Première partie : Généralités

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Première partie : Généralités 1

2

Chapitre 1: Introduction générale 1.1. Problématique Le paludisme est plus qu un problème de santé, il pose un problème de société et de développement qui fait que l on considère qu "une lutte antipaludique bien conduite au niveau national est primordiale dans la poursuite des objectifs du Millénaire pour le développement"(1). En effet, avec 225 millions de cas et 781 000 décès en 2009, le paludisme est une des maladies parasitaires les plus répandues et les plus meurtrières au monde (2). Environ 86% des cas et 91% de ces décès surviennent en Afrique, principalement chez les jeunes enfants (3). Le paludisme est l une des principales causes de mortalité chez les moins de cinq ans en Afrique (20%) et il représente 10% de la charge totale de morbidité du continent (1). Le paludisme est "responsable de 40% des dépenses de santé publique, de 30-50% des admissions dans les hôpitaux et de pas moins de 50% des consultations externes dans les zones de forte transmission entraînant plus de 12 milliards de perte annuelle de PIB en Afrique" avec un lourd tribut payé essentiellement par les pauvres : "58 % des cas surviennent dans les 20 % les plus pauvres de la population mondiale" (1, 4-5). D où l importance de l initiative mondiale «Faire Reculer le Paludisme» (FRP), lancée le 23 juillet 1998 par l OMS et ses partenaires qui a abouti à son adoption le 25 Avril 2000 par les chefs d Etats et des gouvernements africains des pays endémiques au sommet d Abuja (6). La RDC, 2 e pays le plus endémique au monde, s est officiellement appropriée l initiative depuis février 2001, et s est de ce fait engagée à mettre en œuvre, en collaboration avec tous ses partenaires au développement, les stratégies adoptées au niveau mondial et régional (3, 7). Depuis, une politique nationale de lutte contre le paludisme a été adoptée et des plans stratégiques (depuis le plan stratégique 2002-2006 à l actuel 2009-2013) élaborés au niveau national s appuient tous sur les stratégies consensuelles de l initiative mondiale FRP (7-10). Cette initiative visait le renforcement des systèmes de santé afin d assurer : [1] aux malades un accès rapide à un traitement efficace et abordable, [2] aux personnes exposées au risque, notamment les jeunes enfants et les femmes enceintes, l association la plus adaptée de mesures de protection au niveau personnel et communautaire et [3] aux femmes enceintes exposées au risque un accès à des traitements préventifs (6). 3

Ces stratégies ont démontré leur efficacité et permis d enregistrer globalement une baisse de la morbidité et de la mortalité palustres ces dernières années (1). Cependant, il convient de rappeler que les progrès dans la lutte contre cette endémie ont été remis en cause par le passé suite principalement à l émergence de la résistance du parasite aux antipaludiques, mais aussi suite à l augmentation du risque de transmission dans les régions où les programmes de lutte contre le paludisme s étaient relâchés, et également suite au développement de la résistance des vecteurs aux insecticides, à l augmentation des voyages internationaux et à la défaillance des systèmes de santé dans les pays pauvres et les pays affectés par les conflits armés (11-15). Ce faisant, avec un accroissement de la mortalité spécifique palustre chez les enfants de moins de 5 ans de 15% à 22% au cours de la décennie 1990-2000 essentiellement en Afrique subsaharienne, le paludisme a été, avec le VIH/SIDA, l une des principales causes de mortalité en augmentation, annulant ainsi le bénéfice de la réduction de la mortalité due au recul d affections aussi meurtrières que la rougeole, les infections respiratoires et les maladies diarrhéiques (16). Dans les années 80 en RDC, la résistance à la chloroquine a été considérée comme responsable de la multiplication par 2 et par 4 respectivement des admissions et de la mortalité palustres à Kinshasa (17). Face à la progression de la résistance à la chloroquine du Plasmodium falciparum responsable de plus de 90% des cas de paludisme en RDC, le Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP) a adopté transitoirement la sulfadoxine-pyriméthamine (SP) en 2002 puis définitivement une combinaison à base d artémisinine (CTA), en l occurrence l association artesunate + amodiaquine (AS-AQ), en mars 2005 pour le traitement du paludisme simple et garde la quinine pour la prise en charge du paludisme grave. Pour la prévention, les axes prioritaires sont l usage de la moustiquaire imprégnée à longue durée et le traitement présomptif intermittent (TPI) de la femme enceinte à la SP (9, 18). Fondant sa nouvelle politique sur des décisions basées sur des données factuelles, un des fondements de l initiative FRP, le PNLP et ses partenaires avaient mis en œuvre une série d études à travers ses sites sentinelles pour l évaluation in vivo de l efficacité des antipaludiques utilisés dans le traitement des cas de paludisme simple avant d adopter les changements successifs de la politique médicamenteuse pour le paludisme simple (7, 9, 18). Cependant, c est bien l émergence de la résistance du Plasmodium à la SP qui a motivé le changement du traitement de 1ère ligne dans le curatif en faveur des CTA. Même si on 4

