INFECTION A VIH EN 2012

Documents pareils
Pathologie VIH. Service maladies infectieuses Archet 1. Françoise ALEXIS, infirmière Monique BORGHI, infirmière 15 octobre 2013

Restitution de l 'atelier 1 Protocoles thérapeutiques et aspects médicaux de la PTME

Marseille 25 octobre 2012 Accompagnement du traitement chez les co-infectés VHC-VIH en pratique

LIGNES DIRECTRICES CLINIQUES TOUT AU LONG DU CONTINUUM DE SOINS : Objectif de ce chapitre. 6.1 Introduction 86

Que faire devant un résultat positif, négatif ou indéterminé? Elisabeth Bouvet Atelier IGRA VIH JNI Tours 13 Juin 2012

LE MALI L HÔPITAL GABRIEL TOURE L HÔPITAL DU POINT G INTRODUCTION 2 INTRODUCTION 1 DISPENSATION DES ARV DANS LES HÔPITAUX DU POINT G ET GABRIEL TOURE

L hépatite C pas compliqué! Véronique Lussier, M.D., F.R.C.P.C. Gastroentérologue Hôpital Honoré-Mercier 16 avril 2015

Bonne lecture!! et si vous souhaitez consulter le document de l AFEF dans son intégralité, c est ici

Prise en charge du. Dr FERNANE.Arezki Hôpital André Grégoire Montreuil

Journée Mondiale des Hépatites

Infection VIH et Grossesse Rédigée par : Laurichesse Hélène, C Jacomet

Actualités sur le Virus de l'hépatite C

Implication des Corevih dans l arrivée des ADVIH: Expérience du Corevih LCA

HEPATITES VIRALES 22/09/09. Infectieux. Mme Daumas

Mme BORGHI Monique Infirmière ETP Mme ALEXIS Françoise Hopital Archet I Infectiologie/Virologie Clinique

Lecture historique et prospective du rôle de la barrière génétique

Prophylaxie infectieuse après exposition professionnelle

Perspectives en sciences sociales et santé publique. Bernard Taverne (CRCF/IRD)

Sélection et Évaluation Quantitative des Médicaments pour la Prise en Charge du VIH/SIDA. Sophie Logez, OMS/PSM Addis Abeba, Ethiopie, Février 2005

LES ACCIDENTS D EXPOSITION AU RISQUE VIRAL Prise en charge & Prévention

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS DE LA COMMISSION. 10 octobre 2001

Co-infection HVB HVC CO-infection VIH HVB et HVC

Z I G U I N C H O R SITUATION ECONOMIQUE ET SOCIALE REGIONALE Service Régional de la Statistique et de la Démographie de Ziguinchor

Hépatite C une maladie silencieuse..

Hépatite C, les nouveaux traitements

Diabète de type 1 de l enfant et de l adolescent

VIH : Parlons-en franchement!

Détection et prise en charge de la résistance aux antirétroviraux

Document d information dans le cadre de l installation d un cyclotron. à Saint-Louis

Le traitement du paludisme d importation de l enfant est une urgence

IMR PEC-5.51 IM V2 19/05/2015. Date d'admission prévue avec le SRR : Date d'admission réelle : INFORMATIONS ADMINISTRATIVES ET SOCIALES

Prise en charge thérapeutique des personnes infectées par le VIH

Thérapeutique anti-vhc et travail maritime. O. Farret HIA Bégin

Hépatite = inflammation du foie. Pr Bronowicki CHU Nancy Conférence mensuelle - section de Forbach

Drug Misuse and Treatment in Morocco

Les hépatites virales chroniques B et C

Les usagers de drogues âgés de 40 ans et plus pris en charge dans les structures de soins pour leurs problèmes d addiction

Compliance (syn. Adhérence - Observance) IFMT-MS-Sémin.Médict.Nov.05 1

Vivre avec le VIH. Point de départ

Pierre-Yves Comtois, Marc Leclerc, Bruno Lemay, Karina Ortega Révision scientifique : Benoît Lemire, pharmacien

LISTE DES ACTES ET PRESTATIONS - AFFECTION DE LONGUE DURÉE HÉPATITE CHRONIQUE B

Mon traitement n a pas marché.

