MALADIE RÉNALE CHRONIQUE ET ADDICTIONS (ALCOOL TABAC) Dr SCERRA Sami Médecin Coordinateur Réseau Régional d Addictologie 30 Avril 2016
Maladie rénale chronique Présence pendant plus de 3 mois de marqueurs d atteinte rénale (morphologiques, histologiques, biologiques) ou de baisse du DFG < 60 ml/min/1,73m 2 Maladie fréquente (10 % des adultes) Principales causes: HTA, diabète Dépistage et prise en charge importants pour ralentir la progression de la maladie (IRCt, Dialyse, TR)
Addiction Perte de contrôle d un comportement/de l usage de substance qui «donne du plaisir, de la satisfaction, de l intérêt» = c est un trouble de l usage (DSM V) à ne pas confondre avec les effets propres des substances («rien à voir avec la substance») Ainsi possibilité d avoir des conséquences graves de l usage sans avoir de trouble de l usage => Problématiques différentes «Malgré soi» qui entraine des adaptations psychologiques (déni, projection.)
Addiction Pr Auriacombe Déterminants bio psycho - environnementaux
Addiction - neurobiologie Substance ou comportement addictogène : action aigue au niveau du circuit de la récompense (aire Tegmentaire Ventrale, noyau Accubens ) avec libération de dopamine Nécessite un pic de stimulation donc une substance/un comportement qui agisse «vite et fort» Système universel de contrôle pour en profiter au mieux, éviter les inconvénients, s adapter aux conséquences Addiction: le système de contrôle dysfonctionne
Addiction - neurobiologie
Addiction Il s agit d une maladie, chronique, fréquente, grave dont le repérage est fiable et facile et pour laquelle il existe des thérapeutiques efficaces (Pr Auriacombe PUPH Psychiatrie/Addictologie CHU Bordeaux) Un symptôme: le craving Un signe: la rechute
Addiction Objectifs thérapeutiques: Ne pas confondre ceux du thérapeute et ceux du patient Guérison (retour à un usage normal dans l absolu) Réduction des risques Pour atteindre ces objectifs: Médicaments Approches psychothérapeutiques
Alcool et tabac En France 90 % de la population consomme de l alcool 5 à 10 % de ces usagers vont développer un trouble de l usage 30 % de la population française consomme du tabac dont la très grande majorité vont développer un trouble de l usage. Cout pour la société: 120 milliards / an pour chacune des 2 substances (données OFDT) A La Réunion (données tableau de bord ORS 2015) En population générale, ce sont les 2 principales substances psychoactives consommées (expérimentation, usage régulier). Morbi-mortalité en baisse mais supérieure à la moyenne nationale
Conséquences des usages Les conséquences directement liées au tabagisme Taux* de mortalité directement liée au tabagisme, Réunion et Métropole (moyenne 2010-2012) Surmortalité globale Maladies respiratoires : Taux 2 fois plus élevé 1 600 personnes prises en charge (CSAPA** 2014) 570 décès par an (moyenne 2010-2012) 1 ère cause de décès par cancer Sources : CSAPA (ANPAA 974, KAZOTE!), Inserm cepidc, Fnors, Réseau OSCOUR : services des urgences du CHU, CHGM et GEHR / Cire OI / ARS OI, INSEE * Taux standardisé sur la population France entière au RP 2006 / Taux pour 100 000 habitants ** Centre de Soins, d Accompagnement et de Prévention en Addictologie
Conséquences des usages Les conséquences directement liées à l alcoolisme 2 200 personnes prises en charge (CSAPA** 2014) 5 300 recours aux urgences (moyenne 2012-2014) Sur morbidité hospitalière Taux d hospitalisation pour dépendance : 2 fois plus élevé 230 décès par an (moyenne 2010-2012) dont 7 sur 10 prématurés
MRC et addictions quels points communs? Maladies Chroniques, fréquentes, longtemps silencieuses, potentiellement très handicapantes Accompagnement global: médico-psycho-social Plusieurs partenaires Importance d une bonne coordination du parcours de soins (problématique complexe) Rôle des réseaux Outils (Offre de soins, plateforme téléphonique, PPS) Rôle de l éducation thérapeutique ++
MRC et addictions Deux maladies chroniques - quelles différences? - Maladie vs vice - Maladie organique vs psychologique - Responsabilité du patient dans la survenue de la maladie - Acceptation pour le patient et l entourage - Difficultés de prises en charges Représentations!
