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DIABETE DEFINITION Le diabète est une affection métabolique du glucose, due à un déficit ou à une hyposensibilité à l insuline (hormone hypoglycémiante). Cela crée un excès de sucre dans le sang. Glycémie à jeun supérieure à 7 mmol/l à 2 reprises Ou Glycémie supérieure à 11,1 mmol/l à n importe quel moment de la journée ou après une hyperglycémie provoquée On distingue 2 types généraux de diabète : 1. Le diabète de type I ou diabète insulinodépendant C est un diabète d apparition précoce et souvent brutale, c est-à-dire avant l âge de 20 ans. Il représente 10 à 15 % des cas de diabète. La pathologie est liée à la destruction d au moins 80% des cellules bêta et les signes cliniques n apparaissent qu à partir de ce taux de destruction cellulaire. C est une destruction auto-immune des cellules béta, productrices d insuline des îlots de Langerhans du pancréas. On retrouve fréquemment chez un malade atteint de ce diabète la présence d anticorps dirigés contre son propre pancréas (anticorps anti-îlots circulants). Il existe parfois des facteurs génétiques : recherche d antigènes HLA DR ¾. L apport d insuline est inévitable pour abaisser la glycémie et prévenir les complications. Les symptômes typiques de décompensation, liste non exhaustive, sont : Polydipsie Polyurie Polyphagie Amaigrissement Asthénie Douleurs abdominales 2. Le diabète de type II ou diabète non insulinodépendant C est un diabète d apparition plus tardif, le plus souvent chez le sujet d âge avancé. La physiopathologie s explique par la diminution de la sensibilité à l insuline. La production d insuline est maintenue, voire augmentée au début de l installation de la pathologie. Les cellules deviennent insensibles à l insuline qui n est plus correctement assimilée et reste dans le sang. Malgré un fonctionnement normal du pancréas, l insuline ne suffit plus à réguler la glycémie qui s élève de plus en plus. Le diabète de type 2 est généralement asymptomatique durant de longues années, son dépistage et son diagnostic reposent sur l'examen biologique de la glycémie à jeûn ou après stimulation par l'ingestion de sucre (glycémie post-prandiale ou hyperglycémie provoquée). Il y a des facteurs de risques du diabète de type II, qui sont : L âge L hérédité Le surpoids, l alimentation riche en graisses et sucre La sédentarité Certains médicaments comme les corticoïdes Il existe encore d autres formes particulières de diabète, comme le diabète gestationnel qui survient au cours de certaines grossesses et qui est transitoire. Page 1 de 17

Principales hormones régulants la glycémie 1. L insuline, est l hormone hypoglycémiante, elle est sécrétée par le pancréas et : Accélère la pénétration du glucose dans les cellules Augmente la conversion du glucose en glycogène (le glycogène est un glucide stocké dans le foie et les cellules musculaires, prêt à être converti en glucose et utilisé par l organisme) Empêche la néoglucogenèse (formation de glucose à partir de protéines) et la lipolyse (formation de glycérol et de corps cétonique) 2. Le glucagon, principale hormone hyperglycémiante détermine l orientation métabolique du foie, en : Stimulant la glycogénolyse Stimulant la néoglucogenèse 3. Le cortisol stimule la lipolyse. Son action hyperglycémiante s explique par l augmentation des acides aminés précurseurs de la néoglucogénèse, l induction des enzymes hépatiques de la néoglucogénèse et l inhibition de l utilisation périphérique du glucose. 4. Les catécholamines ont une action hyperglycémiante et lipolytique (effet β). Elles stimulent la cétogénèse (effet α 2) et elles inhibent la sécrétion d insuline (effet α 2). Les catécholamines interviendraient particulièrement dans certaines agressions aiguës (infarctus, traumatisme, choc, stress psychologique), causes déclenchantes du coma acidocétosique. C est le rapport insuline / glucagon qui détermine l orientation métabolique de l organisme vers un état anabolique (I/G élevé) ou au contraire vers un état catabolique (I/G bas). Dans l acidocétose, le rapport I/G est bas. Page 2 de 17

