ETUDE DE L ENHERBEMENT SUR COLOMBARD

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Transcription:

Extrait de «Matériel végétal et techniques viticoles» Journée Technique (compte-rendu) ETUDE DE L ENHERBEMENT SUR COLOMBARD Auteur : Nathalie David Chambre Agriculture du Gers Contact : Domaine de Mons 32100 Caussens Tél. 05.62.68.30.30 Date de publication : Février 2001

SOMMAIRE RESULTATS 3 CONCLUSION 5

Enherbement Colombard Essai d Estang (32) 1994-2000 En zone de vin de pays "Côtes de Gascogne", la production du cépage Colombard est souvent difficile à maîtriser. Aussi, un essai d'enherbement permanent a-t-il été mis en place, fin 1993, à la demande de la Cave Coopérative de Panjas, à Estang, sur la parcelle d'un de leurs adhérents. Il s'agit de mesurer l'impact de cette technique sur le niveau de production du Colombard et sur la qualité de la vendange. Trois types d'enherbement (2/3 de la surface interang) sont comparés à un témoin désherbé chimiquement : fétuque rouge fétuque élevée enherbement mixte : 70 % fétuque rouge + 30 % ray-grass anglais. Cet essai est mené en partenariat par la Chambre d'agriculture du Gers et la station régionale de l'itv. RESULTATS * L'évolution des poids de bois de taille par cep montre bien la forte incidence de l'enherbement sur la vigueur de la vigne. L'effet dépressif des 3 types d'enherbement apparaît dès janvier 1995 et s'accentue d'année en année. La concurrence la plus forte est celle de la fétuque élevée (FE), l'espèce la moins agressive est la fétuque rouge (FR). L'enherbement mixte est intermédiaire. (Cette différence dans les niveaux de concurrence entre les 3 enherbements se retrouvera pour tous les critères). On arrive en janvier 1998 à une diminution du poids des bois de taille de 30 % pour la FR, et de 60 % pour la FE. Les résultats de 1999 semblaient montrer une diminution de la concurrence exercée par la FE, que n'ont pas vraiment confirmé ceux de 2000. (Remarque : à partir de la récolte 1998, seules les modalités témoin et FE ont été conservées. En effet, l'essai a subi une attaque de chenilles à l'automne 1997, et les autres enherbements ont moins bien résisté que la FE) L'observation des bois, ainsi que les comptages, montre pour les modalités enherbées une quantité plus faible d'entre-coeurs : ainsi en 1998 par exemple, les entre-coeurs représentent seulement 4 % du poids total des bois pour la FE, alors qu'ils représentent 20 % de ce poids chez le témoin. On note aussi une moindre fertilité des contre-bourgeons sur les vignes enherbées. L'enherbement, s'il est très concurrentiel (FE), entraîne aussi un raccourcissement des entre-noeuds : pour une même longueur de baguette, on laisse donc plus d'yeux sur ces souches que sur celles du témoin. * La surface foliaire totale est diminuée par l'enherbement. Mais le moindre développement des entre-coeurs diminue l'épaisseur de feuillage, permettant aux feuilles d'être plus actives pour la photosynthèse : en conséquence, l'enherbement, même très concurrentiel comme la FE, n'entraîne pas forcément de grand changement de la SFEp (Surface Foliaire Exposée potentielle) par rapport au témoin. La concurrence de l'enherbement se traduit aux différents stades phénologiques (débourrement, floraison et véraison) par une plus grande précocité : de 2 à 10 jours suivant les années et les stades par rapport au témoin. La fétuque élevée est la plus précoce. Fétuque rouge et mélange ont une même avance sur le témoin. * Les contrôles de maturité montrent une nette avance de maturité des modalités enherbées quant à la teneur en sucres (+ 17 à 24 % au premier contrôle), qui reste constante jusqu'aux vendanges. Sur moûts, pour une même date de récolte, l'enherbement permet d'obtenir de 1 à 3 degrés potentiels de plus par rapport au témoin. L'acidité totale est par contre plus faible, de 0,3 à 2 points de moins : cet écart provient essentiellement d'une moindre teneur en acide malique des lots enherbés (cela peut Etude de l enherbement sur Colombard page 3

