Traitements loco-régionaux des Carcinomes Hépato Cellulaires. Jean-Luc Raoul Institut Paoli-Calmettes Marseille

Documents pareils
Le point sur les techniques d embolisation des hépatocarcinomes

TRAITEMENT DES TUMEURS HEPATIQUES. Paul Legmann Radiologie A Pôle Imagerie

CORRELATION RADIO-ANATOMIQUE DANS LE CARCINOME HEPATOCELLULAIRE TRAITE PAR TRANSPLANTATION HEPATIQUE : IMPACT SUR LA RECIDIVE

Chimio-embolisation intra-artérielle des hépatocarcinomes. Comparaison des techniques, lipiodolée classique et par billes chargées.

Chimioembolisation du carcinome hépatocellulaire : le retour?

Cas clinique 2. Florence JOLY, Caen François IBORRA, Montpellier

Traitements néoadjuvants des cancers du rectum. Pr. G. Portier CHU Purpan - Toulouse

Cancer du rein métastatique Nouvelles approches thérapeutiques. Sophie Abadie-Lacourtoisie 20 mai 2006

INTERFERON Traitement adjuvant du mélanome à haut risque de récidive. Dr Ingrid KUPFER-BESSAGUET Dermatologue CH de quimper

Quel apport de l imagerie dans les traitements anti-angiogéniques?

PLACE DE L IRM DANS LE BILAN D EXTENSION DU CANCER DU RECTUM. Professeur Paul LEGMANN Radiologie A - Cochin Paris

Carcinome hépato-cellulaire

Peut-on ne pas reprendre des marges «insuffisantes» en cas de Carcinome canalaire infiltrant

Radiologie Interven/onnelle sur les nodules pulmonaires. J. Palussière, X. Buy Département imagerie

Pierre OLIVIER - Médecine Nucléaire

Sophie Sigrist. Thèse sous la direction de Pascale Pisano (Directeur de thèse)

Le traitement conservateur des tumeurs malignes des membres a largement remplacé les amputations

NOUVEAUTÉS EN TRANSPLANTATION HÉPATIQUE EN Thomas Decaens

Traitement de l hépatite C: données récentes

Essais précoces non comparatifs : principes et calcul du nombre de sujets nécessaire

TRAITEMENT DE L HÉPATITE B

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE. Avis. 23 mai 2007

Le dropéridol n est pas un traitement à considérer pour le traitement de la migraine à l urgence

Validation clinique des marqueurs prédictifs le point de vue du méthodologiste. Michel Cucherat UMR CNRS Lyon

ESMO 14. L oncogériatrie d un coup d éventail! Dr Elisabeth Carola UCOG Picardie

Dr Pierre-François Lesault Hôpital Privé de l Estuaire Le Havre

Recommandations régionales Prise en charge des carcinomes cutanés

Le RIVAROXABAN (XARELTO ) dans l embolie pulmonaire

IRM du Cancer du Rectum

Votre guide des définitions des maladies graves de l Assurance maladies graves express

Essai Inter-groupe : FFCD UNICANCER FRENCH - GERCOR

27 ème JOURNEE SPORT ET MEDECINE Dr Roukos ABI KHALIL Digne Les Bains 23 novembre 2013

LES CO-INFECTIONS VIH-VHC. EPIDEMIOLOGIE, INTERFERENCES. Patrice CACOUB La Pitié Salpêtrière, Paris

Place de l interféron dans le traitement de l hépatite B chez le patient co-infecté VIH

Essais cliniques de phase 0 : état de la littérature

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE

PRINTEMPS MEDICAL DE BOURGOGNE ASSOCIATIONS ANTIAGREGANTS ET ANTICOAGULANTS : INDICATIONS ET CONTRE INDICATIONS

Y a-t-il une place pour un vaccin thérapeutique contre l hépatite B? H. Fontaine, Unité d Hépatologie Médicale, Hôpital Cochin

Nouveaux anticoagulants oraux : aspects pratiques

Immunothérapie des cancers bronchiques

F ZOULIM. Traitement du VHB : Interféron ou anti-viraux

Traitement de consolidation dans les cancers de l ovaire

Traitement des hépatites virales B et C

Qui et quand opérer. au cours du traitement de l EI?

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS. 4 novembre 2009

L IRM pas à pas Un module d enseignement interactif des bases physiques de l Imagerie par Résonance Magnétique.

