«PROBLEMATIQUE DE LA MORTALITE ET DEFIS DU CONTROLE DES ASSURANCES EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE: CAS DE LA ZONE CIMA»



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Transcription:

0 CONGRES INTERNATIONAL DES ACTUAIRES Du 30 Mars au 04 Avril 2014 Washington DC, USA *********************** «PROBLEMATIQUE DE LA MORTALITE ET DEFIS DU CONTROLE DES ASSURANCES EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE: CAS DE LA ZONE CIMA» *********************** Thomas YEBOUET, Commissaire-contrôleur en chef à la CIMA Ousmane LAGUIDE, Commissaire-contrôleur en chef à la CIMA Raoul Gabin DONESSOUNE, Commissaire-contrôleur à la CIMA Luc NOUBISSI, Commissaire-contrôleur à la CIMA

1 ABSTRACT... 2 1 PRESENTATION DE LA CIMA... 3 1.1 HISTORIQUE ET ORGANES... 3 1.2 QUELQUES DONNÉES CHIFFRÉES DE L ESPACE CIMA EN 2012... 4 1.3 PRINCIPE DE SPÉCIALISATION INSTAURÉ PAR LA RÉGLEMENTATION CIMA ET ÉTENDUE DE L'USAGE DE LA TABLE DE MORTALITÉ... 5 2 CONSTRUCTION ET MISE EN ŒUVRE DES NOUVELLES TABLES DE MORTALITE... 6 2.1 COLLECTE ET EXPLOITATION DES DONNÉES... 6 2.2 CONSTRUCTION DES TABLES DE MORTALITÉ... 8 2.3 IMPACT DES NOUVELLES TABLES DE MORTALITÉ SUR LE PROVISIONNEMENT... 9 2.4 LE PROCESSUS DE SUIVI DES NOUVELLES TABLES DE MORTALITÉ... 9 3 DEFIS ET PERSPECTIVES... 10

2 ABSTRACT ICA 2014 LEARN, INTERACT, GROW Mortality Issues and Regulatory Challenges In Sub-Saharan Africa (CIMA Region) Abstract: CIMA (Conference Interafricaine des Marches d Assurances) is an International Organization in charge of Regulating the Insurance Industry within fourteen countries in Africa. Created in 1992, the Institution appears today as a great example of a successful inclusion experience among countries. All the State members are developing countries with very limited actuarial experience. The regulator inherited the laws and technical support from some western countries, leaded by France. For many years, Life Insurance companies have been forced to use an old French mortality table (PM 60-64) for pricing and reserving. In September 2012, CIMA has issued new mortality tables (CIMA H and CIMA F) with data from some Insurance Companies of the Region. These new tables that come into force in January 2013 will definitely carry out some critical challenges for the whole industry. Some critics are already registered concerning the inadequacy of these tables in such a multi-cultural context. Although the initiative is very worthy, it raises some important issues about the ability of the African markets to develop their own tools of Risks Assessment and Management. Moreover, the need for a strong actuarial expertise is evident in this Region. A solid partnership between the Regulator (CIMA) and independent actuaries could enable the mandatory of some products like the Whole Life Insurance for Microinsurance, similar to Car Insurance for Non-Life Insurance Thus, there is a huge room of opportunities for the actuarial profession in Africa, the new Eldorado. The Regulation of the Insurance must be more intrusive taking into account Models validation by the supervisor, setting Standards of practices, profit testing to prevent corporate insolvency or systemic crisis, regulating the insurance business on the Internet

3 1 PRESENTATION DE LA CIMA 1.1 Historique et organes La CIMA regroupe plusieurs Etats d Afrique de l ouest et d Afrique centrale dont le point commun est d avoir été des colonies françaises. En effet avant les indépendances intervenues en 1960, l assurance dans les Etats africains était essentiellement le fait des entreprises françaises qui garantissaient les investissements de la métropole dans les colonies. A l avènement des indépendances, la sauvegarde de ses investissements a amené la France à regrouper ces colonies afin de conclure avec elles une convention qui devrait lui permettre d avoir, d une part un interlocuteur unique et d autre part, une influence suffisamment forte sur le secteur des assurances pour atteindre son objectif de sauvegarde de ses intérêts. Ainsi est née la CICA en 1962 regroupant 14 Etats dont le siège se trouvait initialement en France. Son objectif primordial était de parvenir à une législation unique des assurances. Plus tard, en 1992, cet objectif sera atteint après une révision profonde de la convention marquée par le passage de la CICA à la CIMA à travers un traité supra national signé entre les différents Etats que sont : 1. Bénin ; 2. Burkina Faso ; 3. Cameroun ; 4. Centrafrique ; 5. Congo ; 6. Côte d Ivoire ; 7. Gabon ; 8. Guinée Bissau ; 9. Guinée Equatoriale ; 10. Mali ; 11. Niger ; 12. Sénégal ; 13. Tchad ; 14. Togo. Ce traité comprend un code unique des assurances en application dans les Etats. Le traité a également mis en place une organisation efficace pour sa mise en œuvre. Elle se résume comme suit : - Le Conseil des Ministres