Liste des principales abréviations

MALI MEDICAL. Echec virologique aux antirétroviraux

Devenir des soignants non-répondeurs à la vaccination anti-vhb. Dominique Abiteboul - GERES Jean-François Gehanno Michel Branger

Le VIH et votre foie

CERTIFICATION MÉDICALE RAPPORT MÉDICAL POUR LE DROIT DE SÉJOUR

Guide du parcours de soins Titre ACTES ET PRESTATIONS AFFECTION DE LONGUE DURÉE. Hépatite chronique B

Avis 6 novembre 2013

1 ère manche Questions fermées

Tests de détection de l interféron γ et dépistage des infections tuberculeuses chez les personnels de santé

Programme DPC des infirmiers

Hépatite. du dépistage au traitement. Questions et réponses. L hépatite C Dépistage, clinique, prise en charge et conseils aux patients

VIH et hépatites Profil des consultants 4 ème trimestre 2000

TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX DU DIABETE DE TYPE 2 (Hors Insuline) MAREDIA Dr Marc DURAND

GHUPC Projet de transformation du site Hôtel Dieu. Pr S CHAUSSADE, Dr I. FERRAND

Lecture critique d article ou comment briller en société sans en avoir trop l air

Traitement et questions connexes

Août a thérapie. antirétrovirale. pour les adultes infectés par le VIH. Guide pour les professionnels de la santé du Québec

Définition de l Infectiologie

LES CO-INFECTIONS VIH-VHC. EPIDEMIOLOGIE, INTERFERENCES. Patrice CACOUB La Pitié Salpêtrière, Paris

Le Comité Scientifique a traité les questions suivantes : «Association reconnue d utilité publique» - 1 -

Droits des patients et indemnisation des accidents médicaux

Droits des patients et indemnisation des accidents médicaux

LE FINANCEMENT DES HOPITAUX EN BELGIQUE. Prof. G. DURANT

Diagnostic des Hépatites virales B et C. P. Trimoulet Laboratoire de Virologie, CHU de Bordeaux

- 2 - faire industriel dans la mise au point des produits biologiques. L Institut Roche de Recherche et Médecine Translationnelle (IRRMT, basé à

Résistance du virus de l hépatite C aux nouveaux traitements anti-viraux

L investigation chez la personne infectée par le VIH

Les ateliers de pratique réflexive lieu d intégration des données probantes, moteur de changement de la pratique

Hépatite chronique B Moyens thérapeutiques

Etat des lieux du prélèvement et de la greffe d organes, de tissus et de cellules MAROC

Christian TREPO, MD, PhD

L accès au suivi et au traitement pour les personnes atteintes de l hépatite C au Québec 1

Parcours du patient cardiaque

L adhésion au traitement: les clés du succès

Projet de grossesse : informations, messages de prévention, examens à proposer

HABITAT INDIGNE, SOUFFRANCE PSYCHIQUE. ET DEFENSES DELIRANTES DANS LES EXCLUSIONS (internes et externes) Lyon, 2014

Cours de Mme Ollivier. Le

Diatélic DP : télémédecine pour la prévention des aggravations de santé des dialysés à domicile

Traitement de l hépatite C: données récentes

Quoi de neuf dans la prise en charge du psoriasis?

Lettre à l éditeur. Résistance du VIH aux Antirétroviraux : Quoi de neuf au Mali? Quelles. perspectives?

droits des malades et fin de vie

La santé. Les établissements de l entité Mutualité Santé Services

Résistance du VIH-1 aux antirétroviraux dans les compartiments anatomiques et cellulaires

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE. 10 décembre 2008

Infection à CMV et allogreffe de cellules souches hématopoïétiques : Expérience du Centre National de Greffe de Moelle Osseuse, Tunis.

