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Transcription:

Un quizz pour commencer... Soit un ket ψ normé. Indiquez la ou les bonnes réponses: A. ψ ψ est un nombre B. ψ ψ est un opérateur C. ψ ψ est une observable D. ψ ψ est un projecteur E. ψ ψ n a aucun sens Polarisation du photon, intrication et inégalités de Bell Π = ψ ψ est visiblement un opérateur hermitien, et Π 2 = ψ ψ ψ ψ = ψ ψ = Π c est donc bien un projecteur. Chapitre 5.6, 6.2 et 14 Les objectifs de cet amphi - compléter et illustrer le formalisme introduit dans l amphi 5 - présenter et analyser des conséquences physiques importantes 1. De la polarisation du photon aux bits quantiques La polarisation du photon Un petit paradoxe Une vraie expérience 2. Le produit tensoriel d espaces d états Un outil essentiel en mécanique quantique 3. Mesures sur un système intriqué Corrélations entre des mesures séparées 4. L argument EPR et les inégalités de Bell Principe et démonstration des inégalités de Bell Tests expérimentaux Chapitre 6.2 1. De la polarisation du photon aux bits quantiques

Equations de Maxwell : Polarisation de la lumière * vibration transverse, linéaire ou circulaire * si on met un polariseur, direction de polarisation imposée * 2e polariseur (analyseur) faisant un angle θ avec l analyseur : Polariseur à une voie ("polaroïd") : une polarisation est absorbée Φ transmis = Φ incident cos 2 (θ) (Loi de Malus) (transmission nulle si le polariseur et l analyseur sont orthogonaux) sin 2 θ Polariseur à 2 voies : θ pas d absorption, toute la lumière ressort cos 2 θ Toujours 2 sorties dont les intensités varient en cos 2 (θ) et sin 2 (θ) θ cos 2 θ Polarisation d un photon Photon : "grain" d énergie lumineuse, E = h ν 2 10-19 J Flux lumineux émis par une lampe 200 W : 10 21 photons/seconde Comment définir l état de polarisation d un seul photon? θ sin 2 θ cos 2 θ Si on détecte un photon unique après le polariseur, on ne peut obtenir qu un des deux résultats (mutuellement exclusifs) "transmis" ou "dévié" On dira alors que la polarisation du photon est "horizontale" ou "verticale" Si la polarisation initiale du photon est orientée suivant un angle θ, les probabilités pour que le photon soit transmis ou dévié seront cos 2 θ et sin 2 θ Pour un grand nombre de photons, on retrouve bien la loi de Malus! Polarisation d un photon Photon : "grain" d énergie lumineuse, E = h ν 2 10-19 J Flux lumineux émis par une lampe 200 W : 10 21 photons/seconde Comment définir l état de polarisation d un seul photon? θ sin 2 θ cos 2 θ Différence cruciale entre les comportements classiques et quantiques : Un champ classique incident E est projeté sur les deux axes du polariseur, et se partage en deux composantes : transmise E cosθ, et déviée E sinθ Le «champ électrique» d un photon unique ne se partage pas, mais le photon est transmis ou dévié, avec des probabilités cos 2 θ et sin 2 θ Pour un grand nombre de photons, le flux obéit bien à la loi de Malus! Polarisation d un photon Photon : "grain" d énergie lumineuse, E = h ν 2 10-19 J Flux lumineux émis par une lampe 200 W : 10 21 photons/seconde Expérience de "tri" par la polarisation : * orientations 0 ou 90 : 2 sortes de photons (mutuellement exclusifs) "vertical" : v et "horizontal" : h * mais on a aussi 45 et 135 : 2 sortes de photons (mutuellement exclusifs) "oblique droit" : d et "oblique gauche" : g Raisonnement "classique" : 2 propriétés différentes, par exemple : * homme : h ou femme : v * blond : d ou brun : g Test expérimental?

