Le territoire, ses entreprises et le financement de l investissement : l influence des pairs sur le mode de financement



Documents pareils
Annexe - Balance des paiements et équilibre macro-économique

Analyse Financière Les ratios

DEBAT D ORIENTATIONS BUDGETAIRES 2015

Compétitivité internationale des industries françaises des filières animales

Présentation des termes et ratios financiers utilisés

Le présent chapitre porte sur l endettement des

Chapitre 3. La répartition

Principes d octroi de crédit et rôle des garanties. Eric Schneider

La méthode des scores, particulièrement de la Banque de France

PARTIE I - Données de cadrage. Sous-indicateur n 9-1 : Nombre de consultations de médecins par habitant, perspective internationale

ELEMENTS DE COMPTABILITE NATIONALE

Comparaison des enjeux énergétiques de la France et de l Allemagne

observatoire du Transport Sanitaire 2014 kpmg.fr

Les perspectives mondiales, les déséquilibres internationaux et le Canada : un point de vue du FMI

Analyse financière détaillée

Chapitre 1 : Introduction au contrôle de gestion. Marie Gies - Contrôle de gestion et gestion prévisionnelle - Chapitre 1

Communiqué de presse. Paris, le 15 février 2012

les évolutions récentes

Chapitre 3 L interprétation des documents financiers et la planification financière

Quels enseignements de l expérience française ( )

Les questions relatives aux finances publiques, longtemps réservées aux spécialistes, sont

Carrefour : Résultats annuels 2012 Hausse du chiffre d affaires et du résultat net part du Groupe Renforcement de la structure financière

I N V I T A T I O N Cycle de formation

Le groupe Crédit Mutuel en 2010 Un réseau proche de ses sociétaires-clients, au service des entreprises créatrices d emplois dans les régions (1)

ANALAYSE FINANCIERE 1] BILAN FONCTIONNEL

Lambotte J.-M. Géographe-Urbaniste. Chercheur au Lepur ULg. Semaine Universitaire Luxembourgeoise de l'environnement - Libramont

DIAGNOSTIC SOCIO-ÉCONOMIQUE ET FINANCIER LE BILAN-SANTÉ DE L'INTERCOMMUNALITÉ

Rachat d actions : les raisons d un engouement

COMMUNAUTE DU PAYS D E V E N D O M E. Orientations budgétaires 2010

Management Chapitre 3 Diriger et décider

TD n 1 : la Balance des Paiements

4LES FINANCES DES COLLECTIVITÉS LOCALES LES COLLECTIVITÉS LOCALES EN CHIFFRES 2010

Analyse financière par les ratios

Les coûts de la production. Microéconomie, chapitre 7

Les opérations à effet de levier - LBO. Isabelle Martinez Master CCA2

Monia Amami Franck Brulhart Raymond Gambini Pierre-Xavier Meschi

Cet article s attache tout d abord

Attitude des ménages face au risque. M1 - Arnold Chassagnon, Université de Tours, PSE - Automne 2014

POINTS DE REPÈRE SUR LA FÉVRIER 2015 PRODUCTIVITÉ EN FRANCE

Interpréter correctement l évolution de la part salariale.

IMMOBILIER D ENTREPRISE CROISSANT OUEST POINT SECOND SEMESTRE 2013

Investissements et R & D

L'analyse de la structure financière

Études. La position extérieure : éléments de mesure et utilité pour la politique monétaire et la stabilité financière

QUEL RÔLE POUR LE FMI DANS LE NOUVEL ORDRE ÉCONOMIQUE MONDIAL?

Inégalités de salaires et de revenus, la stabilité dans l hétérogénéité

1 er trimestre : Résultats en ligne avec les objectifs annuels

Evaluer l ampleur des économies d agglomération

CONFERENCE DE PRESSE > LANCEMENT DU «MANIFESTE POUR UNE SOCIÉTÉ POSITIVE»

LES SIIC. Pierre Schoeffler Président S&Partners Senior Advisor IEIF. Étude réalisée par. Les SIIC et la retraite 1

Nouvelles règles de sous-capitalisation : Révision nécessaire et optimisation des financements intra-groupe

Innover plus et mieux Maintenir et développer les activités industrielles sur nos territoires

Le build-up est-il la solution?

DISCOUNTED CASH-FLOW

Épargne et investissement. L épargne...

ECONOMIE GENERALE G. Carminatti-Marchand SEANCE III ENTREPRISE ET INTERNATIONALISATION

Comparaisons internationales de la dette

La jeunesse française a-t-elle encore un avenir?

DOSSIER DE GESTION. Sommaire

QUELLE DOIT ÊTRE L AMPLEUR DE LA CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE POUR RAMENER LA DETTE À UN NIVEAU PRUDENT?