Traitement antibiotique probabiliste des urétrites et cervicites non compliquées

Le don de moelle osseuse :

SOMMAIRE COMMUNIQUÉ DE PRESSE. p. 3. p. 4 LE CESU. p. 5. Les outils. p. 6. Le centre de simulation. Quelques chiffres

Fécondation in vitro avec don d ovocytes

L hôpital dans la société. L expérience du CHU de Paris, l AP HP. Pierre Lombrail, Jean-Yves Fagon

EXEMPLE DE METHODOLOGIE POUR L ELABORATION D UN PROTOCOLE DOULEUR Marie AUBRY Infirmière référente douleur Hôpital TENON AP-HP Paris XX e SOMMAIRE

Déclarations européennes de la pharmacie hospitalière

Etablissement Français du Sang

LA MÉTHAMPHÉTAMINE LE CRYSTAL C EST QUOI

Information au patient

Innovations thérapeutiques en transplantation

Rendre les résultats d un test VIH, communiquer les messages pour refaire le test et fournir un conseil à l adulte

Transcription:

INFECTION A VIH EN 2012 Journée mondiale de lutte contre le sida Vendredi 30 Novembre 2012 Dr Christophe Compagnon

L ère du vih et ses visages 1983: espérance de vie: 2 ans après la première infection opportuniste 1996: antiprotéases et trithérapie: Efficacité stable Amélioration notable de la tolérance des nouvelles molécules et des nouvelles familles: anti-integrase, inhibiteur de fusion, inhibiteurs de co-récepteurs 2012: 86 % de patients ont une charge virale plasmatique indétectable Mais

avec des effets délétères Des effets secondaires à moyen et long terme: cardiovasculaires, métaboliques (lipidoglucidiques), osseux, rénaux, neurologiques, du tissu adipeux Vieillissement accéléré des personnes infectées par le vih multifactoriel: antirétroviraux, comorbidités (hépatites, tabac), activation immunitaire persistante, terrain génétique

Evolution de la mortalité

Progression patients avec CV indétectable

Des PARCOURS de PATIENT MULTIPLES Dépistage Suivi médical Instauration des arv Surveillance de l efficacité et dépistage des complications Traitements des IO et des comorbidités Diagnostic précoce ou tardif Environnement culturel et familial Intégration sociale et professionnelle Personnalité et profil psychologique

Cas clinique 1.1 Thierry, 44 ans, marié, 3 enfants Dépistage de son épouse en 94 lors de sa 2e grossesse (avait eu des jumeaux 3 ans auparavant et le dépistage du vih n avait pas été proposé) CD4: 120 CV: 80 000 asymptomatique Instauration d une bithérapie Profil psychologique: autoritaire, peu enclin aux compromis, accepte mal cette contamination, sensation de perte de liberté

Cas clinique 1.2 Plusieurs changements de bithérapie pour échappements: apparition de mutations nombreuses avec des résistances aux nucléosidiques 1996: instauration d une trithérapie «virtuelle» 2005: CD4: 50 CV: 18 000 Accès à une nouvelle IP (Aptivus) en association au Fuzeon Problème: Fuzeon en injection SC 2 fois par jour

Cas clinique 1.3 Ne veut plus se traiter, épuisé par des années d effets secondaires et d échecs thérapeutiques Revient 2 semaines plus tard et débute cette nouvelle quadrithérapie Indétectable après 6 mois et l est toujours resté

Cas clinique 1.4 Modification du traitement progressive (en fonction de leur disponibilité) en substituant de nouvelles molécules non par manque d efficacité mais pour obtenir une meilleure tolérance Actuellement trithérapie sans effets secondaires parfaitement acceptée: CD4: 380, CV indétectable Son épouse a débuté une trithérapie en 98 et sa CV est indétectable depuis cette date indétectable 2 objectifs thérapeutiques: efficacité, tolérance++

