Réforme de la formation professionnelle, un nouveau souffle pour la lutte contre l illettrisme
Quel est le problème à résoudre? 2 500 000 personnes âgées de 18 à 65 ans sont confrontées à l illettrisme en France soit 7 % de la population (enquête IVQ INSEE-ANLCI 2011) la moitié a plus de 45 ans 51 % sont dans l emploi soit 1 275 000 personnes 71 % d entre elles parlaient uniquement le Français à la maison à l âge de 5 ans 10 % des demandeurs d emploi 6 % des personnes dans l emploi sont en situation d illettrisme
En savoir plus sur les personnes concernées par l illettrisme : Taux d illettrisme par groupes d âges en 2004 et 2011
Quels sont les secteurs professionnels concernés? Source : Enquête information et vie quotidienne INSEE-ANLCI 2012
Quels sont les enjeux? Faciliter l accès à l emploi Faciliter l accès à des formations y compris des formations techniques Favoriser la mobilité professionnelle Répondre aux nouvelles exigences du travail et s adapter aux changements Et tout simplement : réduire le stress, la peur de se tromper, faciliter l échange et la communication, la promotion sociale
Un impératif : Permettre aux salariés et demandeurs d emploi de sortir de l illettrisme : Réacquérir la base de la base, lecture, écriture, calcul, numérique pour être autonomes dans la réalisation des tâches simples de leur vie quotidienne et professionnelle
L apport de l ANLCI :
Un engagement croissant dans le monde du travail Une vision claire et commune du problème à résoudre : les chiffres INSEE-ANLCI et le RCCSP (2008) Une prise de conscience et des moyens renforcés pour les plus fragiles : le FPSPP, les OPCA, les FONGECIF La prise en compte de la formation de base dans la fonction publique territoriale et dans la fonction publique hospitalière Une ingénierie d intervention mieux adaptée grâce à l engagement des partenaires sociaux et la signature d accords cadre avec l ANLCI Une offre de formation de mieux en mieux équipée et plus lisible
Une méthode : Partir de l emploi, de la situation de travail Faire le lien entre la tâche à réaliser et les compétences de base que la personne doit maîtriser pour pouvoir l exécuter Eviter la remise en situation scolaire
Différentes logiques d approche
La lutte contre l illettrisme dans le droit positif Une compétence partagée : l article L121-2 du code de l éducation La lutte contre l'illettrisme et l'innumérisme constitue une priorité nationale. Cette priorité est prise en compte par le service public de l'éducation ainsi que par les personnes publiques et privées qui assurent une mission de formation ou d'action sociale. Tous les services publics contribuent de manière coordonnée à la lutte contre l'illettrisme et l'innumérisme dans leurs domaines d'action respectifs. Une inscription dans le code du travail : Article L6111-2 du code du travail Les actions de lutte contre l'illettrisme et en faveur de l'apprentissage de la langue française font partie de la formation professionnelle tout au long de la vie Article L6313-1 du code du travail (énumération des actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue ) Les actions de formation qui entrent dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue sont : [ ] 13 Les actions de lutte contre l'illettrisme et l'apprentissage de la langue française. Article L6321-1 du code du travail (élaboration du plan de formation et obligation d adaptation) L employeur assure l adaptation des salariés à leur poste de travail [ ]. Il peut leur proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu à la lutte contre l illettrisme Article R2241-9 du code du travail (champ de la négociation triennale de branche en matière de formation et d apprentissage) La négociation triennale en matière de formation professionnelle et d'apprentissage porte notamment sur : ( ) 6 Les actions de formation à mettre en œuvre en faveur des salariés ayant les niveaux de qualification les moins élevés et, en particulier, ceux qui ne maîtrisent pas les compétences de base notamment pour faciliter leur évolution professionnelle
Les nouveaux outils de la loi du 5 mars 2014 à mobiliser pour développer la formation de base L objectif de la loi : Faire de la formation un levier pour sécuriser l emploi et favoriser la compétitivité des entreprises
Du côté des entreprises Un changement de logique : obligation de cotiser obligation de former Une responsabilisation plus forte des entreprises par rapport au maintien des compétences et de l employabilité des salariés «au regard notamment de l évolution des emplois, des technologies et des organisations» - Information renforcée du comité d entreprise - Entretien professionnel tous les 2 ans - Bilan de parcours tous les 6 ans Deux conséquences : - une obligation de financement direct dans le cadre du plan de formation - un droit pour tous les salariés à évoluer professionnellement tous les 6 ans état des lieux tous les 6 ans : une action de formation? un élément de certification? une progression salariale ou professionnelle? (pénalité de 100 h si deux de ces trois critères ne sont pas atteints dans les entreprises de + de 50 salariés)