L ACIDOCETOSE DIABETIQUE Physiopathologie La carence en apport de sucre ou en insuline entraîne la mise en route de la voie catabolique permettant de puiser dans les réserves : de graisses, qui par lipolyse produise le glycérol et les corps cétoniques hépatiques de glycogène disponible par la glycogénolyse (peut au max. fournir la moitié des besoins quotidien), mais surtout dans la néoglucogenèse hépatique. Chez une personne saine, qui possède une insulino-sécrétion basale, les corps cétoniques entraîne une augmentation de la sécrétion d insuline, qui induit la boucle de contrôle suivante : Besoin de glucose Insulino-sécrétion Lipolyse cétogénèse cétogénèse lipolyse Insulino-sécrétion Chez le diabétique insulino-dépendant, n ayant pas de sécrétion basale d insuline, ce rétrocontrôle ne fonctionne pas, si bien que la lipolyse continue, avec production d acide gras synthétisé en corps cétoniques. Cette décompensation du diabète entraîne : a) acido-cétose b) hyperglycémie c) déshydratation d) déficit potassique et sodique Acido-cétose : L absence d insuline qui est la seule hormone anti-lipolytique, provoque un accroissement de la lipolyse avec production de corps cétoniques. Les corps cétoniques sont des acides forts provoquant une acidose métabolique. Il y a 2 voies d élimination de ces acides : 1. rénale : sous forme de sel de sodium et de sel de potassium, responsable d une perte importante de ces 2 cations. N.-B. : si il y a une insuffisance rénale fonctionnelle secondaire à l hypovolémie, cette voie est diminuée. 2. pulmonaire : grâce au système tampon HCO3- / CO2, par hyperventilation élimination du CO2. Toutefois cette voie est maximale une fois seulement la réserve alcaline fortement diminuée. De plus l acidose encourage l échange de K+ (LIC vers LEC) contre H+ (LEC vers LIC) augmentant encore la perte potassique. Les conséquences de l acidose peuvent être grave, comme par exemple une dépression respiratoire, une diminution de la contractilité cardiaque, une diminution du tonus vasculaire, une baisse de la sensibilité aux catécholamines, pouvant aboutir au collapsus cardiovasculaire. Hyperglycémie : Il y a une augmentation de la glycogénolyse hépatique et de la néoglucogenèse, mais en l absence d insuline le transport du glucose dans les cellules adipeuses et musculaires est impossible et le glucose reste dans le compartiment vasculaire. Cette hyperglycémie induit une hyperosmolarité extra-cellulaire qui entraîne un passage d H2O et Page 3 de 17

de K+ intracellulaire vers le compartiment extracellulaire. Il s ensuit une hypervolémie avec du flux glomérulaire. Seulement, à partir d une valeur seuil de glycémie (env. 15mmol/l), le rein ne réabsorbe plus le sucre et il s ensuit une glycosurie avec diurèse osmotique. Non compensée cette diurèse osmotique engendre une hypovolémie pouvant conduire à une insuffisance rénale fonctionnelle, élevant le seuil rénal du glucose et majorant encore l hyperglycémie. Cette insuffisance rénale fonctionnelle va engendrer un hyperaldostéronisme secondaire. N.-B. : le cerveau, le cœur, les surrénales et les globules rouges n ont pas forcément besoin d insuline, ils peuvent consommer directement le sucre Déshydratation Liée, comme expliqué auparavant à la diurèse osmotique, mais aussi à la polypnée compensatrice de l acidose qui peut être responsable de la perte de 2L par jour. De plus les vomissements sont très fréquents. Déficit potassique et sodique La perte de potassium est dûe à l acidose, au catabolisme (glycogénolyse, néoglucogenèse et lipolyse) et à l hyperosmolarité, qui entraînent un passage de K+ du compartiment intra-cellulaire vers l extra-cellulaire. Ensuite ce K+ extra-cellulaire va être éliminé dans les urines en raison de la diurèse osmotique, de l élimination des corps cétoniques sous forme de sel de potassium et de l hyperaldostéronisme secondaire. Même si la kaliémie peut parfois être haute ou normale initialement, il y aura toujours un déficit potassique qui va se révéler durant les premières heures du traitement. La perte sodique est dûe à la diurèse osmotique, à l élimination des corps cétoniques sous forme de sel de sodium et aux vomissements. N.-B. : l hyperaldostéronisme diminue les pertes sodiques, mais augmente les pertes potassiques. Etiologie Dans 85 % des cas, le coma acidocétosique complique un diabète de type 1. Mais dans 15 % des cas, il complique un diabète non traité par l insuline. Le plus souvent, il s agit alors d un diabète de type 2 en état d agression, par exemple, à l occasion d une infection sévère ou d un infarctus du myocarde. Il peut s agir aussi de diabètes de type 1 lents devenant insulino-dépendants après des années de traitement par des hypoglycémiants oraux. Causes de l acidocétose diabétique coma acidocétosique inaugurale révélateur du diabète infection arrêt de l insulinothérapie (volontaire ou panne de la pompe à perfusion souscutanée d insuline) accident cardiovasculaire chirurgie grossesse Page 4 de 17