Crises financières et de la dette

La retraite de nos enfants Colloque Question-Retraite Centre Mont-Royal, Montréal

Des solutions pour les seniors à revenus insuffisants

La Licence Mathématiques et Economie-MASS Université de Sciences Sociales de Toulouse 1

CAMPAGNE ANNUELLE DES EPARGNES ACQUISES

COMMENTAIRE. Services économiques TD

La perspective de «windfall profits» (profits indus) pour les électriciens allemands

4LES FINANCES DES COLLECTIVITÉS LOCALES LES COLLECTIVITÉS LOCALES EN CHIFFRES 2009

Secteur bancaire Enjeux d image

4. Résultats et discussion

SOMMAIRE RÉSULTATS SEMESTRIELS 2011 PRÉAMBULE 2 PERFORMANCE COMMERCIALE 6 RÉSULTATS CONSOLIDÉS 9 STRUCTURE FINANCIÈRE 13 SQLI EN BOURSE 18

Cours 9 : Plans à plusieurs facteurs

Exercices & cours de Gestion en vidéo - BTS MUC. Liste des formules. (Consultez également «Liste des tableaux»)

BANQUE NATIONALE DE ROUMANIE BANQUE NATIONALE DE ROUMANIE

4LES FINANCES DES COLLECTIVITÉS LOCALES LES COLLECTIVITÉS LOCALES EN CHIFFRES 2011

LA GESTION DU RISQUE DE CHANGE. Finance internationale, 9 ème édition Y. Simon et D. Lautier

Contents. 1 Introduction Objectifs des systèmes bonus-malus Système bonus-malus à classes Système bonus-malus : Principes

Le financement de l entreprise

Évolution du processus de normalisation en ce qui a trait à la présentation de l information financière Vivons-nous un changement d environnement?

«La Mutualité Française ouvre de nouveaux chantiers innovants.»

Etudes sur la situation de l entreprise

Programme de stabilité Quel impact sur l investissement local?

que les performances opérationnelles long terme des entreprises françaises émettrices d actions

Etude du niveau stress ressenti par les salariés de plusieurs entreprises du tertiaire. Un outil de mesure.

SECTION 1 RENSEIGNEMENTS PERSONNELS (OBLIGATOIRE)

L Europe bancaire et financière M2 Politiques européennes

ANNEXE C. ÉLÉMENTS D'ANALYSE FINANCIÈRE

MONITORING DE LA COMPÉTITIVITÉ DU TRANSPORT AÉRIEN SUISSE

COMMENTAIRE. Services économiques TD LA CONSTRUCTION AUTOMOBILE REDÉMARRE AU CANADA, MAIS MANQUERA-T-ELLE BIENTÔT DE CARBURANT?

Éligible PEA. La recherche de la performance passe par une approche différente

APPEL A COMMUNICATIONS

Le Bulletin de salaire

Options en matière de réforme des systèmes financiers

LE CASH AU CŒUR DU SYSTEME DE L ENTREPRISE

RAPPORT D OBSERVATIONS DEFINITIVES SUR LES COMPTES ET LA GESTION DE LA COMMUNE DE TARBES

LA CONNAISSANCE DES COMPTES FINANCIERS ET NON FINANCIERS DES ACTEURS FINANCIERS

TABLE DES MATIÈRES TITRE I- LES ÉTATS FINANCIERS... 7 TITRE II- LA FISCALITÉ CORPORATIVE... 55

L IMPACT DE LA MUTUALISATION SUR LES RESSOURCES HUMAINES

Les nouveaux ratios prudentiels applicables aux établissements de crédit au titre du droit communautaire

BREVET DE TECHNICIEN SUPÉRIEUR TERTIAIRES SESSION 2013

Transcription:

Le territoire, ses entreprises et le financement de l investissement : l influence des pairs sur le mode de financement Par Kevin GUILLAS-CAVAN Doctorant dir. Prof. Dr. Antoine Rebérioux

Grandes entreprises et territoires, un lien croissant? Rupture financière des années 1980-1990 Profitabilité des firmes françaises : passage de la dernière à la première place dans l OCDE Contrainte de la convergence européenne restructuration, modernisation, montée en gamme Création de réseaux denses dominés par les grandes entreprises 2

Territoires ou espaces? Multi-layered hierarchical structure (Amable & Hancké, 2001) vs. «Länder as building-blocks» (Wójcik, 2002) Déterminants du choix régional: implantation préalable ou ressources-contraintes spécifiques? Opposition stratégie globale (prédation) et glocale (concurrence coopérative) (Carluer 2004) Porter-Pecqueur-Barel vs. Perroux Isard-Krugman et Venable 3

Sources Base de données DIANE du bureau Van Dijk Variables descriptives Secteur (NAF à 3 rangs) Âge Taille du groupe Taille (effectifs et capital social) Localisation Banque principale Séries de variables dépendantes Ratios des financements bancaire, de groupe, non-bancaire et total (en ) par rapport aux capitaux (en ) [long terme (LT) / court terme (CT) / total] Part du CT ; part du LT sur le financement extérieur total Part des financements bancaire, non-bancaire et de groupe dans le financement total Part des financements bancaire, non-bancaire, de groupe de CT et de LT dans le financement de LT et de CT total Part du CT et du LT dans le financement bancaire, nonbancaire et de groupe 4