L obligation d adaptation L Article L6321-1 du code du travail (élaboration du plan de formation et obligation d adaptation) L employeur assure l adaptation des salariés à leur poste de travail [ ]. Il peut leur proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu à la lutte contre l illettrisme Une jurisprudence constante Un enjeu majeur pour la lutte contre l illettrisme
La jurisprudence Application de l article L6321-1 du code du travail (élaboration du plan de formation et obligation d adaptation) La Cour de Cassation avait été saisie du cas de deux salariés en situation d illettrisme qui n avaient jamais bénéficié de formation de base. Elle a considéré que «le fait que les salariés n'aient bénéficié d'aucune formation professionnelle continue pendant toute la durée de leur emploi dans l'entreprise établit un manquement de l'employeur à son obligation de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, entraînant pour les intéressés un préjudice qu'il appartient au juge d'évaluer» (Cass. Soc., 2 mars 2010, 09-40.914, X et autres c/ société de la Tour Lafayette venant aux droits de la société des Hôtels Concorde Inédit)
Ce qu il faut retenir Logique d auto financement du plan de formation + Obligation d adaptation = Nécessité d amplifier l effort d information auprès des entreprises sur l illettrisme et sur les solutions qui existent «Il n y a pas que le compte personnel de formation dans la vie»
Du côté des personnes Le congé individuel de formation Le compte personnel de formation «les formations éligibles au compte personnel de formation sont les formations permettant d acquérir le socle de connaissances et de compétences défini par décret» La formation pour l obtention du socle ne peut pas être refusée par l entreprise La formation peut se tenir sur le temps de travail Ce droit nouveau ne se substitue pas mais s additionne à toutes les autres formes d intervention contre l illettrisme Le conseil en évolution professionnelle
Ce qu il faut retenir Mise en place d un droit individuel opposable à une formation de base + Renforcement des services liés à l orientation professionnelle + Bénéficiaires potentiels éloignés de la formation = Nécessité d outiller les acteurs du conseil en évolution professionnel pour qu ils puissent s adapter à la situation des personnes qu ils reçoivent
Zoom sur le socle de connaissances et de compétences professionnelles
Le socle est issu de la négociation collective : l ANI du 5 octobre 2009 - L'acquisition et l'actualisation d'un socle de compétences favorise l'évolution et les transitions professionnelles tout au long de la vie professionnelle - Ce socle complète le socle commun défini par l Education nationale (ce que chaque jeune doit maîtriser à la sortie de l école). - Les partenaires sociaux se sont réunis à plusieurs reprises sous l égide du Comité Observatoires et Certifications (issu du CPNFP) mais n ont pas pu se mettre d accord sur les contours de ce socle jusqu en 2014. - De 2009 à 2015, en l absence de définition des partenaires sociaux, beaucoup de branches professionnelles et d OPCA se sont saisis du RCCSP de l ANLCI pour définir le socle de connaissances et de compétences propres à leurs secteurs d activités.
l ANI du 14 décembre 2013 (article 12) Article 12. Formations éligibles au compte personnel de formation Les formations éligibles au compte personnel de formation permettent aux personnes d acquérir des compétences attestées (qualification, certification, diplôme), qui sont autant de repères professionnels sur le marché du travail. Ces formations constituent un levier déterminant pour faciliter la réalisation d un projet d évolution professionnelle, au sein ou en dehors de l entreprise, ou un projet d accès à l emploi. C est pourquoi les formations éligibles au compte personnel de formation sont obligatoirement des formations qualifiantes correspondant aux besoins de l économie prévisibles à court ou moyen terme et favorisent la sécurisation des parcours professionnels des salariés. Au titre du présent accord, une formation qualifiante s entend comme conduisant à : - une certification inscrite au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ; - un certificat de qualification professionnelle de branche (CQP) ou interbranche (CQPI) ; - une certification inscrite à l inventaire mentionné au sixième alinéa de l article L. 335-6 du Code de l éducation ; - le socle de connaissances et compétences mentionné au point 4.4 de l ANI du 5 octobre 2009.