Diagnostic Phase dite de pré-coma diabétique Habituellement, l installation de l acidocétose se fait progressivement avec une phase dite de «précoma» de plusieurs jours : polydipsie, polyurie, perte de poids, crampes nocturnes, troubles visuels, souvent apparition d une discrète dyspnée et de troubles digestifs. Le malade diabétique correctement éduqué a donc le temps de prévenir l acidocétose sévère. Phase d acidocétose sévère Coma présent dans 10 % seulement des malades atteints d acidocétose, alors qu à l opposé, 20 % ont une conscience parfaitement normale, les autres patients étant stuporeux, plus ou moins confus. La polypnée est un signe fondamental présent dans 90 à 100 % des cas, tantôt dyspnée à 4 temps type Kussmaul, tantôt respiration ample et bruyante. La fréquence respiratoire est toujours supérieure à 20 et peut atteindre 30 ou 40. En cours d évolution, la mesure de la fréquence respiratoire est un bon indice de l évolution de l acidose en l absence de pneumopathie. Par ailleurs, on note l odeur caractéristique d acétone exhalée. La déshydratation est globale, extra-cellulaire (persistance pli cutané, hypotension, hémoconcentration, ) et intra-cellulaire (soif, sécheresse de la muqueuse buccale, trouble état de conscience). Le collapsus cardio-vasculaire est retrouvé dans 25 % des cas, dû en général à la déshydratation intense, plus rarement à une septicémie à gram négatif ou à une lésion viscérale aigüe (infarctus ou pancréatite). L hypothermie est fréquente, y compris en cas d infection. Si on ajoute que l acidocétose peut entraîner une hyperleucocytose, on voit que ni la prise de la température, ni la numération formule sanguine ne sont d un grand secours pour diagnostiquer une infection, du moins dans les premières heures du coma acidocétosique. Au contraire, une hypothermie profonde inférieure à 35 témoigne souvent d une infection sévère de mauvais pronostic. Les signes digestifs sont fréquents. Les nausées ou vomissements se voient dans 80 % des cas. Les vomissements aggravent la déshydratation et la perte ionique. Ils exposent aux risques de fausses routes trachéales et peuvent provoquer un syndrome de Mallory-Weiss (ulcérations œsophagiennes hémorragiques). Les douleurs abdominales se voient dans 40 % des cas, surtout en cas d acidose sévère, et surtout chez l enfant, sources d erreurs diagnostiques redoutables avec un abdomen chirurgical aigu. Les causes probable de ces douleurs sont la diminution de la perfusion mésentérique dû à l hypovolémie et à l acidose. Evidemment, l examen clinique vérifie l absence de signe neurologique en foyer et l absence d atteinte viscérale associée. Cet examen est complété par la détermination de la glycémie capillaire au bout du doigt et par la recherche de sucre et des corps cétoniques dans les urines fraîches recueillies si possible sans sondage. Finalement, la constatation d un syndrome clinique d acidose, d une hyperglycémie capillaire supérieure à 14 mmol/l, d une glycosurie et d une cétonurie importantes, permet d entreprendre un traitement énergique avant le résultat des examens biologiques plus complets. Page 5 de 17

