Présenté à la commission des Affaires sociales



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COMMISSION PARLEMENTAIRE SUR LE DOCUMENT DE CONSULTATION : GARANTIR L ACCÈS : UN DÉFI D ÉQUITÉ, D EFFICIENCE ET DE QUALITÉ Mémoire de la Fédération des chambres de commerce du Québec Présenté à la commission des Affaires sociales Mars 2006

INTRODUCTION... 3 1. Ouverture au privé... 4 A. Une meilleure gestion du système de santé... 5 B. Une plus grande ouverture à la prestation des services de santé par le secteur privé... 6 C. Une ouverture au financement privé... 7 2. Une meilleure utilisation de la main d œuvre médicale... 10 3. Régime d assurance contre la perte d autonomie... 11 SOMMAIRE DES RECOMMANDATIONS... 12 2

Introduction Grâce à son vaste réseau de 164 chambres de commerce, la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) représente 57 000 membres exerçant leurs activités dans tous les secteurs de l'économie et sur l'ensemble du territoire québécois. Plus important réseau de gens d'affaires et d'entreprises au Québec, la FCCQ est, depuis près de 100 ans, l'ardent défenseur des intérêts de ses membres au chapitre des politiques publiques, favorisant ainsi un environnement d'affaires innovant et concurrentiel. La FCCQ remercie les membres de la Commission d avoir acceptée d entendre notre point de vue concernant la place du privé dans les services de santé du Québec. La manière dont le système de santé est conçu, géré et financé est de première importance pour le Québec à cause de son impact sur notre compétitivité, notre économie et nos choix de société. Toutefois le débat devra aussi se faire au niveau canadien car la loi canadienne sur la santé impose un modèle plutôt restreint à l inclusion du privé dans la santé. Tout en étant conscients qu il faut être prudents dans l utilisation de comparaisons nationales ou internationales, nous croyons sur l expérience d autres provinces ou d autres pays peut contribuer à faire progresser la discussion. Ainsi, la preuve présentée devant la Cour suprême dans l affaire Chaoulli 1 a établi que plusieurs pays occidentaux qui n imposent pas un monopole en matière de prestations de soins de santé réussissent à fournir à leurs citoyens des services médicaux de qualité, à prix plus abordables et finalement plus accessibles que ceux offerts actuellement au Canada. La FCCQ croit donc que le gouvernement peut améliorer la performance du système de santé en mobilisant davantage le secteur privé pour diminuer les pressions à la hausse sur le 1 Chaoulli c. Québec, [2005] 1 R.C.S. 791, par. 104 [Chaoulli] 3

financement et la prestation de services, sans compromettre pour autant l accès garanti aux soins pour tous. 1. Ouverture au privé Nous appuyons le gouvernement dans ses efforts pour améliorer l efficience du système de santé public qui fait présentement face à des problèmes sérieux quant à l accès aux services et l augmentation vertigineuse des coûts. La FCCQ est particulièrement favorable à la proposition du gouvernement de permettre une ouverture au secteur privé. Cependant, l ouverture proposée nous semble beaucoup trop timide. En effet, la FCCQ estime qu il faut aller au-delà des trois chirurgies électives proposées et permettre une ouverture plus grande au secteur privé. Compte tenu des pressions actuelles sur le système de santé public, l ouverture au secteur privé est non seulement souhaitable mais nécessaire. Le vieillissement de la population, avec l accroissement de la demande de soins et services qu elle entraînera, auront pour effet de lourdement grever les finances publiques. Selon le rapport du comité Ménard, les dépenses de santé et de services sociaux croîtront à un rythme annuel de l ordre de 5,1 % au cours des quinze prochaines années. On le voit déjà quelques mois plus tard, les prévisions pour 2006-2007 déposées auprès du Ministre Audet, le 23 mars dernier, affichent déjà une croissance plus élevée soit de 6,3 %. À elle seule, l évolution démographique fera augmenter les dépenses de 1,5 % par année. Les dépenses progressent de 1,6 % annuellement en raison du développement des technologies et de 2,0 % par année à cause de l inflation générale 2. Tel qu indiqué par le rapport Ménard, la croissance structurelle des dépenses de santé de 5,1 % par année devrait être beaucoup plus rapide que celle des revenus budgétaires qui est estimée à 3,5 % par année. Cette croissance structurelle aura pour effet de créer un écart qui atteindrait 1,7 milliard de dollars en 2010 et plus de 25 milliards de dollars en 2030 3. À moins d un changement de direction majeur, les ajustements ponctuels au système de santé ne feront que retarder le moment des véritables choix pour les Québécois et des décisions 2 Québec, Garantir l accès: un défi d équité, d efficience et de qualité, février 2006, p.58 4

