Le non-respect du droit de préemption est sanctionné par la nullité de la vente.



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Transcription:

Veille juridique Cabinet Lawrizon Avocats Septembre 2014 BAUX COMMERCIAUX - Loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (ou Loi Pinel) : synthèse concernant les conditions d application du nouveau droit de préemption du preneur Chère Madame, Cher Monsieur, Nous vous prions de trouver ci-après une note de synthèse concernant les conditions d application du droit de préemption instauré au profit du preneur par la loi n 2014-626 du 18 juin 2014 (dite Loi «Pinel», codifiée à l article L. 145-46-1 du Code de commerce), applicable en cas de vente des murs du local commercial ou artisanal, et ce pour les ventes réalisées à compter du 19 décembre 2014 i. Le non-respect du droit de préemption est sanctionné par la nullité de la vente. L objet de la présente synthèse est de préciser, en l état des informations disponibles, le champ d application et les sanctions de ce nouveau dispositif. SYNTHESE OPERATIONNELLE ET RECOMMANDATIONS Compte-tenu des incertitudes sur le champ d application de ce nouveau droit de préemption du preneur applicable pour les cessions à partir du 19 décembre 2014 et du risque de nullité de la vente y afférent, il est recommandé de mener les actions suivantes : 1. Vérifier si les locaux objets de la vente peuvent être qualifiés de locaux commerciaux ou artisanaux (voir 1.1.). 2. Si oui au point 1, vérifier si l opération concernée permet d invoquer un cas d exclusion (voir 1.2.). 3. En cas de doute sur ce qui précède et/ou de contexte délicat de l opération de cession, se rapprocher de son notaire et de l autre partie (vendeur ou acquéreur) pour connaitre leur appréciation concrète du risque en fonction des éléments de contexte. 4. Si un doute est établi, purger le droit de préemption auprès du/des preneur(s) concerné(s) (délai de 3 à 5 mois, selon le cas) ou obtenir une renonciation expresse du preneur ou une garantie du vendeur. 1. Champ d application du droit de préemption du preneur Pour être soumise à ce dispositif, une double condition cumulative doit être remplie : il doit s agir de locaux à usage commercial ou artisanal (1.1.) et l opération envisagée doit être incluse dans le champ des opérations concernées (1.2.). 1.1 Application quant à la nature du local : «local commercial ou artisanal» 1.1.1. Aux termes de l article L. 145-46-1 du Code de commerce ii, le preneur n est titulaire d un droit de préemption que si les locaux loués sont à usage commercial ou artisanal : «Lorsque le propriétaire d'un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire ( )». 1.1.2. Il est à noter qu un amendement au projet de Loi Pinel a exclu expressément l application dudit droit de préemption pour le cas où le local serait à usage industriel (amendement n CE 173). 1

