Evaluation et explorations complémentaires du syndrome de vessie douloureuse Alain Ruffion Urologie Lyon-Sud
Première étape: affirmer le diagnostic de vessie douloureuse
Critères «!historiques!» (NIDKK/NIH) (I) Critères d inclusion Au moins un des 2 critères suivants sur la cystoscopie Pétéchies diffuses (> 10 par quadrant) dans au moins 3 quadrants Ulcère de Hunner Au moins un des symptômes suivants : Douleurs vésicales Impériosités mictionnelles
Critères «!historiques!» (NIDKK/NIH) (II) Critères d exclusion Cliniques: Âge < 18 ans Pollakiurie diurne < 8 ou Pollakiurie nocturne < 2 Symptômes de durée < 9 mois Symptômes améliorés par antibiotiques, anti-infectieux urinaires, anticholinergiques, antispasmodiques Urodynamiques: Capacité vésicale > 350 ml (sans anesthésie) Absence d hypersensitivité pour 150 ml de sérum ou 100 ml de CO2 remplis à une vitesse de remplissage entre 30 et 100 cc/minutes Absence de contraction vésicale non inhibée à vitesse de remplissage moyenne. Autres diagnostics: Infection urinaire ou prostatique dans les 3 mois précédents les symptômes Herpès génital ou vaginite Diverticule de l urètre Cancer de l utérus, vagin, urètre de < 5 ans Traitement par cyclophosphamide, cystite chimique, tuberculeuse ou radique Tumeur de vessie Calcul de vessie ou du bas uretère
Critères NIDKK/NIH Avantage théorique: meilleure «!standardisation!» des patients Problème: près de 60% des patients consultant pour vessie douloureuse n entrent pas dans ces critères diagnostics, alors qu ils ont une plainte cohérente avec le diagnostic de vessie douloureuse Gillenwater JY et al (1988). J Urol, 140: 203-6 van de Merwe, JP et al. (2008). Eur Urol, 53: 60-7
Définition 2009 vessie douloureuse/cystite interstitielle ESSIC Syndrome de vessie douloureuse: Douleur/gêne/pesanteur pelvienne en relation avec le remplissage vésical depuis plus de 6 mois Et au moins un symptôme urinaire (pollakiurie diurne ou nocturne ) En l absence d autres pathologies vésicale Sous groupe: Anomalies cystoscopiques van de Merwe, JP et al. (2008). Eur Urol, 53: 60-7
van de Merwe, JP et al. (2008). Eur Urol, 53: 60-7
Evaluation des critères ainsi définis semble permettre une sélection correcte des patients Mouracade et al: N=156 Etude d une population «!étiquetée SVD!» sur les critères NIH/NIDKK 89% des patients correspondent à la nouvelle définition Mouracade, P et al. (2008). Prog Urol, 18: 674-7
Evaluation d une vessie douloureuse Phase initiale=affirmer le syndrome de vessie douloureuse Affirmer et quantifier la douleur ou l inconfort (EVA 0 à 10) Affirmer le siège vésical des douleurs: Augmentent avec le remplissage vésical Aggravées par certains aliments S améliorent avec la miction Warren, JW et al. (2008). Urology, 71: 444-8 Fenton, BW et al. (2008). J Minim Invasive Gynecol, 15: 601-4
Warren, JW et al. (2008). Urology, 71: 444-8 Etude cas témoin (NP3) sur deux cohortes de femmes suivies pour vessie douloureuse (n=428, cohortes EPIC/ICDB) 97% des patientes avaient 1, 2 ou 3 de ces symptômes
Rechercher des signes associés consécutifs à la douleur Ces signes sont souvent associés mais non indispensables Différencier du Syndrome d hyperactivité vésicale (urgenturie, pollakiurie diurne et/ou nocturne du fait de la crainte d avoir des fuites d urine) Envies impérieuses d uriner pour éviter la DOULEUR Pollakiurie consécutive à la DOULEUR
Evaluer un(e) patient(e) avec une vessie douloureuse
Outils diagnostics disponibles en 2009 Aucun outil d évaluation clinique spécifique scientifiquement validé en Français: Catalogue mictionnel signalant les douleurs EVA Deux questionnaires validés pour le diagnostic et le suivi: PUF et O Leary Sant Questionnaires d évaluation d amélioration globale posttraitement Questionnaires de qualité de vie Travail d élaboration d un outil utilisable en clinque quotidienne dédié à la vessie douloureuse nécessaire Fenton, BW et al. (2008). J Minim Invasive Gynecol, 15: 601-4 Kushner, L et al. (2006). J Urol, 176: 587-92
Pain Urgency Frequency symptom scale (PUF)
O Leary/Sant Questionnaire Mouracade, P et al. (2008). Prog Urol, 18: 418-25
