Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou coloscopie virtuelle

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Transcription:

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou coloscopie virtuelle D. Heresbach et J.-F. Bretagne Introduction En France, le dépistage du cancer colorectal est basé sur les recommandations de pratique clinique concernant l endoscopie digestive basse de 1996 révisées en 2004 (1) et les recommandations développées lors de la Conférence de consensus consacrée au cancer colorectal en 1998 (2). Un programme de dépistage par recherche de saignement occulte dans les selles (test Hemoccult II ) répété tous les deux ans, utilisant le test Hemoccult II, est à présent appliqué dans vingt-trois départements français, avec l espoir de le généraliser à la totalité du pays dans un futur proche, c est-à-dire fin 2007. Toutefois, d autres modes de dépistage basés sur l endoscopie ont été préférés dans d autres pays européens et aux États-Unis, et les résultats des programmes en cours en Grande-Bretagne, aux États-Unis et en Italie sont attendus vers 2006-2010. Dans cette revue générale, nous vous proposons de faire le point des connaissances sur le dépistage du cancer colorectal par les méthodes endoscopiques et par coloscopie virtuelle ou coloscanner. Place de l endoscopie dans les recommandations actuelles de dépistage du cancer colorectal dans une population à risque moyen Peu après les recommandations publiées par la Société Nationale Française de Gastroentérologie en matière de dépistage du cancer colorectal (2), l Union européenne (3) a recommandé le test Hemoccult II tous les un à deux ans chez les sujets âgés de 50 à 74 ans et a suggéré d évaluer par des études contrôlées randomisées les performances de la sigmoïdoscopie flexible (RSS) comme méthode de dépistage.

58 Le dépistage du cancer colorectal La Société Américaine d Endoscopie (ASGE) a recommandé un test Hemoccult II annuel à partir de l âge de 50 ans, une RSS tous les cinq ans ou une coloscopie totale (CT) tous les dix ans (4). La même année, le Collège Américain de Gastroentérologie s est prononcé en faveur de la CT pratiquée tous les dix ans à partir de 50 ans et a proposé comme alternative un test Hemoccult II annuel et une RSS tous les cinq ans (5). Les recommandations australiennes proposent soit la CT tous les cinq à dix ans soit un test Hemoccult II annuel associé à une RSS tous les cinq ans (6). En 2003, l Association Américaine de Gastroentérologie (7) a proposé aux sujets à risque moyen âgés de 50 ans ou plus de choisir parmi les stratégies de dépistage suivantes: a) test Hemoccult II annuel (trois tests à deux reprises associés à des restrictions diététiques et sans réhydratation) ; b) une RSS tous les cinq ans suivie de CT si la première investigation a démontré la présence d adénome de plus d un centimètre, d adénome villeux, d adénomes multiples ou d autre type d adénome chez un patient de plus de 65 ans ou ayant un contexte familial de cancer colorectal ; c) test Hemoccult II annuel suivi de RSS tous les cinq ans, en commençant par le test Hemoccult II ; ou d) une CT tous les dix ans. Dès lors, la plupart des recommandations européennes actuelles prônent le dépistage par le test Hemoccult II dont l efficacité a été démontrée dans plusieurs essais contrôlés, mais certains pays incluent dans ce dépistage la coloscopie parmi les techniques prises en charge (8). Résultats du dépistage du cancer colorectal par endoscopie digestive basse dans une population à risque moyen La prévention du cancer colorectal basée sur la rectosigmoïdoscopie flexible ou souple (RSS) ou la coloscopie totale (CT) a été évaluée au cours d études ouvertes et d études cas témoins. Des essais contrôlés randomisés sont en cours en Grande- Bretagne, en Italie, et aux États-Unis, conformément aux recommandations de dépistage du cancer colorectal de l Union européenne (3). Résultats des études ouvertes et des études de cohorte Plusieurs études ouvertes (9-34) ont rapporté des taux de détection par endoscopie d adénomes et de carcinomes dans une population à risque moyen (tableau I). La plupart de ces études ont analysé les résultats de la surveillance par CT, mais pour certaines la CT était faite après une première exploration préalable par RSS (30, 33-35, 40). Aucune de ces études n a fourni des données d incidence et de mortalité observées au cours du suivi (tableau I). Des adénomes ont été détectés chez 6 % à 46 % des patients, des adénomes avancés (adénomes tubulovilleux ou de taille 1 cm ou en dysplasie de haut grade ou carcinome in situ) chez 2 % à 13 % des patients, et des carcinomes dans 0,3 % à 2,5 % des cas. Ces grandes différences observées entre les séries de détection peuvent être imputées à des différences de conception des études ou des critères d inclusion (âge, sexe, RSS préalable). Les antécédents fami-

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 59 Tableau I - Études ouvertes de dépistage endoscopique du cancer colorectal chez les sujets à risque moyen. Auteurs (année) n patients dépistés (1) Critères d inclusion (2) Tests effectués (%) Adénome (%) Adénome Carcinome (%) avancé (%) Johnson (1990) 90 > 50 ans 88 (97) 23 (26) 2 (2) 1 (1) (9) CT Anamnèse, F(-), P(-) Hemoccult II (-) 89/90 Rex (1991) 210 50-75 ans 209 (95) 53 (25) 13 (6) 1 (0,5) (10) CT Anamnèse, F(-), P(-) Hemoccult II (-) DiSario (1991) 119 50-79 ans, H 119 (100) 49 (41) 7 (6) ---- (11) CT Anamnèse, F(-), P(-) Hemoccult II (-) 107/119 Lieberman (1991) 113 50-76 ans 105 (90) 33 (31) ---- 1 (1) (12) CT Anamnèse, F (20%) Foutch (1991) 129 50 ans 129 (100) 17 (13) ---- 3 (2,5) (13) CT Anamnèse, F (12%) Foutch (1991) 114 50-79 ans 114 (100) 26 (23) 11 (10) ---- (14) RSS ± CT Anamnèse, F(-), P(-) Hemoccult II (-) Rex (1992) 482 50-75 ans 482 (100) 124 (26) ---- 3 (0,6) (15) CT Anamnèse, F(-), P(-) Hemoccult II (-) Rex (1993) 633 50-75 ans 624 (99) 125 (25) 54 (9) 3 (0,6) (16) CT Anamnèse, F(-), P(-) Kadakia (1996) 176 > 50 ans 175 (99) 80 (46) ---- ---- (17) RSS ± CT Anamnèse, F(-), P(-) Read (1997) 3 496 ---- ---- 203 (6) 33 (1) ---- (18) RSS ± CT 108/RRSS (+) Wallace (1998) 4490 50 ans ---- ---- 71 (1,6) 1 (0,0003) (19) RSS ± CT Anamnèse, F(-) (1) CT : coloscopie totale ; RSS : sigmoïdoscopie flexible. (2) H : hommes ; Anamnèse F(-) ou P(-) : aucun antécédent familial ou personnel de cancer colorectal ; Hemoccult II (-) négatif SY (+) patients symptomatiques. (3) adénome > 1 cm ; CCR : cancer colorectal.

