La conduite de projets de changement à Bercy : retour sur une expérience Institut des Finances Beyrouth, Mai 2013
1 La DLF est placée sous l'autorité du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et mise à disposition du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique pour la préparation des lois de finances 2 Autorité conjointe avec le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville 3 Autorité conjointe avec le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et le ministre de la santé et des sports 4 Service à compétence nationale sous l'autorité conjointe de la direction générale de l'administration et de la fonction publique et de la direction générale des finances publiques 5 Autorité conjointe avec le ministre auprès du Premier ministre, chargé de la mise en œuvre du plan de relance 6 Autorité conjointe avec le haut-commissaire à la jeunesse 7 Service à compétence nationale rattaché conjointement à la direction générale du Trésor et de la politique économique et à la direction générale des finances publiques Service à compétence nationale Services communs aux deux ministères 2
Un ministère composite Les 180 000 agents exercent des métiers très divers Assiette et collecte de l impôt Stratégie économique Douane Gestion des finances publiques Concurrence et répression des fraudes Statistiques et études économiques Emploi Aide aux entreprises Soutien au commerce extérieur 3
Un ministère composite Ces métiers divers relèvent jusqu en 2007 de sept réseaux distincts Administration centrale DGI Direction générale des impôts DGCP Trésor public DGDDI Direction générale des douanes et droits indirects INSEE Institut national de la statistique et des études économiques DGCCRF Direction générale de la concurrence consommation et répression des fraudes DRIRE Directions régionales de l industrie, de la recherche et de l environnement Réseau à l étranger 4
Un ministère socialement réactif Un ensemble de 180 000 agents, composé pour 45% d agents d exécution (catégorie C) Avec des syndicats nombreux, actifs et représentatifs : 80% de participation aux élections professionnelles Une participation toujours record aux mouvements de grève de la fonction publique Des conflits sociaux longs et massifs, événements très rares dans la fonction publique française : 1989 : 100 000 grévistes 1999 : échec d un plan de réforme de l administration fiscale et démission du Ministre 5
Un ministère doté de valeurs fortes mais rétif au changement Points forts Points faibles Une culture professionnelle très solide faite de loyauté, d honnêteté et de sens du service public Une grande compétence technique des personnels Des moyens budgétaires adaptés Une culture de procédure centrée sur la régularité Une peur de toute réforme : remise en cause des avantages acquis Une administration très nombreuse qui ne s intéresse pas à ses résultats Une image de conservatisme dans l opinion 6
Pourquoi changer? «Le monde bouge et il ne nous attend pas.» Des évolutions externes de plus en plus nombreuses et qui ont un impact fort sur l administration Francis Mer, Ministre de l économie, des finances et de l industrie 2002-2004 La construction européenne Perte de responsabilité pour les Etats (législation européenne), diminution des marges de manœuvre, encadrement des aides aux entreprises Obligation d agir dans un cadre concentré : mesures sanitaires, règle de concurrence, code douanier européen, fiscalité La mondialisation Développement des comparaisons entre pays («benchmarking») Uniformisation des pratiques et des modes de gestion (ex : distinction front office/back office permettant de spécialiser les tâches complexes) 7
Des évolutions externes Le développement des technologies de l information Raccourcissement des délais de réponse Possibilité d agir à distance, de travailler «en ligne», de dématérialiser les documents) Développement des traitements de masse Des moyens budgétaires stabilisés ou en diminution Concurrence fiscale réduction des recettes réduction des dépenses de fonctionnement contrainte des critères de Maastricht (dette,.) L inversion du rapport de force entre administration/administrés, fournisseurs de service/usagers Une évolution culturelle forte L administré, le client, veut une réponse rapide, avec une seule démarche, en s adressant à un seul interlocuteur «la pression des assujettis». 8
Comment changer? Deux façons de conduire le changement La peur «Si on ne change pas, demain il sera trop tard.» Le désir «Demain sera mieux qu hier et qu aujourd hui.» Utilisation de ces deux moteurs La peur : risque d obsolescence «Le monde ne nous attend pas.» Le désir : rompre avec l image de conservatisme et être un acteur d une administration moderne. 9
Comment changer? Tirer les leçons des échecs passés S inscrire dans la durée : changer prend du temps Utiliser les benchmarks comme des éclairages et non comme des modèles à appliquer hors contexte Changer n est pas une punition : donner envie de changer et associer les agents Etre capable d adapter le projet sans capituler sur l essentiel (utiliser la méthode des expérimentations) Communiquer après sur les résultats en évitant les annonces préalables spectaculaires Informer régulièrement syndicats et personnel : Dire ce que l on va faire et le faire. «Observer» les résultats (Observatoire interne) Promouvoir une démarche ministérielle et n oublier personne Rôle du Secrétaire général 10