Signes d acidocétose Conscience variable (normale 20 % - obnubilation 70 % - coma 10 %) Polypnée Polydypsie Polyurie (initiale puis oligoanurie) Nausées, vomissements, douleurs abdominales (surtout chez les enfants) Déshydratation importante intra et extra-cellulaire Dinimution de la transpiration, peau sèche et fraîche Asthénie Odeur sucrée et fruitée de l'haleine (pouvant ressembler à celle du solvant pour poli à ongles) Hypothermie Perte de poids Crampes musculaires Absence de signe neurologique en foyer Cétonurie +++ Glycosurie +++ Glycémie capillaire > 14 mmol/l ph inférieur à 7,30 Examens complémentaires 1. Le ph et la réserve alcaline affirment l acidose métabolique. Une acidose grave (ph inférieur à 7,10) est une menace pour la fonction myocardique. 2. La natrémie peut être abaissée, normale ou élevée, selon l importance respective des pertes hydriques et sodées. De toute façon, le bilan sodé est négatif. Une «fausse» hyponatrémie peut être due à l hyperglycémie (hyponatrémie de dilution par sortie d eau du secteur intra-cellulaire avec maintient d une osmolarité plasmatique normale) ou à l hypertriglycéridémie (hyponatrémie factice par réduction du volume d eau par litre de plasma). 3. La kaliémie est également élevée, normale ou basse, mais la déplétion potassique totale (intra et extra cellulaire) est constante. Ceci est essentiel pour le traitement dont un des objectifs est d éviter l hypokaliémie. 4. L ECG donne un reflet très approximatif, mais très rapidement obtenu des anomalies potassiques et surtout de leur retentissement cardiaque (l hypokaliémie se traduit par un allongement de l espace QT, une sous-dénivellation de ST, l aplatissement de l onde T, l apparition d une onde U). Il permet de dépister un infarctus du myocarde dont la décompensation du diabète peut être la seule traduction clinique. 5. L hématocrite élevé témoigne de l hémoconcentration. 6. Il existe en général une élévation de l urée sanguine dû à la fois au catabolisme protidique et à l insuffisance rénale fonctionnelle. 7. Il existe un déficit en calcium, phosphore et magnésium qui se révélera en cours de traitement, mais qui n a pas d importance pratique. 8. L amylasémie est parfois élevée en dehors même des rares cas de pancréatite (il s agit le plus souvent de l iso-enzyme salivaire). 9. La phosphatase alkaline et les enzymes hépatiques sont souvent augmentés. Page 6 de 17

10. Au moindre doute infectieux, hémocultures et prélèvements locaux s imposent. Examens complémentaires à demander en urgence devant un coma acidocétosique diabétique Ionogramme sanguin, glycémie Gazométrie artérielle E.C.G. Si besoin, hémocultures et prélèvements locaux (E.C.B.U., prélèvement de gorge...) Eventuellement, RX pulmonaire au lit, formule sanguine complète Diagnostic différentiel Si le diabète n est pas connu, il s agit, grâce aux examens d urines systématiques, de ne pas se laisser égarer par une forme à expression cardiovasculaire, respiratoire ou neurologique ou surtout par une forme à expression abdominale pseudo-chirurgicale. C est pourquoi l examen systématique des urines doit être la règle devant un syndrome abdominal aigu en milieu chirurgical. En cas d hésitation avec une authentique affection chirurgicale aiguë responsable de la décompensation du diabète, ce sont les examens cliniques et paracliniques répétés de façon rapprochée après le début du traitement énergique de la cétose, qui permettent de différencier la composante métabolique de la lésion chirurgicale vraie. A l inverse, il ne faut pas prendre pour un coma diabétique un coma d autre origine associé à un trouble mineur et transitoire de la glycorégulation, tel que peuvent le produire certaines affections neurologiques aiguës (hémorragie méningée, AVC ischémique, encéphalite aiguë) ou certaines intoxications (salicylés : Aspégic ; isoniazide : Rimifon=antituberculeux ; hydantoïne : Phénitoïne ; ciprofloxacine : Ciproxine ; alcool). Le diagnostic repose sur l anamnèse, la clinique, le dosage non seulement de la cétonurie, mais aussi de la cétonémie, la recherche des toxiques. Si le diabète est connu, le diagnostic avec les autres comas est en règle facile. La mesure instantanée de la glycémie capillaire au bout du doigt permet d éliminer un coma hypoglycémique. L erreur essentielle consiste à confondre un coma hyperosmolaire, une acidose lactique comportant une cétose modérée, avec une authentique acidocétose. On pensera au coma hyper osmolaire devant les conditions habituelles de survenue (telles qu une infection chez un vieillard), l importance de la déshydratation, le ph supérieur à 7,20 et la réserve alcaline supérieure à 15 meq/l. On évoquera l acidose lactique en cas de pathologie hypoxique sévère, devant la discrétion de la déshydratation en raison d une oligo-anurie précoce, devant la gravité du tableau clinique et l importance des douleurs. Il est alors essentiel de demander un dosage des lactates, le trou anionique paraissant plus important que la seule cétonémie. L erreur diagnostique peut en effet avoir de lourdes conséquences : défaut d hydratation en cas de coma hyperosmolaire, défaut d alcalinisation et absence de transfert en centre de dialyse en cas d acidose lactique. Enfin, il ne faut pas se laisser abuser par une discrète cétose de jeûne associée à une acidose métabolique d origine rénale chez un diabétique insuffisant rénal chronique. Porter Page 7 de 17