60 Le dépistage du cancer colorectal Tableau I (suite) - Études ouvertes de dépistage endoscopique du cancer colorectal chez les sujets à risque moyen. Auteurs (année) n patients dépistés (1) Critères d inclusion (2) Tests effectués (%) Adénome (%) Adénome (%) Carcinome (%) avancé (%) Nicholson (2000) 20 50 ans ---- 3 (15) ---- ---- (20) CT Anamnèse, F(-) Ikeda (2000) 3 992 48-57 ans, H 3 131 (78) 1 231 (39) 61 (2) 18 (0,5) (21) CT Anamnèse, F(-), P(-) Rosen (2000) 570 50-90 ans ---- 95 (17) 45 (8) ---- (22) CT --- Lieberman (2000) 3 196 50 ans 3 121 (98) 1171 (37) 329 (10,5) 30 (1) (23) CT Anamnèse, F(14%) Collet (2000) 6 446 50-64 ans 2 605(40) 351 (13) --- 7 (0,25) (24) RSS ± CT Anamnèse, F(-), P (-) 302 (98) 38 (13) --- 17 (6) Imperiale (2000) 1 994 > 50 ans 1 934 (97) 168 (8,4) 61 (3,1) 12 (0,6) (15) CT Anamnèse, F(?), P(-) Lieberman (2001) 3 121 50 ans 2 885 (93) 788 (27) 306 (11) 24 (0,8) (26) CT Anamnèse, F(?), P(-) Schoenfeld (2005) 1 593 40-79 ans 1 483 (93) 229 (20) 71 (4,8) 1 (0,08) (28) CT Anamnèse P(-), Hemoccult II (-) Imperiale (2002) 906 40-49 ans 898 (99) 79 (9) 32 (3,5) ---- (29) CT Anamnèse, F(?), P(-) Sung (2003) 505 > 50 ans 476 (95) 117 (25) 63 (13) 4 (0,8) (30) CT Anamnèse, F(-), P(-) Harewood (2003) 5 109 Moyenne 62 ans, H ---- ---- 467 (5) (3) ---- (32) CT histologie (?) Wu (2003) 110 (562) Anamnèse, F(-) ---- ---- 40(7) 2 (0,3) (33) CT (via RSS) Hemoccult II (-) Betes (2003) 2 260 40 ans 2 210 (98) 617 (28) 148 (6,5) 11 (0,5) (34) CT Anamnèse, F(-), P(-) Soon (2005) 1512 40 ans cohorte chinoise 1 456 (97) 214 (14,7) 58 (4,0) 4 (0,3) (31) CT Anamnèse, F(-), P(-) 3 463 40 ans cohorte occidentale 3 403 (98) 705 (20,7) 166 (4,9) 11 (0,3) CT Anamnèse, F(-), P(-) (1) CT : coloscopie totale ; RSS : sigmoïdoscopie flexible. (2) H : hommes ; Anamnèse F(-) ou P(-) : aucun antécédent familial ou personnel de cancer colorectal ; Hemoccult II (-) négatif SY (+) patients symptomatiques. (3) adénome > 1 cm ; CCR : cancer colorectal.

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 61 liaux n étaient pas toujours connus ; les patients ayant un antécédent familial de cancer colorectal ont été inclus dans certaines études et exclus dans d autres ; enfin quelques études ont inclus exclusivement des patients avec test Hemoccult II négatif. Dans certaines études, la CT était réservée aux patients porteurs d anomalies à la RSS (par exemple, au moins un adénome, un adénome avancé, ou de multiples adénomes). Dans les études ayant inclus le plus grand nombre de patients (24-29, 32, 34) ayant respecté la définition du risque moyen de cancer colorectal et reposant sur la CT, les taux de détection étaient respectivement de 10 % à 25 % pour les adénomes, 5 % à 15 % pour les adénomes avancés, et de 0,1 % à 1 % pour les carcinomes. Deux études n incluant respectivement que des hommes (26) ou que des femmes (29) à risque moyen cancer colorectal ont montré que ces trois types de lésions étaient présents chez respectivement 27 % vs 20 %, 11 % vs 4,9 % et 0,8 vs 0,1 % des patients. Résultats des études cas témoins Plusieurs études cas témoins ont évalué l incidence du cancer colorectal et la mortalité chez des patients explorés par RSS ou CT (tableau II). L incidence du cancer colorectal était significativement diminuée, de 45 % à 80 % après endoscopie basse. Dans cinq études cas témoins (35-39), la mortalité était diminuée de façon significative de 56 % à 75 %. Bien que certaines études contrôlées aient reposé exclusivement sur une rectosigmoïdoscopie rigide (35) ou une RSS (36, 40, 42), et d autres sur la RSS ou la CT (37-39, 41), l impact de la RSS ou de la CT sur l incidence ou la mortalité du cancer colorectal sont similaires. Dans des études avec rectosigmoïdoscopie rigide (35) ou souple (36, 42), la réduction de la mortalité par cancer colorectal était entièrement calculée pour les lésions distales du rectum ou du sigmoïde, accessibles par l exploration endoscopique. Dans une étude, la réduction de l incidence était inversement proportionnelle à l intervalle de temps écoulé depuis la RSS ou la CT (41) : la diminution était de 80 % pour les patients explorés au cours des cinq dernières années et restait significativement diminuée de 59 % pour ceux explorés plus de dix ans auparavant. Dans l étude par RSS de Newcomb et al. (42), une réduction significative de 70 % de l incidence du cancer rectosigmoïdien était également observée, mais cette diminution n était plus significative chez les patients explorés depuis plus de sept ans. Résultats des études contrôlées L impact de l endoscopie de dépistage avec polypectomie sur l incidence et/ou la mortalité par cancer colorectal a fait l objet de plusieurs études contrôlées qui ont utilisé divers protocoles. Dans un premier type d études réalisées chez des patients à risque moyen ou élevé de cancer colorectal et tous porteurs d adénome (sousgroupes avec incidence et risque élevé de néoplasie), la polypectomie au cours de la CT a été suivie d une diminution de l incidence du cancer colorectal (43-45). La polypectomie au cours de la CT a été associée à une réduction de l incidence du

