Amende fiscale pour les conseils apportant leur concours à des montages d'évasion fiscale



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Transcription:

Amende fiscale pour les conseils apportant leur concours à des montages d'évasion fiscale V3.08.012.14 rectifie ARTICLE 44 terdecies (nouveau) (Art. 1735 ter du code général des impôts) - Modification de la sanction pour défaut de présentation de la documentation relative aux prix de transfert LE TEXTE VOTE PAR L ASSEMBLEE NATIONALE...1 ATTENTION le texte vise UNIQUEMENT les abus de oumis aux disposions de l article 1729 b CGI...2 LES TRAVAUX DE LA COMMISSION DU SENAT...2 I. LE DROIT EXISTANT...2 A. LES CONSEILS PROPOSANT DES MONTAGES ABUSIFS NE S'EXPOSENT À AUCUNE SANCTION ADMINISTRATIVE EN CAS DE FRAUDE FISCALE...2 B. LA LOI DE FINANCES POUR 2014 : UNE PREMIÈRE TENTATIVE DE PRISE EN COMPTE DU RÔLE DES INTERMÉDIAIRES...3 1. La déclaration préalable des schémas d'optimisation fiscale...3 L'exemple britannique : la loi DOTAS...3 2. Un dispositif censuré par le Conseil constitutionnel...4 II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE...5 III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES...5 AMENDEMENT Présenté par M. de MONTGOLFIER au nom de la commission des finances...6 Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié. LE TEXTE VOTE PAR L ASSEMBLEE NATIONALE Article 44 quaterdecies (nouveau) Voté par l(an le 21.11/en cours d examen par le sénat I. Le B de la section 1 du chapitre II du livre II du code général des impôts est complété par un 11 ainsi rédigé : «11 : Sanction à l égard de tiers facilitant l évasion et la fraude fiscales «Art. 1740 C. Toute personne qui, avec l intention de faire échapper autrui à l impôt, s est entremise, a apporté son aide ou son assistance ou s est sciemment livrée à des agissements, manoeuvres ou dissimulations conduisant directement à la réalisation d insuffisances, d inexactitudes, d omissions ou de dissimulations ayant conduit à des rappels ou rehaussements assortis de la majoration prévue au b de l article 1729 est redevable d une amende égale à 5 % du chiffre d affaires réalisé au titre des 1

faits sanctionnés. L amende ne peut pas être inférieure à 10 000 EUR.» II. Le I s applique aux insuffisances, inexactitudes, omissions ou dissimulations commises à compter du 1er janvier 2015. ATTENTION le texte vise UNIQUEMENT les abus de oumis aux disposions de l article 1729 b CGI Article 1729 Modifié par LOI n 2008-1443 du 30 décembre 2008 - art. 35 (V) Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; b. 80 % en cas d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; elle est ramenée à 40 % lorsqu'il n'est pas établi que le contribuable a eu l'initiative principale du ou des actes constitutifs de l'abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire ; c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION DU SENAT Rapport général n 108 (2014-2015) de M. Albéric de MONTGOLFIER, fait au nom de la commission des finances du SENAT Commentaire : le présent article vise à instaurer une amende fiscale spécifique pour les conseils apportant leur concours à la réalisation de montages fiscaux conduisant les contribuables à des redressements sur le fondement de l'abus de droit. I. LE DROIT EXISTANT A. LES CONSEILS PROPOSANT DES MONTAGES ABUSIFS NE S'EXPOSENT À AUCUNE SANCTION ADMINISTRATIVE EN CAS DE FRAUDE FISCALE Les infractions à la loi fiscale sont sanctionnées par des pénalités fiscales, qui comprennent les intérêts de retard, les amendes fiscales (forfaitaires) et les majorations de droits (proportionnelles). Ces pénalités sont déterminées par l'administration fiscale, sous le contrôle du juge de l'impôt. À ces pénalités fiscales peuvent, le cas échéant, venir s'ajouter des sanctions pénales, au titre du délit de fraude fiscale défini à l'article 1741 du code général des impôts. Ces dernières sont prononcées par les tribunaux correctionnels saisis à l'initiative de l'administration fiscale. Dans les cas les plus graves, la procédure de l'abus de droit permet de sanctionner le détournement de dispositions légales à des fins contraires à l'esprit de leurs auteurs (cf. encadré). Cette procédure rare permet de requalifier une optimisation fiscale «trop» habile en fraude fiscale, et de la sanctionner. L'abus de droit Prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (LPF) et modernisée en 2008 130( * ), la procédure de l'abus de droitpermet de sanctionner les actes qui, «recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs (...), n'ont pu être inspirés par aucun 2

autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles». En d'autres termes, l'abus de droit vise à sanctionner les opérations dont le but exclusif est d'échapper à l'impôt. L'abus de droit est lourdement sanctionné : le contribuable s'expose en effet à une majoration de 80 % de l'impôt normalement dû, qui vient s'ajouter au redressement lui-même et au paiement des intérêts de retard (0,4 % par mois). La sanction est toutefois ramenée à 40 % des droits éludés s'il n'est pas établi que le contribuable a eu l'initiative de l'acte constitutif de l'abus de droit, ou qu'il n'en a pas été le principal bénéficiaire. La mise en oeuvre de l'abus de droit est toutefois délicate dans la mesure où la frontière entre le montage habile (l'optimisation légale) et l'abus de droit est rarement évidente, alors que les conséquences sont majeures pour le contribuable. De plus, l'administration doit apporter la preuve que le but du contribuable est exclusivement fiscal, critère qui peut aisément être contourné par l'introduction d'un petit fondement économique. Par exemple, une entreprise peut justifier la création d'une holding dans un État à la fiscalité très faible par la nécessité de coordonner ses opérations internationales, ou de servir une - modeste - clientèle locale. La mise en oeuvre de l'abus de droit relève principalement de la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI). En 2013, 158 procédures d'abus de droit ont été lancées par l'administration fiscale, pour un montant de 809 millions d'euros de droits redressés et 676 millions d'euros de pénalités 131( * ). Source : commission des finances Toutefois, en l'état actuel du droit, les intermédiaires apportant leur concours à des actes relevant de la fraude fiscale ou de l'abus de droit ne s'exposent à aucune sanction fiscale. Pourtant, de nombreux montages sont élaborés et commercialisés par des tiers, qu'il s'agisse par exemple de cabinets d'avocats ou de conseil, d'experts comptables, d'institutions financières ou encore de gestionnaires de patrimoine. Les intermédiaires s'exposent toutefois à des sanctions pénales, notamment au titre de la complicité au délit de fraude fiscale 132( * ) ou du blanchiment de fraude fiscale 133( * ). B. LA LOI DE FINANCES POUR 2014 : UNE PREMIÈRE TENTATIVE DE PRISE EN COMPTE DU RÔLE DES INTERMÉDIAIRES 1. La déclaration préalable des schémas d'optimisation fiscale Une première tentative de prise en compte du rôle des intermédiaires et des conseils dans l'élaboration de montages fiscaux abusifs a vu le jour lors des débats budgétaires de l'année 2013. L'article 96 de la loi de finances pour 2014 prévoyait ainsi de soumettre toute personne commercialisant, élaborant ou mettant en oeuvre un «schéma d'optimisation fiscale» à une obligation de déclaration préalable de ce schéma d'optimisation fiscale à l'administration. Le manquement à l'obligation de déclaration entraînait l'application d'une amende égale à 5 % du montant des revenus perçus au titre de la commercialisation du schéma, ou à 5 % du montant de l'avantage fiscal procuré par sa mise en oeuvre. Ce dispositif s'inspirait notamment de systèmes mis en oeuvre par d'autres pays, notamment le Royaume-Uni avec la loi «DOTAS» votée en 2004 (cf. encadré) ou encore les États-Unis, le Canada et l'afrique du Sud. L'obligation de déclaration préalable des schémas d'optimisation fiscale était également l'une des propositions (n 22) du rapport de nos collègues Éric Bocquet et François Pillet au nom de la commission d'enquête sur le rôle des banques et des acteurs financiers dans l'évasion fiscale 134( * ). L'exemple britannique : la loi DOTAS 3