pour le gouvernement. Il nous apparaît donc nécessaire que le gouvernement cherche un nouvel équilibre entre financement public et financement privé. Autrement, la viabilité du système sera menacée. A. Une meilleure gestion du système de santé La proposition du gouvernement limite l ouverture au secteur privé à trois chirurgies électives, et indique que tous les soins qui pourraient éventuellement être assurés par le secteur privé feront nécessairement l objet d une garantie d accès dans le secteur public. Le plan proposé par le gouvernement prévoit un investissement de 20 millions de dollars supplémentaires afin de mettre en œuvre le programme de garantie d accès, seulement pour les trois chirurgies proposées. Il ne nous apparaît pas productif que la revalorisation du rôle du secteur privé s accompagne d investissements supplémentaires dans le système public de santé, puisque ceci a pour effet de décourager l expansion du secteur privé et d empêcher qu il apporte une contribution positive à la performance du système de santé. Le recours au privé doit être conçu à la fois comme un moyen permettant de maîtriser l augmentation des dépenses de santé et pour contribuer à la stimulation de l innovation et de la performance du système. La FCCQ croit que les problèmes actuels du système de santé ne se règleront pas seulement par le biais d investissements supplémentaires puisque déjà la part des dépenses de santé et de services sociaux dans les dépenses de programmes du gouvernement est passée de 31,9 % en 1985-1986 à 43,1 % en 2005-2006 4. La FCCQ estime donc que des investissements supplémentaires dans le système de santé ne permettront pas à eux seuls d assurer la pérennité d un système de santé efficace. Nous croyons qu il faut revenir à la source du problème, en revoyant en profondeur la gestion du système de santé afin d en contrôler les coûts et d en augmenter la productivité pour assurer la viabilité du système à long terme. Selon nous, cela passe par la diversification de l offre de services. 3 Québec, Garantir l accès: un défi d équité, d efficience et de qualité, février 2006, p.58 5

Nous appuyons pleinement le gouvernement dans ses efforts en vue d accroître l efficience du système. Une meilleure gestion, et l élimination des gaspillages et des abus, permettront d améliorer les délais d attente et la qualité des soins. Par exemple, certains dysfonctionnements du système pourraient être corrigés par l introduction du dossier médical informatisé. Assorti de garanties de confidentialité des données médicales, ce dossier permettrait non seulement d optimiser les soins, mais aussi de décourager les surconsommations injustifiées. B. Une plus grande ouverture à la prestation des services de santé par le secteur privé Par ailleurs, la FCCQ estime que le recours au secteur privé pour la prestation de services de santé permettrait d introduire, une saine concurrence dans le domaine des soins de santé. Cette émulation favoriserait l accroissement de l efficacité du système public et une meilleure maîtrise du rythme de croissance des coûts. Encadré par une réglementation appropriée, le recours au secteur privé au sein du système de prestation de soins de santé devrait favoriser une plus grande accessibilité aux soins et la réduction des coûts à la charge du système public. De plus, l ouverture au privé pourrait contribuer à revitaliser certains services par l apport de la grande capacité d innovation, la rapidité de réaction et l efficacité propres au secteur privé. Le recours au secteur privé pour la prestation de services de santé pourrait aussi contribuer à réduire les coûts pour le système public tout en maintenant la qualité et l accès aux services. Quant à la proposition d achat de services auprès de «cliniques spécialisées affiliées», la FCCQ s interroge sur l efficacité de cette approche. Nous craignons que ces cliniques finissent par souffrir d un excès de contrôle bureaucratique et d un manque de souplesse, ce qui les rendraient semblables aux établissements publics. L objectif d efficacité ne peut être 4 Québec, Garantir l accès: un défi d équité, d efficience et de qualité, février 2006, p. 61 6