considère que les échecs thérapeutiques au cours des essais in vivo dans le traitement du paludisme chez les enfants de moins de 5 ans ne sont pas extrapolables au TPI chez la femme enceinte (19-20), certains auteurs estiment qu avec l accroissement rapide de la résistance à la SP, il serait invraisemblable que le TPI à la SP chez la femme enceinte soit actuellement aussi efficace qu il y a 5 à 10 ans lorsqu il avait été évalué en Afrique de l Est (21). Par ailleurs, si les évidences actuelles montrent que le TPI demeure efficace dans les régions où les échecs thérapeutiques dans le traitement des cas chez l enfant sont entre 20 et 40%, il y a, ce jour, un consensus sur le constat d absence de données pour les régions où les taux d ET sont plus élevés (19, 22-24). En outre, à côté de l efficacité thérapeutique, il existe des facteurs additionnels susceptibles de contrarier l adoption ou l extension de la couverture de nouveaux traitements antipaludiques parmi lesquels l adhérence des prestataires de soins et des patients est déterminante (25-31). Ainsi, bien que les CTA soient très efficaces, il est évident que seul un traitement bien prescrit par les prestataires des soins et complètement suivi par les malades peut garantir la guérison et éviter l émergence de la résistance (32). C est pourquoi la compréhension des déterminants de l adhérence des prestataires et des patients aux CTA a été relevée par certains auteurs parmi les questions urgentes de recherche (26, 33-34). Enfin, un diagnostic correct et un traitement efficace et précoce des accès palustres constituent un des trois axes stratégiques majeurs de l actuel plan mondial contre le paludisme (35). Cependant, les manifestations cliniques et biologiques du paludisme grave sont polymorphes et varient en fonction de l âge et de l intensité de la transmission du Plasmodium falciparum et leur description reste incomplète (36-38). C est pourquoi, l OMS a proposé des critères permettant de diagnostiquer les formes graves du paludisme et de mettre rapidement les malades sous un protocole thérapeutique efficace et validé au niveau national (39). Cependant les évaluations récentes des projets de lutte antipaludique financés par le Fonds Mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme ont montré, comme une des faiblesses majeures de la lutte antipaludique, les écarts au protocole de prise en charge des patients en RDC (40). 5

1.2. Cadre conceptuel, hypothèses et objectifs 1.2.1. Cadre conceptuel La figure 1-1 présente les conséquences du paludisme et les stratégiess majeures du plan mondial contre le paludisme, lesquelles stratégies forment le trépied de la politique de lutte antipaludique en RDC. Des trois stratégies majeures préconisées, le présent travail a porté sur 2 volets : le TPI et la prise en charge des cas. Paludisme : manifestations aigües, chroniques et liées à la grossesse Adapté de Breman et al (41). 2 Accès fébriles aigus 2 Formes sévères Hypoglycémi Anémie Détresse respiratoire Malnutrition Moustique infecté 1 Homme infecté Effets chroniques Anémie Neurologiques Développement Neuropaludisme Altération de la croissance et du développement Mortalité Paludisme sur grossesse 3 Fœtus Mère Faible poids de naissance Accès aigu Anémie Réduction de la productivité Politique de lutte antipaludique en RDC 1 Prévention : MILD, PID, LAV 2 PEC : Diagnostic précoce (clinique et biologique), traitement des cas simples (ASAQ), des échecs thérapeutiques (quinine orale) et des cas graves (quinine en perfusion) Surveillance, suivi et évaluation Réduction de la morbidité et de la mortalité palustres 3 TPI des femmes enceintes Figure 1-1 : Conséquences antipaludique en RDC. du paludisme et points d ancrage de la 6 politique de lutte

1.2.2. Hypothèses Les hypothèses sous-tendant le travail étaient : Le TPI de la femme enceinte à la SP a perdu son efficacité dans les régions de la RDC où la résistance du P falciparum est élevée ; Certains facteurs font obstacle à l utilisation de l AS-AQ pour le traitement du paludisme simple ; Il existe des écarts au protocole de prise en charge (diagnostic et traitement) du paludisme grave qui conduisent à la surestimation de la fréquence et alourdissent la mortalité palustres hospitalières. 1.2.3. Objectifs Objectif général L objectif général de ce travail est de contribuer à l amélioration de la politique nationale de lutte contre le paludisme en RDC en apportant un complément d évidence sur les stratégies prioritaires de prise en charge et de prévention afin d éclairer les décideurs pour une prise de décision basée sur les preuves (evidence based policy) et l adoption de stratégies efficaces pour réduire la morbidité, la mortalité et le coût socio-économique que le paludisme fait peser sur la population congolaise. Objectifs spécifiques Le travail poursuit trois objectifs spécifiques : Evaluer l efficacité du TPI en tenant compte de l émergence de la résistance du Plasmodium falciparum à la SP ; Relever les déterminants de l adhérence des prestataires des soins et des patients au nouveau traitement de 1 ère ligne (artesunte + amodiaquine) pouvant éventuellement être pris en compte dans sa promotion ; Décrire le paludisme sévère de l enfant à Kisangani sur le plan clinique et évolutif. 7

1.3. Organisation de la thèse Ce travail est subdivisé en 5 parties. La 1 ère, comportant 2 chapitres, est consacrée aux généralités. Le 1 er chapitre est une introduction générale à la thèse. Il présente la problématique, le cadre conceptuel et les objectifs du travail. Le 2 nd présente le profil épidémiologique du paludisme en RDC et fait le point sur l état de la lutte antipaludique en RDC à l horizon 2010. Il permet ainsi d avoir une vision claire du contexte dans lequel tout le travail est encré. La 2 e partie aborde la question de la pertinence du TPI chez la femme enceinte dans le contexte de résistance du P falciparum à la SP et comprend les chapitres 3 et 4. Le chapitre 3 évalue le poids des NN dans 3 régions de la RDC avec différents niveaux de résistance à la SP en fonction de la prise du TPI par la mère. Le chapitre 4 présente une comparaison dans le temps de l effet du TPI sur le poids des NN à l est du pays dans une région à résistance élevée à la SP. La 3 e partie traite des déterminants de l adhérence des prestataires et des patients au nouveau médicament recommandé par la politique nationale pour la prise en charge des cas de paludisme simple. Une étude préliminaire, objet du chapitre 5, a été réalisée à Kisangani et suivie un an après d une étude étendue à 3 des 10 districts sanitaires de la province Orientale et présentée dans le chapitre 6. Ces enquêtes ont permis de réaliser, dans le 7 e chapitre, une analyse des facteurs d adhésion des prestataires de soins à l AS-AQ en se référant au modèle de diagnostic de Green et Kreuter et aux étapes de changement de comportement de Prochaska. La 4 e partie, portant sur la prise en charge du paludisme sévère, comprend le 8 e chapitre qui décrit les pratiques cliniques et thérapeutiques dans les 2 principaux hôpitaux généraux de référence (HGR) de Kisangani. Il relève les faiblesses liées à l évaluation des cas et traitement des enfants admis pour paludisme grave entre janvier 2010 et février 2011. La dernière partie résume les principaux résultats et leur intérêt pour l amélioration de la politique de lutte antipaludique en RDC. 8

