personnel et risque pour le nouveau né Daniel Floret Université Claude Bernard Lyon1 Conflits d intérêt



Documents pareils
GUIDE PRATIQUE N 1 HERPES ASSOCIATION HERPES. Agissons contre l herpès

Apport de la biologie moléculaire au diagnostic des parasitoses

ARTICLE IN PRESS. Article original. Modele + MEDMAL-2842; No. of Pages 5

Stratégies de dépistage des bactéries multirésistantes. Qui? Pourquoi? Comment? Après? L exemple des MRSA

Streptocoque B :apports des tests en fin de grossesse, nouvelles propositions.

La Responsabilité Civile De L anesthésiste

PRISE EN CHARGE D'UN PATIENT ATTEINT OU SUSPECT DE CLOSTRIDIUM DIFFICILE

Vaccinations pour les professionnels : actualités

HEPATITES VIRALES 22/09/09. Infectieux. Mme Daumas

Résumé des modifications intervenues : simplification et clarification des actions descriptives

INFORMATIONS pour le médecin qui contrôle et complète le formulaire

POURQUOI L HYGIENE HYGIENE = PROPRETE HYGIENE = PREVENTION DES INFECTIONS COMMUNAUTAIRES ET DES INFECTIONS ASSOCIEES AUX SOINS

STOP à la Transmission des microorganismes!

Laurence LEGOUT, Michel VALETTE, Henri MIGAUD, Luc DUBREUIL, Yazdan YAZDANPANAH et Eric SENNEVILLE

Incertitude et variabilité : la nécessité de les intégrer dans les modèles

Fièvre sans foyer chez l enfant de moins de 3 mois

Devenir des soignants non-répondeurs à la vaccination anti-vhb. Dominique Abiteboul - GERES Jean-François Gehanno Michel Branger

Infection à CMV et allogreffe de cellules souches hématopoïétiques : Expérience du Centre National de Greffe de Moelle Osseuse, Tunis.

Annales du Contrôle National de Qualité des Analyses de Biologie Médicale

Statistiques Canadiennes sur le Cancer, et HMR sur le poumon

Le Don de Moelle Ça fait pas d mal!

Club Santé. «Vaccination : quelle évolution pour une meilleure prévention?» Dimanche 16 octobre 2005

Traitements néoadjuvants des cancers du rectum. Pr. G. Portier CHU Purpan - Toulouse

Il est bien établi que le réseau d eau hospitalier peut

Surveillance épidémiologique : application à la détection et la prédiction des épidémies

Y a-t-il une place pour un vaccin thérapeutique contre l hépatite B? H. Fontaine, Unité d Hépatologie Médicale, Hôpital Cochin

INTERFERON Traitement adjuvant du mélanome à haut risque de récidive. Dr Ingrid KUPFER-BESSAGUET Dermatologue CH de quimper

Existe t il des effets pervers à l identification du portage de BMR?

Les formes cliniques. Maxime Breban

Logiciels de gestion sur mesure Etude et développement. Logiciel de suivi des évènements indésirables dans les établissements hospitaliers

PSDP et usage des pénicillines - ESAC

Comment se déroule le prélèvement? Il existe 2 modes de prélèvements des cellules souches de la moelle osseuse:

VACCINS ANTIPNEUMOCOCCIQUES

Pharmacovigilance des nouveaux anticoagulants oraux

La raison d être des systèmes d information

Epidémiologie appliquée aux sciences vétérinaires DES DAOA DES - DEA

Listes de fournitures du secondaire pour la rentrée

Évolution des pratiques vaccinales : 3. vaccination après la grossesse

Contenu de la formation PSE1et PSE2 (Horaires à titre indicatif)

Don de moelle osseuse. pour. la vie. Agence relevant du ministère de la santé. Agence relevant du ministère de la santé

Références et partenaires :

1 ère manche Questions fermées

Vertiges et étourdissements :

COMMUNIQUÉ DE PRESSE. Exposition temporaire «Très toucher»

Arthralgies persistantes après une infection à chikungunya: évolution après plus d un an chez 88 patients adultes

Présentation des intervenants et modérateurs

Les Infections Associées aux Soins

complémentaire santé?

