CERTIFICAT STRATEGIE DES EXAMENS DE LABORATOIRE GENERALITES: Les EXAMENS BIOCHIMIQUES. Pr Jean ROUSSEAUX VERSION 1 NOVEMBRE 2003

Documents pareils
I - CLASSIFICATION DU DIABETE SUCRE

CONCOURS DE L INTERNAT EN PHARMACIE

LISTE DES ACTES ET PRESTATIONS - AFFECTION DE LONGUE DURÉE HÉPATITE CHRONIQUE B

LA RETRAITE Loi Madelin (R94)

Caisse Primaire d Assurance Maladie de La Charente

ntred 2007 Résultats de l étude Description des personnes diabétiques

EVALUATION DES TECHNOLOGIES DE SANTÉ ANALYSE MÉDICO-ÉCONOMIQUE. Efficacité et efficience des hypolipémiants Une analyse centrée sur les statines

DON DE SANG. Label Don de Soi

Guide du parcours de soins Titre ACTES ET PRESTATIONS AFFECTION DE LONGUE DURÉE. Hépatite chronique B

Demande d adhésion 2007

Ageas Sérénité Manager

Ischémie myocardique silencieuse (IMS) et Diabète.

Ordonnance collective

Pour les emprunteurs qui ont des difficultés à s assurer

Intérêt diagnostic du dosage de la CRP et de la leucocyte-estérase dans le liquide articulaire d une prothèse de genou infectée

Référentiel Officine

OUVERTURE ET MISE EN PLACE

ÉVALUATION DE LA PERSONNE ATTEINTE D HYPERTENSION ARTÉRIELLE

LE GRAND LIVRE Du. Pr Jean-Jacques Altman Dr Roxane Ducloux Dr Laurence Lévy-Dutel. Prévenir les complications. et surveiller la maladie

Projet de grossesse : informations, messages de prévention, examens à proposer

Diabète de type 1 de l enfant et de l adolescent

Test direct à l Antiglobuline (TDA ou Coombs direct)

F.Benabadji Alger

Sérodiagnostic de la polyarthrite rhumatoïde

Décret n du 19 octobre

[ PRÉVOYANCE] PARTICULIERS. empo senior. L assurance décès pour les seniors. L assurance n est plus ce qu elle était.

Activité 38 : Découvrir comment certains déchets issus de fonctionnement des organes sont éliminés de l organisme

SECTION II RELATIVE AU PRÉLEVEUR

AGREGATION DE BIOCHIMIE GENIE BIOLOGIQUE

Loi 41. GUIDE D EXERCICE Les activités réservées aux pharmaciens

dossier de presse nouvelle activité au CHU de Tours p a r t e n a r i a t T o u r s - P o i t i e r s - O r l é a n s

RAPPORT ANNUEL D ACTIVITÉS SCIENTIFIQUES 2005 DU COMITÉ

La prise en charge. de votre affection de longue durée

Chapitre II La régulation de la glycémie

empo senior L assurance décès pour les seniors

Isolé : 2,20 % du PASS (54 /mois) Isolé : 2,69 % du PASS (67 /mois) Famille : 5,46 % du PASS (135 /mois) Famille : 6.54 % du PASS (162 /mois)

L investigation chez la personne infectée par le VIH

Devenir des soignants non-répondeurs à la vaccination anti-vhb. Dominique Abiteboul - GERES Jean-François Gehanno Michel Branger

Les Jeudis de l'europe

ACTUALITES THERAPEUTIQUES. Dr Sophie PITTION (CHU Nancy) Metz, le 2 Juin 2012

Livret des nouveaux anticoagulants oraux. Ce qu il faut savoir pour bien gérer leur utilisation

points Les actes de biologie médicale : analyse des dépenses en 2008 et 2009

En option : il est possible d augmenter le capital de base (l augmentation ne s applique pas à la majoration enfant à charge).

MODULAR ANALYTICS EVO Un univers de Fiabilité, de Puissance et de Flexibilité

Sang, plasma, plaquettes...

Spondylarthropathies : diagnostic, place des anti-tnf et surveillance par le généraliste. Pr P. Claudepierre CHU Henri Mondor - Créteil

Objectifs pédagogiques : spectrophotomètre Décrire les procédures d entretien d un spectrophotomètre Savoir changer l ampoule d un

1.3 Recherche de contaminants au cours de la production de Saccharomyces boulardii

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS DE LA COMMISSION. 10 octobre 2001

Le traitement pharmacologique du diabète de type 2 : que devez-vous savoir?