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Chapitre 2 : Profil épidémiologique et état de la lutte antipaludique en République Démocratique du Congo à l horizon 2010 Epidemiological profile and status of malaria control in the Democratic Republic of Congo in 2010 J Losimba Likwela, M Wilmet Dramaix. (Soumis en novembre 2011 à Kisangani Médical). Résumé Deuxième pays le plus endémique pour le paludisme au monde, la république démocratique du Congo (RDC) a adopté officiellement l initiative "Faire Reculer le Paludisme" (FRP) en 2001 et depuis, aligne sa politique de lutte contre le paludisme sur les directives de l OMS dont les orientations stratégiques les plus récentes sont inscrites dans le plan stratégique mondial FRP 2005-2015 et le plan d action mondial contre le paludisme. Afin de faire le point par rapport aux objectifs de couverture universelle visés au niveau mondial et national, nous avons passé en revue la situation épidémiologique du paludisme en RDC, l organisation et le niveau des indicateurs de la lutte antipaludique à la fin de l année 2010 au moyen d une revue de la littérature indexée sur PUBMED, des rapports de l OMS, des rapports et documents stratégiques du programme national de lutte contre le paludisme et des rapports d enquêtes nationales réalisées auprès des ménages en 2001, 2007 et 2010. La couverture en moustiquaire imprégnée, l utilisation du traitement présomptif intermittent par les femmes enceintes et l accès aux antipaludiques recommandés restent faibles. On note une tendance à la réduction de la mortalité infanto-juvénile et de la morbidité palustre quoiqu inférieure aux cibles attendues en fin 2010. L extension de la couverture des populations en interventions de lutte antipaludique associée au renforcement du système de santé, l amélioration du système de surveillance et la mise en place d un réseau local de chercheurs et acteurs de santé publique impliqués dans la lutte antipaludique sont des éléments importants à canaliser dans le «pipeline» des appuis disponibles pour améliorer la lutte antipaludique en RDC. 13

Abstract Second most endemic for malaria in the world, the Democratic Republic of Congo (DRC) has officially adopted the Roll Back Malaria (RBM) initiative in 2001 and since, aligns its malaria control policy on the WHO guidelines which most recent strategic orientations are presented in the Roll Back Malaria Global Strategic Plan 2005-2015 and in the Global Malaria action Plan. The aim was to estimate the achievement up to 2010, of the objectives of universal coverage fixed at the international and national level. We have reviewed the epidemiological profile, the organization and indicators level of malaria control in the DRC in 2010 through a review of the literature indexed on Medline, WHO reports, reports and strategic documents of the national malaria control program and reports of national households surveys 2001, 2007 and 2010. ITN coverage, the use of intermittent presumptive treatment by pregnant women and access to recommended antimalarial drugs remain low. There was a trend towards reduction of child mortality and malaria morbidity although less than targets expected in 2010. The extension of populations coverage in malaria control interventions, strengthening the health system, improving the monitoring system and setting up a researchers' local network and public health actors involved in malaria control should be a priority of Ministry of health to be taken into the account within financial supports available to improve malaria control in the DRC. 2.1. Introduction Avec 225 millions de cas et 781 000 décès en 2009, le paludisme reste une des maladies parasitaires les plus répandues et les plus meurtrières au monde (1). La République Démocratique du Congo (RDC) occupe le 2e rang mondial parmi les pays les plus frappés par cette affection (2). Pour parer à cette endémie, l initiative «Faire Reculer le Paludisme» (FRP) a été mise en place en 1998 par l OMS, le PNUD, l Unicef et la Banque Mondiale et adoptée par les chefs d Etat et de gouvernements africains en 2000 (3). Depuis la communauté internationale a mobilisé des fonds destinés à la lutte antipaludique dans les pays les plus touchés comme jamais auparavant (4). Les objectifs visés sur le plan international sont ambitieux : «réduire la mortalité due au paludisme pour obtenir un chiffre proche de zéro et la morbidité de 75% d ici la fin de 2015» via une couverture universelle des populations à risque par une combinaison d intervention de prévention et de prise en charge 14

de cas (5). Fin 2010 ayant été fixée par le Secrétaire Général des Nations Unies comme l année de l atteinte de la couverture universelle des interventions de lutte antipaludique (LAP) (1), il nous a paru opportun de faire le point sur la situation épidémiologique du paludisme en RDC, l organisation de la lutte antipaludique et le niveau des indicateurs de la lutte contre cette endémie à la fin de l année 2010. 2.2. Méthodologie Nous avons procédé à une recherche bibliographique en ligne en utilisant les termes ((malaria) OR (paludisme)) AND ((Democratic Republic of the Congo) OR (République Démocratique du Congo) OR (Zaïre)). Les bibliographies de ces articles ont ensuite fait l objet d une recherche manuelle des références pertinentes. Ont été également pris en compte : les rapports et documents stratégiques du Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP) (rapports annuels, plans stratégiques et déclaration de politique nationale de lutte antipaludique) et les rapports de l OMS (Arica Malaria Report 2003 et 2006 et World Malaria Report 2008, 2009 et 2010). Seuls les articles ayant satisfaits aux critères de sélection ci-après ont été retenus dans la présentation des résultats : Présenter/discuter les données relatives à la distribution et aux caractéristiques du parasite, des vecteurs, des cas et décès ; Présenter/discuter les données sur l organisation de la LAP : offre et utilisation des méthodes préventives, curatives et promotionnelles de LAP; Présenter le niveau des indicateurs de LAP ; Au total 212 articles ont été obtenus après la recherche initiale via Pub Med parmi lesquels 42 ont été retenus. 2.3. Epidémiologie du paludisme en RDC 2.3.1. Agents pathogènes et profil de résistance Quatre espèces de Plasmodium sont responsables de la maladie chez l homme et récemment une espèce parasite du singe, P. Knolesi, a été retrouvée chez l homme en Asie du sud-est (6). Trois de ces espèces sont rencontrées en RDC : P falciparum, P ovale et P malariae. P 15