Cancers de l hypopharynx

Un nouveau test sanguin performant pour le diagnostic non-invasif de steatohépatite non alcoolique chez les patients avec une NAFLD

ALK et cancers broncho-pulmonaires. Laurence Bigay-Gamé Unité d oncologie thoracique Hôpital Larrey, Toulouse

Effets sur la pression artérielle rielle des traitements non-médicamenteux

Plan. Introduction. Les Nouveaux Anticoagulants Oraux et le sujet âgé. Audit de prescription au Centre Hospitalier Geriatrique du Mont d Or

Les différents types de cancers et leurs stades. Dr Richard V Oncologie MédicaleM RHMS Baudour et Erasme La Hulpe 1/12/07

INFORMATION À DESTINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ LE DON DU VIVANT

«Quelle information aux patients en recherche biomédicale? Quels enseignements en retirer pour la pratique quotidienne?»

PLACE DES MARQUEURS NON INVASIFS DE FIBROSE ET DE L ELASTOMETRIE

Dépistage du cancer colorectal :

Quantification de l AgHBs Pouquoi? Quand?

Prise en charge de l embolie pulmonaire

Métastase unique d un NPC: Une question singulière? Jean Louis Pujol - Xavier Quantin Mohammad Chakra Fabrice Barlési

Christian TREPO, MD, PhD

Pharmacovigilance des nouveaux anticoagulants oraux

Objectifs pédagogiques Lecture critique d article

Innovations thérapeutiques en transplantation

Les nouveaux anticoagulants oraux, FA et AVC. Docteur Thalie TRAISSAC Hôpital Saint André CAPCV 15 février 2014

Second cancers après cancer du sein. M. Espié Centre des maladies du sein

Virus de l hépatite B

Les anticoagulants. PM Garcia Sam Hamati. sofomec 2008

L hépatite C pas compliqué! Véronique Lussier, M.D., F.R.C.P.C. Gastroentérologue Hôpital Honoré-Mercier 16 avril 2015

Les facteurs de croissance lignée blanche Polynucléaires neutrophiles Grastims

COMPLICATIONS THROMBOTIQUES DES SYNDROMES MYÉLOPROLIFÉRATIFS: ÉVALUATION ET GESTION DU RISQUE

Apport de l IRM dans la

Avis 29 mai XYZALL 5 mg, comprimé B/14 (CIP : ) B/28 (CIP : ) Laboratoire UCB PHARMA SA.

Cancer colo-rectal : situation belge

Thérapeutique anti-vhc et travail maritime. O. Farret HIA Bégin

Cancer du sein in situ

Traitements de l hépatite B

Évaluation du risque cardiovasculaire dans le contexte de l hypertension artérielle et de son traitement

La prise en charge de l AVC ischémique à l urgence

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE. 10 décembre 2008

Pemetrexed, pionnier de la chimiothérapie histoguidée. Dr Olivier CASTELNAU Institut Arnault TZANCK ST Laurent du Var

La Maladie Thrombo-Embolique Veineuse (MTEV) et sa prise en charge médicamenteuse

Place de la chirurgie à l heure des thérapies ciblées. The role of surgery in the era of targeted therapy. * Non ouvert en France.

e-santé du transplanté rénal : la télémédecine au service du greffé

QUEL PROTOCOLE DE REENTRAINEMENT PROPOSER AUX PATIENTS INSUFFISANTS CARDIAQUES?

J. Goupil (1), A. Fohlen (1), V. Le Pennec (1), O. Lepage (2), M. Hamon (2), M. Hamon-Kérautret (1)

La mesure de la réserve coronaire

Transplantation hépatique à donneur vivant apparenté. Olivier Scatton, Olivier Soubrane, Service de chirurgie Cochin

La nouvelle classification TNM en pratique

Revue de la littérature

CEPHALEES POST-BRECHE DURALE. Post Dural Puncture Headache (PDPH)

Cancer et dyspnée: comment peut-on soulager? Dr Lise Tremblay 10 mai 2010

Traitement des hépatites virales

Cancer du sein. Du CA15-3 à la tomographie à émission de positons.

Pharmacologie des «nouveaux» anticoagulants oraux

COMPARAISON DE QUATRE PROTOCOLES DE CHIMIOTHERAPIE POUR DES CANCERS DU POUMON NON A PETITES CELLULES (CBP NAPC) AVANCES

GASTRO-ENTEROLOGIE. Variabilité. A des entrées. B des sites anatomiques. C inter-individuelle. D intra-individuelle

Objectifs. La prise en charge du cancer du poumon métastatique: vers une approche personnalisée. Dre Lise Tremblay

Évaluation de la prise en charge du cancer du rein métastatique à l ère des thérapies ciblées. Étude clinique rétrospective sur six ans

EXERCICE N 10 : Modifier le protocole d'un essai pour mieux réussir ; mais réussir quoi?