PLAN EXPERT TNS. Prévoyance : En pourcentage de la base des garanties, de 1 à 4 plafonds annuels de la Sécurité Sociale

LIGNES DIRECTRICES CLINIQUES TOUT AU LONG DU CONTINUUM DE SOINS : Objectif de ce chapitre. 6.1 Introduction 86

DIABETE ET SPORT. Dominique HUET Hopital Saint Joseph PARIS

Le VIH et votre cœur

Le VIH et votre foie

CRITERES DE REMPLACEMENT

Sang, plasma, plaquettes...

TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX DU DIABETE DE TYPE 2 (Hors Insuline) MAREDIA Dr Marc DURAND

ORDONNANCE COLLECTIVE

CAHIER SPÉCIAL Nathalie Ferron

ANTICORPS POLYCLONAUX ANTI IMMUNOGLOBULINES

Logiciels d éducation à la Nutrition et à l activité physique

RÉFÉRENCES ET RECOMMANDATIONS MEDICALES

Poitou-Charentes. Commission Sécurisation du circuit du médicament Groupe informatisation du circuit

FICHE D INFORMATION AVANT UNE TRANSFUSION

RAPPORT DU CONTROLE DE MARCHE DES DISPOSITIFS MEDICAUX DE DIAGNOSTIC IN VITRO DE DOSAGE DE THYROGLOBULINE

Le VIH et votre apparence physique

ANEMIE ET THROMBOPENIE CHEZ LES PATIENTS ATTEINTS D UN CANCER

La version électronique fait foi

QU EST-CE QUE LA PROPHYLAXIE?

Charte de la Banque ADN et de Cellules de Généthon


L axe 5 du Cancéropole Nord Ouest

Dossier de presse. Le don de sang sur les lieux fixes de collecte. Juin Contact presse :

La raison d être des systèmes d information

N.-B. 18 à 34 24,3 28,1 20,1 24,4. 35 à 54 36,7 23,0 31,6 49,3 55 à 64 18,7 18,7 21,3 16,9 65 et plus 20,3 30,2 26,9 9,4

Insuffisance cardiaque

Diagnostic des Hépatites virales B et C. P. Trimoulet Laboratoire de Virologie, CHU de Bordeaux

HVC CHRONIQUE MOYENS THERAPEUTIQUES ET BILAN PRE-THERAPEUTIQUE CHAKIB MARRAKCHI.

Catherine Prost Squarcioni Centre de Références Maladies Rares NET-DBAI-IDF Hôpital Saint Louis et hôpital Avicenne

DECES OU INVALIDITE PERMANENTE ET TOTALE Tout assuré Majoration par enfant à charge DECES SIMULTANE- DECES ou INVALIDITE ABSOLUE et DEFINITIVE

Conseils pour réaliser un tableau de sortie

Hémostase et Endocardite Surveillance des anticoagulants. Docteur Christine BOITEUX

Primeurs en cardiologie I

Le don de moelle osseuse :

eduscol Santé et social Enseignement d'exploration

La prise en charge de votre affection de longue durée

MONITORING / SUIVI DES PATIENTS

TRAIT FALCIFORME. Clinique spécialisée d hématologie pédiatrique

Item 169 : Évaluation thérapeutique et niveau de preuve

Information sur les programmes d autorisation préalable, de pharmacie désignée et de gestion des dossiers médicaux. Autorisation préalable

TEST DE DÉTECTION DE LA PRODUCTION D INTERFÉRON γ POUR LE DIAGNOSTIC DES INFECTIONS TUBERCULEUSES

INTERET PRATIQUE DU MDRD AU CHU DE RENNES

Maladie hémolytique du nouveau né. Dr Emmanuel RIGAL Unité d hématologie transfusionelle GENEVE Présentation du 13 janvier 2012.

chronique La maladie rénale Un risque pour bon nombre de vos patients Document destiné aux professionnels de santé

Pathologie VIH. Service maladies infectieuses Archet 1. Françoise ALEXIS, infirmière Monique BORGHI, infirmière 15 octobre 2013

WHA63.12 Disponibilité, innocuité et qualité des produits sanguins 4,5

Tests de comparaison de moyennes. Dr Sahar BAYAT MASTER 1 année UE «Introduction à la biostatistique»

UN ENNEMI DU CŒUR ET DES ARTÈRES

Transcription:

CERTIFICAT STRATEGIE DES EXAMENS DE LABORATOIRE GENERALITES: Les EXAMENS BIOCHIMIQUES Pr Jean ROUSSEAUX VERSION 1 NOVEMBRE 2003

OBJECTIFS PEDAGOGIQUES Comment demander un examen biologique: les indications. Quelles règles à respecter pour s assurer de la pertinence de ma demande? Quelles contraintes sont liées au prélèvement? : conditions de réalisation, risques, délais de réalisation de l analyse, Quels renseignements cliniques sont utiles voire indispensables? Comment interpréter les résultats obtenus? Pourquoi et quand répéter la demande d un examen biologique? Quel est le coût des analyses demandées?