Danielle D Amour, inf. Ph.D. IUFRS 24 février 2011

Notre système. Immunitaire

Infiltrats pulmonaires chez l immunodéprimé. Stanislas FAGUER DESC Réanimation médicale septembre 2009

Gestion des épidémies en FAM et MAS. 2 ère réunion annuelle FAM/MAS 20 mars 2015

TUBERCULOSE Nouveautés 2009

UE11 Phonétique appliquée

Innovations thérapeutiques en transplantation

Les anticoagulants. PM Garcia Sam Hamati. sofomec 2008

Communiqué de presse. Créée il y a 25 ans, l Association Charles Nicolle devient «Fondation reconnue d utilité publique»

Prise en charge de l embolie pulmonaire

Tests de détection de l interféron γ et dépistage des infections tuberculeuses chez les personnels de santé

MINISTERE DE LA SANTE ET DES SOLIDARITES DIRECTION GENERALE DE LA SANTE- DDASS DE SEINE MARITIME

Cas clinique Enquête autour d un cas IDR vs IGRA Pr Emmanuel Bergot

L entretien en radiologie conventionnelle. Comment procède t on? Radiologie conventionnelle. Quel mobilier et matériel?

LES ACCIDENTS D EXPOSITION AU RISQUE VIRAL Prise en charge & Prévention

RÈGLE N 1 : SAUVEGARDEZ VOS DONNÉES

Actes requérant le concours des autorités ou strictement personnels selon le nouveau droit

SUTURE D EPISIOTOMIE ET PRISE EN CHARGE DE LA CICATRICE; RECOMMANDATIONS AUX PATIENTES

Prophylaxie infectieuse après exposition professionnelle

FICHE D URGENCE * ECOLE JEAN MOULIN - LE BARCARES - Nom - Prénom de l enfant : Classe :.Date de naissance :..

Le conseil d enfants La démocratie représentative à l école

French Version. Aciclovir Labatec 250 mg (For Intravenous Use Only) 02/2010. Product Information Leaflet for Aciclovir Labatec i.v.

CONTROVERSE : IDR OU QUANTIFERON LORS D'UN CONTAGE EN EHPAD?

Pour une meilleure qualité de vie au travail

GESTION DU RISQUE INFECTIEUX D ORIGINE ALIMENTAIRE DANS LES UNITES DE SOINS

REHABILITATION DE LA FRICHE INDUSTRIELLE DE L ESTAQUE. Surveillance médico-professionnelle des entreprises intervenantes

Laetitia SELLAM. Mémoire pour l obtention du DES de pédiatrie. CHU Clermont Ferrand. 9 octobre 2009

Quoi de neuf dans la prise en charge du psoriasis?

RECOMMANDATIONS OFFICIELLES - DEFIBRILLATEURS AUTOMATISES EXTERNES

Intérêt diagnostic du dosage de la CRP et de la leucocyte-estérase dans le liquide articulaire d une prothèse de genou infectée

ÉCOLE : cycle 3 (CM2) Sciences de la vie et de la Terre S INFORMER : organiser l information Classer, trier, assembler, grouper, distinguer

ASSURANCE RESPONSABILITE CIVILE MEDICALE QUESTIONNAIRE GENERAL

Rougeole, Oreillons Rubéole et Coqueluche

Indications de la césarienne programmée à terme

psychologique Quels enfants entrent dans le système scolaire européen?

Qu'est-ce qu'un virus?

Charges virales basses sous traitement: définition impact virologique. Laurence Bocket Virologie CHRU de Lille

LES CONTRATS EN AVICULTURE. Comité Volailles FranceAgriMer, 31 janvier

L ANIMATEUR D ATELIER D ÉCRITURE DOIT S ASSUMER CRÉATEUR Par Michel DUCOM Conférence de Barcelone, 2008.

H A C C P. Hazard Analysis, Critical Control Point. Analyse des dangers, maîtrise des points critiques. Programme de formations.

TRAUMATISME CRANIEN DE L ENFANT : conduite à tenir?

Christian TREPO, MD, PhD

Contrôle difficile non prévu des voies aériennes: photographie des pratiques

CONCOURS DE L INTERNAT EN PHARMACIE

Le traitement conservateur des tumeurs malignes des membres a largement remplacé les amputations

Organisation du suivi dans le cadre d un réseau

Incontinence anale du post-partum

Le traitement du paludisme d importation de l enfant est une urgence

Le référentiel professionnel du Diplôme d Etat d Aide Médico-Psychologique

Les responsabilités à l hôpital

Latitude N Longitude E Altitude 376 m RÉSUMÉ MENSUEL DU TEMPS DE JANVIER 2014

CEPHALEES POST-BRECHE DURALE. Post Dural Puncture Headache (PDPH)

Transcription:

Herpès labial de la mère/du personnel et risque pour le nouveau né Daniel Floret Université Claude Bernard Lyon1 Journée du Réseau Mater. Lyon, 16 octobre 2014 Conflits d intérêt Déclaration Publique d Intérêt consultable sur www.hcsp.fr Pas de conflit d intérêt sur ce thème 1