atteint sans un juste équilibre entre un contrôle étroit et la marge d autonomie nécessaire pour motiver le secteur privé. Nous croyons que dans son analyse des solutions permettant d améliorer la performance et l efficience de la prestation de services de santé, le gouvernement devrait aussi évaluer la possibilité de rentabiliser certaines installations des établissements publics en favorisant leur utilisation par le secteur privé (par voie de location ou autre entente contractuelle). Les équipements hospitaliers sont des équipements dont l acquisition et la mise en service génèrent des coûts particulièrement élevés, et dont la sous-utilisation confine au gaspillage. Les installations dont le volume d utilisation est limité pour des raisons de rationnement des services par le système public sont génératrices de dépenses élevées dont une partie pourrait être prise en charge par le secteur privé si on permettait la location de ces ressources à sa disposition. Cette approche pourrait favoriser une utilisation optimale des ressources existantes sans nuire par ailleurs aux services à la population, tout en injectant de nouvelles sources de financement dans le système public. C. Une ouverture au financement privé La FCCQ estime également que l ouverture au financement privé devrait s étendre dans une seconde étape au-delà des trois chirurgies électives proposées après que le gouvernement en ait évalué l éfficacité. À l instar de la proposition du gouvernement, cette ouverture doit se faire par le biais de l assurance duplicative. L assurance duplicative permettra ainsi de donner plus de choix aux citoyens. Tout en restant couverts par le système public, les citoyens pourraient choisir de payer plus pour se faire traiter dans un système privé parallèle, sans que les fonds publics ne soient engagés pour couvrir les soins 5. Le recours au financement privé pourrait alors être avantageux pour le gouvernement, puisque les citoyens qui s en prévaudront continueront de contribuer au financement du système public. L assurance privée duplicative serait donc en sus de la couverture publique universelle. 7

De plus, en permettant le financement privé via l assurance duplicative, les services privés seraient accessibles à une plus grande partie de la population et non seulement à ceux qui ont les moyens de payer pour ces services directement de leur poche. L ouverture au financement privé tout en contribuant à la réduction des délais d attente pourrait alors engendrer des économies pour le système public. Toutefois, la FCCQ est consciente que contrairement à ce qu on pourrait penser, même si elle injecte des ressources supplémentaires dans le système de santé, l assurance maladie privée ne soulage pas automatiquement les régimes publics de tout leurs maux. En effet, les études sur le sujet démontrent que malgré leur participation à une assurance duplicative, les assurés continuent souvent de se faire soigner dans les hôpitaux publics. De plus, les établissements privés ont tendance à se concentrer sur une gamme limitée de soins électifs, laissant au secteur public la prise en charge des soins ou des catégories de population les plus onéreux. Malgré cela, bien que l assurance privée ne soit pas la panacée de tous les maux, elle permet toutefois de soustraire une partie de la clientèle au système public, ce qui est, à notre avis, souhaitable pour dimunuer la charge du système public. De plus, par l ouverture au secteur privé, le système public peut donc devenir plus efficient, ce qui devrait lui permettre de mieux accomplir son objectif principal soit, d offrir des soins de santé de qualité à l ensemble de la population. En effet, l exemple des provinces canadiennes où un système privé est autorisé (soit la Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve-et-Labrador) démontre que les services de santé publics ne sont pas menacés par l assurance privée 6. Le Nouveau- Brunswick permet aux médecins de fixer eux-mêmes leurs honoraires. En Saskatchewan, ce droit est limité aux médecins non-participants. Le coût n est pas remboursé par le régime public, mais les patients peuvent s assurer pour ces coûts. Pour sa part, Terre-Neuve-et- Labrador acceptent de rembourser aux patients les frais payés aux médecins non participants jusqu à concurrence de la somme couverte par le régime public. À Terre-Neuve-et-Labrador, les patients peuvent souscrire une assurance privée pour couvrir la différence. Contrairement à ce que l on pourrait croire, l ouverture au privé ne menace donc pas l intégrité du système public mais agit en complémentarité. 5 «Le financement de la santé par l assurance-maladie privée», Les Notes économiques, Collection «Santé», Institut économique de Montréal, novembre 2005. 6 Chaoulli, par. 74 8