falciparum, responsable de la grande majorité des formes graves et des décès à travers le monde, est l espèce la plus fréquente en RDC (plus de 90% des cas) (7-10). Mais deux décennies de guerre avec les mouvements des populations et des forces armées (belligérantes et forces de maintien de la paix) ainsi que les erreurs de diagnostic dues à la confusion entre P Ovale et P vivax, morphologiquement proches, peuvent étayer les publications faisant état de la présence de P vivax en RDC longtemps considéré comme préservée par la prévalence élevée du phénotype Duffy négatif chez les populations mélano-africaines d Afrique centrale et de l ouest (11-14). Depuis les premiers cas de résistance rapportés en 1982 à l est du pays, la résistance du P falciparum aux antipaludiques progresse inexorablement aussi bien pour les monothérapies que pour les combinaisons thérapeutiques à base d artémisinine (CTA) (15-30). Les études d efficacité in vitro et in vivo réalisées dans différents sites sentinelles (figure 2-1) permettent ainsi d adapter la politique nationale de prise en charge de cas et de prévention chez la femme enceinte en fonction des recommandations de l OMS. Dans les années 80, l accroissement de la résistance à la chloroquine a résulté en la multiplication par 2 et par 4 respectivement des admissions et de la mortalité palustres à Kinshasa (32) et en la perte d efficacité de la chimioprophylaxie chez la femme enceinte (33-37). En 2001, la chloroquine a été remplacée par la sulfadoxine piryméthamine (SP) comme traitement de 1 ère ligne et pour le TPI chez la femme enceinte (7). La progression de la résistance à la SP a conduit le pays à l adoption de l association artesunate + amodiaquine (ASAQ) en 2005 même si dès avant son adoption, cette association affichait des seuils d échec thérapeutique in vivo de 9% à Kisangani et 15% à Boende (7, 27). C est ainsi qu a été souligné la nécessité de maintenir la surveillance de l efficacité des antipaludiques en usage ainsi que la recherche de nouvelles molécules et leur évaluation sur terrain (comme c est le cas de la dernière étude comparant Artemether+Luméfanthrine à Artesunate+Pyronaridine (38) qui laisse espérer des alternatives de meilleur profil thérapeutique pour la prise en charge des cas que celui de l AS+AQ). Y aurait-il de l avenir du côté des plantes médicinales utilisées dans le traitement de la fièvre en médecine traditionnelle congolaise? Les études, de plus en plus nombreuses depuis la fin des années 90 avec la perte de la chloroquine, n en sont encore à ce jour qu au stade préclinique ou clinique de phase I (39-45). 16

ET au J28 à la CQ1983: 4,5% à Kinshasa et Mbuji-Mayi (Nguyen-Dhin et al) ET au J14 à la CQ 1982: 9,5% au Kivu (Delacollette et al) ET au J7 à la CQ en 1985: 66% à Kinshasa et 8% à Bwamanda (Paluku et al) ET au J28 à la CQ 1985: 5% environs de Kinshasa (Ngimbi et al) ET au J28 à la CQ 1990: 17% à Kinshasa ; (Kabeya et al) ET au J28 à la CQ 1995: 79,5% à Nord Kivu au camps de réfugiés Rwandais (Wolday et al) % ET J28 Sites CQ SP Bukavu 62,5 12,8 Katanga 63,6 4,1 Kimpese 67,7 4,5 Kisangan 65,4 7,9 Mikalayi 69,0 2,2 Vanga 68,2 7,5 Total 66,5 6,8 2000-2001 : Kazadi et al ET au J28 2002: 32% à AS-AQ, 22% à AS- SP et 61% SP au Nord Kivu (Alker et al) ET au J28 2004: 16,9%/ 6,8*% à AS- AQ et 34,6%/ 19,7*% à AS- SP au Sud Kivu (Swartout et al) ET au J28 2003-04: 15,1*% à AS-AQ et 24,6*% à AS-SP, 35,9*% à SP et 18,3*% à AQ à Boende, Vs 0*% à AS-AQ, 0*% AS-SP et 19,6*% à SP à Kabalo (Bonnet et al) Sites % ET J28* ASAQ AL Bolenge 1,4 1,6 Kisangani 3,7 9,2 Rutshuru 5,5 2,7 Kimpese 6,8 6,7 Kingasani 6,9 0 2005 : Odio ET au J28 2007-08: 0,5*% à AS- PR, 2,1*% à A-L à Kinshasa (Tshefu et al) 1980 1990 2000 2010 CP/FE à la CQ 1983 : inefficace (Moran) CP/FE à la CQ 1990 : efficace (Steketee et al) CP/FE à la CQ 1993 : efficace (Nyirjesy et al) CP/FE à la CQ 1998-99 : inefficace au nord Kivu (Mugisho et al) CP à la CQ 2000-01 : inefficace à Kinshasa (Mulumba et al) TPI à la SP 2006 : inefficace à Kinshasa (Lukuka et al) 2001 : CQ remplacée par SP pour la PEC des accès simples et la prévention chez la FE 2005 : SP remplacée par AS+AQ pour la PEC des accès simples Légende : Etude d efficacité in vivo, Evaluation de la prévention chez la femme enceinte, Changement de politique Abréviations et symboles: ET= Echec Thérapeutique, CQ= chloroquine, J=Jour, AS-AQ=Artesunate + Amodiquine, SP=Sulfadoxine + Pyriméthamine, AL= Artemether + Luméfantrine, FE= femme enceinte, *= Correction par PCR Figure 2-1: Evaluation in vivo de l efficacité des antipaludiques, évaluation de la prévention (chimiprophylaxie et TPI) chez la femme et changement de politique médicamenteuse en RDC. On peut aussi relever l étude du profil pharmacocinétique et pharmacodynamique de l artesunate et de la dihydro-artémisinine chez la femme enceinte (46), quoique la courte demi-vie de ces molécules ne soit pas vraiment favorable au traitement présomptif intermittent (TPI). Ce qui traduit la préoccupation des acteurs de la lutte antipaludique face à une possible perte d efficacité de la SP pour le TPI qui est du reste déjà annoncée par certains auteurs (37). 2.3.2. Les vecteurs Plus de 50 espèces d anophèles peuvent assurer la transmission du paludisme chez l homme (12). Les vecteurs les plus rencontrés en RDC sont An. gambiae (92%), An. funestus (vecteur principal pour la région des hauts plateaux de l est), An. nili, An. moucheti, An. brunnipes, et 17