1.1.3. La Loi Pinel ne précise pas ce qu il faut entendre par «local à usage commercial ou artisanal». Au surplus, la notion de locaux à usage commercial ou artisanal n est pas définie de manière universelle par la loi (hors les cas mentionnés ci-après). Il est donc légitime de s interroger sur l application (ou non) de ce droit de préemption aux locaux à usage de bureaux et d entrepôts. (i) Arguments pour l application : Le statut des baux commerciaux, tel que modifié par la Loi Pinel, s applique à tous les locaux dans lesquels est exploité un fonds de commerce (y compris bureaux et entrepôts logistiques). En l état actuel de la rédaction de l article L. 145-46-1 du Code de commerce, il n est pas possible d affirmer que les locaux à usage de bureaux ou d entrepôts sont expressément exclus du nouveau droit de préemption du preneur : Ainsi, la notion de locaux à usage commercial en matière de bail commercial pourrait faire l objet d une application large par la jurisprudence, et ce d autant plus qu il s agit d une mesure avantageuse pour la partie présumée la plus faible (le locataire). La jurisprudence pourrait ainsi considérer au vu notamment de l amendement n CE 173 susvisé que le législateur n a en réalité entendu exclure du champ d application du droit de préemption du preneur que les locaux à usage strictement industriel. C est-à-dire les locaux affectés à «la production de biens matériels par la transformation et la mise en œuvre de matières premières» iii. Si la jurisprudence adoptait une telle analyse de l article L. 145-46-1 du Code de commerce, les locaux à usage de bureaux ou d entrepôt ne pourraient pas échapper au droit de préemption du preneur. Néanmoins, cette analyse doit être modérée au regard des arguments recensés ci-après. (ii) Argument 1 contre l application : L esprit de la Loi Pinel a pour vocation initiale de protéger le commerce et l artisanat au sens strict. Dans l esprit initial du projet de Loi Pinel, il s agissait d adapter le statut des baux commerciaux à l activité des toutes petites entreprises appartenant au secteur du commerce et de l'artisanat, lesquelles reçoivent, dans les locaux loués, des clients pour vendre des produits ou fournir des prestations à leur clientèle. En conséquence, la Loi Pinel ne devrait théoriquement pas concerner les bureaux et les entrepôts. En particulier, le mécanisme de droit de préemption portant sur des locaux dans lesquels un fonds de commerce est exploité ne devrait pas bénéficier à toutes les sociétés commerciales, mais seulement aux commerçants pour lesquels les locaux et leurs emplacements sont essentiels à l exploitation de leurs fonds de commerce. (iii) Argument 2 contre l application : Selon le Code de l urbanisme (article R 123-9), il faut faire une distinction entre la destination «commerce» et les autres. Ainsi, il existe neuf destinations, qui peuvent être retenues pour qualifier une construction : à ce titre, il est fait une distinction précise entre la destination de «bureaux», celle de «commerce», celle d «artisanat», celle d «industrie» et celle d «entrepôt» (pour ne citer que les destinations ayant un intérêt au cas particulier). En application de ces définitions légales, la notion de locaux à usage de commerce n englobe donc pas: 2

les locaux à usage de bureaux, ceux-ci étant traditionnellement dédiés à l exercice d activité d ordre intellectuelle, cette qualification pouvant certes impliquer la réception de la clientèle mais est en revanche exclusive de toute réception, dépôt ou vente de marchandises ; les locaux à usage d entrepôts, dès lors qu aucune vente de marchandises n aurait lieu sur place (au sens acte de commerce). (iv) Argument 3 contre l application : Selon les dispositions relatives au choix de l indice de révision telle que prévues dans le Code de commerce et le Code monétaire et financier, il faut également opérer une distinction entre, d une part, les locaux à usage commercial et/ou artisanal et, d autre part, les locaux à usage de bureaux et d activités tertiaires. Ainsi, le législateur confirme cette distinction lorsqu il définit les champs d application respectifs de l indice des loyers commerciaux (ILC) et de l indice des loyers des activités tertiaires (ILAT). L ILC ne peut en effet être utilisé que pour l indexation des loyers des baux conclus pour l exercice d activités commerciales ou artisanales iv tandis que l ILAT ne peut être utilisé que pour l indexation des loyers des baux conclus pour l exercice d activités autres que commerciales exercées dans des locaux professionnels (les bureaux) et les entrepôts v. (v) Argument 4 contre l application : L analyse du Conseil Supérieur du Notariat en date du 24 juin 2014 indique, s agissant du champ d application du droit de préemption du preneur, qu il «aurait vocation à s appliquer aux seuls locaux à usage commercial ou artisanal, mais non aux entrepôts, locaux de bureaux ou encore locaux mixtes de bureaux et d activités commerciales». vi 1.2 Application du droit de préemption du preneur quant à la nature de l opération de cession envisagée 1.2.1. L article L. 145-46-1 du Code de commerce vise seulement l hypothèse de la vente des locaux loués. La vente est une notion juridique définie dans le Code civil et qui laisse peu de place à l interprétation. Le droit de préemption du preneur ne serait donc pas applicable à la cession de parts de SCI, ou à une opération emportant transmission universelle de tout ou partie du patrimoine du bailleur (fusion, scission, TUP, apport partiel d actifs soumis au régime des scissions). 1.2.2. Cette position pourrait néanmoins évoluer, à l instar des évolutions législatives relatives au droit de préemption urbain (notamment en matière de cession de parts de SCI), de sorte que ce droit de préemption soit élargi à différentes formes de mutations. 1.2.3. En l état du droit positif, le législateur a expressément exclu le droit de préemption du preneur dans les cas suivants : A titre préliminaire, il faut noter que ces cas d exclusions ne concernent que les locaux à usage commercial, faisant l objet d une interprétation limitative s agissant de dérogations aux dispositions légales. - Dérogation 1 : «cession unique de plusieurs locaux d un ensemble commercial ( )», Est donc exclue la cession concomitante par une entité à une autre entité de plusieurs lots localisés au sein d un même ensemble commercial (centre commercial, retail park) ; - Dérogation 2 : «cession unique de locaux commerciaux distincts ( )», 3