ALTO : des outils d information sur les pathologies thromboemboliques veineuses ou artérielles et leur traitement

Transcription:

Traitements loco-régionaux des Carcinomes Hépato Cellulaires Jean-Luc Raoul Institut Paoli-Calmettes Marseille Cours Intensifs FFCD, Marseille 2016

Les CHC ont une hypervascularisation artérielle / foie non tumoral

Les thrombus tumoraux également! Evaginations intra-vasculaires de la tumeur, vascularisées par les artères tumorales

Rationnel Voie intra-artérielle: Concentration de l agent thérapeutique au sein de la tumeur, En limitant les effets / foie non tumoral, Une «injection» => plusieurs tumeurs; Ischémie / embolisation: cytotoxicité; Abord simple; Approche très utilisée: (Chimiothérapie IAH (Asie)) Chimio-embolisations (CE) Radioembolisations (RE)

Radioembolisation Microsphères microvx TheraSphere Ho-PLLA SIR-Spheres MS Nordion Utrecht Sirtex U Verre Résine 25 (±10) µm 30 µm 35 (?) (±10) µm Activité par microsphère: 2500 Bq 450Bq Bq nb sphères / 5 GBq: 4 M 3340-80 M M 90 Y 166Ho b b -, g 64 h 27h 2.5 mm 2.2 mm 11 mm 10 mm

90Y Microsphères Modalités de traitement: 1 ère angiographie: Cartographie, Embolisation de certaines branches Injection of 99mTcMAA (fausses sphères), Activité: dose cible > 120-150Gy, < 30 Gy / poumons 2 nde angiographie Injection de 90Y-microsphères Patient sort dans les 24 h TX: un lobe puis l autre 1 Salem R J Vasc Interv Radiol 2006, 2 2 Hamami ME, et al. J Nucl Med 2009

Y90 microsphères 35 Pts transplantés après TheraSphere examen des foies explantés prc: 23 / 38 lésions = 61 % prc / taille 1 3 cm 3 5 cm > 5 cm n = 9 n = 17 n = 12 89% 65% 33% prc / date < 3 mo 3 6 mo > 6 mo n = 11 n = 8 n = 19 36% 75% 68% Riaz A, Hepatology 2009

Microsphères & Thrombose porte TheraSphere : 108 Pts, dont 37 avec TVP 30 cirrhotiques, 43% Child B-C Dosimétrie: dose cumulée140 Gy Pas de SAE net (hyperbilirubine, ascite?) Pas d embolisation artérielle majeure Réponse ORR = 42.2% EASL (mrecist) = 70% Radioembolisation: faisable si thrombose porte Kulik LM, et al. Hepatology 2008

3/10/2007 9/10/2009 JL Raoul, Centre E Marquis, Rennes

Donc Radioembolisation: «Techniquement faisable», Bien toléré, Probablement efficace: En palliatif Notamment si thrombose porte Neoadjuvant, bridge avant TH? Résultats d études de phase III attendus dans 1 2 ans

Chimio-embolisation Hétérogénéité des résultats selon les séries! Quelles sont les bonnes indications aux CE? Comment réaliser les CE: ctace? DC Beads? Comment évaluer l efficacité des CE? Quand stopper les CE? Quoi après échappement / toxicité?

Méta-analyse: survie à 2 ans CE/embolisation vs BSC Study Number of patients Odds ratio (95% CI) in random effects model Lin, et al 1998 63 GETCH 1995 96 Bruix, et al 1998 80 Pelletier, et al 1998 73 Lo, et al 2002 79 Llovet, et al 2002 112 Overall 503 p=0.017 Heterogeneity p=0.14 Favours treatment Favours control Bénéfice en survie modéré CE/embolisation de 16 mois (BSC) à 20 mois? Llovet JM, et al. Lancet 2003;362:1907 17

MAIS: une nouvelle méta-analyse est négative Oliveri RS, Wettersley J, Gluud C Cochrane Database Syst Rev 2011

Chimio-embolisation: hétérogénéité! A bons patients, bons résultats Bologne 1, 2, Barcelone 3 1 à 3 nodules, diamètre moyen de 3 cm Réponse Complète: > 50% (définition) mos > 3 ans A mauvais patients, résultats quelconques 3 essais randomisés Européens 4, 5, 6, série de Vienne 7 Multinodulaires, > 5 cm in diamètre, bilobaires, Réponse Complète : 0 25% (quelque soit la définition) mos: de 14 à 28 mois Comparables à ceux du sorafenib... 1 Golfieri R, et al. Hepatology 2011, 2 Terzi E, et al. J Hepatol 2012, 3 Burrel M, et al. J Hepatol 2012 4 Llovet J, et al. Lancet 2002 5 Doffoel M, et al. Eur J Cancer 2008 6 Lammer J, et al. CIR 2009 7 Sieghart W, et al. Hepatology 2013