An. paludis, An. arabiensis, An. brochieri, An. coustani, An. hancocki, An. hargreavesi, An. melas, An. pharoensis (7, 47-49). Cependant, à l intérieur de l aire de distribution de chaque espèce, les facteurs climatiques, édaphiques, et humains conditionnent la présence des gîtes larvaires, donc la densité, et la dynamique des populations d anophèles vecteurs, résultant pour un territoire aussi vaste que la RDC en une mosaïque de répartition de différentes espèces. C est ainsi par exemple que Karsh et al ont trouvé au Bandundu une prédominance d An. paludis sur An. gambiae (50). Par ailleurs, le développement de la biologie moléculaire permet d identifier de nouvelles entités taxonomiques susceptibles d avoir des différences dans la capacité vectorielle et la susceptibilité aux moyens de contrôle par rapport aux espèces auxquelles elles ont été longtemps rattachées (51-52). C est pourquoi la politique de LAP prévoit, comme pour le parasite, une surveillance des vecteurs et de leur sensibilité aux insecticides (53). Cependant, les données de cette surveillance principalement réalisée par l Institut National de Recherches Biologiques (INRB) en collaboration avec l Ecole de Santé Publique de l Université de Kinshasa ne sont pas disponibles dans la littérature scientifique indexée sur PUBMED. 2.3.3. Le faciès épidémiologique L impact du paludisme en termes de Santé Publique (mortalité et morbidité) varie considérablement d un pays à l autre et d une province à l autre en fonction de 3 paramètres : les modalités de transmission liées à la présence de biotopes favorables aux anophèles et à la qualité vectorielle de espèces présentes, les espèces de plasmodium impliquées et les réactions de défense des êtres humains face à l agression (12). Le concept de faciès épidémiologique, établi pour l Afrique de l Ouest par Carnavale et al et généralisé à toute l Afrique par Mouchet et al, permet de définir 3 faciès prédominant en RDC parmi les 6 répertoriés (tableau 2-1) (7,12). A l intérieur de chacun de ces faciès, le paludisme est souvent hétérogène comme le sont les caractéristiques climatiques et phytogéographiques, elles-mêmes affectées par l activité humaine (déforestation, forages, barrages, irrigations, urbanisation). C est dire l importance de la détermination ponctuelle des indices paludométriques pour offrir les repères d interprétation des données de routine et le suivi de l efficacité des interventions de LAP sur terrain. Il en va de la pertinence de l utilisation de ces données pour le processus décisionnel dans le management de la LAP par des données factuelles 18

contextuelles. Le renforcement des capacités locales et la mise en place de réseaux de chercheurs et acteurs de santé publique capables d alimenter les projets internationaux et régionaux (World Malaria Report, Mapping Malaria Risk in Africa (MARA) Project et Malaria Atlas Project entre autres, etc.) en données fiables est donc plus que jamais important pour l Afrique Sub-saharienne (54). 19

Tableau 2-1 : Faciès épidémiologique du paludisme en RDC Faci ès Strate OMS Transmission Vecteurs les plus fréquents TIE Morbidité et mortalité Caractéristiques phytogéographiques Equatorial Tropical Montagnard Strate I de l OMS, 97 % du territoire national Strate IV de l OMS : 3% du intense et permanente = zone de paludisme stable recrudescence saisonnière longue = zone de paludisme stable période de transmission très courte = zone de paludisme instable An gambiae, An funestus, An nili, An moucheti NB. Il y n a pas d Anophèles vecteur dans le sous-bois. An gambiae, An arabiensis, An funestus, An nili (très localisé) An arabiensis (hauts plateaux et montagnes), An funestus (dans les dépressions souvent mal drainées) Jusqu à 1000 pi/pers/an NB. Dans la forêt du Mayombe, on a relevé 397pi/pers/an à Kulila contre 80 à Makaba, distant seulement de 3 km 100 à 400 pi/pers/an, maximum en saison de pluie (comparable au faciès équatorial) - Prémunition précoce (vers 5ans), - 30-50% de fièvre du au paludisme chez les <5ans, - morbidité toute l année, mais mortalité plus faible que dans les zones tropicales - Densité parasitaires du paludisme simple très élevée : 12000/mm3 chez les jeunes enfants, diminue avec l âge, <2000/mm3 chez l adulte - formes graves (neuropaludisme) surtout chez les <5ans - Prémunition plus tardive, vers 10 ans - morbidité plus importante en saison des pluies : 30 à 50% des fièvres (comme en zone équatoriale) - formes graves surtout chez l enfant avant 10 ans. - Mortalité très élevée comparée à la zone équatoriale. <2 pi/pers/an - Peu ou pas de prémunition, - formes graves du paludisme dans l'ensemble de la population, - aspect pseudo épidémique forêts et savanes post forestières. NB. Potentialité de développement des vecteurs maximale après déforestation savanes humides. > 1500 mètres d'altitude, relief variable : hauts plateaux et montagnes ± abruptes, entrecoupées de dépressions où se collectent les eaux TIE : Taux d inoculation entomologique, pi : piqûre infectante. 20