L assurance duplicative est aussi disponible dans un grand nombre de pays dont la France, la Suède, le Royaume-Uni et la Finlande. En Suède, la possibilité de souscrire à une assurance maladie privée ne paraît pas avoir nui au système de santé public. Enfin, selon une étude de l OCDE, dans les pays où elle joue un rôle prépondérant, l assurance privée a injecté des ressources dans les systèmes de santé, élargi le choix offert aux consommateurs et rendu ces systèmes plus réactifs. Dans des pays tels que la France, la Suisse ou l Allemagne, tous les individus, qu ils soient assurés par le secteur public ou privé, ont un accès rapide aux soins de santé. Ces pays n ont pratiquement pas de délais d attente pour les chirurgies électives 7. Régimes d assurance collective La FCCQ est consciente que l ouverture au privé risque de se traduire par une hausse des coûts des régimes privés d assurance collective. Cependant, nous considérons que dans le contexte démographique de vieillissement de la population et de pénurie de la main d œuvre, ce risque est acceptable car l ouverture au privé permettrait de réduire les périodes d invalidité en ramenant les employés plus rapidement au travail. Les entreprises trouveraient ainsi leur compte par ce gain de productivité. De plus, la réduction des périodes d invalidité pourrait possiblement diminuer les coûts des régimes d assurance invalidité offerts par les employeurs venant ainsi contrebalancer les hausses possibles des régimes privés d assurance collective. Par ailleurs, nous croyons que si l ouverture au secteur privé permet d alléger les pressions sur le système public, elle devrait être soutenue par des incitatifs fiscaux. Les mesures fiscales viendraient ainsi encourager les entreprises qui désirent offrir de l assurance collective duplicative à leurs employés. Les entreprises jouent déjà un rôle important en matière de santé. Elles contribuent de façon considérable au financement des médicaments et de certains soins de santé, notamment, par leurs régimes d assurances collectives. Le gouvernement devrait reconnaître et stimuler davantage le rôle des entreprises par des mesures fiscales qui encouragent les entreprises qui contribuent aux financement des soins de 9

santé. Si le gouvernement juge cette approche valable en matière de transport collectif, combien encore plus pertinente cette approche incitative serait-elle en matière de santé. 2. Une meilleure utilisation de la main d œuvre médicale La FCCQ considère que les médecins devraient avoir plus de latitude pour pouvoir desservir le secteur privé une fois qu ils ont atteint leur plafond d heures dans le système public. Bien que nous soyons conscients de la disponibilité limitée de la main d œuvre médicale, nous estimons qu il n est pas justifié dans le contexte actuel de maintenir l obligation de l exclusivité de la rémunération des médecins. Actuellement, un médecin est incité à arrêter de travailler dès qu il a atteint les plafonds salariaux qui lui sont imposés, même si des patients continuent à souffrir sur des listes d attente 8. Est-ce vraiment raisonnable de limiter les interventions quand les besoins sont si grands? Au Royaume-Uni, où le ratio de médecins en activité par 1000 habitants est inférieur au ratio québécois 9, on permet aux médecins spécialistes d exercer dans le privé jusqu à concurrence de 10 % de leur revenu. De plus, le personnel hospitalier peut travailler dans le privé pendant ses temps libres et les hôpitaux peuvent louer leurs équipements lorsqu ils ne sont pas utilisés. Nous invitons le gouvernement à reconsidérer le principe de l étanchéité de la pratique médicale. Une plus grande souplesse pourrait favoriser une organisation plus rationnelle de l activité des professionnels de la santé, elle contribuerait à rentabiliser le coût de leur formation et se traduirait par une optimisation des ressources humaines disponibles. 7 Francesca Colombo et Nicole Tapay, «Private Health Insurance in OECD Countries : The Benefits and Costs of Individuals and Health Systems», OECD Health Working Papers, no 15, 2004, p.5 8 «Le financement de la santé par l assurance-maladie privée», Les Notes économiques, Collection «Santé», Institut économique de Montréal, novembre 2005, p.4 9 Le document de consultation indique qu en 2003, le ratio des médecins en activité par 1000 habitants au Royaume Uni était de 2,2 alors qu il se situait à 2,3 au Québec. 10