Cas clinique 2.1 Jérémy, 27 ans, gay, vih + en 2008, non traité (CD4: 750), perdu de vue depuis mars 2010 Adressé par un ami qui l héberge car a perdu son logement à Paris où il vivait depuis 2 ans, chômage depuis 1 an, a perdu 14 kg et est très dépressif Ne s est pas fait suivre à Paris

Cas clinique 2.2 Bilan: CD4: 580, sérologies VHC positive (4a) et syphilis positive Initiation au slam il y a 18 mois: s est injecté de multiples produits (cocaine, kétamine, mephedrone, ) Utilisation occasionnelle au début, puis 1 à 2 fois par semaine

Cas clinique 2.3 Multiples produits: 1 nouvelle drogue détectée par semaine (OEDT 2012) Augmentation du nombre des usagers et tendance aux mélanges de produits Développement des sites de vente en ligne: 170 en 2010, 690 en 2012 Prévalence d usage chez les homos: 3 à 4 fois plus que les hétéros 10% des HSH utilisent des drogues à chaque rapport mais pour une grande majorité d utilisateurs la pratique reste occasionnelle

Cas clinique 2.4 Coupe la sensation de faim et de soif Recherchés pour leurs effets: desinhibition sexuelle, euphorisant, sensation de toute puissance, favorisant la répétition des rapports sexuels Mais aussi facilitant le passage à l acte de fantasmes hors normes et les dégats éventuels (perforation colique, auto-mutilation) Augmentation des pratiques sexuelles à risque associée au risque de l injection iv

Cas clinique 2.5 Pour le soignant, le chemin est étroit pour aborder ces drogues «festives» Evaluation difficile entre hyperconsumérisme d un patient assidu des «sexparty s» ou des soirées «chem» et usage occasionnel d un clubber Garder la possibilité d un dialogue avec le patient sans jugement moral et en respectant sa vie personnelle et sa liberté de comportement

Cas clinique 3.1 Monique, 55 ans, hospitalisée en gastro pour diarrhée fébrile depuis 1 mois, anorexie et amaigrissement de 8 kg Lors du bilan, le dépistage du vih s avère positif La patiente est transférée dans le service: CD4: 72 arnvih: 250000 Instauration d une trithérapie et d un traitement pour une colite à cytomégalovirus

Cas clinique 3.2 Pas de notion de prise de risque: la patiente vit seule avec sa fille de 11 ans et n a plus de rapports sexuels depuis sa naissance Donc dépistage tardif d une infection par le vih

Cas clinique 3.3 Un médecin du service a l impression de l avoir déjà vue en consultation Après quelques recherches, il s avère que la patiente a été suivie de 2001 à 2005 dans un autre hôpital de Marseille pour une infection vih puis perdue de vue

Cas clinique 3.4 Repli vers une religion intolérante qui devait lui apporter la guérison? Déni? Occultation? Niveau de compréhension limitée? Famille rigide? De multiples explications, recommencées à chaque fois que les questions étaient reposées et surtout la terreur de mourir pendant les 3 premières semaines d hospitalisation en ont fait la patiente la plus observante pour l instant

Prise en charge médicale Service hospitalier spécialisé Spécialiste du vih/sida en médecine de ville En collaboration avec le médecin traitant Réseaux ville-hôpital : favoriser l installation de multiples passerelles afin de proposer une offre de soins adaptée à la singularité de chaque patient

Prise en charge pluridisciplinaire Les réseaux ville-hôpital sensibilisent, forment et coordonnent les soignants de ville afin de constituer des équipes pluridisciplinaires pour la prise en charge de patients suivis en ville: infirmiers, psys, kinés, travailleurs sociaux.

Accompagnement des patients fragiles Les difficultés psycho-affectives, physiques, économiques réduisent l accès aux soins et à «l indétectabilité» Les réseaux ville-hôpital ont développé de nombreux dispositifs permettant de soutenir les patients fragiles Bénéfice individuel et aussi en terme de santé publique

Bonne fin de semaine