COMPRENDRE CE QU EST UN EXAMEN BIOLOGIQUE? Mon examen biologique est-il exclusivement quantitatif? Par exemple la mesure d une concentration par unité de volume ou de masse? = l examen biochimique Mon examen est-il exclusivement ou partiellement qualitatif? = la recherche de la présence d une anomalie génétique, d une cellule particulière (dans le sang, le L.C. R;, la moelle..), d une bactérie, d un virus, d un parasite?

LE POINT DE VUE DU BIOCHIMISTE: I. QUELQUES NOTIONS GENERALES

COMPRENDRE CE QU EST UN DOSAGE Que dose t on? Une petite molécule de l organisme: le glucose, l urée Une activité enzymatique: transaminases, GGT Une protéine particulière: sérumalbumine, CRP, PSA Un médicament Comment? Méthode «biochimique» Méthode immunologique

COMPRENDRE LA RELATION ENTRE CE QUE L ON DOSE, LA METHODE UTILISEE POUR LE DOSAGE ET LES RESULTATS OBTENUS 2 notions essentielles: la standardisation des méthodes de dosage (qui n existe pas toujours!) les valeurs normales que doit vous fournir le laboratoire avec, si possible, des indications sur les variations pathologiques.

1er cas, le plus simple : le dosage d une molécule par une méthode pour lesquelles on dispose de solutions étalons : exemple le glucose Les plus faciles à standardiser: on dispose de solutions étalons et d échantillons de contrôle. Mais ce n est pas toujours le cas: exemple la bilirubine non conjuguée (peu soluble dans l eau) les résultats peuvent varier significativement selon la méthode et l appareillage employé D où l importance dans ce cas de faire réaliser des dosages successifs chez un même patient par le même laboratoire

2ème cas: le dosage d une molécule par une méthode pour laquelle on ne dispose de solutions étalons Exemple : les activités enzymatiques, l hémoglobine glyquée Importance de la standardisation Pour une activité enzymatique: la valeur exprimée à 37 C n est pas la même que celle exprimée à 30 C! Le laboratoire doit employer une méthode de référence: par exemple dosage de l Hb A1c pour l hémoglobine glyquée La méthode doit être certifiée par des critères de qualité (voir plus loin : «exactitude et précision»)

3ème cas: le dosage d une molécule par une méthode immunologique Avoir présent à l esprit que : le résultat dépend non seulement de la méthode utilisée mais aussi de l anticorps utilisé voire du type d antigène détecté Exemple : le marqueur cardiaque de l infarctus, la troponine On peut doser la troponine Ic ou la troponine T On peut doser la troponine Ic avec l anticorps A ou l anticorps B => le seuil pathologique et les variations pathologiques seront différents

EXACTITUDE ET PRECISION: AVOIR UN «ŒIL» CRITIQUE SUR LES CHIFFRES Tout résultat fourni par un laboratoire comporte un certain degré d inexactitude et d imprécision Exemple : glucose 6mmol/l Exactitude résultat obtenu par le dosage : 6mmol/l = exact 7mmol/l= inexact Précision: exprimée par le coefficient de variation (C.V.) = σ/moyenne 6,6 +2σ 6,12 6,06 6 5,94 5,88 Méthode précise +2σ +σ moy. - σ 2σ 6,3 6 5,7 5,4 +σ moy. - σ 2σ Méthode imprécise

CONSEQUENCES POUR LA PRATIQUE MEDICALE Seuil pathologique: 7 mmol/l 6,84 6,77 6,7 6,63 6,56 Méthode précise 7,3 7,0 6,7 6,4 6,1 Méthode imprécise Se méfier d un seul résultat hors normes dans un bilan systématique (préopératoire, bilan de santé...) Penser au problème majeur que pose une méthode imprécise dans un suivi de patient (ce fut le cas pendant longtemps pour l hémoglobine glyquée)

POPULATION DE REFERENCE ET POPULATION MALADE Tenir compte du fait que les résultats d un dosage dans une population de référence peuvent varier selon le sexe, l âge, l origine géographique, le nycthémère Ne pas oublier que les valeurs témoins d un dosage représentent celles de 95% de la population de référence (et non 100%) Pour qu un dosage ait un intérêt, il faut pouvoir distinguer nettement les les valeurs pathologiques et les valeurs normales témoin malade témoin malade Possible Pas possible

LE POINT DE VUE DU BIOCHIMISTE: II. COMMENT DEMANDER UN DOSAGE??