L hépatite fulminante à virus herpes chez l enfant. Lachaux A, & al. Pédiatrie 1986; 41: 489-03 Né à terme, grossesse et accouchement normaux 3 semaines: hospitalisation pour vomissements. Sténose de pylore. Intervention J5 post op: fièvre. Tt ATB. Persistance de la fièvre J8 post op: transfert en réanimation: état de choc, hypoglycémie, gros foie Biologie: insuffisance hépatocellulaire (TP 10%, F V 5%, fibrinogène indosable). Cytolyse massive (TGO 4000 UI/l, TGP 1300UI/L) Décès en quelques heures L hépatite fulminante à virus herpes chez l enfant. Lachaux A, & al. Pédiatrie 1986; 41: 489-03 Autopsie: atteinte pluriviscérale: poumon, foie, surrénales Nécrose hépatique massive Inclusions virales Culture HSV1 Anamnèse: herpès récurrent chez la mère. Stomatite vésiculeuse chez un frère la veille de l hospitalisation 2

Herpès néonatal Trois formes: Localisée: peau, bouche, yeux (45%) Atteinte du SNC (30%) Généralisée (25%): une des formes les plus graves de l infection néonatale: mortalité 85% en l absence de traitement Surtout HSV2, mais HSV1 en augmentation (20% et jusqu à 40% selon les pays) Incidence 1/ 3 000 à 1/ 20 000 naissances vivantes Acquisition, classiquement: À l accouchement 85% Intra utérine transplacentaire: 5% Post natale: 10% mais provenance de ces chiffres??? Kimberlin DW. C. Neontal Herpes Infection. Clin Microbiol Rev 2004; 17: 1-13 Pediatrics 1979; 63: 480-2 24 nourrissons rapportés, 66% décédés Transmission d enfant à enfant: Francis DP, & al. Am J Dis Child 1979: 4 cas en 2 mois (HSV2). Trois d origine maternelle. 1 cas (virus identique) transmission probable de Nné à Nné par les mains du personnel Linnemann CC, & al. Lancet 1978: 2 cas dans une nursery: 1 probablement contaminé par le père (herpes labial), le second avec même virus mais mode de transmission inconnu Transmission d adulte à enfant: 13 cas transmission par la mère: herpès oral 9 cas transmission par adulte autre: personnel hospitalier habituellement herpès labial, grand-mère, soeur 3

31 cas d herpès néonatal: Pediatrics 1984; 73: 188-93 Infection génitale récurrente mère: 26% Primo infection maternelle: 29% 3 orales 6 génitales Mère non à l origine: 9,6% (2 en contact avec un adulte ayant des infections récurrentes) Source de l infection incertaine: 35,5% Transmission familiale n impliquant pas la mère Nné forme disséminée à 7 jours de vie. Père herpès labial récurrent (fin d évolution à la naissance). Souches HSV1 identiques chez père et enfant. Yeager A, & al. J Pediatr 1983; 103: 905-7 Nné 9 jours: forme disséminée (décès). Père herpès récurrent a J6 post naissance. Souches HSV1 identiques. Douglas J, & al. J Pediatr 1983; 103: 908-10 Nné de 6 jours. Forme disséminée. Père herpes récurrent dont poussée au moment de la naissance. Mère ulcèration du sein à J3 (herpes+). Souches HSV1 identiques chez l enfant le père et la mère. Van der Wiel H, & al. Eur J Pediatr 1985; 144: 56-7 4

gingivostomatite Les infirmières ont présenté un panaris herpétique An outbreak of herpes simplex virus type1 in an intensive care nursery. Hammerberg O, & al. Pediatr Infect Dis 1983; 2: 290-4 Prématuré 1800g, MMH, décès inattendu à J12. Culture LCR: HSV1 10 jours plus tard, 3 enfants (40, 69 et 11 jours) vésicules cutanéo-muqueuses. HSV1 4 souches identiques Origine maternelle exclue pour les 4 cas Source de l épidémie non identifiée. Probable transmission manuportée 5

Épidémie 1 Périnatal Hospital Sapporo Cas 1: admission i J3 fièvre. J10 hémorragies. Décès J11. HSV1 Cas 2: 2a3m plus tard: naissance même service. J4 fièvre puis atteinte multiviscérale. Décès J13. HSV1 Cas 3: 1a6m plus tard: naissance même service. J7 vésicules, guéries à J21. HSV1 Les 3 souches de sous type G (très rare) sont identiques et proviennent de la même source Interprétation: un membre du personnel (non identifié) ayant des réactivations récurrentes a contaminé les 3 enfants Épidémie 2: NICU de la préfecture d Aichi Cas n 1: mère herpes génital à l accouchement. e A J6 mis en berceau chauffant. Décès à J8. HSV1 Cas n 2: né 2 jours après le décès de (1). 63h après le décès de (1), mis dans le même berceau chauffant non désinfecté. Décès à J12. HSV1 Cas n 3: mis en berceau chauffant à 2 m de celui de (2). A J11, vésicules. HSV1 Les 3 souches sont identiques Interprétation: contamination de (2) par le berceau chauffant. (3) a été contaminé par le personnel 6