62 Le dépistage du cancer colorectal Tableau II - Études cas témoins du dépistage endoscopique du cancer colorectal chez les sujets à risque moyen. Auteur v(année) (réf.) critère d inclusion (1) Groupe nombre n RR de CCR ou RR de décès par CCR (2) Selby SR (1971-1988) cas 261 0,25 (0,16-0,42) et 0,80 (0,54-1.19) (1992) (35) témoins 868 décès par CCR distal et proximal (accessible ou inaccessible par SR) Newcomb RSS (1979-1988) cas 74 0,21 (0,1-0,52), 0,05 (0,01-0,43), 0,36 (0,11-1.2) (1992) (36) témoins 206 mortalité par CCR, CCR distal et CC Müller RSS ou CT (1988-1992) cas 4358 0,41 (0,33-0,50) et 0,44 (0,36-0,53) (1995) (37) 68-69 ans témoins a (3) 16531 mortalités par CCR versus contrôles a et d témoins d (3) 16199 Müller RSS ou CT cas 16351 0,51 (0,44-0,58) et 0,55 (0,47-0,64) (1995) (38) 7 à 12 ans/diag témoins 16351 incidence du CC et CR Kavanagh RSS ou CT cas 21549 0,58 (0,36-0,96) et 0,56 (0,20-1,6) (1998) (39) 40-75 ans témoins 3195 incidence et mortalité du CCR hommes Slattery RSS cas 1048 0,6 (0,4-0,8) et 0,5 (0,3-0,8) incidence (2000) (40) 10 années/diag témoins 1209 du CCR chez les hommes et femmes 30-79 ans Brenner RSS ou CT cas 320 0,20 (0,08-0,49) et 0,41 (0,19-0,88) (2001) (41) 40-80 ans témoins 263 RRSS ou CT < 5 ou > 10 années / diagnostic de CCR Newcomb RSS (1998-2002) cas 1726 0,30 (0,20-0,43) et 0,83 (0,66-1,04) (2003) (42) 20-75 ans témoins 1324 CCR proximal et distal diagnostiqués (1) CT : coloscopie totale ; RSS: sigmoïdoscopie souple ; SR : sigmoïdoscopie rigide (année d inclusion), âge du patient. (2) CCR : cancer colorectal; CC : cancer colique ; CR : cancer rectal; diag : diagnostics de CCR. (3) contrôles v et d : contrôles vivants et décédés. RR : risque relatif (le nombre entre parenthèses indique l intervalle de confiance à 95 %).

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 63 cancer colorectal de 76 % à 98 % comparée à trois groupes témoins historiques nord-américains (44). Dans une autre étude (45), des sujets asymptomatiques à risque moyen de cancer colorectal, qui avaient subi une polypectomie d un ou plusieurs adénomes, ont été comparés aux contrôles chez lesquels l incidence du cancer colorectal avait été estimée à partir des taux de mortalité par cancer colorectal extraits des registres nationaux italiens. Cette comparaison a montré une réduction significative de 66 % (IC 95 %, 0,23-0,63) de l incidence du cancer colorectal après 10,5 ans de surveillance postpolypectomie. Dans un second type d études, plusieurs essais contrôlés randomisés (tableau III) ont comparé la RSS au test Hemoccult II ou à l absence de dépistage. Un de ces programmes (51, 52) comportait aussi un bras CT, et une seule autre étude, prématurément interrompue, comparait le dépistage premier par CT à l absence de dépistage (54). Un dernier programme de dépistage par CT n a actuellement publié que les premiers taux de participation (57). Un seul essai contrôlé randomisé a déjà rapporté l impact du dépistage endoscopique sur l incidence du cancer colorectal et sa mortalité (47, 58) : l incidence du cancer colorectal après surveillance pendant dix ans était réduite de 80 % à dix ans (RR, 0,2 ; IC 95 % : 0,03-0,95) dans le groupe dépisté par RSS. Aucune diminution significative de la mortalité par cancer colorectal n a été observée, avec respectivement 1 et 3 décès parmi les 400 sujets explorés par RSS et les 399 témoins du fait de la taille des effectifs (58). Les données relatives à l impact du dépistage par RSS sur l incidence et la mortalité du cancer colorectal en Grande-Bretagne (56), en Italie (50), et aux États-Unis (48, 49) devraient être disponibles entre 2006 et 2010 en fonction des périodes d inclusion des patients : 1996-1999 en Grande Bretagne ; 1995-1999 en Italie, et 1999-2000 aux États-Unis (tableau IV). Ces différents programmes ont rapportés des taux de détection d adénomes par RSS ou CT de 7-18 % et 5-21 % alors que pour les carcinomes ces taux étaient de 0,03-0,54 %, et de 0-1,6 % ce qui est comparable aux résultats obtenus dans les études de cohortes prospectives (24-29, 32, 34). Résultats des études à stratégies combinées (endoscopie plus test Hemoccult II ) Plusieurs études (tableau V) ont comparé l impact de la rectosigmoïdoscopie rigide (62) ou souple (66) isolément ou combinée au test Hemoccult II. D autre part, quatre études (53, 63-65) ont comparé les résultats du test Hemoccult II seul à ceux du test Hemoccult II associé à la RSS. Bien que l association des deux techniques de dépistage améliore les taux de détection des carcinomes (62) ou des adénomes coliques (62, 63, 66), seules deux études ont rapporté des données de surveillance. Dans une étude (62), après une surveillance moyenne de neuf ans, l incidence des carcinomes colorectaux était semblable dans les deux groupes (0,9 vs 0,9 pour 1 000 patients-années), mais il existait une diminution de la mortalité par cancer colorectal à la limite de la significativité en faveur de la détection par méthodes combinées (0,63 vs 0,36 décès pour 1 000 patients-années). L autre étude (63) portait sur une période de surveillance variant de 24 à 62 mois et n a pas mis en

64 Le dépistage du cancer colorectal Tableau III - Études contrôlées randomisées du dépistage endoscopique du cancer colorectal chez les sujets à risque moyen. Auteurs Critère n patients n inclus Antécédent familial Découverts à l inclusion (années) (réf.) d inclusion (1) (%) (2) de CCR Adénome Adénome avancé Carcinome Brevinge 55-56 ans 3 184 1353 (42) --- 5 % 2,3 % 0,3 % (1997) (46) RSS vs Hemoccult II 3 183 1893 --- 0,7 % 0,5 % 0,05 % Thiis-Evensen 50-59 ans 400 324 (81) 7 % 35 % --- 0 % (1999) (47) suivi de 13 ans 399 358 8 % --- --- --- RSS vs NS Gohagan 55-74 ans 74 000 56 958 (77) 0 % --- --- --- (2000) (48) suivi de 23 ans 74 000 --- 0 % --- --- --- Bresalier RSS à 0 et 3 ans vs NS (2002) (49) Segnan 55-64 ans 17 148 9 911 (58) 11% 10,8 % 3,4 % 0,5 % (2002) (50) RSS vs NS 17 144 --- 11 % --- --- --- Segnan 55-64 ans 3 695 852 (23) --- --- 4,4 % 0,34 % (2002) (51) RSS vs Hemoccult II 8 310 2370 --- --- 1,1 % 0,26 % Segnan 55-64 ans 5 043 1 380 (27) --- --- 4,4 % 0,43 % (2004) (52) RSS vs Hemoccult II vs CT 5 546 1 625 --- --- 1,0 % 0,13 % Segnan 55-64 ans 8159 2336 (29) --- 0,1 % 1,5 % 0,30 % (2005) (53) Hemoccult II vs RSS 3650 1026 (28) --- 6,9 % 5,3 % 0,30 % vs RSS + Hemoccult II 10 867 3049 (28) Winawer 50-69 ans 547 444 (81) --- 17 % 5 % 1 % (2002) (54) CT vs NS 553 --- --- --- --- --- Gondal 50-64 ans 9 991 6 694 (67) 21 % 8,7 % 2,8 % 0,2 % (2003) (55) RSS vs RSS 9 946 6 266 19 % 8,0 % 2,6 % 0,2 % + Hemoccult II UK-FRSS Trial 55-64 ans 57 254 40 674 (71) --- 12 % 4,7 % 0,3 % (2003) (56) RSS vs NS 113 178 --- --- --- --- --- (1) RSS : sigmoïdoscopie souple ; NS : pas de dépistage ; CT : coloscopie totale ; Hemoccult II. (2) Pourcentage de patients dépistés par endoscopie.