L'exemple britannique : la loi DOTAS Adoptée en 2004, la loi DOTAS («Disclosure of Tax Avoidance Schemes») instaure une obligation de déclaration des schémas d'optimisation fiscale pesant sur les promoteurs et les utilisateurs, afin de permettre une réaction rapide de l'administration fiscale britannique (Her Majesty's Revenue and Customs - HMRC). Le fonctionnement du dispositif est le suivant : - le promoteur d'un schéma d'optimisation est tenu de le déclarer à l'administration fiscale dans les cinq jours suivant sa commercialisation. Toutefois, l'obligation déclarative repose sur l'utilisateur du montage lorsque le promoteur est établi hors du Royaume-Uni, lorsque le promoteur est avocat et que certaines obligations légales l'empêchent de le déclarer, ou lorsque l'utilisateur a créé son propre montage. Des pénalités (5 000 livres sterling, après décision d'un juge, ainsi que 600 livres sterling par jour de retard) sont prévues en cas de non-respect de cette obligation ; - chaque schéma reçoit alors un numéro d'identification individuel ; - tout particulier ou entreprise utilisant ce schéma est tenu de le notifier à l'administration en mentionnant son numéro d'identification dans sa déclaration d'impôts. Des pénalités sont également prévues en cas de manquement à cette obligation ; - l'administration peut alors suivre ce schéma et, le cas échéant, prendre les mesures nécessaires pour l'interdire. Le dispositif repose sur une définition précise de la notion de schéma d'optimisation fiscale. L'obligation de déclaration s'applique ainsi dès lors qu'un montage a pour objet principal de procurer un avantage fiscal, et qu'il répond à certains critères, définis par une instruction fiscale, tels que la confidentialité ou le caractère standardisé. La dernière instruction, publiée en avril 2011, comporte plusieurs mesures de renforcement du dispositif. Sont considérés comme promoteurs de schémas fiscaux les personnes physiques ou morales qui conçoivent, offrent ou gèrent ces schémas. La liste des impôts couverts par DOTAS a été étendue au fil des années. Il existe deux obligations déclaratives : l'une en matière de TVA et l'autre, générale, qui vise l'ensemble des impôts (impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, impôt sur les plus-values de capital, cotisations sociales et droits d'enregistrement sur les immeubles non résidentiels). Depuis 2011, le transfert d'actifs à un trustest également soumis au régime déclaratoire. D'après HMRC, 2 289 schémas fiscaux ont été déclarés entre 2004 et 2012, conduisant à l'adoption d'une cinquantaine de mesures anti-abus et au «maintien» sur le territoire d'une assiette fiscale de près de 12 milliards de livres sterling. HMRC reçoit annuellement des déclarations en provenance de 50 à 100 promoteurs. Source : commission des finances, d'après la DGFiP et HRMC - http://www.hmrc.gov.uk/aiu L'objectif de cette obligation déclarative était de faire gagner un temps précieux à l'administration fiscale, en lui permettant de lancer des contrôles sur la base d'une analyse des risques, et le cas échéant d'apporter une réponse législative ou réglementaire aux cas les plus problématiques. Cette réactivité devait permettre d'écourter la durée de vie des schémas d'optimisation fiscale, y compris lorsque ces derniers sont légaux. L'obligation de déclaration préalable de la loi de finances pour 2014 ne visait toutefois pas à sanctionner les intermédiaires au titre de la fraude fiscale qui aurait, le cas échéant, résulté des schémas commercialisés ou élaborés par leurs soins. Seule était sanctionnée l'absence de déclaration de ces schémas. 2. Un dispositif censuré par le Conseil constitutionnel Outre d'importantes difficultés de mise en oeuvre concrète -installation d'un service dédié, formation etc. - le dispositif adopté par l'assemblée nationale présentait une faiblesse majeure, à savoir l'absence de définition précise d'un «schéma d'optimisation fiscale». L'article 96 de la loi de finances pour 2014 faisait ainsi référence à «toute combinaison de 4