4 C est l organe suprême de la Conférence. Elle est seule habilitée à modifier les règlements et à fixer de nouvelles règles. - La Commission Régionale de Contrôle des Assurances (CRCA) C est l organe de régulation. Elle se charge de mettre en application les règlements et de veiller au bon fonctionnement des marchés. Elle a le pouvoir de sanctionner des sociétés d assurances pouvant aller jusqu au retrait d agrément. Son avis est indispensable pour l octroi d agrément aux sociétés d assurances. Pour cela elle dispose d un corps de commissaires contrôleurs. - Le Secrétariat Général C est la cheville ouvrière de l institution CIMA. Elle comprend le corps de contrôle évoqué plus haut et est chargé de la préparation de tous les travaux du Conseil des Ministres et de la CRCA. Elle peut être saisie sur toutes les questions d assurance relatives aux pays membres. 1.2 Quelques données chiffrées de l espace CIMA en 2012 - Nombre de sociétés d assurances : 156 o Sociétés non vie : 103 o Sociétés vie : 53 - Chiffre d affaires globale : 810 milliards de FCFA, soit environ 1,62 milliard USD o Sociétés non vie : 586 milliards de FCFA, soit 1,172 milliard de dollars US o Sociétés vie : 224 milliards de FCFA, soit 448 millions de dollars US 80.0% 70.0% 60.0% 50.0% 40.0% 30.0% 20.0% 10.0% 0.0% Assurance non vie Assurance vie - Taux de pénétration de l assurance: 1%

5 1.3 Principe de spécialisation instauré par la réglementation CIMA et étendue de l'usage de la table de mortalité Le principe de spécialisation signifie qu une même société d assurance ne peut pratiquer à la fois des opérations d assurances vie et des opérations d assurance non-vie. Il existe donc deux types de sociétés d assurances : les sociétés vie et les sociétés non-vie. Généralement les tables de mortalité n intéressent que les sociétés d assurances vie en raison de la tarification des risques. En ce qui concerne l espace CIMA, les tables de mortalité intéressent également les sociétés d assurances non-vie pour une raison précise : l indemnisation des préjudices corporels des victimes d accident de la circulation. En effet, cette indemnisation fait l objet d une «barémisation» à laquelle sont tenues toutes les sociétés pratiquant le risque automobile. Elle oblige les assureurs à verser en seul capital les rentes allouées à certaines victimes. La table de mortalité sert dans ce cas à déterminer le facteur viager entrant dans ce calcul, étant donné la valeur de la rente. Dans la pratique, les calculs sont déjà faits et disponibles dans un tableau de conversion de rente. Deux contraintes réglementaires relatives à la tarification des contrats d assurance vie - L article 338 du code des assurances CIMA fixe le taux d intérêt maximum des contrats à 3,5%. Ce taux n inclut pas la participation bénéficiaire aux assurés. - La table de mortalité en usage est : o Pour les contrats en cas de décès, la TD correspondant à la table de mortalité française de la population masculine observée entre 1960 et 1964 o Pour les contrats en cas de vie, la TV correspondant à la mortalité française de la population féminine observée entre 1960 et 1964. Ces deux contraintes appellent des observations : - La principale observation des assureurs sur le taux d intérêt est qu il est trop faible et rend donc les contrats peu attrayants. En réponse, le régulateur a toujours fait valoir l obligation de faire participer les assurés aux bénéfices réalisés afin de corriger la faiblesse du taux d intérêt. En effet, l inexistence de marchés financiers structurés en Afrique (zone CIMA) ne peut qu inciter à la prudence du régulateur dans l encadrement du taux d intérêt. - S agissant des tables de mortalité, elles sont en usage sur toute l étendue de l espace CIMA, c est-à-dire applicable dans les 14 Etats membres. En réalité, elles ne correspondent à aucune réalité des populations africaines mais étaient censées s en approcher. Au-delà de la référence à la France, l unicité d une table de mortalité applicable dans 14 Etats pose problème car les réalités culturelles, démographiques, voire de mortalité ne sont pas les mêmes d un pays à un autre.