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 65 Tableau IV - Participation (%), résultat et nombre d examens dans les programmes de dépistage du cancer colorectal par rectosigmoïdoscopie souple (RSS). Programme UK-FRSS (56, 59) Score (53) NORCAP (55) Telemark (47) PLCO (60,61) Fremantle (24) Date, n centre 1996-99 1995-99 1995-99 1993 1993-2001 1995-99 Âge (ans) 55-64 55-64 50-64 50-55 55-74 55-64 % homme- % > 60 ans 50,4 %-43,8 % 50,0 %-44,2 % 48,6 %-26,0 % 49 %-? 51,1 %-66,4% 59 %-? n courriers envoyés 368 142 266 568 20 780 400 77 465 6 446 n réponses obtenues 194 726 43 010 20 003 --- --- 1 483 n inclus pour RSS 57 254 17 148 9 991 400 64 658 2 605 CAT en RSS biopsie et exérèse exérèse à la pince biopsie de pas de biopsie laissé au choix biopsie encouragées, ou anse froide tout polype, majorité sans des polypes < 3 mm et dans les si < 5 mm pas d exérèse biopsie ni 5 cm distaux : abstention exérèse n RSS réalisées (%) (1) 40674(71-11-21) 9911 (58-3,7-23) 6694(67-32-34) 324(81-?) 55 989(83-?) 2605(100-?) n polype (%) (2) 10258 (25.2) 1695 (17.6) ---- 112 (35) 15 150 (23.4) 1678 (64) n adénome (%) (2) 4931 (12.1) 1070 (10.8) 1154 (11.5) 57 (18) 4655 (7,2) (8) 351 (13) n adénome à 1905 (4,7) (3) 341 (3,4) (4) 287 (2,8) (5) 34 (10) (6) 1746 (2,7) (4)(8) 116 (4) (7) risque élevé (%) (2) n cancer (%) (2) 131 (0,34) 47 (0,54) 21 (0,2) 1 (0,03) 187 (0,29) 6 (0,2) Critères pour CT polype 1 cm, polype 5 mm, polype 1 cm polype polype ou adénome après RSS 3 adénomes, polype et néoplasie sur 5 mm masse quelle que villeux, adénome villeux mauvaise préparation, les biopsies soit la taille carcinome ou tubulovilleux, 3 adénomes, 20 p. hyperplasiques adénome villeux proximaux / rectum ou tubulovilleux (1) % par rapport au nombre, de patients inclus pour RSS courrier d invitation envoyé de réponse reçues. (2) % par rapport au nombre de RSS réalisée. (3) 3 polypes ou 1 cm. (4) : villeux ou > 1 cm, ou dysplasie. (5) villeux ou > 1 cm. (6) > 5 mm. (7) : villeux. (8) lésion distale rectosigmoïdienne ou dans les 50 cm distaux / marge anale.

66 Le dépistage du cancer colorectal Tableau IV (suite) - Participation (%), résultat et nombre de coloscopie totale (CT) dans les programmes de dépistage du cancer colorectal par rectosigmoïdoscopie souple (RSS). Programme UK-FRSS (56, 59) Score (53) NORCAP (55) Telemark (47) PLCO (60,61) Fremantle (24) n inclus pour RSS 57 254 17 148 99 91 400 64 658 2 605 n RSS réalisées (%) (1) 40 674 (71) 9 911 (58) 6 694 (67) 324 (81) 55 989 (83) 2 605 (100) Critères pour CT polype 1 cm, polype 5 mm, polype 1 cm polype polype adénome après RSS 3 adénomes, polype et néoplasie sur 5 mm ou masse villeux, adénome villeux, mauvaise préparation, les biopsies quelle que soit carcinome ou tubulovilleux 3 adénomes, la taille 20 p. hyperplasiques adénome villeux proximaux / rectum ou tubulovilleux N coloscopie totale indiquée (%) (2) 2 131 (5) 832 (8,.4) 1302 (19,5) 112 (35) 15 150 (23,4) 399 (15) réalisée (%) 2 051 (96-5) (9) 775 (93-8) (9) 1175 (18) (11) 102 (91-31) (9) 11 241 (74-10) (9) 302 (76-11) (9) n adénome (%) 386 (18,8) (10) 116 (15,5) (10) 308 (4,6) (11) --- 5676 (50) (10) 65 (21) (10) n carcinome (%) 9 (0,4) (10) 7 (0,9) (10) 0 (0) (11) 1 (1) (10) 180 (1,6) (10) 5 (1,6) (10) (9) % par rapport au nombre de coloscopie totale indiqué % par rapport au nombre de RSS réalisée. (10) % par rapport au nombre de CT réalisée. (11) nombre et % de diagnostic par RSS et/ou CT.

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 67 Tableau V - Études contrôlées randomisées du dépistage colorectal par la sigmoïdoscopie souple seule ou combinée à l Hemoccult II. Auteurs Groupe (2) Participation Patients dépistés Carcinome Adénome Mortalité (année) (réf.) % n n n (avancé) (3) Winawer (1) SR --- 5 806 17(31) (5) --- 0,63 décès (6) (1993) (62) SR + Hemoccult II --- 6 673 26(31) (5) --- 0,36 décès (6) SY (+) Rasmussen Hemoccult II 56 3 055 4 21(14) (3) 14 décès (4) (1999) (63) RSS + Hemoccult II 40 2 222 12 253(72) (3) 11 décès (4) 50-75 ans, RSS (-) Berry Hemoccult II 50 3 128 2 (4) (3) --- (1997) (64) RSS + Hemoccult II 20 3 243 3 (26) (3) --- 50-74 ans, SY (-) Verne Hemoccult II 32 854 1 3 --- (1998) (65) RSS + Hemoccult II 30 401 1 30 50-75 ans, SY (-) Hoff SY 67 6 694 21 1 167(284) (3) --- (2003) (66) RSS + Hemoccult II 63 6 266 20 1 063(258) (3) --- (1) essai contrôlé non randomisé. (2) RSS: sigmoïdoscopie souple ; SR : sigmoïdoscopie rigide ; Hemoccult II ; SY (-) : aucun symptôme. (3) adénome 10 mm. (4) décès par cancer colorectal après 24 à 62 mois de suivi. (5) cancer incident après dépistage. (6) décès par 1000 patient-années (p < 0,05) après 9 années de suivi.