Repenser l organisation du travail Traiter de façon industrielle les procédures de masse (cf. banques, assurances ) Alléger et simplifier les tâches en réexaminant régulièrement les procédures (réingénierie de process) Rendre le service public plus accessible : les contribuables ne sont pas des assujettis. Revaloriser la fonction de l accueil. Développer la polyvalence sur les fonctions simples et spécialiser le traitement des tâches complexes 11
Les trois objectifs du changement a. Accroître la performance et mesurer les résultats b. Améliorer le service aux usagers c. Faire bénéficier les personnels du changement 12
Accroître la performance et mesurer les résultats Les contrats pluriannuels de performance : présentation Un document court (40-50 pages) cosigné par le directeur concerné, le secrétaire général et le directeur du budget qui engage les signataires pour 3 ans avec deux parties : performance et moyens 1 re génération DGI et DREE : 2000-2002 2 e génération + DGCP : 2003-2005 3 e génération + Douane, DGCCRF: 2006-2008 et INSEE : 2007-2009 La génération 2009-2011 est en cours de préparation Caractéristiques Affirmation d une stratégie claire et définition des priorités Démarche de performance : objectifs, indicateurs, résultats audités par l IGF (cf. page suivante) Visibilité budgétaire avec des engagements de productivité Contreparties sociales 13
Accroître la performance et mesurer les résultats Les contrats pluriannuels de performance : exemples d indicateurs Douane Taux de disponibilité opérationnelle des unités de surveillance (cible 2006 : 69% ; 2007 : 69,6% ; 2008 : 70% ; 2009 : 74 %) Délais moyens d immobilisation des marchandises déclarées dans la journée (cible 2006 : 11 min. ; 2007 : 10 min. 30 s. ; 2008 : 10 min. ; 2009 : 8 min.) Taux d intervention global sur les recettes fiscales (cible 2006 : 1,22% ; 2007 : 1,19% ; 2008 : 1,15% ; 2009 : 1,10 %) Trésor public Délai global de paiement des dépenses de l Etat (ordonnateurs et comptables) (cible 2006 : 35 j. ; 2007 : 30 j. ; 2008 : 28 j. ; 2009 : 27 j) Taux de paiement dématérialisé des impôts des particuliers (IR, TH, TF) (cible 2006 : 45% ; 2007 : 47% ; 2008 : 49% ; 2009 : 50 %) Impôts Part des recettes TVA, IS et TS télépayés (cible 2006 : 63% ; 2007 : 67% ; 2008 : 70% ; 2009 : 71,5 %) Taux de respect spontané des obligations déclaratives en matière d imposition directe des particuliers (cible 2006 : 97,8% ; 2007 : 97,9% ; 2008 : 98% ; 2009 : 98 %) 14
Accroître la performance et mesurer les résultats Exemples de résultats obtenus : la dématérialisation des procédures Télédéclaration Nombre de télédéclarations (en millions) 5,76 7,38 7,42 8,50 * 3,77 0,12 0,60 1,25 * objectif 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 Paiement dématérialisé de l impôt 80,0 75,0 70,0 65,0 60,0 55,0 50,0 60,3 61,0 taux de paiement dématérialisé pour l'impôt sur le revenu 78,4 70,7 73,0 73,1 63,8 54,9 57,8 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 15
Améliorer le service aux usagers Principe : Ce n est pas à l usager de coordonner l administration Organisation par procédure organisation par usagers Création d un point de contact unique pour le citoyen (cf. page suivante) - contact téléphonique - contact physique - contact écrit ex. : - interlocuteur fiscal unique des entreprises - interlocuteur fiscal unique des particuliers (250 SIP fin 2009, 750 fin 2011). - pour l INSEE, projet RESANE (RÉingéniérie du système d information des Statistiques Annuelles d Entreprises) - portail unique de traitement dématérialisé de la création d entreprise 16
Améliorer le service aux usagers LE SERVICE DES IMPOTS POUR LES PARTICULIERS (SIP) 17
Faire bénéficier les personnels du changement Des métiers plus difficiles des compétences accrues Une reconnaissance des qualifications et des plans de promotion supplémentaires Un accroissement de l effort de formation initiale et continue Un effort particulier lié aux réformes : des indemnités spécifiques pour les acteurs de la réforme Une garantie de maintien de rémunération (cas des suppressions de service) Une aide à la mobilité géographique Une rémunération partiellement liée à la performance 18
Premier bilan On peut faire mieux avec moins en s organisant différemment Une qualité de service en forte progression et une image vraiment améliorée : 94% d usagers satisfaits des services de la Douane 76% des contribuables satisfaits de l administration fiscale Un satisfecit donné par les parlementaires Des dépenses de fonctionnement stabilisées et des effectifs en diminution (17 000 emplois supprimés sur 2003-2009, soit un gain de productivité de 1,5%/an) Des recettes en progression (+ de 1 Mds ) grâce à l amélioration du taux de recouvrement L idée que la modernisation est indispensable s impose progressivement (48% des agents pense que le ministère va dans le bon sens) Moins de «pourquoi?» et plus de «comment?» 19
Premier bilan Des ruptures importantes, en particulier sur le plan culturel Un nouveau vocabulaire : performance, productivité, résultat De nouvelles façons de travailler : définir des priorités, hiérarchiser les interventions De nouveaux modes de pilotage : les contrats pluriannuels de performance (CPP) Ces ruptures inquiètent (40% des agents craignent une dégradation de leur situation personnelle à court terme) et déstabilisent les personnels et les cadres Investir dans la conduite du changement Consulter, expliquer Former, accompagner Développer la formation, condition clé du succès 20