LES INDICATIONS La demande des examens biologiques prolonge l examen clinique (examens «complémentaires») Au plus l indication est précise, au plus les résultats seront informatifs Pour bien formuler l indication, il faut bien connaître la physiopathologie de la maladie, voire le métabolisme de la molécule (en endocrinologie) Il faut adopter une logique dans ses demandes d examens: par exemple, inutile de demander un test génétique d hémochromatose si on n a pas dosé d abord le fer sérique et le coefficient de saturation de la transferrine Les examens systématiques: bilan de santé, bilan d entrée à l hôpital, : les limiter aux examens réellement utiles Bilan de santé: glycémie à jeun; cholestérol, triglycérides, cholestérol HDL, transaminases et GGT; ionogramme, urée et créatinine chez le sujet âgé; PSA chez l homme >50ans

LE PRELEVEMENT = LA «PRISE DE SANG» C est plus une problématique du laboratoire ou de l infirmière Etre à jeun ou pas? Oui (depuis la veille minuit) pour glycémie à jeun, bilan lipidique, certains enzymes (le laboratoire donne ces renseignements). A une heure définie? : important pour les dosages hormonaux (cortisol par exemple) Avec quelles précautions? : variables selon l analyse demandée Exemples : éviter garrot, hémolyse pour le dosage du potassium dans la glace pour gaz du sang,,ammoniémie, lactate Sur quel type de tube? Variable selon l analyse (le laboratoire donne ces renseignements).

LES RENSEIGNEMENTS A FOURNIR Nom, nom de jeune fille, date de naissance, sexe Importance de la vérification d identité au lit du patient à l Hôpital Adresse du patient, ou, à l Hôpital, identification de l Unité de soins A l Hôpital: heure de prélèvement pour les prélèvements urgents Quelques renseignements diagnostiques utiles voire indispensables (exemple: date des dernières règles en cas de réaction biologique de grossesse) Liste des médicaments utilisés par le patient : très important car interférences possibles dans certains dosages. Si dosage de médicament: connaître les posologies Feuille de consentement éclairé signée par le patient si analyse génétique

LE DELAI D ACHEMINEMENT ET DE REALISATION L acheminement urgent = surtout à l Hôpital urgent parce que risque vital: gaz du sang, potassium urgent pour préserver le métabolite à doser: lactate, ammoniémie, homocystéine, sérotonine Le délai de réalisation : variable selon l analyse (le laboratoire doit indiquer les délais) L analyse urgente : à bien cibler; si tout est urgent, rien n est urgent! Ne pas oublier que le laboratoire doit enregistrer la demande (quelques min) si nécessaire, centrifuger pour récupérer le plasma (10min) faire le dosage (exemple troponine: 15min); éventuellement le vérifier valider (biologiste) le résultat

LES RESULTATS ET LEUR INTERPRETATION Les résultats: signés par le biologiste après les avoir validé ( en fonction des contrôles de qualité, des résultats antérieurs, de la cohérence du bilan ) A l Hôpital: possibilité de signature «électronique» Le biologiste doit fournir impérativement : - les taux normaux de la population de référence - si l analyse le requiert, les taux en fonction du sexe, de l âge L interprétation par le praticien: D autant plus facile que l indication a été bien posée

LA REPETITION DES DEMANDES D ANALYSE Il est inutile de répéter des examens sans valeur pronostique La répétition des examens sert: à suivre l évolution d une maladie: par exemple, dosage de la troponine en cas d angor instable et d infarctus; à suivre l efficacité d un traitement: par exemple le dosage de la CRP en cas d infection bactérienne néo-natale traitée par antibiothérapie, le dosage de l hémoglobine glyquée chez un diabétique; à faire un suivi thérapeutique: par exemple, dosage d un anti-épileptique, d un anti-tuberculeux; à détecter une pathologie fréquente dans le cadre d un dépistage systématique: par exemple le bilan lipidique (cholestérol, triglycérides, cholestérol HDL). Il faut respecter la fréquence de réalisation de ces tests: inutile de répéter le dosage de l hémoglobine glyquée plus d une fois tous les 3 mois.

LE COUT DES ANALYSES L analyse: - Est à la nomenclature de la Sécurité Sociale (cotation en B; 1B= 0,27 euros) => Votre patient sera remboursé - N est pas à la nomenclature de la Sécurité Sociale (cotation en B HN) => Votre patient sera peut-être remboursé s il a une mutuelle A l Hôpital : avoir à l esprit que les réactifs pour les nouveaux marqueurs biochimiques coûtent le plus souvent beaucoup plus cher que les anciens Un dosage de CPK: 0,1 euro Un dosage de troponine: 4 euros Un dosage de BNP: 30 euros