68 Le dépistage du cancer colorectal évidence de différence significative de mortalité par cancer colorectal entre le test Hemoccult II seul ou associé à la RSS. Ces résultats sont en accord avec ceux d une large étude prospective récente portant sur 2 885 patients à risque moyen (26), au cours de laquelle les sensibilités du test Hemoccult II et de la RSS dans la détection du cancer colorectal ne s additionnaient pas. Ainsi, la sensibilité du diagnostic de néoplasie avancé était de 70 % avec la RSS seule et de 76 % avec l association RSS et test Hemoccult II. Bien qu aucune étude n ait comparé en population jusqu à présent la stratégie endoscopique et non endoscopique dans le dépistage du cancer colorectal, les deux stratégies ont été utilisées dans les mêmes zones géographiques par le même groupe d investigateurs (67). Les rendements en termes de détection des lésions ont été comparés pour le test Hemoccult II tous les deux ans pendant dix ans vs le test Hemoccult II associé à un seul examen par RSS. Néanmoins, aucune donnée relative à l incidence et la mortalité par cancer colorectal au cours du suivi n a été recueillie dans cette étude. Les taux de détection du cancer colorectal étaient respectivement de 0,99 % et 0,66 % avec les deux stratégies et de 2,3 % et 3,3 % (P < 0,01) pour les adénomes à haut risque en ne tenant compte que des individus testés (analyse per-dépistage). Lorsque l analyse était faite avec l intention de dépister, les valeurs correspondantes étaient respectivement 0,65 % vs 0,27 % (P < 0,002) et de 1,5 % vs 1,3 %, pour le cancer et les adénomes à haut risque. Deux programmes de dépistage réalisés en Grande-Bretagne en population peuvent être comparés : l un était basé sur le test Hemoccult II tous les deux ans pendant onze ans (68, 69), et l autre sur une seule exploration par RSS entre 55 et 64 ans (56). L endoscopie a détecté dix fois plus d adénomes (1,5 % vs 12,5 %) et deux fois plus d adénomes de plus de 10 mm (1,2 % vs 2,4 %) ; les taux de détection de cancer colorectal étaient voisins (0,52 % vs 0,35 %) en analyse per-dépistage. Dans une étude récente comparant diverses stratégies (test Hemoccult II seul, RSS seule, RSS suivie d un test Hemoccult II, choix du patient entre le test Hemoccult II ou une unique RSS), le risque relatif de découverte d adénomes avancés par RSS comparativement au test Hemoccult II était de 3,6 (IC à 95 % : 2,5-5,1) (53). Quelle est la meilleure méthode d exploration endoscopique digestive basse pour le dépistage du cancer colorectal : rectosigmoïdoscopie souple versus coloscopie totale (RSS vs CT)? Dans le cadre d un dépistage à l échelle d une population, l alternative CT vs RSS a des répercussions financières dont il faut tenir compte. Aussi est-il important, quelle que soit la méthode, de définir les taux exacts de faux négatifs du dépistage du cancer colorectal. Plusieurs études ont tenté de déterminer la prédiction de tumeurs proximales (adénome ou adénome avancé) selon la présence de lésions coliques dis-

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 69 tales détectées par RSS (tableau VI). Les adénomes proximaux ont été observés chez 1,5 % à 4,8 % des patients exempts de lésions distales et chez 8 % à 13 % des patients porteurs d adénomes distaux. Les adénomes proximaux avancés chez les sujets à risque moyen de cancer colorectal représentent de 18 % à 54 % (25, 79, 95, 83) de la totalité des adénomes avancés détectés par dépistage. Dans ces études portant sur des sujets à risque moyen de cancer colorectal, les adénomes avancés proximaux étaient plus fréquents chez les patients porteurs d adénomes distaux que chez ceux qui en étaient dépourvus (25, 78-81, 83). Bien que les lésions au niveau distal (rectum et sigmoïde) découvertes en cours de CT aient été assimilées à celles découvertes par la RSS, deux études incluant des sujets à risque moyen, masculins (26) et féminins (28), ont montré que 66 % des hommes et seulement 35 % des femmes porteurs de néoplasies avancées auraient été détectés si la RSS avait été utilisée comme seule technique de dépistage. Une métaanalyse (85) a montré que le risque relatif d adénome proximal avancé était 2,8 fois plus élevé (IC 95 % : 1,45-5,42) chez les patients porteurs d un adénome distal mais n était pas significativement accru (RR = 1,63; IC 95 % : 0,61-4,33) chez ceux porteurs de polypes hyperplasiques de siège distal. Une analyse multivariée a été effectuée dans cinq études, afin de déterminer les facteurs prédictifs d adénome avancé proximal chez les sujets à risque moyen de cancer colorectal (78, 83, 86-88). Dans l une de ces études (78), un âge supérieur à 64 ans, des antécédents familiaux de cancer colorectal après 55 ans, et la présence au niveau distal d adénome tubulovilleux ou d adénomes multiples étaient associés à la présence d adénome proximal avancé. Les résultats de deux études ne peuvent aider à définir les indications de CT après RSS car l analyse multivariée a, soit exclu les patients dépourvus d adénome distal (78), soit inclus uniquement les patients présentant un adénome distal (87). Malgré l observation d adénomes proximaux respectivement chez 35 % et 20 % des patients avec ou sans adénome distal, et un risque accru d adénome proximal (RR = 1,8 ; IC 95 % : 1,2-2,5) chez les patients porteurs d adénomes distaux non avancés de taille inférieure à 9 mm, la présence d un adénome distal de moins de 9 mm n était pas associée à un risque accru d adénome avancé proximal synchrone (6 % des patients porteurs et 5,5 % dépourvus d adénome distal, RR = 1,1 ; IC 95 % : 0,5-2,6) ; le seul facteur de risque d un adénome avancé proximal identifié en analyse multivariée était dans cette étude (88) le sexe masculin (RR = 1,3 ; IC 95 % : 1,01-2,61). Dans une autre étude multivariée (83), le risque de développer un adénome proximal avancé était augmenté uniquement chez les patients porteurs d un adénome distal volumineux (RR = 2,6 ; IC 95 % : 2,0-3,4) ou villeux (RR = 2,7; IC 95 % : 2,1-3,5) mais non significatif chez les sujets porteurs d un seul petit adénome tubuleux distal (RR = 1,05 ; IC 95 % : 0,8-1,3). Pour mieux définir les critères prédictifs, un index a été établi à partir des résultats d une étude de dépistage par CT réalisée chez 1 994 individus à risque moyen de cancer colorectal ; les résultats ont été validés grâce à une autre cohorte prospective portant sur 1 031 individus examinés de façon successive (86). Des scores furent attribués à un certain nombre de critères tels que l adénome distal avancé ou non avancé (polype hyperplasique, adénome < 1 cm, adénome avancé, scores respectifs : 1, 2, et 3), le sexe (homme : score 1), et l âge (55 à 65 ans : score 1 à 3). La