Affirmer le syndrome de vessie douloureuse Autres syndromes Rechercher signes urinaires associés Rechercher Autres pathologies Irradiation, Trts toxiques pour la vessie (cyclophosphamide, )endométriose, lithiase urinaire, prostatite, infections génitales, pathologie neurologique, pathologie psychiatrique... Examen clinique Herpes, sténose/diverticule de l urètre, prolapsus, tumeur gynécologique, atteinte nerf pudendal, autre douleur périnéale Bilan para-clinique
Examens paracliniques dans le cadre du syndrome de vessie douloureuse BU ± ECBU+compte d Addis: premier examen à réaliser Hématurie: tumeur, CE, lithiase Pyurie sans bactériurie: rechercher tuberculose, lithiase, tumeur Si! : en théorie doit faire rediscuter le diagnostic Moins de 7% des patientes avec SVD ont des infections urinaires récurrentes En revanche, dg d IU avec ECBU! dans près de 1/3 des cas initialement Stanford, E et al. (2007). Int Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct, 18: 551-4 Warren, JW et al. (2008). Urology, 71: 1085-90
Urètro-Cystoscopie et cytologie urinaire Recherche d une tumeur vésicale, lithiase, corps étranger, sténose/diverticule urètre Ne pas hésiter à répéter l examen tous les deux-trois ans Critères diagnostics de cystite interstitielle Douleur remplissage/amélioration vidange Glomérulations Ulcère de Hunner ("5%)
Glomérulations
Ulcère de Hunner
Hydrodistension: obligatoire ou non? Hydrodistension courte recommandée initialement (2*2 min), mais rarement évaluée Ottem et al : N=82 Pas de différence diagnostique ou pronostique entre groupes avec/sans hydrodistension courte En revanche, amélioration chez 50% des patients «!hydrodistendus!» pendant 2 semaines Intérêt pronostic pour effet bénéfique de l hydrodistension «!vraie!»? Ottem, DP et al. (2005). Urology, 66: 494-9
Biopsies de vessie: obligatoires ou non? Cytologie urinaire: VPN " 1 00% (et variable suivant l examinateur). Les biopsies de vessie sont donc importantes pour affirmer l absence de tumeurs de vessie: logiques si un test d hydrodistension courte est prévu Pas de preuves histologiques formelles de cystite interstitielle
Test de sensibilité au KCl Principe: mise en évidence d une anomalie de la perméabilité capillaire chez les patients porteurs d un SVD/CI Déroulement pratique: Instillation de 40 ml de NaCl laissé quelques minutes dans la vessie. EVA Instillation de 40 ml de KCl (0,4 M) laissé quelques minutes dans la vessie. EVA Test «!positif!» si EVA # 2
Faut-il faire le test au KCl en routine? Intérêt diagnostique? Non: Le test peut être négatif chez 27 à 39% des patients avec symptômes A l inverse, peut être positif jusqu à 50% des cas chez des patients ayant un diagnostic autre que SVD/CI Sairanen, J et al. (2007). Neurourol Urodyn, 26: 267-70 Chambers et al (1999). J Urol, 162: 699-701 Gregoire et al (2002). J Urol, 168: 556-7 Hanno et al (2005). Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct, 16: 428-9
Faut-il faire le test au KCl en Intérêt pronostic? Non: routine?(2) Aucune étude n ayant démontré une efficacité supérieure de certains traitements en fonction de la sensibilité au test En revanche, variation de réponse objective retrouvée en cas de réponse clinique à la cyclosporine, intérêt potentiel dans essais cliniques
Imagerie Nécessaire pour les diagnostics différentiels TDM pelvien: permet d éliminer lithiase du bas appareil, tumeurs pelviennes IRM pelvienne: Plus opérateur dépendant Recherche diverticules de l urètre UCRM: De moins en moins souvent proposée
Bilan urodynamique Faisait partie du bilan nécessaire pour le diagnostic dans le cadre des critères NIH/NIDKK Inutile et pénible en standard pour les patients actuellement Capacité vésicale maximum et moyenne «!physiologiques!» mieux évaluées sur le catalogue mictionnel Intérêts: Dans certains cas pour le diagnostic différentiel hyperactivité détrusorienne Pronostic pour certaines modalités thérapeutiques du futur (toxine botulique??)
En conclusion Le terme de «!cystite interstitelle!» doit être progressivement abandonné pour celui de syndrome de vessie douloureuse Un outil d évaluation clinique fiable et permettant le bilan initial, le suivi et la réponse des patients paraît important à établir Avenir: marqueurs d inflammation urinaire permettant de mieux identifier des sous-groupes de patient et ainsi d avoir des programmes thérapeutiques mieux ciblés?