6 Dans la réalité, les assureurs vie majorent la table de mortalité avant l application, ce qui n est pas réglementaire. D une façon générale, les critiques formées contre les tables de mortalité ont conduit à la construction d autres tables en remplacement des celles indiquées ci-dessus. 2 CONSTRUCTION ET MISE EN ŒUVRE DES NOUVELLES TABLES DE MORTALITE Les tables de mortalité utilisées jusqu alors étaient les tables «TD CIMA» pour les assurances en cas de décès et «TV CIMA» pour les assurances en cas de vie (art.338 et 334-4 du Code des Assurances CIMA). Le processus de construction des nouvelles tables de mortalité propres à la zone CIMA, a été impulsé par les conclusions des Etats Généraux de l assurance vie tenue en 2007. La réalisation de ce processus, conduit par la Conférence Interafricaine des Marchés d Assurance (CIMA) et la Fédération des sociétés d Assurances de droit National Africaines (FANAF) a effectivement démarré en 2009. Un Cabinet d actuariat basé en France a été retenu pour réaliser les travaux. Les différentes étapes du processus étaient : - collecte et exploitation des données ; - construction proprement dite des tables ; - Impact des nouvelles tables de mortalité sur le provisionnement ; - Processus de suivi des nouvelles tables de mortalité. 2.1 Collecte et exploitation des données Les principales difficultés rencontrées dans cette phase sont les suivantes : - recul statistique insuffisant dans le temps : les sociétés d assurance vie de la CIMA sont relativement jeunes. Les plus anciennes existent en tant que entité à part entière depuis la mise en place de la CIMA au début des années 1990, à la faveur du principe de spécialisation adopté par la CIMA. Mais la majorité fonctionne seulement depuis les années 2000 ; - étroitesse des plages d âge exploitables, notamment au-delà de 55 ans ; - mauvaise qualité des données : en général, la qualité des données est mauvaise et plusieurs sociétés sont dans l incapacité de communiquer certaines informations sur

7 leur portefeuille (dates de sortie, les dates de naissance, le sexe de l assuré). Ces insuffisances sont la conséquence de systèmes d informations inadaptés ou mal maitrisés. Sur un échantillon de données global initial d environ 37 organismes assureurs et 3 caisses de retraite et de prévoyance, seuls 32 assureurs ont transmis des données exploitables. Après retraitement dû aux imperfections : environ 113,000 lignes de données ont été supprimées sur 1.3 millions de lignes initiales : Nombre de lignes Initiale 1 315 946 100% Nombre de lignes supprimées 113 476 9% Nombre de lignes Final 1 202 473 91% A l issue de cette phase 9% des données ont été supprimées Pertinence et fiabilité : à partir des données retenues après retraitement, un filtre supplémentaire a été utilisé afin de juger de leur pertinence et de leur fiabilité, et le cas échéant, procéder à de nouvelles suppressions de données. Pour cela, les données sont éclatées par assureur, par sexe (F, M) et par sous zone (CEMAC, UEMOA). La période d observation se situe entre le 01/01/2003 et le 31/12/2006, soit 4 ans. A ce niveau, trois critères ont été utilisés: o Une exposition au risque (effectifs pondérés par leur durée de présence pendant la période d observation) inférieur à 1000 pour un segment donné, conduit à sa suppression ; o Lorsque aucun décès n est observé pour un segment, ses données sont supprimées du périmètre ; o Suppression des données des sociétés présentant des taux bruts de décès anormalement bas ou élevés, ou présentant des taux très erratiques entre assureurs du même marché (variation de plus de 1000% entre les assureurs). Tous ces retraitements ont permis de supprimer environ 755 000 «expositions au risque (2003-2006)» soit en moyenne 189 000 lignes (755 000 / 4 années d observation).

8 2.2 Construction des tables de mortalité L espace CIMA est composé de deux sous zones géographiquement distinctes. Il s agit de construire des tables de mortalité par sexe pour chacune des zones CEMAC et UEMOA et porter un avis sur la possibilité d utiliser une table commune pour les deux zones. Les taux bruts de mortalité par âge sont établis à partir de la méthode de Hoem, selon la formule ci-après : : estimateur de la probabilité de décéder à l âge x. dx : est la réalisation de la variable aléatoire représentant le nombre de décès observé sur x ;x+1] : intervalle inclus dans x ;x+1] pour lequel l assuré i est sous observation. L étude a mis en évidence les aspects suivants : - à partir des données transmises et après retraitement, seules les informations relatives aux tranches d âge allant de 30 à 55 ans ont été considérées comme fiables. Les ajustements des taux de mortalité d expérience ont été déduits à partir d un positionnement par rapport à une table de référence externe (table françaiseth00-02) en effectuant une régression des logits d expériences sur les logits de référence ; - Au-delà des tranches d âges exploitables, une extrapolation a été appliquée aux taux de mortalité ajusté en prenant en compte pour les âges extrêmes (faibles et élevés) les écarts de mortalité issus des statistiques de l OMS, entre les deux sous régions (CEMAC et UEMOA) ; - en raison d un faible volume de données pour la population féminine, un positionnement par rapport à la population masculine a été réalisé à partir d un modèle multiplicatif (modèle de Cox). L ensemble de ces éléments et hypothèses a permis d établir quatre tables de mortalité, pour chaque sous-région (CEMAC et UEMOA) et pour chaque sexe (homme et femme). Au final, une table par sexe commune à la zone CIMA a été constituée à partir d une pondération des tables par sous-région. Selon les principales conclusions du rapport final : - en dépit des difficultés liées à la collecte des données auprès des compagnies d assurance vie et des organismes de retraite et de prévoyance, les tables construites