70 Le dépistage du cancer colorectal Tableau VI - Taux de récidive et risque relatif d adénome proximal ou d adénome proximal avancé selon la nature de la lésion au niveau distal. Auteurs Patient Critère d inclusion % adénome proximal, adénome proximal avancé (2) selon le polype distal (années) (réf.) n Âge, procédé, sexe, indication (1) Aucun HP (3) Ad. tubuleux Ad. villeux Ad. <1cm Ad. 1cm Ad avancé Achkar 162 > 50 ans, RSS ± CT 13 29 --------------------33------------------------- (1988) (70) H 76 %, RSS (-) Foutch 129 > 50 ans, CT 15 32 --------------------37------------------------- (1991) (13) H 99 %, SY (-) Rex 210 50-75 ans, CT 15 15 ---------------------42------------------------- (1991) (10) H 71 %, SY (-) Lieberman 105 50-76 ans, CT 28 29 --------------------42------------------------- (1991) (12) H 100 %, SY (-) Rex 482 50-75 ans, CT 15 18 --------------------38------------------------- 1992 (15) Brady 162 > 50 ans, RSS ± CT 11,9 14,3 --------------------42------------------------- (1993) (71) H 76 %, SY (-) Zarchy 226 > 60 ans, RSS ± CT (2)--- --- 1,4 12,5 4,2 10,3 --- (1994) (72) H 63 %, SY (-) Kadakia 175 > 50 ans, RSS ± CT 23 --- ----------------------29------------------------- --- (1996) (73) H 60 %, SY (-) Read 3496, RSS ± CT --- --- --- --- 6-10 29 --- (1997) (74), SY (-) Wallace 4490 50 ans, RSS ± CT --- --- --- --- 0-5,4 --- 7,9 (1998) (75) H 71 %, SY (-) Sciallero 3088 18-69 ans, CT --- 19 ----------------------28------------------------- --- (1997) (76) H 55 %, SY (88 %) (1) H : pourcentage d hommes parmi les patients ; CT : coloscopie totale ; RSS : sigmoïdoscopie souple ; SY (-) : absence de symptôme indiquant une nécessité d endoscopie digestive basse. (2) étude rapportant le pourcentage d adénomes avancés et proximaux. (3) polype hyperplasique.

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 71 Tableau VI (suite) - Taux de récidive et risque relatif d adénome proximal ou d adénome proximal avancé selon la nature de la lésion au niveau distal. Auteurs Patient Critère d inclusion % adénome proximal, adénome proximal avancé (2) selon le polype distal (années) (réf.) n Âge, procédé, sexe, indication (1) Aucun HP (3) Ad. tubuleux Ad. villeux Ad. <1cm Ad. 1cm Ad avancé Schoen 981 > 35 ans, RSS ± CT (2)--- --- 3,2 5,7 3,4 5,7 5,9 (1998) (77) H 63%, SY (45 %) Lewin 2 972 > 50 ans, (2)4,8 --- --- 11,7 4,1 3,9 --- (1999) (78) H 61 %, SY (-), CT Lieberman 3 196 > 50 ans, CT (2)3,7 5,1 9,4 13,2 8,7 13,3 --- (2000) (79) H 97 %, SY (-) Imperiale 1 994 > 50 ans, CT (2)1,5 4,0 7,1 --- --- --- 11,5 (2000) (25) H 59 %, SY (-) Schoenfeld 1 463 > 50 ans, CT (2)3,4 -- --------------------33------------------------- 88,0 (2005) (28) F 100 %, SY (-) Hammer 3 268 53-73 ans, CT (2)4,1 --- --------------------33------------------------- 22,1 (2000) (80) H 49 %, SY (±) Ikeda 3 191 48 à 57 ans CT (2)0,8 --- --- --- 1,3 --- 6,0 (2000) (81) H 100 %, SY (-) Gondal 1 833 > 50 ans, RSS ± CT --- --- 21 25 20 28 28 (2003) (82) H 62 %, SY (-) (2)--- --- 4 12 3 11 10 Pinsky 8802 55-74 ans RSS ± CT (2)4,8 3,5 4,3 11,7 4,3 11,5 11,7 (2003) (83) H 61 %, SY (-) Betès 2210 > 40 ans, CT (2)1,4 0 4,2 --- --- --- 15,9 (2004) (84) H 75 %, SY (-) Soon > 40 ans, CT, SY (-) (2005) (31) 1512 H 62 %, cohorte chinoise (2)0,9 --- --- --- --- --- --- 3463 H 49 %, cohorte occidentale (2)1,9 --- --- --- --- --- --- (1) H : pourcentage d hommes parmi les patients; CT : coloscopie totale ; RSS : sigmoïdoscopie souple ; SY (-) : absence de symptôme indiquant une nécessité d endoscopie digestive basse. (2) étude rapportant le pourcentage d adénomes avancés et proximaux.. (3) polype hyperplasique

72 Le dépistage du cancer colorectal probabilité de détecter un adénome avancé proximal variait de 0,43 % à 27,8 %. Elle était égale à 0,68 % pour un score total de 0-1 à 2, à 11 %, pour un score total de 2-3 et à 10,0 %. Pour un score total de 4-7 dans la cohorte utilisée pour établir l index, ces valeurs étaient respectivement de 0,40 %, 1,92 %, et 3,79 % dans la cohorte servant à la validation. Selon cette étude, la CT est un examen approprié après RSS pour les sujets dont les scores indiquent un risque élevé (score 4 à 7) : chez ces sujets, le taux de détection d adénome avancé était de 61 %. Ainsi, la CT après RSS serait indiquée chez 19 % des patients qui réunissent les critères suivants : homme de plus de 65 ans ou homme de plus de 55 ans porteur d un adénome tubuleux de taille inférieure à 10 mm ou de polypes hyperplasiques, homme porteur d un adénome avancé, femme de plus de 65 ans avec polype hyperplasique, femme de plus de 60 ans avec adénome de taille inférieure à 10 mm, ou femme de plus de 55 ans avec adénome avancé. Dans le programme PLCO (dépistage de cancer de la prostate, du poumon, colorectal et ovarien) (77), si seuls les patients porteurs d adénome distal avancé (ADA) étaient soumis à une CT, 37 % des patients avec adénome avancé auraient été diagnostiqués et 16 % de sujets dépourvus d adénome avancé aurait eu une CT. Ces valeurs auraient été de 58 % ou 36 % pour les patients avec ADA ou les hommes de plus de 65 ans et de 77 % ou 69 % pour les patients avec ADA ou les hommes et les femmes de plus de 65 ans. Au total, pour un dépistage basé sur la RSS première, il est nécessaire d envisager au moins une CT chez les sujets présentant un adénome avancé distal ; cette stratégie doit être adaptée en fonction du sexe et de l âge du sujet. Il pourrait être proposé de faire une CT après RSS ayant mis en évidence non seulement un adénome avancé quels que soient l âge ou le sexe du sujet mais aussi pour un adénome simple (non avancé) chez les hommes de plus de 55 ans et les femmes de plus de 60 ans. Fréquence et rythme de l endoscopie digestive basse pour le dépistage du cancer colorectal Des recommandations ont été proposées pour la répétition des endoscopies digestives basses après un premier dépistage chez les sujets à risque moyen de cancer colorectal. Aux États-Unis, on recommande une RSS tous les cinq ans (7) sur la base d une étude cas témoins au cours de laquelle une diminution significative de la mortalité par cancer colorectal était observée pendant les cinq ans après rectosigmoïdoscopie mais qui disparaissait pour des intervalles plus longs (48, 50, 55). Aux États-Unis, il est également proposé un intervalle de dix ans entre les CT (7), bien qu une étude où deux CT étaient immédiatement et successivement répétées a montré que jusqu à 6 % des patients étaient porteurs respectivement d adénomes avancés ou d adénomes méconnus lors de la première CT (89-91). En outre, la proportion des patients porteurs d adénomes méconnus après une première CT était de 16 %, 30 % et même 48 % lorsque aucun, un ou deux polypes avaient été repérés lors de la CT (89). Par conséquent, cet intervalle de dix ans ne s applique pas aux patients