MRC et usages d alcool et de tabac quels liens? 1 Causalité 2 Impact des usages d alcool et de tabac sur le pronostic de la MRC 3 Impact de la MRC sur l accompagnement addictologique
Causalité Usages d alcool et de tabac entrainant la MRC Tabac -> maladie athéromateuse Usage chronique d alcool -> HTA Cirrhose OH et néphropathie IGA secondaire MRC «entrainant» des «addictions» Consommation à visée anxiolytique, réponse inadaptée qui peut devenir autonome
Impact négatif de l alcool et du tabac sur le pronostic de la MRC Tabac et atteintes vasculaires Ajout d un FDRCV Alcool et HTA, diabète (PCC) Facteur de déséquilibre Alcool et risques de surcharge (en cas de faible diurèse) Alcool et adhésion thérapeutique / adhérence aux traitements Alcool et risque suicidaire (dépresseur, risque de passage à l acte)
Médicaments utilisés en addictologie (alcool et tabac) et dysfonction rénale
Substituts nicotiniques : Dispositifs transdermiques, pastilles, cp à sucer, e cigarette Médicaments de première intention dans le sevrage tabagique (en association avec prise en charge psycho sociale) Efficaces si bien utilisés Pas d adaptation de posologie nécessaire
Diapo addictolytiques
Champix / Varénicicline (agoniste des récepteurs nicotiniques cérébraux 2006) Médicament de deuxième intention dans le sevrage tabagique Efficacité: TNS, Varénicicline > bupropion > placebo Effets secondaires potentiels: dépression, suicide, agressivité, agitation, insomnie, troubles intestinaux, +/- cardiovasculaires Posologie habituelle: 0,5 mg/jour jusqu à 1mg x 2/jour pendant 12 semaines En cas d insuffisance rénale: modification si Cl < 30 ml/min/m2 (1mg/jour max) NR en cas d IR Terminale
Zyban / Chlorydrate de Bupropion (inhibiteur de la recapture de NAD, Sérotonine - 2001) Médicament de dernière intention dans le sevrage tabagique Efficacité: TNS, Varénicicline > bupropion > placebo Effets secondaires potentiels: dépression, suicide, réactions cutanées, insomnie, angoisse, vertiges, céphalées, convulsions, HTA, angor Posologie habituelle: 150 mg/jour 6 jours puis 300 mg/jour pendant 7 semaines En cas d insuffisance rénale 150 mg/jr (RCP)
Baclofène /Liorésal Analogue Gabaergique Recommandation Temporaire d Utilisation (RTU) Rapport bénéfice risque présumé favorable Maintien de l abstinence après sevrage Contrôle de la consommation, réduction des risques et des dommages Efficacité Etudes de cohorte, retours d expériences de patients : + BACLAD : Fortes doses efficaces dans le maintien de l abstinence Bacloville : résultats en attente Alpadir: résultats en attente Posologie Titration = Jusqu à 300 mg/jour (10 cp x 3/jour) Élimination rénale à 80 %
Baclofène /Liorésal = Analogue Gabaergique En cas d insuffisance rénale Dans la RTU, IR SÉVÈRE = CONTRE INDICATION Dans les RCP, précautions d emploi, surveillance des effets indésirables, ajustement / dosages plasmatiques EN PRATIQUE DÉBUTER À 5 MG / JOUR ET AUGMENTER TRÈS PROGRESSIVEMENT EN FONCTION DE L EFFICACITÉ ET DE LA TOLÉRANCE
Indication AMM : Réduction de la consommation Efficacité Nalméfène / Selincro Antagoniste des R opioïdes (μ,δ), agoniste κ Posologie : 1 cp/jour En cas d insuffisance rénale = Pas d adaptation posologique
Naltrexone/Revia Indication AMM : Maintien de l abstinence Efficacité Posologie : 1/ jour pendant 3 mois En cas d insuffisance rénale surveillance particulière (RCP) En cas d insuffisance rénale sévère = CI
Acamprosate / Aotal Indication AMM : Maintien de l abstinence Efficacité Posologie : 2 cp x 3 / jour si > 60 kg 2 cp 1 1 si < 60 kgs pour 1 an En cas d insuffisance rénale = CI
Benzodiazépines DIAZÉPAM / VALIUM - OXAZÉPAM / SERESTA SEVRAGE ALCOOL en prévention des complications (convulsions, DT) Quelques jours en association avec une Hydratation En cas d insuffisance rénale = Pas d adaptation posologique
Quelques outils utiles en addictologie à La Réunion Les patients souffrant de MRC sont une population à dépister et à prendre en charge de façon optimale pour les troubles des usages d alcool et/ou de tabac!