Raisonnement classique : «mélange statistique» Raisonnement classique : «mélange statistique» * homme : h ou femme: v * blond : d ou brun : g p = 0 * homme : h ou femme: v * blond : d ou brun : g p = 0.5 p = 0 v : femme les femmes ne sont pas des hommes! v : femme d : blond femme blonde? les femmes blondes ne sont pas brunes! Raisonnement classique : «mélange statistique» Modèle quantique de la polarisation du photon * homme : h ou femme: v * blond : d ou brun : g p = 0.5 p = 0.5 Mesures de polarisation : on prépare h (ou v) et on mesure h (ou v) : tous les photons passent on prépare h (ou v) et on mesure v (ou h) : aucun photon ne passe v : femme d : blond femme blonde? Raisonnement classique ("mélange statistique") : On trie en 4 catégories v&d, v&g, h&d, h&g Test : on prépare v, puis d => tri des photons v&d? Mesure de h : la moitié des photons v&d sont devenus h! La préparation de d a fait "oublier" celle de v! Le "mélange statistique" est en conflit avec l expérience! 50% des femmes blondes sont en fait des hommes! => états propres orthogonaux h ou v même raisonnement avec g et d => états propres orthogonaux g ou d on prépare h (ou v) et on mesure g : la moitié passe => état g on prépare h (ou v) et on mesure d : la moitié passe => état d on prépare g (ou d) et on mesure v : la moitié passe => état v on prépare g (ou d) et on mesure h : la moitié passe => état h Comment relier les états h, v et les états g, d?

Mélange statistique et superposition linéaire Raisonnement quantique ("superposition linéaire") : d = ( v + h ) / 2, g = ( v - h ) / 2, Test : on prépare v = ( d + g ) / 2, puis v = ( d + g ) / 2 h = ( d - g ) / 2 projection sur l état propre! d = ( v + h ) / 2 Pour l état d : P(d) = 1 P(g) = 0 d et g orthogonaux Mesure : P(h) = 1/2 P(v) = 1/2 ça marche! IL FAUT UNE SUPERPOSITION LINEAIRE D ETATS! Le ket : ( v + i h ) / 2 A. n est pas un vecteur d état acceptable B. représente une polarisation inconnue, alignée soit avec h soit avec v C. représente une polarisation circulaire du photon Polarisation circulaire gauche ou droite : σ ± = ( v ± i h ) / 2 Les états de polarisation n évoluent pas lors de la propagation de la lumière dans le vide Pouvoir rotatoire Dans certains milieux, l indice de réfraction est différent pour des polarisations circulaires gauche et droite (biréfringence circulaire). Vecteur d onde k ± = n ± ω/c associé à σ ± = ( v ± i h ) / 2 ψ θ in = v ψ out =? ψ in = ( σ + + σ - ) / 2 ψ out = ( e i k+ L σ + + e i k- L σ - ) / 2 = e i k L ( cos(δk L) v - sin(δk L) h ) et en posant k ± = k ± δk = e i k L ( cos(θ) v + sin(θ) h ) avec θ = - δk L La polarisation du faisceau tourne de θ : pouvoir rotatoire. Analogie avec le calcul de ψ (T), en remplaçant iω ± T par ik ± L POUVOIR ROTATOIRE DE L'EAU SUCREE : LA SPIRALE DE LUMIERE Dans Dans de de l eau l'eau sucrée, sucrée la la polarisation de de la la lumière tourne en spirale hélice. On ne voit plus la lumière quand la direction de la polarisation pointe dans la direction d'observation. Remarque : on «voit» en fait seulement une très faible fraction des photons, ceux qui sont diffusés par le liquide. Pouvoir rotatoire de l eau sucrée : une hélice de lumière Direction de propagation Direction de polarisation Lumière diffusée