Est donc exclue la cession concomitante par une entité à une autre entité, d au moins deux locaux commerciaux (exemple : cession d un portefeuille d immeubles), étant précisé que (i) la notion de locaux commerciaux est discutable (cf. ci-dessus) et (ii) la notion de «distincts» n est pas définie (zone géographique distinctes?, locataires distincts? configuration physique des locaux...). Une appréciation au cas par cas semble nécessaire ; - Dérogation 3 : «cession d un local commercial au copropriétaire d un ensemble commercial ( )», Est donc exclue la cession d un seul local commercial compris dans un centre commercial (par exemple) à une entité d ores et déjà co-propriétaire d un lot au sein du même centre commercial. Il n est pas indiqué si cette exclusion concerne les co-volumistes (dans le cadre d une division volumétrique de l ensemble) ; - Dérogation 4 : «cession globale d un immeuble comprenant des locaux commerciaux ( )», ce qui exclurait du droit de préemption du preneur la cession unique d un immeuble en entier comprenant plusieurs locaux commerciaux étant précisé que la notion de locaux commerciaux est discutable (cf. ci-dessus) ; - Dérogation 5 : «cession d un local au conjoint du bailleur ou à un ascendant ou descendant du bailleur ou de son conjoint». 2. Sanction du non-respect du droit de préemption du preneur par le bailleur ou son notaire La détermination du champ d application du droit de préemption est d autant plus délicate que la sanction qui y est associée est grave : la nullité de la vente. L article L. 145-46-1 alinéa 1 du Code de commerce ne prévoit pas expressément de sanction applicable pour le cas où le bailleur omettrait de notifier son projet de vente initial au preneur, mais seulement la nullité de la notification initiale en cas de non-respect des règles régissant son contenu (doute sur l interprétation de cet alinéa). En revanche, ce même article (alinéa 3) prévoit expressément qu à défaut pour le bailleur de procéder à une nouvelle notification régulière de son projet de vente au preneur pour le cas où il envisagerait de vendre les locaux loués à un prix plus avantageux que celui prévu initialement, la nullité de la vente est encourue. A notre sens, la même sanction devrait trouver à s appliquer pour le cas où le bailleur omettrait de notifier régulièrement au preneur son projet initial de vente des locaux loués. Ce point reste néanmoins à confirmer par la jurisprudence. 3. Synthèse des modalités de purge du droit de préemption du preneur Aux termes de l article L. 145-46-1 du Code de commerce, le preneur dispose d un délai d un mois pour se prononcer sur l offre initiale du vendeur à compter de sa réception. En cas d'acceptation, le locataire dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur, d'un délai de deux mois pour la réalisation de la vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l'acceptation par le locataire de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. La loi ne précise pas quels sont les délais qui doivent être respectés par le bailleur pour la purge du second droit de préemption dont le preneur est titulaire pour le cas où il déciderait de vendre les locaux loués à des conditions plus avantageuses que celles prévues dans son projet de vente initial. A notre sens, il convient à tout le moins que le bailleur respecte les délais prévus par la loi pour la purge du droit de préemption du preneur dans le cadre de son projet de vente initial. 4