Modèles Étape 1 CarFin X i Y i, j j i, j Avec : X i les variables de contrôle de la société i (taille, secteur, âge) Y j les variables propres à la zone j pour chaque société i (nombre de sociétés du même secteur en fonction de leur taille) θ j une variable discrète qualifiant la zone 5

Modèles Étape 2 Test de l hétéroscédasticité (Test de Breusch- Pagan) Analyse de la variance (Anova) et clustering des unités territoriales en utilisant le test Tukey- Kramer (honest significant difference) 6

Un exemple de résultat Un modèle particulièrement puissant pour - Ratio Dette LT / Capital (R2 = 0.15, p=2.20e-16) Reg Dpt Sec Age Eff. T. Grp Banq C.Dp t - Et pour les variables quantitatives GE EI ME E>i *** *** *** *** *** *** *** * * *** Âge T.Grp C.Dpt GE EI E>i -18.77*** -0.102*** -3.084*** 175.4*** -13.91*** 3.862*** 7

L influence des GE Un effet surdéterminant (coefficient 10 à 100x supérieur au deuxième plus haut) Positif sur le taux d endettement de long terme le taux d endettement de court terme (mais moindre) la part du crédit de CT dans le crédit bancaire Négatif sur la part du financement de LT dans le financement total la part du financement bancaire dans le financement LT la part des instruments non-bancaires dans le financement LT la part des instruments non-bancaires de CT dans le financement non-bancaire 8

L influence des GE Présence d une grande société une hausse de l endettement, notamment à long terme à se détourner des banques pour le financement de long terme à se détourner des instruments financiers nonbancaires dans le financement de long terme! Un effet ambigu : un effet très net à la présence d une GE mais un effet inverse à mesure que le nombre de GE croît! 9

L influence des GE Comme on pouvait s y attendre, la présence d une grande société conduit à renforcer la dette de groupe au détriment des autres instruments financiers La présence d une grande société ne se résume cependant pas à un effet de substitution mais induit aussi un accroissement de l endettement Cela dépasse aussi l effet groupe : autrement, elle ne décroîtrait pas à mesure que croît le nombre de grandes sociétés. Une partie dépasse l effet de la grande société sur ses affiliées modèle de la firme-réseau prédatrice vs. modèle de la concurrence coopérative (Carluer) pas seulement une question de choix ou de stratégie de la grande firme mais un résultat de sa capacité de contrôle 10

L influence des EI et ME Pour les EI, un effet négatif sur le taux d endettement de long terme (positif pour les GE) la part du financement bancaire dans le financement CT Et un effet positif (à prendre avec précaution) sur le taux d endettement total. Pour les ME, un effet négatif sur La part du financement de groupe (CT, LT, Total) dans le financement total La part des prêts bancaires CT par rapport au total des prêts bancaires La part des instruments non-bancaires de court terme dans le financement non-bancaire La part du financement de groupe de CT dans le financement de groupe Et positif sur le taux d endettement (de CT, de LT, total) 11

L influence des EI et ME La présence des ME modèle différent Renforce aussi le long terme Permet un financement extérieur plus important Diminue l importance du groupe le groupe est plus subi que choisi (ou en tout cas, choisi par défaut) Renforce le financement bancaire Il peut être intéressant de distinguer l effet des sociétés intermédiaires Renforce aussi le long terme Diminution du taux d endettement global Augmente l importance du financement de groupe Diminution du crédit bancaire (et notamment du crédit bancaire de court terme) 12

Résumé Quatre formes d intégration - Domination par une grande société («firmeréseau prédatrice»?) - Intégration dans un réseau de grandes sociétés (et une privilégiée) («firme-réseau intégrée») - Réseau de firmes (ME) accompagné d institutions bancaires - Le réseau hiérarchique de firmes (leadership de firmes intermédiaires) un cas intermédiaire (groupe et long terme) mais faible endettement un cas plus efficace? 13

Conclusion Au-delà du débat sur l échelon territorial pertinent, quelle créativité pour quels acteurs? Le choix des grandes sociétés françaises n a visiblement pas entraîné les autres (même en rajoutant les intermédiaires aux grandes) 14

Conclusion La France, un cas intermédiaire entre l Allemagne (les Länder comme «building block» - diversité territoriale) et le Japon où la logique d hybridation est portée par les dynamiques financières de deux grands types de keiretsu (Yamamura 2003, Aoki, Jackson, Miyajima 2007)? 15

Financement de CT dans le financement total 16

Financement bancaire de LT dans financement de LT 17

Part du financement nonbancaire de CT dans le financement non bancaire 18