CE: quelles sont les bonnes indications? PS = 0 (1) Child A, B7 Ni métas Ni TVPorte Plurinodulaire Raoul JL, et al. Cancer Treat Rev 2011

Raoul JL, et al. Cancer Treat Rev 2011

Raoul JL, et al. Cancer Treat Rev 2011

CE: Comment les réaliser? ctace vs DC beads «les particules chargées» : DC bead: controled delivery system, Résultats intéressants en phase II, Phase IIR: PRECISION V: ctace avec doxo: 100 Pts vs DC bead + doxo: 100 Pts But: ORR à 6 mois Lammer J, et al. Cardiovasc Intervent Radiol 2010

Tumour Response at 6 Months BUT NON ATTEINT: étude négative p = 0.11 Disease Control = Objective Response + Stable Disease Objective Response = Complete Response + Partial Response Lammer J, et al. Cardiovasc Intervent Radiol 2010

Tolérance Effets secondaires dus à la Doxorubicine p = 0.0001 DC Bead TM ctace Lammer J, et al. Cardiovasc Intervent Radiol 2010

ctace vs DC beads PRECISION ITALIA: Phase III, but = survie à 2 ans Arrêtée pour futilité, après inclusion de 177 Pts Moins de douleurs dans le bras DC Beads Taux de contrôle de la maladie Golfieri R, et al. BJC 2014

DC beads, en bref Efficacité > CE classique? Bien ou mieux tolérée, Pas une percée majeure; MAIS: reproductible. Lammer J, et al. Cardiovasc Intervent Radiol 2010

CE: comment en évaluer l efficacité? Imagerie classique: Rétention intra-tumorale de Lipiodol: intense et complète Définit comme réponse complète dans certaines séries? Mais sur pièce histologique: ypcr dans 56% Cependant associé à meilleur pronostic. Taille: en unidimentionnel selon RECIST ou OMS: oui mais Imagerie injectée: EASL ou mrecist (uni ou bidimentionnelle): mesure partie «viable» Meilleure prédiction du pronostic que RECIST ou OMS AFP: Intérêt probable; Surtout si chiffres élevés initialement et décroissance «nette». Donc: imagerie injectée et AFP Golfieri R, et al. Hepatology 2011; Forner A, et al. Cancer 2009; Liu L, et al. Clin Cancer Res 2014; Bonnekamp S, et al. Radiology 2013

CE: quand les stopper? Raoul JL, et al. Cancer Treat Rev 2011

CE: quand les stopper? Progression intraitable: - En zone prétraitée; - Progressions nettes; - Contre-indications: - Thrombose porte, - Métastases, - Dégradation cirrhose, - Dégradation PS. Scores Wait and see Forner A, et al. Nat Rev Clin Oncol 2014

ART score: une aide à la décision? ART - score Points Absence of radiologic response 1 AST increase > 25% 4 Child Pugh score increase 1 point 1,5 2 points 3 Juste avant la date de la seconde session de CE Sieghart W, et al Hepatology 2013

CE: quand stopper, score ABCR Score ART: Non confirmé: en Italie, au Japon Ni dans série Marseille Nancy Score ABCR: Même méthodologie Score: AFP (/200): 0,1 - BCLC : 0, 2, 3 D Child: 0, 0, 2 - Réponse: 0, -3 Sieghart W, et al. Hepatology 2013; Kudo M, et al Hepatology 2013 Terzi E, et al. Dig Dis 2014; Adhoute X, et al. J Hepatol 2014

CE: quoi ensuite? Child A-B7, PS 0 TACE B S C TACE Sora fenib B S C TACE Sorafenib B S C TACE RE? Sorafenib B S C Survie globale

Donc, efficace, très efficace si Bonnes indications: «Petites» tumeurs hypervascularisées Pas trop nombreuses Bon patient: Fonction hépatique conservée (CP A ou B7) Tronc porte libre, branches libres y compris segmentaires Bon état général (PS 0, 1??) Bonne technique: Suprasélectif, ou sélectif DCbeads: reproductibilité

Futur des traitements intra-artériels? + biothérapies? antiangiogènes Billes chargées d autres produits?

TACE + Sorafenib logique mais SPACE Phase II randomisée: TACE + sorafenib (154) vs. + placebo (153) Lencioni R, J Hepatol 2016

Conclusions Tt intra-artériels: Meilleure approche des CHC localisés CE: Revoir modalités? Et indications: garder les meilleures Radioembolisation: Participer, attendre : essais en cours Prometteur, mieux toléré, mais