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Table nationale sur la main-d œuvre infirmière Plusieurs pistes de solution sont avancées Par Emmanuelle Gril Après avoir tenu une rencontre par mois depuis septembre dernier, la Table nationale sur la main-d œuvre infirmière s apprête à remettre son rapport au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). À l origine de cette table : une démarche de planification de la main-d œuvre démontrant que des pénuries importantes pointaient à l horizon en matière de personnel infirmier. «Les nombreux départs à la retraite et l augmentation des besoins, conséquence du vieillissement de la population, sont les deux principaux facteurs de cette pénurie appréhendée dès 2010», fait valoir le directeur des ressources humaines de l AQESSS, Pierre Gingras. Dans cette perspective, le mandat de la Table était d examiner dès maintenant des mesures qui permettraient de pallier le manque de personnel, et ce, afin d éviter des ruptures de service. Selon Pierre Gingras, le rapport qui sera remis au MSSS répond tout à fait à cette description. Les propositions de la Table de travail, présidée par Francine Girard, doyenne de la Faculté de sciences infirmières de l Université de Montréal s articulent autour de deux grands axes. «Le premier, explique le directeur des ressources humaines de l AQESSS, est d assurer l utilisation optimale de la main-d œuvre, c est-à-dire d avoir recours à la bonne ressource au bon endroit. Le second est l attraction/rétention du personnel.» Trois secteurs à surveiller En ce qui concerne le premier volet, soit la réorganisation du travail, la Table préconise de s attaquer à trois secteurs en particulier : les soins à domicile, l hébergement et le bloc opératoire.» «La tendance, affirme Pierre Gingars, est à la non-institutionnalisation de la clientèle, afin que les gens demeurent dans leur milieu de vie. Le dernier budget provincial consacre d ailleurs 80 millions de dollars pour les personnes en perte

d autonomie liée au vieillissement. Si cela avait pour effet d augmenter les besoins en personnel infirmier, cela aggravera le problème de pénurie. Il faut donc revoir l organisation du travail afin d avoir davantage recours aux infirmières auxiliaires, aux préposés aux bénéficiaires ou aux auxiliaires familiales dans ce domaine, lorsque c est possible», fait-il valoir. Du côté de l hébergement (CHSLD), les besoins augmentent au rythme du vieillissement de la population. La Table préconise notamment la valorisation du rôle de l infirmière, ces professionnelles étant difficiles à recruter dans ce domaine. «C est en hébergement que l on utilise le plus de main-d œuvre indépendante et de temps supplémentaire, ce qui illustre bien les difficultés de recrutement», note le directeur de l AQESSS. Par ailleurs, quelques projetspilotes sont actuellement en cours sur le terrain pour revoir l organisation du travail dans ce secteur. Troisième champ d action privilégié, le bloc opératoire, où l on préconise l introduction (ou la réintroduction) d infirmières auxiliaires en service interne. Le service externe sera examiné dans un deuxième temps. «Un projet pilote est en cours à l Hôpital Maisonneuve-Rosemont. De la formation d appoint est également prévue pour les infirmières auxiliaires qui vont travailler au bloc», souligne Pierre Gingras. Il ajoute que cette démarche se fait en parallèle avec celle de la Fédération des médecins spécialistes, laquelle a négocié une entente avec le gouvernement. «Dans le cadre de cette entente, on vise notamment l augmentation de la productivité. Il est question d augmenter de 5 % l efficacité et le nombre d interventions. Nous effectuerons donc l introduction d infirmières auxiliaires au bloc opératoire de concert avec cette démarche.» Un quatrième champ d intervention est également dans la ligne de mire de la Table nationale sur la main-d œuvre infirmière, soit les soins critiques (urgences, soins intensifs, néonatalogie et grands brûlés), où prévaut un problème important de stabilisation des équipes. On vise une proportion de 60 % de personnel à temps complet, celle-ci étant d un peu moins de 50 % actuellement. «La priorité, avance le porte-parole de l AQESSS, est mise sur les horaires de travail plus