le diagnostic d acidocétose sévère peut avoir des conséquences graves en raison de la très grande sensibilité à l insuline dans ces cas. Page 8 de 17

DECOMPENSATION HYPEROSMOLAIRE HYPERGLYCEMIQUE Physiopathologie La décompensation hyperosmolaire hyperglycémique est l aboutissement d un processus autoentretenu : Hyperglycémie initiale, s en suit une polyurie dite «osmotique», qui entraîne une hypovolémie, qui engendre une insuffisance rénale fonctionnelle provoquant une rétention sodée par hyperaldostéronisme et une élévation importante du seuil rénal du glucose, qui la glycémie Contrairement à l acidocétose du patient insulino-dépendant, la persistance d une insulinosécrétion, certes insuffisante pour permettre la pénétration intra-cellulaire du glucose, mais suffisante pour inhiber la lipolyse et donc la production de corps cétoniques. La cétonurie est donc faible ou nulle, mais on constate une fois sur deux une acidose métabolique avec une réserve alcaline inférieure à 20 meq. Cette acidose avec trou anionique s explique par la rétention des cations phosphates et sulfates dû à l insuffisance rénale et par la production accrue d acide lactique lors de la glycogénolyse et de la néoglucogenèse. Les hormones de la contre-régulation en particulier le Glucagon, sont augmentées. C est pourquoi la néoglucogénèse hépatique est un déterminant majeur de l hyperglycémie. Etiologie patients de plus de 60 ans diabète non insulino-dépendant dans 95 % des cas. Souvent considéré comme «mineur», traité par le régime seul ou associé aux hypoglycémiants oraux, ce diabète est même méconnu une fois sur deux patients ne percevant pas la sensation de soif ou étant dans l impossibilité de l assouvir pour des raisons neurologiques le processus hyperosmolaire peut être enclenché par toute cause de déshydratation : vomissements, diarrhée, infection en particulier pulmonaire, prescription mal surveillée de diurétiques... ou par tout facteur d hyperglycémie : «agression» responsable d une hyper-sécrétion des hormones de contre-régulation (infection, accident vasculaire), mais aussi prescription de médicaments ou de solutés hyperglycémiants (corticoïdes, nutrition entérale mal conduite, administration excessive de sérum glucosé hypertonique). Le terrain d élection du coma hyperosmolaire est donc plus banalement la personne âgée ayant une hypertension artérielle traitée par les diurétiques, faisant un accident vasculaire cérébral, le vieillard traité par corticoïdes pour une maladie de Horton ou la vieille dame institutionnalisée pour démence victime d une infection broncho-pulmonaire. Page 9 de 17