Le socle est repris dans la loi du 5 mars 2014 Article L. 6323-6 du code du travail, premier alinéa : «Les formations éligibles au compte personnel de formation sont les formations permettant d acquérir le socle de connaissances et de compétences défini par décret». Article L.6324-1 du code du travail : «Les périodes de professionnalisation ont pour objet de favoriser par des actions de formation le maintien dans l'emploi de salariés en contrat à durée indéterminée, de salariés en contrat de travail à durée déterminée ( ). Les actions de formation mentionnées au premier alinéa sont : ( ) 2 Des actions permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret ;( )» Article L. 6121-2 du code du travail : «En application de l article L.121-2 du code de l éducation, la région contribue à la lutte contre l illettrisme sur le territoire régional en organisant des actions de prévention et d acquisition d un socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Une définition en deux temps Par les partenaires sociaux jusqu en mai 2014 - consultation de l ANLCI fin avril 2014 Dans le cadre du groupe quadripartite pour la préparation du décret - consultation de l ANLCI fin novembre et mi décembre
La définition du socle (décret du 13 février 2015) «L ensemble des connaissances et des compétences qu il est utile pour un individu de maîtriser afin de favoriser l accès à la formation professionnelle et son insertion professionnelle ( ). Ces connaissances et compétences sont également utiles à la vie sociale, civique et citoyenne de l individu.»
Ce qu il faut retenir au sujet du décret du 13 février 2015 Un ensemble de connaissances et de compétences qu un individu doit maîtriser afin de favoriser son évolution professionnelle (contexte professionnel) Les connaissances et compétences doivent également être utiles à la vie sociale, civique et culturelle de l individu Le socle fait l objet d une certification (recensement de droit à l inventaire) : référentiel des connaissances et des compétences + référentiel de certification pour évaluer les acquis (principes directeurs) Le niveau de sortie est articulé avec les degrés 2 et 3 (seuil de sortie de l illettrisme) Une évaluation des compétences déjà maîtrisées est prévue avant le démarrage de la formation Le COPANEF définit les modalités de délivrance de la certification (transparence de l information et qualité du processus) Le socle peut être complété par des actions mises en place par les conseils régionaux
Le contenu du socle (référentiel du COPANEF) La communication en français L utilisation des règles de base de calcul et du raisonnement mathématique L utilisation des techniques usuelles de l information et de la communication numérique L aptitude à travailler dans le cadre de règles définies d un travail en équipe L aptitude à travailler en autonomie et à réaliser un objectif individuel La capacité d apprendre à apprendre tout au long de la vie La maîtrise des gestes et postures, et le respect des règles d hygiène, de sécurité et environnementales élémentaires
Un déploiement supervisé par le COPANEF Une implication des branches Une implication des COPAREF Une double habilitation (cahier des charges du 22 avril 2015) : - habilitation des organismes chargés du positionnement et de la certification - habilitation des organismes chargés de la formation Un démarrage prévu en septembre 2015
La qualité de la formation
Améliorer la qualité des solutions proposées La qualité fait l objet d une attention particulière La responsabilité de s assurer de la qualité de la formation est confiée aux financeurs des actions Un projet de décret invite les financeurs à identifier sur une liste de référence, rendue publique, les prestataires dont ils se sont assurés de la capacité à mettre en œuvre des actions de qualité - soit dans le cadre de leur procédures internes d évaluation - soit par la reconnaissance d une certification ou d un label Le programme d échange des bonnes pratiques porté par l ANLCI L annuaire des organismes de formation intervenant dans l acquisition des compétences de base en entreprise accessible depuis le 30 avril 2015
La gouvernance de la formation professionnelle
Une gouvernance plus concentrée CNEFOP CREFOP COPANEF COPAREF Une clarification du rôle des régions dans la lutte contre l illettrisme La prévention et la lutte contre l illettrisme, une compétence partagée La prise en compte de cette question par les instances de gouvernance de la formation professionnelle Un pilotage de l action publique qui repose sur une concertation entre l Etat et le Conseil régional