9 paraissent cohérentes et utilisables en l état ; - il apparaît utile de poursuivre les analyses sur la mortalité d expérience dans la région par la collecte de données statistiques complémentaires qui permettront de suivre l adéquation des tables construites aux données et d organiser le transfert de compétence. 2.3 Impact des nouvelles tables de mortalité sur le provisionnement Dans le cadre de la zone CIMA, la mortalité constatée par les tables construites est inférieure à celle des anciennes tables (TD CIMA et TV CIMA). L adoption des nouvelles tables depuis fin 2012, devrait conduire pour les produits en cas de vie, à une hausse des provisions mathématiques. Pour les produits en cas de décès, on devrait assister à une baisse des provisions mathématiques. Du point de vue comptable, les majorations induites par les nouvelles tables doivent être comptabilisées intégralement dans les comptes de l exercice clos au 31 décembre 2013. Toutefois, si pour une société donnée l augmentation des provisions mathématiques, du fait du changement de table de mortalité est supérieure à 5%, la société pourrait être autorisée, sur sa demande, à amortir linéairement ce différentiel sur une période maximale de 5 ans 2.4 Le processus de suivi des nouvelles tables de mortalité Il s agit de tester la robustesse des tables et ajuster les résultats de l étude initiale le cas échéant. Ce processus consiste à récupérer des données statistiques complémentaires dans le but d une part d enrichir la base de données ayant permis l établissement des tables de mortalité, et d autre part de bâtir des indicateurs mesurant la fiabilité des tables établies. Le processus de suivi doit se dérouler sur 5 ans, de 2011 à 2015. Les données collectées chaque année dans le cadre du suivi couvre la période d observation initiale 2003-2006 et des années supplémentaires. Par exemple les données collectées en 2012 ont permis d observer sur la période 2003-2009. En plus de l évolution du périmètre des données, on devrait s attendre à priori à une amélioration de la qualité des données collectées du fait de l accumulation d expérience par les compagnies. Les résultats obtenus à l issue du processus de suivi des nouvelles tables avec les données collectées en 2011 ont permis d observer que les nouvelles tables CIMA construites restent prudentes dans le cadre des garanties décès (que ce soit par rapport à la collecte 2009 ou par rapport à la collecte 2011). En outre, elles sont plus proches du risque de la population assurée que ne le sont les tables CIMA (TD CIMA et TV CIMA). Les mêmes constats sont faits sur la base des données collectées en 2012 dans le cadre du suivi.

10 Le tableau suivant illustre ce constat : Sous zone Ecart relatif entre les décès observations (suivi 2012) et les décès prédits de la table TD Ecart relatif entre les décès observations (suivi 2012) et les décès prédits de la table CIMA H CEMAC -53% -20% UEMOA -343% -252% 3 DEFIS ET PERSPECTIVES Les nouvelles tables de mortalité ont l avantage d avoir été construites sur la base des données propres aux populations assurables. La référence à la France a disparu. Cependant le régulateur reste conscient d un certain nombre de facteurs qui continuent d entacher sa fiabilité. Par exemple : - Les données utilisées, notamment l âge, ne sont pas toujours fiables. En effet, en Afrique, dans les endroits les plus reculés, les naissances ne sont pas toujours déclarées. Plus tard, les pièces d identité sont fabriquées avec dates de naissance tendant erronées ; - La nouvelle table de mortalité conçue est une grande table d expérience des sociétés d assurance vie de la zone CIMA. Elle ne saurait se substituer à une table démographique dont l usage reste essentiel dans certains domaines, notamment le calcul de l indemnité des victimes d accident de la circulation. Malheureusement, les tables démographiques dans nos états sont quasi inexistantes; - Le problème d unicité de la table applicable à 14 Etats différents avec des populations aux habitudes différentes se pose toujours. La construction de nouvelles tables pourrait se révéler nécessaire dans un moyen terme.