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 73 avec antécédents personnels d adénome mais plutôt à ceux à risque moyen soumis à un programme de dépistage. Chez les patients avec antécédent d adénome, les études prospectives ont démontré une augmentation significative du risque relatif d adénome s élevant à 1,6 (92), 1,9 (93), ou 2,7 (94) chez les patients ayant des antécédents de plus de deux ou trois adénomes. Le risque de récidive d adénome était 1,25 fois plus élevé par adénome détecté lors de la première CT (95). Ainsi, chez les patients à risque élevé après un suivi de cinq ans, le risque de récidive «néoplasique» variait de 7,9 % à 40,9 % (96). Plusieurs études ont évalué le taux de détection des néoplasies par une seconde exploration endoscopique basse après une première RSS ou CT utilisée comme moyen de dépistage du cancer colorectal chez des individus à risque moyen (tableau VII). Toutefois, peu d études (101,103) ont inclus exclusivement des patients asymptomatiques à risque moyen de cancer colorectal dépistés par CT ; les taux de détection étaient respectivement de 27 % et de 0,5 % pour les adénomes et ceux de diamètre supérieur à un centimètre au cours de la deuxième CT. Pour les adénomes de plus d un centimètre, ce taux variait jusqu à 5 % - 10 % en fonction des lésions initialement vues à la première CT (103). Le faible risque de survenue d adénome, après dépistage initial défini par deux CT négatives, a été récemment établi dans une étude de 7 604 individus à risque moyen de cancer colorectal. Le taux annuel de récidive calculé à partir du résultat de l examen suivant (c est-à-dire la troisième exploration par CT) était égal à 7,2 %, 19,3 %, et 22,9 % pour les adénomes dans les trois groupes définis par le diagnostic initial (aucun adénome chez 5069 patients, un adénome chez 2 142 patients, et un adénome avancé chez 393 patients), et respectivement 0,21 %, 0,64 %, et 1,88 % pour les adénomes avancés (104). Chez des individus à risque moyen de cancer colorectal, le taux de détection des adénomes lors de la seconde RSS réalisée 3 ans (61), 4,2 ans (102), ou 5 ans (105) après la RSS initiale variait de 3 % à 7 %. Les taux de détection pour les adénomes, les adénomes avancés et les carcinomes 3 ans après la première exploration étaient respectivement de 3 %, 0,4 %, et 0,06 % ; après 5 ans, ils étaient respectivement de 8 %, 1 %, et 0 % (61, 105). Dans l étude de cohorte CoCaP (102), au cours de la période 1994-2000, l incidence du cancer colorectal distal durant la première, la seconde et la quatrième année après une première RSS négative (absence de polype) était respectivement de 2,8, 10,7, et 13,0 pour 100 000 patients-années, tandis que dans l étude de Schoen et al. (61), l incidence était de 22,9/100 000 patients-années pendant les trois premières années. Morbidité consécutive à l exploration colique par endoscopie pour le dépistage des sujets à risque moyen Les principaux effets secondaires analysés ci-après et consécutifs à l endoscopie du tractus digestif bas sont la perforation et l hémorragie, l un et l autre accrus après polypectomie.

74 Le dépistage du cancer colorectal Tableau VII - Lésions observées au cours d une seconde sigmoïdoscopie ou coloscopie totale après un premier examen endoscopique négatif chez des patients à risque moyen de cancer colorectal. Auteurs Critère (1) Patients inclus pour Adénome Lésions découvertes après 2 e examen Facteur de risque (années) (réf.) d inclusion 2 e examen/1 er examen (%) adénome 1 cm Carcinome RR (95 % IC) Riff 50 ans 258/329 10 (4) ---- ---- ---- (1990) (97) 1 an, RRSS ± CT Rex 50 ans 259/540 15 (6) 0 0 âge 60 années (1994) (90) 3,5 années, RRSS 3,76 (1,17-12,2) (2) Krevsky 40 ans 69/202 5 (7) ---- ---- ---- (1994) (98) 16 mois, RSS Squillace 50-70 ans 29/? 12 (41) 1 0 19 / 29 saignement rectal (1994) (99) 5,75 ans, CT avant 1 er examen Neugut 35-65 ans 99/508 24 (24) ---- ---- 70 / 99 symptômes (1995) (100) 3 années, CT avant 1 er examen Rex 50-82 ans 154/368 41 (27) 1 0 ---- (1996) (101) 5,5 années, CT Schoen 50-75 ans 9 317/11 583 286 (3) 44 6 hommes 1,7 (1,3-2,2) (2) (2003) (61) 3 années, RSS fumeur 1,6 (1,0-2,5) (2) Doria-Rose (3) 50 ans 72 373/72 483 ---- ---- 30 âge 60 années (2004) (102) 4,2 années, RSS 20 vs 13/10 5 personnes-années (1) âge des patients à l inclusion dans l étude, temps écoulé entre les 2 examens endoscopiques; CT : coloscopie totale; RSS : sigmoïdoscopie souple. (2) risque relatif (intervalle de confiance 95 % (IC 95 %)) d avoir un adénome découvert à CT. (3) étude basée sur le registre CoCaP (1994-1996) et sur le registre du «Kaiser Permanente Prepaid tumour» (1994-2000).

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 75 Coloscopie totale Après CT avec ou sans polypectomie, les taux de perforation sont respectivement de 0,41 % et 0,17 % (106). Dans une étude récente portant sur 10 500 CT, le taux global de perforation était de 0,19 %, et 40 % des perforations étaient survenues après polypectomie (107). Toutefois, ces études n ont pas porté sur des patients à risque moyen de cancer colorectal dans le cadre d un dépistage. Dans une étude contrôlée randomisée de dépistage du cancer colorectal effectuée aux États-Unis (54), aucune complication n avait été observée parmi 547 sujets randomisés en vue d une CT. Trois études ouvertes (25, 30, 79) de dépistage par CT chez des patients à risque moyen de cancer colorectal ont rapporté respectivement des taux de perforation 0 sur 505 patients, 0 sur 1 463 patients, et 1 sur 1 994 patients ; la chirurgie n était nécessaire dans aucun cas et un saignement était survenu respectivement chez 1, 6, et 3 patients, mais n avait nécessité ni intervention, ni transfusion. Dans une étude ciblée de façon spécifique sur le taux de complications associées au dépistage par CT chez des individus à risque moyen de cancer colorectal (108), aucun des 3 196 patients n avait présenté de perforation, tandis que 7 patients (0,22 %) avaient eu une hémorragie dont une ayant nécessité une intervention chirurgicale. Au total, les complications associées à 7 158 dépistages par CT consistaient en un cas de perforation (1/10 000) ne nécessitant pas d intervention chirurgicale et 17 (2/1 000) cas d hémorragie après polypectomie justifiant des transfusions chez un patient et une intervention chirurgicale chez un autre. Rectosigmoïdoscopie souple Les taux de complication après RSS varient de 1/10 000 (106) à 1/25 000 explorations (107). Ces études n ont pas concerné des individus à risque moyen de cancer colorectal. Une étude récente chez des patients à risque moyen a rapporté un taux de complications après dépistage par RSS de 7/109 500 explorations : il s agissait de deux cas de perforation sur diverticulose du sigmoïde et de saignement justifiant des transfusions. Un infarctus du myocarde était survenu dans les quatre semaines suivant l exploration chez 33 des 110 000 patients ; ce taux n était pas supérieur à celui survenu au cours des 48 semaines suivantes (0,8 %) (109). Dans quatre programmes de dépistage évaluant la RSS dans le dépistage de sujets à risque moyen (49, 50, 56, 82, 83), les taux de perforation et de saignement étaient les suivants : 1 et 12 sur 40 674 explorations, 1 et 10 sur 9 911 explorations, 3 et 0 sur 56 958 explorations, et 0 et 0 sur 6 594 examens. Ainsi, après dépistage par RSS, les risques cumulés de perforation étaient 4/100 000 et 2/10 000 pour les hémorragies coliques. Une intervention chirurgicale a ainsi été nécessaire chez trois patients (2/100 000). Le nombre de CT réalisées après RSS dans ces quatre programmes de dépistage (49, 50, 56, 82, 83) était respectivement de 2 131, 775, 7 975, et 2 524. Tous les cas de perforation et de saignement rapportés étaient survenus après polypectomie. Par conséquent, le dépistage par RSS, suivi de CT, était associé à un taux de