2.4. Organisation de la LAP en RDC 2.4.1. Historique Conçu au départ comme un projet du ministère de la santé (Projet de Lutte Anti Paludique PLAP de 1977 à 1982), la LAP a ensuite été intégrée comme un volet au Programme Elargi de Vaccination et de Lutte contre les Maladies Transmissibles de l Enfance (PEV/LMTE de 1982-1998) avant d être érigée en Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP de novembre 1998 à ce jour) (53). Ce programme, contemporain de la naissance de l initiative FRP, base toute ses directives et plans stratégiques sur les recommandations de l OMS, via l initiative FRP dont les dernières orientations formulées dans le «plan d action mondial contre le paludisme» visent : l atteinte d une couverture universelle, pour toutes les populations à risque ( 80%), avec des interventions de prévention et de gestion des cas localement adaptées, à l horizon 2010 et le maintien de cette couverture universelle jusqu à ce que les recherches locales menées sur le terrain laissent suggérer qu elle puisse être progressivement limitée aux zones et aux saisons à risque élevé, sans risque de réapparition généralisée; la réduction du nombre de cas de paludisme à l échelle mondiale de 50 % en 2010 et de 75 % en 2015 par rapport à 2000; 21

2.4.2. Axes stratégiques de base (Tableau 2-2) (7, 53, 55) Tableau 2-2 : Stratégies de base de LAP en RDC Domaine Interventions Modalités de mise en œuvre Cible en 2013 Prévention Promotion de l utilisation de la MILD Pulvérisation intra Domiciliaire (PID) d insecticide à effet - Distribution gratuite au cours des campagnes de distribution de masse - Distribution de routine (prix subventionnés ou gratuitement) aux groupes vulnérables : FE au cours de la CPN et enfants < 5ans au cours de la CPS - Marketing social - Pulvérisation ciblées des maisons dans les zones de santé (ZS) à potentiel épidémiques dans les hauts plateaux de l est - Au moins 80% de personnes à risque (toute la population) dormant sous MILD - Au moins 80% des maisons couvertes par la PID d insecticide à effet rémanent dans les ZS d intervention rémanent Application du TPI chez les femmes enceintes - 2 doses de SP au cours des CPN (à 16 SA et à 28 SA) pour les FE VIH- - Une 3 e dose à 32 SA pour les FE VIH+ - au moins 80 % des femmes enceintes bénéficient d au moins 2 doses de SP pour TPI 22

Prise en charges des cas Surveillance Traitement des cas simples et graves. - Shift, pour les cas non compliqués, du traitement basé sur le diagnostic présomptif vers le traitement après confirmation par TDR au niveau du CS - Diagnostic basé sur la GE pour les échecs thérapeutiques (CS et HGR) et les formes graves (HGR, avec numération quantitative et identification de l espèce) - Paludisme simple : AS (4mg/kg) + AQ (10mg/kg) en prise unique pendant 3 jours - Si échec thérapeutique ou contre-indication de l ASAQ : quinine per os x 10 mg/kg/jour pendant 7 j + clindamycine 2 x 10 mg/kg/jour pendant 7j (pas de clindamycine au nouveau-né) - Paludisme grave : quinine en perfusion (Dose de charge : 20 mg de sel de quinine/kg dans 5-10 ml de solution glucosée isotonique (5 %) / kg pendant 4 heures, suivi d une période de repos de 8h. Puis dose d entretien : 12h après le début de la dose de charge, 10 mg de sel de quinine par kg dans 5 à 10 ml de solution glucosée 5%/kg de poids corporel pendant 4h. Répéter cette dose toutes les 12h jusqu à ce que le malade soit capable de boire sans vomir. Dès que le patient est capable de boire, compléter par 7j de traitement avec quinine per os x 10 mg/kg/jour pendant 7 j + clindamycine 2 x 10 mg/kg/jour pendant 7j ou donner ASAQ 3j. - Surveillance Intégrée des Maladies et Riposte (SMIR) sous la coordination de la Direction de lutte contre la maladie (lutte contre les épidémies en collaboration avec les programmes respectifs) - Surveillance «Faire Reculer le Paludisme» à travers les sites sentinelles du PNLP - Surveillance de la qualité des antipaludiques, études d efficacité des antipaludiques et des insecticides en collaboration avec les institutions de recherche (ESP, INRB principalement) - 80 % des patients atteints du paludisme bénéficient d un diagnostic et d un traitement conformes aux directives nationales à tous les échelons de la pyramide sanitaire, y compris dans la communauté - au moins 80% des épidémies dues au paludisme sont maîtrisées conformément aux directives nationales MILD : Moustiquaire Imprégnée à Longue Durée, FE : Femme enceinte, SA : Semaine d aménorrhée, CPN : Consultation prénatale, CPS, Consultation préscolaire, TDR : Test de diagnostic rapide, GE : Goutte épaisse, CS : Centre de santé, HGR : Hôpital Général de Référence, PID : Pulvérisation intradomiciliaire, TPI : Traitement présomptif intermittent. 23