Repérage précoce et intervention brève Importance du dépistage en addictologie FREINS AU DÉPISTAGE DES CONDUITES ADDICTIVES EN MÉDECINE DE VILLE? : Manque de temps Absence de demande / résistance du patient Manque de formation, de ressources Efficacité ressentie faible
Repérage précoce et intervention brève RPIB : Procédure de prévention secondaire visant au repérage précoce d un comportement «facteur de risque» La personne ainsi repérée fait l objet d une intervention brève, structurée et ciblée. Le but étant de motiver à un changement de comportement Tous les professionnels de santé du premier recours sont concernés : médecins généralistes, pédiatres, pharmaciens d officine, infirmiers, dentistes, médecins du travail, médecins scolaires, sages-femmes, gynécologues, travailleurs sociaux et bien d autres RPIB prévu pour être systématique mais limites en médecine de ville: => Cibler les populations à risque: D avoir un trouble de l usage D avoir des conséquences (encore plus) grave de l usage
Repérage précoce et intervention brève = > Utile pour les patients atteints de MRC (population à risque) Formation fin 2016 : ANPAA 974
Plan personnalisé de Santé (PPS) Qu est ce que c est? OUTIL DE COORDINATION DU PARCOURS DE SOINS PRECONISÉ PAR LA HAS CENTRÉ SUR LA PERSONNE A quoi ça sert? OPTIMISER L ACCOMPAGNEMENT DES PATIENTS SOUFFRANT DE PROBLÉMATIQUES COMPLEXES: GLOBAL PERSONNALISÉ COORDONNÉ - RESPECT DES BONNES PRATIQUES Est ce adapté pour aider à l accompagnement addictologique? ADDICTION = PATHOLOGIE CHRONIQUE SOUVENT COMPLEXE NÉCESSITANT UN ACCOMPAGNEMENT GLOBAL (MÉDICO-PSYCHO-SOCIAL) Quelle est la place du MG dans la coordination des soins? PIVOT
PPS Mise à disposition juin 2016 PPS en ligne SAOME-Dr SMART
PPS Diffusion et aide à la prise en main de l outil en ligne Rencontres interprofessionnelles organisées par SAOME (différents professionnels) Visites confraternelles au cabinet Rémunération (prestation dérogatoire) Établissement PPS = 2 consultations Bilans intermédiaires = 1 consultation Bilan annuel = 1 consultation
Offre de soins en addictologie à La Réunion ANNUAIRE papier et en ligne PLATEFORMES TÉLÉPHONIQUES MÉDICO-PSYCHO-SOCIALE
Stratégie de réduction des risques et des dommages Abstinence pas toujours possible (patient ne veut ou ne peut pas) Importance de la RDR Accepter les objectifs du patients prendre le patient «là ou il en est» Exemple de la cigarette électronique (on ne traite pas l addiction mais on réduit très très fortement le risque CV => amélioration du pronostic rénal) Exemple d une réduction de consommation d alcool vs abstinence
CONCLUSIONS Importance du repérage des usages de SPA et conduites addictives notamment concernant l alcool et le tabac chez tout sujet atteint de MRC car: Co-morbidité fréquente Facile à repérer (interrogatoire) Un accompagnement adapté peut permettre indirectement d améliorer le pronostic de la MRC Existence d outils d optimisation du parcours de soins dans ce contexte de deux pathologies chroniques intriquées => parcours complexes