Principales causes déclenchantes de la décompensation hyperosmolaire hyperglycémique Infection Diarrhée, vomissements Trouble neurologique cérébral Diurétiques Corticoïdes Nutrition entérale ou parentérale mal conduite Associé à défaut de surveillance : de la diurèse du bilan hydrique de la glycémie capillaire des électrolytes sanguins Diagnostic Le début est insidieux, progressif, durant plusieurs jours voire 1 à 3 semaines, marqué par une polyurie, une adynamie et les premiers signes de déshydratation. Une forte glycosurie peut être mise en évidence. La simple surveillance de la diurèse devrait permettre de dépister l hyperglycémie et la déshydratation avant le stade de décompensation hyperosmolaire. Hélas, l attention est souvent détournée par l affection aiguë déclenchante. La décompensation hyperosmolaire hyperglycémique associe : 1. Une intense déshydratation globale o intra-cellulaire : sécheresse de la face inférieure de la langue, disparition de la moiteur axillaire, hypotonie des globes oculaires, soif, perte de poids o extra-cellulaire : veines déprimées, marbrure des téguments, pli cutané non interprétable chez le sujet âgé, surtout hypotension artérielle au moins comparativement aux chiffres antérieurs. 2. Des signes neurologiques o les troubles de la conscience allant de l obnubilation au coma, sont bien corrélés au degré d hyperosmolarité o o il existe parfois des signes neurologiques en foyer : déficit moteur ou sensitif, asymétrie des réflexes, signe de Babinski, hémi-anopsie des crises convulsives sont fréquentes, souvent localisées, parfois même généralisées, aggravant le pronostic. 3. La température est variable, de l hyperthermie d origine centrale à l hypothermie indépendamment de toute infection associée. 4. Des signes digestifs avec nausées, voire vomissements et douleurs abdominales sont fréquents. 5. Enfin, on note l absence de signe de cétose : pas d odeur acétone de l haleine, et l absence d acidose métabolique sévère : pas de polypnée de Kussmaul. Page 10 de 17

6. Au lit du malade, on constate à l aide des bandelettes réactives, une cétonurie absente ou discrète (des traces ou une croix d acétone n éliminent pas le diagnostic!), une glycosurie massive, et une glycémie capillaire au bout du doigt très élevée. La réanimation est alors entreprise sans attendre les résultats des examens complémentaires demandés en urgence. Examens complémentaires Ils confirment l hyperosmolarité : glycémie souvent supérieure à 44 mmol/l natrémie supérieure à 140 mmol/l kaliémie variable, souvent élevée, masquant un déficit potassique qui se révélera en cours de traitement urée élevée due à l insuffisance rénale et à l hypercatabolisme protidique la réserve alcaline est souvent un peu abaissée, inférieure à 20 mmol une fois sur deux, mais le ph est supérieur à 7,2 l hyperleucocytose est habituelle en dehors de toute infection le ionogramme urinaire, confirme l insuffisance rénale fonctionnelle, avec une concentration uréique élevée (urée urinaire / urée sanguine > 10) et une inversion du rapport sodium urinaire / potassium urinaire < 1 l osmolarité est supérieure à 320mmol/l. Formule permettant de calculer l osmolarité plasmatique Osmolarité = (Na 2) + glycémie + urée Normale = 310 mmol/l Coma hyperosmolaire 350 mmol/l une élévation de certains enzymes est fréquente, témoignant de la souffrance tissulaire : amylasémie en dehors de toute pancréatite, enzymes hépatiques, CPK en raison d une rhabdomyolyse les hémocultures et les prélèvements bactériologiques locaux s imposent à la moindre suspicion d infection l ECG montre souvent des troubles du rythme supra-ventriculaire et des troubles de la repolarisation dont l évolution sera surveillée la RX pulmonaire au lit est d interprétation souvent difficile. Page 11 de 17