Que peut-on en conclure? * L état de polarisation du photon se décrit dans un espace de Hilbert de dimension 2 : = v + h 2 + 2 =1 α, β réels : polarisations linéaires α, β complexes : polarisations circulaires ou elliptiques * Si la polarisation est bien définie dans la base { v, h }, elle est totalement aléatoire dans la base { d, g } On dit que ces deux bases sont «incompatibles» Les observables associées ne commutent pas. 2. Le produit tensoriel d espaces d états Un photon polarisé, ou un système quantique à 2 états, est un «bit quantique» ou «qubit» Ceci a des conséquences très importantes si on veut utiliser un tel système pour transmettre ou traiter une information. Chapitre 5.6 Position du problème Question : quel espace des états doit-on utiliser : - pour décrire un système de plusieurs particules - pour décrire une particule à plusieurs degrés de liberté (plusieurs dimensions, mouvement + spin...) - de facon générale : pour "combiner" 2 espaces des états, de bases A. B. Dimension de l espace produit tensoriel Pour deux espaces de Hilbert et de dimensions finies, quelle est la dimension de l espace? On peut essayer de définir l état (par exemple de 2 particules) en spécifiant l état de chacune : : Réponse : On appelle produit tensoriel des 2 espaces des états l espace engendré par la base obtenue en "juxtaposant" les vecteurs des deux bases :

Quelques propriétés du produit tensoriel Exemples : plusieurs degrés de liberté Fonctions d ondes à 2 dimensions, base : Fonctions d ondes à 3 dimensions. Intrication Etats intriqués ou non? Indiquez les états ci-dessous qui sont des états intriqués. + + = a : + b : + A. B. C. D. E. F. Un état est dit factorisable s il peut s écrire : Un état non factorisable est intriqué. NB : Si N 1 = N 2 = 2, alors 2 + 2 = 2 x 2, mais le résultat reste valable.

3. Mesures sur un état intriqué Mesures sur un état intriqué Si le photon est transmis : résultat (valeur propre) ε 1 = +1 état propre associé + θ1 Si le photon est transmis : résultat (valeur propre) ε 2 = +1 état propre associé + θ2 On veut calculer la probabilité P( + θ1, + θ2 ) pour l état initial Ψ + θ1, + θ2 = (cos( ) h 1 + sin( ) v 1 ) x ( cos( ) h 2 + sin( ) v 2 ) P( + θ1, + θ2 ) = + θ1, + θ2 Ψ 2 = ½ cos 2 ( - ) Si le photon est réfléchi : résultat (valeur propre) ε 1 = -1 état propre associé θ1 Si le photon est réfléchi : résultat (valeur propre) ε 2 = -1 état propre associé θ2 + 0 = h, 0 = v, + 45 = d, 45 = g θ1, θ2 = (- sin( ) h 1 + cos( ) v 1 ) x (- sin ) h 1 + cos( ) v 1 ) P( θ1, θ2 ) = θ1, θ2 Ψ 2 = ½ cos 2 ( - ) P( + θ1, θ2 ) = + θ1, θ2 Ψ 2 = ½ sin 2 ( - ) P( θ1, + θ2 ) = θ1, + θ2 Ψ 2 = ½ sin 2 ( - ) Mesures sur un état intriqué Mesure des corrélations entre et P( + θ1, + θ2 ) = + θ1, + θ2 Ψ 2 = ½ cos 2 ( - ) P( θ1, θ2 ) = θ1, θ2 Ψ 2 = ½ cos 2 ( - ) P( + θ1, θ2 ) = + θ1, θ2 Ψ 2 = ½ sin 2 ( - ) P( θ1, + θ2 ) = θ1, + θ2 Ψ 2 = ½ sin 2 ( - ) La somme des 4 probabilités vaut bien 1, ok. Quelles sont les probabilités pour les résultats séparés? P( + θ1 ) = P( + θ1, + θ2 ) + P( + θ1, θ2 ) = ½ et de même P( θ1 ) = P( + θ2 ) = P( θ2 ) = ½ Le résultat obtenu pour chaque mesure est totalement aléatoire, mais les résultats obtenus par et sont fortement corrélés! Pour chaque paire de particules, et calculent le produit de leurs résultats ε 1 = ±1 et ε 2 = ±1 et obtiennent un nombre ε 1 ε 2 = ± 1 Si ε 1 ε 2 = +1, résultats corrélés; si ε 1 ε 2 = -1, résultats anticorrélés En répétant leurs mesures un grand nombre de fois, ils obtiennent une évaluation de la fonction de corrélation : E(, ) = ε 1 ε 2 E(, ) 1 E(, ) = Σ ε 1 ε 2 P(ε 1, ε 2 ) = cos 2 ( - ) - sin 2 ( - ) = cos(2( - ))