s'expliquer par une exposition plus importante des grappes suite à la diminution de surface foliaire). La teneur en acide tartrique varie peu par rapport au témoin. Les moûts issus des vignes enherbées sont donc plus équilibrés, avec un rapport S/A d'autant plus grand que l'enherbement est plus concurrentiel. Remarque : le témoin, vendangé 10 à 15 jours après la 1ère récolte (au cours de laquelle toutes les modalités sont vendangées), n'arrive tout de même pas au niveau de maturité des lots enherbés. Par contre, son état sanitaire se détériore assez fortement durant ces 10 à 15 jours. * L'enherbement induit une baisse significative du rendement. Cette diminution du poids de récolte est toujours proportionnelle avec le niveau de concurrence. Elle est due à un moins grand nombre de grappes, le poids de celles-ci étant également plus faible. Excepté sur la première année d'exploitation, les baisses de rendement mettent en évidence les différences de concurrence hydrique existant entre les espèces. Ainsi, quel que soit le millésime, on observe le même type de concurrence entre les différents types d'enherbement. La production diminue de 10 à 20 % par rapport au témoin avec FR, de 15 à 25 % avec l'enherbement mixte, et de 25 à 50 % avec la FE. La baisse de rendement sur les vignes enherbées profite au rapport "Surface foliaire exposée / poids de vendange", qui devient supérieur à celui du témoin. * Les fermentations des modalités enherbées sont plus longues de 2 à 15 jours, voire plus. La fétuque élevée, surtout, accentue les risques d'arrêt de fermentation. Les moûts issus d'enherbement fermentent plus difficilement à cause d'une teneur plus faible en composés azotés. * Les vins obtenus présentent un TAV plus élevé et une acidité totale plus faible que le témoin, confirmant les résultats obtenus sur moûts. Ils ont aussi parfois un taux de sucres résiduels plus important, en relation avec les fins de fermentation languissantes. * Au niveau organoleptique, aucune différence n'est décelée entre modalités pour les récoltes 1994 et 1995. En 1996, les préférences des dégustateurs vont vers les 2 extrêmes en matière de production, mais pour des raisons totalement différentes : le témoin est préféré par certains à cause de son nez très intense (par contre, la bouche est complètement diluée et déséquilibrée) ; la FE est moins puissante olfactivement, mais est beaucoup plus équilibrée, avec une bouche plus grasse et plus ronde. En 1997, le témoin est nettement moins apprécié car beaucoup trop acide, ce qui le déséquilibre. Au niveau olfactif, il est jugé, pour une même intensité, moins complexe que les autres. La différence d'acidité entre la fétuque élevée et les autres enherbements est bien perçue par les dégustateurs. De ce fait, fétuque rouge et enherbement mixte sont un peu moins équilibrés que la fétuque élevée. En 1998, le témoin se distingue par une plus grande intensité et typicité aromatique, mais la bouche est très diluée. La FE se caractérise toujours par ses qualités gustatives bien supérieures ; ses arômes sont jugés moins typiques d'un Colombard. En 1999, la FE est préférée au témoin. Etude de l enherbement sur Colombard page 4

CONCLUSION L'enherbement permanent entraîne donc des baisses significatives de vigueur, de surface foliaire secondaire et de rendement, et en conséquence une modification notable de la composition des raisins (vendange plus riche en sucres et moins acide). Ces effets, ainsi que les risques de problèmes de fin de fermentation, sont d'autant plus importants que l'espèce implantée est plus concurrentielle. Au niveau organoleptique, les écarts ne sont pas aussi tranchés qu'on pourrait le croire au vu des résultats analytiques. La perception gustative est certes en faveur des modalités enherbées ; mais le potentiel aromatique est souvent jugé comme moins intéressant que celui du témoin désherbé Etude de l enherbement sur Colombard page 5