flexibles, en particulier en ce qui concerne le soir et la nuit, et sur un programme d encadrement et de soutien clinique du personnel. Dans ce contexte, on recommande que le supérieur immédiat soit davantage disponible à son équipe et que les nouvelles recrues soient soutenues par leurs pairs.» Même si les modalités ne sont pas encore arrêtées, on pense par exemple à jumeler du personnel possédant cinq ans et moins d expérience avec des mentors plus âgés. Cela pourrait également constituer une façon de prolonger la vie active des employés sur le point de prendre leur retraite. L introduction d un programme de formation continue sur le temps de travail fait également partie des stratégies proposées. Projets-pilotes Pour évaluer et tester ces propositions sur le terrain, un certain nombre de projets-pilotes sera mis en place concernant l introduction du soutien clinique, d horaires flexibles et de formation continue. Trois ou quatre projets seront développés dans le secteur des soins critiques en particulier. «Pour ce qui est du programme de soutien clinique, les projets-pilotes devront d abord s appliquer le soir et la nuit. Les gens commencent souvent leur carrière avec ce type d horaires, et cela constitue donc tout un défi de trouver des personnes plus expérimentées donc avec des horaires de jour qui accepteront de les coacher durant ces périodes, explique Pierre Gingras. Il faut, dit-il, trouver une façon d attirer et de garder notre personnel, car les jeunes se découragent et s en vont.» Dans les secteurs où l on préconise la réorganisation du travail, on souhaite également maximiser l utilisation de la législation, notamment celle de la Loi 90 qui permet au médecin de déléguer certains de ses actes à l infirmière. Un petit groupe de travail sera mis en place sur cet aspect en particulier. «Nous pensons que le soutien clinique, la formation continue et la flexibilité des horaires aideront à relever le défi de la main-d œuvre», affirme convaincu le directeur des ressources humaines de l AQESSS. C est que dans le milieu hospitalier anglophone, où la rotation des quarts de travail prévaut, la rétention

du personnel semble plus facile. «Dès son entrée dans le réseau, l employé est stabilisé le plus possible. Du côté francophone en revanche, on débute traditionnellement sa carrière avec des horaires variables et des quarts de travail de soir et de nuit. Ce système en décourage plusieurs qui finissent par quitter le réseau au bout de quelques années. C est la raison pour laquelle nous aimerions introduire un mode de gestion axée sur la rotation : le personnel fait un certain nombre de quarts de jour et de soir ou de jour et de nuit, ce qui permettrait ainsi de partager les inconvénients.» L ensemble des recommandations de la Table sera sous peu soumis au ministre de la Santé et des Services sociaux, lequel décidera ensuite des mesures concrètes qui seront prises. Une Table représentative Présidée par Francine Girard, doyenne de la Faculté de sciences infirmières de l Université de Montréal, la Table met à contribution des représentants des agences, des ordres professionnels (OIIQ et OIIAQ), du Conseil du Trésor, du secteur de l éducation, des quatre syndicats (FIQ, CSN, FTQ, CSQ), ainsi que de l AQESSS. Robert Garon, chef de projet mandaté par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) sur la question du renouvellement de la maind œuvre y siège également, de même que d autres représentants du MSSS. Un pas dans la bonne direction Le 12 mars dernier, avant même que la Table nationale sur la main-d œuvre infirmière ne dépose son rapport, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) annonçait l injection de 1,2 million de dollars pour soutenir la réorganisation du travail infirmier dans trois établissements de santé de la région montréalaise, soit l Hôpital Maisonneuve-Rosemont, le CSSS du Sud-Ouest- Verdun et le CSSS Ahuntsic et Montréal-Nord.

Les projets-pilotes déployés se dérouleront sur une période de douze mois et viseront spécifiquement une meilleure organisation du travail et la création de postes offrant une plus grande stabilité aux équipes professionnelles en place. À l Hôpital Maisonneuve-Rosemont, 500 000 $ seront ainsi accordés aux équipes des urgences et de l hémodialyse pour l introduction d infirmières auxiliaires et le développement d une fonction de triage avancée. Les deux autres établissements se verront respectivement attribuer 350 000 $ afin de revoir leur organisation du travail en matière de soins de longue durée, favoriser l utilisation optimale des compétences disponibles et mettre en place un programme de soutien clinique. Le MSSS souhaite de plus que ces établissements explorent la possibilité d ajouter des infirmières auxiliaires et des préposés aux bénéficiaires dans les unités de soins pour améliorer la stabilité des équipes et diminuer le recours aux agences privées.