Corrélations pour un état intriqué Corrélations pour un état intriqué = θ = θ A. E(θ, θ) = +1 B. E(θ, θ) = 0 C. E(θ, θ + 45 ) = 0 D. E(θ, θ + 45 ) = - 1 E. E(θ, θ + 90 ) = 0 F. E(θ, θ + 90 ) = - 1 Ψ = ( h 1 h 2 + v 1 v 2 )/ 2 Si =, et obtiennent toujours le même résultat (++ ou - -) Si = +90, ils obtiennent toujours des résultats opposés (+ - ou - +) Ψ = ( h 1 h 2 + v 1 v 2 )/ 2 Une autre méthode pour expliquer ces résultats? Supposons qu fasse une mesure pour la direction = θ et trouve +1, quel est alors l état du système? Complément au principe 3: Cet état est obtenu en projetant l état Ψ sur l état propre correspondant à la mesure. Si n a pas encore fait de mesure, on remplace le projecteur correspondant par l identité 2. L état recherché est donc (il faut renormaliser) : Ψ proj = ( + θ + θ x 2 ) Ψ = + θ, + θ2 = θ / 2 Si on part de l état Ψ, l état reçu par est + θ2 = θ Refaire ce calcul! On retrouve alors tous les résultats précédents avec la loi de Malus. Mesure des corrélations entre et 4. Conclusion : les résultats obtenus par et sont : - totalement aléatoires si on les considère individuellement L argument Einstein Podolsky Rosen (EPR) et les Inégalités de Bell - très fortement corrélés si on les compare entre eux Question : qu est-ce qui "porte" cette corrélation? Chapitre 14

L argument EPR N. Bohr Inégalité de Bell En 1935, EPR développent un argument qui les conduit à conclure que la théorie quantique est "incomplète" (existence de "variables cachées"?) Niels Bohr répond immédiatement, avec le même titre mais une conclusion opposée : l état quantique donne une description "complète". Les inégalités établies par John Bell (1964) permettent d aborder expérimentalement cette question. Comment expliquer ces corrélations? Suivant l idée d EPR, John Bell suppose qu il existe des paramètres λ qui déterminent le résultat des mesures d et : A(, λ) = ± 1 B(, λ) = ± 1 et qui varient aléatoirement d une paire à l autre, Z avec une distribution statistique ρ(λ) normée : ( )d =1 La fonction de corrélation s écrit Z alors : E( 1, 2) = A( 1, )B( 2, ) ( )d J.S. Bell, Rev. Mod. Phys. 38, 447 (1966) ou θ 1 Inégalité de Bell John Bell introduit alors la grandeur S = E(, ) + E(θ 1, ) + E(θ 1, θ 2 ) - E(, θ 2 ) S = s est la moyenne sur la distribution ρ(λ) de s = A(, λ) B(, λ) + A(θ 1, λ) B(, λ) + A(θ 1, λ) B(θ 2, λ) - A(, λ) B( θ 2, λ) = ± 2 On obtient ainsi l inégalité de Bell (voir chapitre 14): pour toute théorie à variables cachées locales, on a J.S. Bell, Rev. Mod. Phys. 38, 447 (1966) ou θ 2 Violation de l inégalité de Bell en physique quantique Pour l état intriqué Ψ précédent, on a E(, ) = cos(2( - )) Configuration intéressante: π/8 π/8 π/8 S = E(, ) + E(θ 1, ) + E(θ 1, θ 2 ) - E(, θ 2 ) 1 1 1 1 θ 1 θ 2 Conflit testable expérimentalement!