3. Régime d assurance contre la perte d autonomie Le document de consultation du gouvernement indique clairement que la situation financière actuelle du système de santé apparaît difficilement soutenable. Le vieillissement de la population et l utilisation de nouvelles technologies continueront à augmenter les coûts du système de santé. Dans ce contexte, il est difficilement concevable qu un régime public d assurance contre la perte d autonomie soit mis en place. De plus, l administration par le gouvernement d un régime d assurance contre la perte d autonomie équivaudrait à la mise en place d une nouvelle taxe. Le fardeau fiscal des québécois est le plus lourd au Canada ; il ne nous semble pas souhaitable de l alourdir davantage. Avant de proposer de nouveaux régimes universels de sécurité sociale, il faudrait d abord assurer la viabilité du système actuel. La FCCQ estime que le gouvernement devrait plutôt encourager l accès aux véhicules privés qui sont déjà en place, par exemple, en permettant aux citoyens d accumuler des sommes à l abri de l impôt pour l achat éventuel d assurances individuelles couvrant les soins longue durée ou pour l achat direct de tels services. Il existe déjà sur le marché canadien des polices d assurance individuelles couvrant les soins de longue durée. Par exemple, l Association nationale des retraités fédéraux propose à ses adhérents un régime d assurance de soins prolongés 10. Nous croyons qu il y a là une piste intéressante à explorer. 10 http://www.fsna.com/pdfdocs/ltci/fsnaenrollme.brochurefr_.pdf 11

Sommaire des recommandations La FCCQ est particulièrement favorable à la proposition du gouvernement de permettre une ouverture au secteur privé. Cependant, l ouverture au secteur privé proposée par le gouvernement nous semble encore beaucoup trop timide. Le recours au secteur privé pour la prestation de services de santé permettrait d introduire une saine concurrence dans le domaine des soins de santé ce qui favoriserait l innovation, la rapidité de réaction et l efficacité de l ensemble du système de santé tout en favorisant une plus grande accessibilité aux soins et à la réduction des coûts à être supportés par le système public. L ouverture au financement privé par le biais de l assurance duplicative permettrait de donner plus de choix aux citoyens. L ouverture au financement privé contribuerait également à la réduction des délais d attente et pourrait engendrer des économies pour le système public. Le gouvernement pourrait, à l instar de ce qui se fait dans d autres pays, encourager par des mesures fiscales les entreprises qui souhaitent offrir de l assurance collective duplicative à leurs employés. Afin de favoriser une utilisation optimale de la main d œuvre médicale disponible, nous croyons à propos que le gouvernement reconsidère le principe de l étanchéité de la pratique médicale. Compte tenu du contexte financier actuel du système de santé, la création d un régime public d assurance contre la perte d autonomie n est aucunement souhaitable d autant plus qu il équivaudrait à la mise en place d une nouvelle taxe. Le gouvernement devrait plutôt favoriser l accès aux véhicules privés qui sont déjà en place. R:\consult\Thais-Pinto\Divers\2006\Mémoire FCCQ\mémoire fccq.doc 12