Un mode de transmission original 5 hôpitaux du centre d Israël. Période: janvier 2001- décembre 2007 22 cas d herpès néonatal Les 7 cas à début tardif (J14- J19) ont eu une circoncision rituelle àj8 Lésions du pénis. 2 formes neurologiques Le rabbin, traditionnellement suce la plaie Infection herpétique en France Lepoutre A, & al. BEH 2013; 42-43: 526-34 7

Infections herpétiques en France Séroprévalence de l herpès chez l adulte en France: HSV1: 67% HSV2: 17,2% 2002; 50: 425-35 L herpès labial Durée: 8 à 15 jours Excrétion virale: 1 semaine en primo infection, 3-4 jours pour les récurrences Récurrences 1à 6/an Facteurs favorisants les récurrences: Infections Fièvre Soleil Froid Traumatismes Règles 8

Excrétion de HSV à partir d un herpès labial Adultes porteurs d un herpès labial Virus détecté Dans la cavité buccale: 78% Sur les mains: 67% Survie des virus: Sur la peau: 2 heures Sur les vêtements: 3 heures Sur le plastique: 4h Turner R, & al. Shedding and survival of herpes simplex virus from «fever blisters». Pediatrics 1982; 70: 547-9 Excrétion virale asymptomatique Prélèvements salivaires chez 384 membres du personnel asymptomatiques ti d un service d obstétrique en Australie HSV isolé chez 9,6% Contraste avec la rareté de l infection néonatale à HSV en Australie Hatherley LI, & al.med J Austral 1980; 6: 273-5 9

Au total L infection néonatale à virus herpès de contamination post natale existe indiscutablement L herpès labial est le plus souvent la lésion responsable de la contamination. La contamination se fait par contact direct avec la lésion ou les sécrétions. La fréquence exacte est difficile à préciser mais elle semble très rare En contraste, les conséquences sont souvent dramatiques Les cas les mieux documentés concernent des transmissions i à partir de la famille La mère semble plutôt moins souvent en cause que le père, les enfants de la fratrie ou les autres membres de la famille Nombre de case reports mentionnent que la personne porteuse d une lésion herpétique a embrassé le nouveau né. 10

Faut-il exclure des soins un agent porteur d un herpès? Les infections néonatales à HSV de transmission nosocomiale sont anecdotiques Le rôle du personnel est plus souvent supposé que démontré, laissant supposer une part importante des excrétions asymptomatiques d HSV dans la contamination Le bénéfice attendu d une telle mesure en matière de cas évités est infime au regard des perturbations et du coût engendrés Mesures de contrôle Pas d indication d exclusion de collectivités pour les personnes présentant un «bouton de fièvre» ou une gingivo stomatite herpétique Haut Conseil de la Santé Publique. Guide des conduites à tenir en cas de maladies infectieuses dans une collectivité d enfants ou d adultes. 28 septembre 2012 Isolement: pour un Nné présentant une infection herpétique avec lésions cutanées/ muqueuses: application des précautions contact 11

Personnel de maternité/ néonatologie présentant des lésions herpétiques Recouvrir les lésions, ne pas les toucher et renforcer les mesures d hygiène des mains Les personnes présentant des récurrences herpétiques doivent être averties d une transmission possible durant une récurrence asymptomatique et incitées à une exigence particulière pour l hygiène des mains. En cas de panaris herpétique: porter des gants et ne pas prendre en charge de nouveau né. Prévention de la transmission intra familiale Informer les personnes de la famille atteintes de lésions d herpès du risque de transmission Demander d éviter tout contact entre le nouveau né et les lésions herpétiques Les personnes porteuses d herpès labial (ou de gingivo stomatite) ne doivent pas embrasser l enfant Celles atteintes d un panaris herpétique ne doivent pas le toucher 12

En Conclusion L infection néonatale à virus herpétique de transmission post natale est aussi rare que grave Des épidémies nosocomiales ont été rarement rapportées, le personnel pouvant en être à l origine L origine de la contamination est le plus souvent le «bouton de fièvre» La prévention consiste à éviter le contact du nouveau né avec les lésions d herpes et un renforcement de l hygiène des mains. 13