La mise en œuvre de ces stratégies indique qu il y a eu d importants inputs qui ont permis une croissance rapide de l offre relative aux principales interventions préventives et curatives comme l indiquent les figures 2-2 à 2-4 (56-57). 1 793 337 5 653 162 7 853 284 1 6330 687 2007 2008 2009 2010 Figure 2-2 : Evolution du nombre des MILD reçues et distribuées en RDC, 2007-2010 50% 40% 30% 20% 10% 0% 16% 23% 32% 43% 2007 2008 2009 2010 Figure 2-3 : Evolution de la proportion des femmes ayant bénéficiées du TPI 1 308 237 2 653 991 9 208 416 10 315 190 2007 2008 2009 2010 Figure 2-4 : Nombre de doses de CTA reçues dans les zones de santé en RDC, 2007-2010 2.4.3. Cadre de mise en œuvre (Figure 2-5) Au niveau opérationnel, la lutte antipaludique est intégrée aux services polyvalents des prestations des soins (CS au 1er échelon et HGR au 2e échelon avec une continuité des soins via un mécanisme de référence et contre-référence) sous la coordination de l équipe cadre de la zone de santé. Au niveau intermédiaire, des services provinciaux ont été mis en place en 2004 au sein des divisions provinciales de la santé sous la tutelle du 4e bureau (chargé de la lutte contre la maladie). Ils ont pour rôle un appui technique aux ZS avec des fonctions de coordination, de formation, suivi, supervision, monitoring, évaluation. Au niveau central, une direction nationale a été mise en place avec la création du programme en 1998. Elle joue, sous la tutelle de la 4 e direction chargée de la lutte contre la maladie et les grandes endémies, un rôle normatif, de coordination, d orientation stratégique et de mobilisation des ressources pour la lutte antipaludique (53). 24

MINISTERE DE LA SANTE DIVISION PROVINCIALE DE LA SANTE ET DISTRICT SANITAIRE DIRECTION NATIONALE DU PNLP : rôle normatif, de coordination, d orientation stratégique et de mobilisation des ressources COORDINATION PROVINCIALE DU PNLP : rôle d appui technique aux ZS avec des fonctions de coordination, de formation, suivi, supervision, monitoring, évaluation, inspection et contrôle ZONE DE SANTE HGR HGR : PEC des cas graves Contre référence CS CS CS CS CS CS Référence CS : PEC des cas simples, MILD, TPI, CCC COMMUNAUTE (groupes cibles : enfants < 5ans, femmes enceintes) Moso, CCC, assainissement, MILD Abréviations : ZS= zone de santé, CS = centre de santé, MOSO= mobilisation sociale, MILD= moustiquaire imprégnée d insecticide à longue durée, CCC= communication pour le changement des comportements, HGR= hôpital général de référence, PEC= prise en charge, PNLP= programme national de lutte contre le paludisme. Figure 2-5 : Représentation schématique de la pyramide sanitaire et du rôle du PNLP 2.5. Niveau actuel des indicateurs de lutte antipaludique Parmi les indicateurs de résultats recommandés par l OMS pour évaluer les interventions de lutte antipaludique (1), nous avons retenu la proportion d enfants de moins de 5 ans dormant sous MILD (indicateur de couverture en intervention de lutte antivectorielle), la proportion d enfants de moins de 5 ans fébriles ayant reçu un traitement antipaludique correct et le nombre de femmes enceintes recevant 2 doses de SP pour le TPI (indicateur de couverture en intervention de prise en charge des cas). Comme indicateurs d impact, nous avons retenu le taux brut de mortalité infanto-juvénilproportion d enfants de moins de 5 ans fébriles durant les 2 semaines précédant l enquête. La et, à défaut de la densité d incidence de paludisme, la figure 2-6 présente l évolution de ces indicateurs mesurés au cours de 3 grandes enquêtes dont 2 enquêtes en grappes à indicateurs multiples (MCIS : 2001 et 2010) et 1 enquête démographique et de santé (EDS 2007), sauf la proportion de femmes enceintes sous TPI qui est rapportée par le PNLP (58-60). 25

250 200 150 100 50 0 213 158 148 52 43 30 39 41 38 31 27 1 16 6 2001 2007 2010 % Enf < 5ans fébriles Tx MIJ* (%0) %Enf<5a ns S/MILD %Enf<5a ns S/AP Réduction % Enf < 5ans fébriles % Enf <5 ans dormant sous MILD 80 34 0 60 40 38 20 39 % Enf<5ans fébriles sous/ap GMP* 43 RDC % FE sous TPI Figure 2-6 : Evolution des indicateurs de résultats et d impact des interventions de lutte antipaludique en RDC Figure 2-7 : Comparaison des performances de la lutte antipaludique aux objectifs du GMP Abréviations : MIJ : mortalité infanto-juvénule ; Enf<5ans : enfants de moins de 5 ans ; FE : femmes enceintes ; TPI : Traitement présomptif intermittent ; S/AP : sous antipaludique ; MILD : Moustiquaire imprégnée à longue durée ; GMP : global malaria plan ; RDC : République Démocratique du Congo. 2.5.1. Morbidité et mortalité palustre Faute de données fiables sur les cas de paludisme confirmés par la goutte épaisse ou les tests de diagnostic rapide et suite à l inexistence d un système de surveillance fiable, les données sur la morbidité et la mortalité ainsi que les limites et l intensité de la transmission à l intérieur d un aussi grand pays que la RDC, ne sont pas connues (8-9, 54). C est pourquoi, alors qu on observe une baisse de la charge de morbidité et de mortalité palustre dans toutes les régions de l OMS (diminution estimative de 233 millions de cas en 2000 à 221 millions en 2009 et 985 mille décès en 2000 à 781 mille en 2009), la RDC est classée parmi les pays dont les données ne permettent pas d établir l évidence de la régression des cas de paludisme (1). Parmi les cas rapportés par la RDC, 2 e pays endémique sur le plan mondial après le Nigéria tant en termes de morbidité et de mortalité (2), seuls 54,1% seraient effectivement palustres (61). Ainsi, la RDC et le Nigéria contribueraient à 24% aux fièvres non palustres rapportés dans le monde (61). Cette situation rend malaisé l évaluation des progrès de la lutte antipaludique tant au niveau national qu au niveau mondial. Seuls les enquêtes périodiques (MICS et EDS) permettent de remédier, au moins en partie, à cette carence. Ainsi, les données de l EDS 2007 (échantillon de sang, caractéristiques soiciodémographiques et géoclimatiques et réponses sur l adoption des mesures de LAP) ont 26