COMPLICATIONS DES 2 PATHOLOGIES L évolution sous traitement peut être émaillée de complications mettant en jeu le pronostic vital. 1. Le collapsus peut être initial, nécessitant un remplissage massif de macromolécules et de NaCl sous surveillance. Mais il peut être secondaire si le traitement a entraîné une baisse rapide de la glycémie, sans apport hydrique parallèle suffisant. En effet, la baisse de l osmolarité plasmatique provoque alors un brusque passage de l eau extra-cellulaire vers le milieu intra-cellulaire, avec contraction volémique et surtout risque d œdème cérébral. 2. Bien que la polyurie protège habituellement le rein, le collapsus peut être responsable d une tubulopathie aiguë anurique. Si celle ci ne réagit pas à un remplissage rapide, un traitement par Furosémide intra-veineux à fortes doses peut être tenté. En cas d échec, l épuration extra-rénale s impose, aggravant le pronostic. 3. En cours de traitement, l hypokaliémie doit être prévenue par l apport de potassium si la diurèse du patient est suffisante. Le contrôle du ionogramme sanguin toutes les 4 heures, permet une adaptation des apports. 4. Des séquelles encéphaliques et psychiques peuvent persister après récupération d une conscience normale : détérioration intellectuelle, syndrome extra-pyramidal, état pseudobulbaire. Ces séquelles sont la conséquence de foyers hémorragiques et ischémiques secondaires aux variations de flux hydriques cérébraux et à l hyperviscosité sanguine, plutôt qu à l hypernatrémie elle-même. 5. Enfin, les personnes âgées diabétiques sont particulièrement exposées aux infections non spécifiques : infection urinaire sur sonde, infection sur cathéter, escarre. Spécifique à l acidocétose : La défaillance cardio respiratoire lié à l acidose sévère. Spécifique à la décompensation hyperosmolaire : La déshydratation massive est notamment responsable d une hyperviscosité des sécrétions exocrines, pouvant entraîner une obstruction canalaire avec surinfection : o o o o o atélectasie prévenue par l utilisation systématique d humidificateurs bronchiques et dès que possible par la kinésithérapie respiratoire stomatite microbienne ou mycosique qui doit être prévenue par les soins de bouche parotidite aiguë suppurée gravissime kérato-conjonctivite prévenue par l instillation répétée de collyre antiseptique enfin, exceptionnellement, obstruction du canal de Wirsung pouvant être responsable d une authentique pancréatite aiguë L hyperviscosité sanguine peut aussi entraîner des thromboses vasculaires artérielles (infarctus cérébral, coronarien, mésentérique ou gangrène) et veineuses (phlébite, embolie pulmonaire), particulièrement chez les patients âgés athéroscléreux ou ayant un mauvais état veineux. Elle justifie un traitement héparinique préventif presque systématique. C est dire que le pronostic dépend non seulement d une réhydratation bien conduite, mais aussi de la minutie de ces «petits soins infirmiers préventifs». Ce faisant, le pronostic autrefois redoutable avec 50 % de décès s est maintenant amélioré, se situant autour de 20 %, dépendant certes du degré d hyperosmolarité, c est-à-dire de la précocité du traitement, mais surtout de l âge et des tares associées. Page 12 de 17

PROCEDURES THERAPEUTIQUE DES DECOMPENSATIONS DIABETIQUE AUX URGENCES Exemple 1 : Procédure HUG Page 13 de 17

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La persistance d une acidose importante ou d autres troubles associés après les premières heures de traitement doit faire discuter de l indication à une admission aux soins intensifs. Page 15 de 17

Exemple 2 : C. Prudhomme, Urgences guide de poche, Ed Maloine 2010 p.92 Comme vous pouvez le constater, les objectifs de ces 2 exemples sont les mêmes. Vous pouvez être confrontés à différentes prises en charge spécifiques dans vos services quant au dosage des médicaments par exemple, mais les objectifs généraux doivent être atteints, à savoir : CORRIGER 1) la volémie 2) la glycémie (ou déficit en Insuline) 3) la kaliémie 4) l acidose Page 16 de 17

REFERENCES/BIBLIOGRAPHIE E. Marieb, Anatomie et physiologie humaines, Ed. De BOECK université, Canada 1993 V. Fatorusso, O. Ritter, Vademecum Clinique, Ed. Masson, France 2004 C. Prudhomme, Urgences guide de poche, Ed Maloine, Paris 2010 L. Rademacher, V. D orio, Urgences médicales en diabétologie : l acidocétose et le coma hyperosmolaire, Revue médicale, Liège 2005 www.chups.jussieu.fr http://urgences.hug-ge.ch/infos_professionnels/protocoles/uploads/35_diabete_01_07_08.pdf Page 17 de 17