassant les prix. Le nombre d entreprises de transport a cru de 40.000 en 2000 à plus de 60.000 aujourd hui. Néanmoins, ce qui d un point de vue japonais apparaît comme déréglementé, peut sembler convenable d un point de vue européen, où nombre de tout petits opérateurs avec un ou deux camions, pas ou peu d employés, contribuent à des coûts très bas mais au prix d une désoptimisation, notamment sur le maillon urbain, et de conditions sociales discutables. Des véhicules petits, propres et pratiques Small is beautiful : les véhicules sont en ville souvent petits, voire très petits, parfois très colorés, mais toujours très propres. La charge moyenne du parc circulant est de 3,2 tonnes à Tokyo et de 3,45 tonnes dans la région de Kyoto/Osaka. La préoccupation de «practicité» est très présente dans le design des véhicules. On y voit : des véhicules porteurs avec parois latérales à ouverture par le haut. Le chargement latéral et les parois en dur à ouverture électrique sont des avantages intéressants ; des véhicules avec caisse à hauteur variable permettant de s adapter à des limites de hauteurs (de parkings par exemple) ; des véhicules avec une caisse multitâches Et bien sûr, que ce soit pour les déplacements des employés ou pour la livraison, le vélo est très utilisé. Une logistique post-désastre très médiatisée Le séisme du 11 mars a permis au grand public japonais de mieux comprendre la réalité de la logistique, sujet appartenant aux «coulisses de la ville» et aussi peu connu qu en Europe. Après avoir épuisé le sujet du Un très grand nombre de toutes petites camionnettes. Shinkansen (train à grande vitesse japonais), arrêté pendant plusieurs jours, des émissions télévisées ont expliqué aussi l impact du séisme sur l approvisionnement, notamment dans la région de Tohoku où le réseau routier a été particulièrement touché. La logistique post désastre a également été très médiatisée. Au 24 avril les 440.000 personnes évacuées ont nécessité la mise en place de solutions logistiques particulières. Le système logistique japonais a dû répondre à une situation très exceptionnelle où trois risques sont advenus : séisme, tsunami et accident nucléaire. Le blackout des infrastructures de télécommunications a rendu d autant plus difficile l organisation de la logistique. De plus, de nombreuses pertes humaines ayant été comptées parmi les fonctionnaires locaux, les relais humains ont manqué pour la mise en place de la logistique post désastre. Les données mises à disposition, dans le cadre d un travail collaboratif, par des entreprises privées (Isuzu, Nissan, Toyota, Honda) ont été essentielles dans la mise en place des secours, car les données de trafic sur les routes ont permis de connaître l état des routes et la possibilité d y passer ou non. Un taux de vacance des entrepôts au plus bas Au-delà de la première urgence, humanitaire, il a fallu aussi trouver des solutions à la rupture du système logistique industriel et de distribution. L entrepôt de Seven Eleven du Tohoku a été fortement affecté par le séisme, de ce fait l approvisionnent des magasins a été très impacté. Bon nombre d entrepôts ont subi des dégradations. Par ailleurs, de nombreuses unités de production ont également été affectées. De ce fait, des sociétés qui auparavant internalisaient leur logistique ont dû, après le séisme, louer des surfaces d entrepôt. Ce qui a fait chuter le taux de vacance à des niveaux jamais vus (6,2 % en avril 2011). Néanmoins le rétablissement a été bien plus rapide que dans le cas du séisme du Hanshin Awaji (Kobe) de 1995, où par exemple l autoroute avait été fermée sur certains tronçons pendant plus de trois semaines et où les infrastructures portuaires ont mis plus de deux ans à être remises à niveau. Ce type d expérience peut interroger les hauts responsables des entreprises, mais aussi les édiles publics, sur les mesures de prévention et surtout sur les réponses à apporter et les plans d action à mettre en œuvre en cas de désastre. Si des «Business Continuity Plans» ou «Resiliency Plannings» existent dans certaines entreprises, la logistique post désastre est un sujet peu pris en compte dans les politiques publiques en Europe, même si le type de risque est différent (pandémie, attaque terroriste..) et si le niveau de risque naturel est sans aucun doute moindre qu au Japon. Une prise de conscience de la nécessité de prévoir à l avance des réponses aux risques majeurs serait de bon augure car lorsque le risque se réalise, il est bien souvent trop tard. S inspirer du modèle japonais? Avec pragmatisme et sans mauvaise conscience, la métropole japonaise multi millionnaire prouve qu elle sait accueillir les fonctions dont elle a besoin, y compris les «parents pauvres» comme la logistique. Et tant pis pour l harmonie des gabarits, des formes, des perspectives. Décousues, chaotiques d un point de vue paysager, mais ô combien vivantes, Tokyo ou Osaka nous amènent à nous interroger sur la manière dont nous arriverons (ou pas) à vivre avec les fonctions urbaines dont nous avons besoin (transport & logistique, gestions des déchets, traitement des eaux usées). Tous ces «organes» sans lesquels la ville ne peut fonctionner, mais que nous avons trop souvent tendance, sous la pression foncière, à évincer loin du cœur de nos villes européennes. DD 82