procédés et instruments juridiques, fiscaux, comptables ou financiers dont l'objet principal est de minorer la charge fiscale d'un contribuable, d'en reporter l'exigibilité ou le paiement ou d'obtenir le remboursement d'impôts, taxes ou contributions», et renvoyait à un décret en Conseil d'état la définition de critères supplémentaires. Pour mémoire, l'instruction fiscale britannique relative à la loi «DOTAS» fait plus d'une centaine de pages. Dans sa décision n 2013-685 DC du 29 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le dispositif de déclaration préalable prévu à l'article 96 de loi de finances pour 2014, considérant «qu'eu égard aux restrictions apportées par les dispositions contestées à la liberté d'entreprendre et, en particulier, aux conditions d'exercice de l'activité de conseil juridique et fiscal, et compte tenu de la gravité des sanctions encourues en cas de méconnaissance de ces dispositions, le législateur ne pouvait (...) retenir une définition aussi générale et imprécise de la notion de "schéma d'optimisation fiscale"». II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE À l'initiative de notre collègue député Dominique Lefebvre, l'assemblée nationale a adopté un amendement, avec l'avis favorable du Gouvernement et de la commission des finances, visant à instaurer une amende fiscale à l'égard des tiers facilitant l'évasion et la fraude fiscales. À cet effet, un nouvel article 1740 C serait créé dans le code général des impôts. Cette amende s'appliquerait à «toute personne qui, avec l'intention de faire échapper autrui à l'impôt, s'est entremise, a apporté son aide ou son assistance ou s'est sciemment livrée à des agissements, manoeuvres ou dissimulations conduisant directement à la réalisation d'insuffisances, d'inexactitudes d'omissions ou de dissimulations ayant conduit à des rappels ou rehaussements assortis de la majoration prévue au b de l'article 1729 [du CGI]». En d'autres termes, sont visés par l'amende fiscale les conseils ayant apporté leur concours à l'élaboration d'un schéma fiscal constitutif d'un abus de droit, ayant conduit à une majoration de 80 % des sommes dues. L'amende fiscale prévue par le présent article est égale à 5 % du chiffre d'affaires réalisé au titre des faits sanctionnés (c'est-à-dire la commercialisation du montage), le montant minimal de l'amende étant fixé à 10 000 euros. Le présent article prévoit que cette nouvelle sanction fiscale est applicable aux insuffisances, inexactitudes, omissions ou dissimulations commises à compter du 1 er janvier 2015. III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES Le dispositif adopté par l'assemblée nationale instaure une amende fiscale spécifique pour les conseils apportant leur concours à la réalisation de montages fiscaux conduisant les contribuables à des redressements sur le fondement de l'abus de droit. En posant le principe d'une responsabilité partagée entre les contribuables indélicats et leurs conseils, il constitue une sorte de pendant «administratif» à la complicité en matière pénale s'agissant de la fraude fiscale. À cet égard, votre rapporteur général estime qu'il s'agit d'un dispositif équilibré, qui évite les écueils relevés par le Conseil constitutionnel. Ainsi, la limitation du dispositif aux montages constitutifs d'un abus de droit permet de : - limiter sa portée aux cas les plus graves ; - garantir le caractère intentionnel de l'évasion fiscale ; - instituer une sanction proportionnelle à l'avantage pécuniaire retiré de la fraude, et non pas du montage lui-même ; - offrir une garantie juridique : aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, la sanction doit être motivée et le contribuable dispose de 30 jours pour présenter ses observations. Le dispositif étant une sanction fiscale, il entraîne la compétence du juge de l'impôt ; - dispenser les intermédiaires d'une obligation de déclaration a priori, difficile à mettre en oeuvre compte tenu de l'absence de définition d'un schéma d'optimisation fiscale et 5

problématique quant au respect du principe de la liberté d'entreprendre, dont l'importance a été rappelée par le Conseil constitutionnel dans la décision précitée. Le dispositif proposé est donc préférable à la mise en place d'une obligation de déclaration préalable des schémas d'optimisation fiscale, étant entendu qu'il ne remet pas en cause le droit légitime des contribuables à rechercher, y compris avec une aide extérieure, la solution légale la plus avantageuse pour eux. Ce dispositif vient en outre renforcer la portée de l'abus de droit, sans prendre le risque d'en élargir la définition. En 2013, notre collègue Philippe Marini, alors président de la commission des finances, avait en effet proposé d'élargir la notion d'abus de droit aux montages à but principalement fiscal, et non plus exclusivement fiscal 135( * ) ; cette proposition, reprise par notre collègue député Pierre-Alain Muet dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 sous une forme proche - à savoir un motif essentiellement fiscal 136( * ) - avait en effet été censurée par le Conseil constitutionnel au motif que la définition retenue laissait à l'administration fiscale une marge d'appréciation trop importante, compte tenu des lourdes conséquences pécuniaires de l'abus de droit pour le contribuable. Toutefois, le caractère restreint du dispositif proposé pourrait aussi être sa principale faiblesse : la charge de la preuve reposant sur l'administration, il appartiendra à celle-ci d'établir que le conseil a intentionnellement proposé un montage frauduleux, le tout sur un ensemble limité d'environ 150 procédures d'abus de droit par an. AMENDEMENT Présenté par M. de MONTGOLFIER au nom de la commission des finances C G Favorable Favorable Adopté ARTICLE 44 QUATERDECIES I. Alinéa 3, première phrase Après les mots : 5 % du chiffre d affaires rédiger ainsi la fin de cette phrase : ou des recettes brutes qu'elle a réalisés à raison des faits sanctionnés au titre du présent article. II. Après l alinéa 3 Insérer un alinéa ainsi rédigé : «Les dispositions de l article L. 80 D du livre des procédures fiscales sont applicables au présent article.» Objet Le présent amendement vise à : - ajouter une référence aux recettes brutes en plus du chiffre d affaires, afin de couvrir tous les intermédiaires pouvant intervenir dans l élaboration d un montage fiscal ; - préciser explicitement que l article L. 80 D du livre des procédures fiscales sur la motivation des sanctions fiscales est applicable, car celui-ci vise les «contribuables» et non les «intermédiaires». Votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement de précision à cet article. Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié. 6