permis, par le recours à des tests moléculaires basés sur la PCR et à la modélisation spatiale à plusieurs degrés, d estimer la prévalence du paludisme et la mortalité imputable au paludisme en RDC (8-9). En dépit des imperfections des indicateurs de mortalité et de morbidité recueillis, on assiste, en RDC comme ailleurs à travers le monde, à une régression de la charge de morbidité et de mortalité imputable au paludisme d année en année (54). En RDC, on note une tendance à la réduction du taux de mortalité infanto-juvénile et de la proportion d enfants fébriles (baisse respective de 26% et de 34% par rapport au niveau de 2001) (Figure 2-6). Dans la région africaine de l OMS, 11 pays et 1 territoire auraient réussi à réduire de plus de 50% les cas confirmés, les hospitalisations ou les décès imputables au paludisme suite à d énergiques interventions de LAP (1), réalisant ainsi les objectifs d Abuja et du plan mondial contre le paludisme (3, 5). 2.5.2. Couverture en intervention de LAP En ce qui concerne le rendez-vous de la couverture universelle en 2010 lancé par le Secrétaire Général de l ONU en 2008, l enquête MICS 2010 montre que la RDC a encore des efforts à fournir pour y arriver (figure 2-7). En effet, pour la proportion des personnes à risque dormant sous MILD, nous sommes à 38% eu lieu des 80% attendus. Quant à la prise en charge des cas, seuls 39% d enfants fébriles sont mis sous antipaludique (n importe lequel). En ce qui concerne le TPI, la couverture est à 43%, largement inférieure aux 80% attendus. On peut ainsi comprendre pourquoi, en termes d impact, le pays se situe en deçà de 50% de réduction de la morbidité et de la mortalité visés. Malgré l adoption par 23 pays de la Région de l Afrique en 2009, des recommandations de l OMS préconisant la fourniture de MILD à toutes les personnes à risques, la couverture en MILD reste globalement faible en Afrique (1). D après les quantités de moustiquaires imprégnées d insecticide fournies par les programmes nationaux de lutte antipaludique, seuls six pays (Ethiopie, Kenya, Madagascar, Niger, Sao Tomé-et-Principe et Zambie) avaient suffisamment de moustiquaires de ce type en 2006 pour protéger au moins 50 % des personnes à risque (2). Quant à l accès à un traitement antipaludique efficace, la synthèse des enquêtes nationales menées en 2006-2007 auprès des ménages de 18 pays africains indiquait qu aucun pays 27

n atteignait la cible de 80%, et la moyenne de l ensemble de 18 pays était de 38% dont seulement 3 % étaient des ACT, allant de 0,1% en Gambie à 13% en Zambie (2). La même source indique qu un sous ensemble de 16 enquêtes nationales auprès des ménages en Afrique relevait une moyenne de 18% de femmes enceintes utilisant TPI dans les pays concernés. 2.5.3. Intrants, processus et contexte Les écarts observés en RDC peuvent s expliquer par le fait que la mise à l échelle des interventions au niveau national n est pas encore totale. Le PNLP présentait une progression des ZS bénéficiant des appuis à la LAP allant de 113 ZS en 2007 à 271 en 2009 et 430 attendues en 2011 (sur un total de 508) (56-57, 62). Il faut prendre ces chiffres avec prudence parce que certains appuis ne sont pas allés au-delà de «l effet d annonce». La meilleure illustration en est l appui annoncé d un projet de la Banque Africaine de Développement de 5 ans à 26 ZS en province orientale qui est en phase de clôture (prévue pour mars 2012) sans qu aucun intrant de LAP ne soit arrivé dans les ZS. Par ailleurs, l intégration du secteur privé n est pas encore effective. Le marché du médicament est quasiment incontrôlé résultant en une offre de monothérapies prohibées accessibles sans ordonnance médicale et au non alignement des formations sanitaires privées à la politique nationale de LAP. Le phénomène n épargne pas le secteur public lui-même confronté à un approvisionnement insuffisant en antipaludiques recommandés (2, 63). La prise en charge à domicile (PECADOM) n est pas encore vraiment opérationnelle telle que recommandée par l OMS (conditionnement des médicaments en unités thérapeutiques contenant le traitement complet pour un épisode de maladie, avec étiquetage illustré ; formation des communautés, notamment des mères et des responsables communautaires ; formation des commerçants, des vendeurs de médicaments et des pharmaciens ; campagne d information, éducation et communication ciblée sur la communauté, visant à modifier les comportements communautaires) (64). On sait pourtant qu en Afrique plus de 70% d épisodes fébriles en milieu rural et 50% en zones urbaines (65% à Katana en RDC en 1996), font l objet d une automédication qui est souvent inadéquate (moins de 15% d épisodes palustres soignés correctement) (65-66). Le recours aux agents de santé communautaire a montré qu ils pouvaient contribuer à l amélioration de la prise en charge à domicile, y compris avec utilisation des TDR (66-67). Cependant, la sélectivité des soins et l ambigüité 28