ou θ 1 Inégalité de Bell Pourquoi obtient-on un résultat aussi fort avec des hypothèses (apparemment) aussi faibles? Z A(, λ) = ± 1 B(, λ) = ± 1 ( )d =1 En fait les hypothèses de Bell sont très générales (toujours vérifiées en physique classique!), mais elles ne sont pas «faibles» - le modèle est local : A(,, λ) = ± 1 B(,, λ) = ± 1 peut être testé expérimentalement (A. Aspect 1976) - les propriétés «cachées» sont «portées par chaque particule» réponse de Bohr : ceci n est pas valable en MQ ou θ 2 θ 1 Les expériences d Orsay (1981-82) L = 12 m Résultats en excellent accord avec la théorie quantique Echec des théories à variables cachées locales! A. Aspect, P. Grangier, G. Roger, Phys. Rev. Lett. 49, 91 (1982) A. Aspect, J. Dalibard, G. Roger, Phys. Rev. Lett. 49, 1804 (1982) θ 2 C 1, C 2 : commutateurs optiques envoyant les photons vers deux polariseurs orientés suivant, (ou, ) T commut (20 ns) < L/c (40 ns) Les expériences "ultimes" (2015) Les expériences d Orsay étaient des prouesses en 1981, mais - la distance entre les polariseurs était un peu trop faible pour pouvoir réaliser des choix de mesure parfaitement aléatoires - beaucoup de paires de photons émises par la source étaient "manquées"; or en principe il faudrait les détecter toutes. Après de nombreux progrès techniques, 3 expériences "ultimes" réalisées en 2015 ont finalement reconfirmé les résultats - paires de photons intriqués, L = 58 m à Vienne, Autriche [1] - paires de photons intriqués, L = 185 m à Boulder, USA [2] - paires de spins intriqués, L = 1.3 km à Delft, Pays Bas [3] Tous les résultats sont en excellent accord avec la théorie quantique Echec (définitif) des théories à variables cachées locales! [1] M. Giustina et al., Phys. Rev. Lett. 115, 250401 (2015). [2] L. K. Shalm et al., Phys. Rev. Lett. 115, 250402 (2015). [3] B. Hensen et al., Nature 526, 682 (2015). Voir aussi : A. Aspect, https://physics.aps.org/articles/v8/123 En résumé En mécanique quantique il existe de nombreux exemples de systèmes à deux états, décrits dans un espace de Hilbert de dimension deux : les photons polarisés, les particules de spin 1/2, les paires de niveaux atomiques excités près de leur résonance (voir amphi 9). Ces systèmes sont appelés "bits quantiques" ou "qubits". Un système quantique "composite" à plusieurs degré de liberté se décrit dans un espace de Hilbert qui est le produit tensoriel des espaces des composantes. Le produit tensoriel est d usage universel en mécanique quantique, pour décrire les systèmes à plusieurs degrés de liberté, ou à plusieurs particules. Dans l espace produit tensoriel on peut définir des états non factorisables ou "intriqués", qui ne peuvent pas s écrire sous la forme du produit de deux état pris dans chaque espace séparément. Pour de tels états, les résultats de mesures sur des sous-systèmes spatialement séparés peuvent être fortement corrélés. Les corrélations quantiques d un état intriqué ne peuvent être décrites par aucun modèle classique "réaliste local", obéissant aux hypothèses de Bell, inspirées de l argument EPR. Les résultats expérimentaux confirment que la causalité relativiste est respectée, mais qu il est impossible d attribuer des propriétés appartenant en propre à un sous-système d un système intriqué.