4. Caractère en principe supplétif de la volonté des parties du droit de préemption du preneur L article L. 145-46-1 du Code de commerce n est pas, de droit, d ordre public (légal) n étant pas expressément visé comme tel par la Loi Pinel. Le bailleur pourrait donc en principe dans le cadre de la rédaction des nouveaux baux à conclure, exclure, par une clause expresse, le droit de préemption du preneur instauré à l article L.145-46-1 du Code de commerce. Il reste que la jurisprudence a pu déclarer d ordre public telle ou telle disposition régissant le statut des baux commerciaux pourtant non visée comme telle par la loi, à l instar de l article L. 145-9 qui, pour mémoire, régit la forme du congé. En espérant que cette note de synthèse vous sera utile, nous restons à votre disposition pour tout commentaire ou question que vous auriez concernant la présente. Bien à vous Séverine Guilluy i Le nouveau droit de préemption du preneur est applicable «à toute cession d un local intervenant à compter du sixième mois qui suit la promulgation de la loi» (L. n 2014-626, 18 juin 2014, art. 21, III), soit à compter du 19 décembre 2014. ii Article L. 145-46-1 du Code de commerce : «Lorsque le propriétaire d'un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Cette notification doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée. Elle vaut offre de vente au profit du locataire. Ce dernier dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer. En cas d'acceptation, le locataire dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur, d'un délai de deux mois pour la réalisation de la vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l'acceptation par le locataire de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, la vente n'a pas été réalisée, l'acceptation de l'offre de vente est sans effet. Dans le cas où le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l'acquéreur, le notaire doit, lorsque le bailleur n'y a pas préalablement procédé, notifier au locataire dans les formes prévues au premier alinéa, à peine de nullité de la vente, ces conditions et ce prix. Cette notification vaut offre de vente au profit du locataire. Cette offre de vente est valable pendant une durée d'un mois à compter de sa réception. L'offre qui n'a pas été acceptée dans ce délai est caduque. Le locataire qui accepte l'offre ainsi notifiée dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur ou au notaire, d'un délai de deux mois pour la réalisation de l'acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l'acceptation par le locataire de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, la vente n'a pas été réalisée, l'acceptation de l'offre de vente est sans effet. Les dispositions des quatre premiers alinéas du présent article sont reproduites, à peine de nullité, dans chaque notification. Le présent article n'est pas applicable en cas de cession unique de plusieurs locaux d'un ensemble commercial, de cession unique de locaux commerciaux distincts ou de cession d'un local commercial au copropriétaire d'un ensemble commercial. Il n'est pas non plus applicable à la cession globale d'un immeuble comprenant des locaux commerciaux ou à la cession d'un local au conjoint du bailleur, ou à un ascendant ou un descendant du bailleur ou de son conjoint.» iii Cette définition est donnée par l encyclopédie Larousse. iv Articles L. 112-2 alinéa 1 et D 112-2 alinéa 1 du Code monétaire et financier. 5

v Article L. 112-2 alinéa 1 et 2 du Code monétaire et financier : «dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties. Est réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'institut national des statistiques et des études économiques ou, pour des activités commerciales ou artisanales définies par décret, sur la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié dans des conditions fixées par ce même décret par l'institut national de la statistique et des études économiques. Est également réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble toute clause prévoyant, pour les activités autres que celles visées au premier alinéa ainsi que pour les activités exercées par les professions libérales, une indexation sur la variation de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires publié par l'institut national de la statistique et des études économiques dans des conditions fixées par décret». Article D 112-2 du Code monétaire et financier : «Les activités mentionnées dans la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier sont les activités commerciales et les activités artisanales. Les activités mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 112-2 sont les activités tertiaires autres que les activités commerciales et artisanales mentionnées au premier alinéa du présent article. Elles recouvrent notamment les activités des professions libérales et celles effectuées dans des entrepôts logistiques». vi Cf. la note du d analyse de la loi Pinel du Conseil Supérieur du Notariat en date du 24 juin 2014. Pour toutes questions, merci de contacter : Lawrizon Avocats Séverine Guilluy Téléphone : 06 23 90 20 27 sguilluy@lawrizonavocats.com Visiter notre site : www.lawrizonavocats.com 6