76 Le dépistage du cancer colorectal complication (perforation et saignement) de 48/127 642 soit 35/100 000 alors que le taux par CT en première intention était de 210/100 000. Acceptabilité et faisabilité de l endoscopie digestive basse pour le dépistage du cancer colorectal Les données relatives à l acceptabilité et la perception de l endoscopie par le patient sont extrêmement rares, en particulier dans le cadre des coloscopies de dépistage chez les sujets à risque moyen de cancer colorectal ; or il s agit d une donnée importante puisque l efficacité des programmes de dépistage est corrélée au taux de participation de la population. Perception du risque de cancer colorectal ou de son dépistage endoscopique D une façon globale, le degré d appréhension par le public de la RSS s avère de loin inférieur à celui de la CT et de l endoscopie du tractus digestif supérieur (110). Toutefois dans cette étude, respectivement 95 % et 99 % des patients explorés par endoscopie du tractus digestif supérieur et CT avaient bénéficié d une sédation consciente intraveineuse, contre seulement 13 % des patients explorés par RSS. La perception des examens par les patients a été évaluée dans des études contrôlées randomisées de dépistage du cancer par RSS (50, 56) : 3 % à 5 % des patients ont relaté des douleurs vives et 2 % à 20 %, un inconfort très supérieur à celui attendu. Six mois après l exploration, 98 % des sujets se déclaraient satisfaits de la méthode de dépistage et 97 % étaient prêts à la recommander à leur famille et leurs amis. Une autre étude prospective a été réalisée en Australie chez des individus à risque moyen âgés de 50 à 75 ans (111). Après information des avantages et des inconvénients des différentes stratégies de dépistage du cancer colorectal, 12 % des participants choisirent l absence de dépistage et 56 % (n = 164) l acceptèrent après arbitrage entre les bénéfices et inconvénients du dépistage. Les 164 participants estimaient que la réalisation de 853 CT était un chiffre acceptable pour prévenir la survenue d un seul décès par cancer colorectal. Taux d acceptabilité du dépistage endoscopique du cancer colorectal Dans les essais contrôlés et randomisés de dépistage du cancer colorectal (50, 56) et dans une analyse spécifiquement consacrée à l évaluation des raisons de l acceptation ou du rejet du dépistage (92), 60 % des participants se disaient prêts à accepter le dépistage et 75 % d entre eux (45 % de la population cible) ont participé au dépistage par RSS. Les taux de participation évalués dans la même région géographique étaient de 40 % pour la RSS plus test Hemoccult II, 55 % pour le test Hemoccult II seul, et 90 % pour le test Hemoccult II répété chez les participants

Dépistage du cancer colorectal par endoscopie classique ou 77 qui ont accepté le premier test (63). Dans un essai contrôlé randomisé en cours (52), l acceptabilité était légèrement meilleure pour le test Hemoccult II (29 %) que pour la RSS (27 %, p < 0,03) ou la CT (22 %, p < 0,001). Toutefois, dans le rapport final de cette étude (53) incluant un groupe avec choix du patient entre le test Hemoccult II et une seule exploration RSS, le taux global d acceptabilité était de 27 %, et identique dans le groupe test Hemoccult II seul (28 %) ou RSS unique (28 %). Le choix des patients était comparable et respectivement de 14,6 % vs 12,5 % pour le test Hemoccult II et la RSS. Dans les essais contrôlés randomisés évaluant le test Hemoccult II (68, 69, 112, 113, 114), les taux de participation lors du premier test étaient respectivement de 89 %, 53 %, 67 %, et 53 %, ainsi que de 60 %, 38 %, 46 %, et 38 % pour l ensemble des tests de dépistage par le test Hemoccult II. Dans les études de dépistage par RSS (46-48, 52, 55, 56, 83), les taux de participation variaient respectivement de 21 % à 34 % pour les sujets ayant répondu à l invitation et de 4 % à 80 % par rapport à la population cible (tableau IV). Une étude récente a montré qu une mobilisation globale était susceptible de multiplier par 3 à 4 le taux de participation au dépistage par CT, mais ce taux ne passait que de 2,5 % à 8 % (53). Dans une analyse ciblée sur l acceptabilité de la CT et de la coloscopie virtuelle (coloscopie par CT-scan ou coloscanner) (115, 116), la CT était moins fréquemment choisie comme méthode de dépistage ultérieur (50 % vs 41 %) (115). Bien que les patients n aient manifesté aucune préférence pour l un ou l autre des moyens de dépistage ultérieur (46 % vs 41 %) (116), 61 % et 62 % des personnes ont trouvé que ces méthodes d explorations étaient plus supportables que prévu et 42 % ont rapporté que la préparation du côlon était la principale cause d inconfort. Toutefois, dans une étude de population (117) de dépistage par coloscopie virtuelle, CT, ou par l une des deux méthodes choisies par le patient, les taux de participation n étaient respectivement que de 18 %, 16 % et 17 %. Par conséquent, les taux de participation varient considérablement selon les études, en particulier en fonction de la stratégie d invitation et de sollicitation. Dans les essais contrôlés randomisés de dépistage par test Hemoccult II pendant dix ans ou RSS unique, qui est un bon indicateur de la véritable acceptabilité et faisabilité, les taux de participation étaient comparables et variaient respectivement de 53 % à 89 % et de 4 % à 80 %, avec un taux plus souvent inférieur à 50 % dans les programmes de dépistage endoscopique. Facteurs prédictifs de l acceptabilité du dépistage endoscopique du cancer colorectal La présence d un adénome chez un parent du premier degré (dont 259 avec adénome de plus de 10 mm) ne semble pas accroître la compliance vis-à-vis du dépistage endoscopique (118) car cet antécédent familial n a permis l adhésion au dépistage par CT que de 16 % des 655 patients avec antécédent de cancer colorectal ou adénome au premier degré. Dans une autre étude incluant 496 sujets, un antécédent familial de néoplasie colique avait peu d influence sur les taux d acceptation ; chez les patients avec ou sans antécédent familial, les taux d acceptation