VIOLENCES CONJUGALES ET INTRAFAMILIALES : LES CIRCULAIRES FEDERALES COL 3/2006 ET 4/2006

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Transcription:

«2006-2009 : les COL 3 et 4 trois ans après» (1/5) VIOLENCES CONJUGALES ET INTRAFAMILIALES : LES CIRCULAIRES FEDERALES COL 3/2006 ET 4/2006 Par René Begon, chargé de projet au CVFE Trois ans après l entrée en vigueur des circulaires fédérales COL 3 et 4 concernant la violence intrafamiliale et, particulièrement, la violence au sein du couple, nous entreprenons, dans une série de cinq articles, de tirer les premiers enseignements de ce vaste chantier, en terminant par le point de vue du CVFE. Ce premier article décrit le contenu de ces deux circulaires, ainsi que le dispositif d évaluation de la COL 4 établi par le Collège des procureurs généraux. «La violence au sein du couple constitue aujourd hui la principale cause de mortalité ou d invalidité pour les femmes européennes âgées de 16 à 44 ans», lit-on dans un document concernant la Clause de l Européenne la plus favorisée 1. Et dans un projet de résolution déposé au Sénat en 2007 : «Une analyse globale montre qu un cinquième à un quart de toutes les femmes européennes ont subi 1 «La clause de l Européenne la plus favorisée : le meilleur de l Europe pour les femmes», Bruxelles, FPS, mai 2009, page 11 (statistiques Eurostat). R. Begon «2006-2009 : les Col 3 et 4, trois ans après (1/5)» - 1 -

des violences physiques au moins une fois dans leur vie d adulte et plus d un dixième des femmes ont subi des violences sexuelles avec usage de la force» 2 A l issue d un long travail de sensibilisation de l opinion publique entrepris par certaines associations d accueil et de soutien aux femmes victimes de violence conjugale, cette question a fini par être prise en considération par les autorités politiques belges. C est ainsi que le conseil des ministres a adopté un «Plan d action national contre les violences à l égard des femmes», pour les périodes 2001-2003 et 2004-2007 et un «Plan d action national de lutte contre le violence entre partenaires» en 2008-2009. D autre part, sous l impulsion de deux femmes, l ancienne procureur du roi de Liège, Anne Bourguignont et la précédente ministre de la justice, Laurette Onkelinx, la justice a également mis cette problématique à son agenda. Dans un premier temps, Mme Bourguignont a joué un rôle d éclaireur en mettant en œuvre à Liège, à partir du 5 septembre 2004, une circulaire, connue sous l appellation «circulaire Tolérance zéro», destinée à lutter contre la violence conjugale 3. De la circulaire liégeoise «Tolérance zéro» aux COL 3 et 4 Abondamment commentée et relayée par les médias, cette circulaire a fait date. Sa philosophie a été reprise par Mme Onkelinx, ministre de la justice, qui a demandé au Collège des procureurs généraux de s en inspirer pour proposer les grands axes d une politique criminelle dans ce domaine. Ainsi, sont entrées en vigueur, le 3 avril 2006, deux circulaires élaborées par un groupe de travail constitué au sein du Collège des procureurs généraux et comprenant des représentants du Service de la politique criminelle du SPF Justice, des magistrats des parquets et des représentants des services policiers, après consultation des associations d aide aux victimes et aux auteurs de violence conjugale : la COL3 concernait la définition des différentes formes de violence intrafamiliale et extrafamiliale 4, tandis que la COL4 décrivait la politique criminelle fédérale applicable en matière de violence au sein du couple 5. 2 Philippe Mahoux, Olga Zrihen, Anne-Marie Lizin, «Proposition de résolution visant à introduire la clause de l Européenne la plus favorisée», Bruxelles, Sénat de Belgique, 17 juillet 2007, page 2 (Source citée : Combattre la violence à l égard des femmes, Etude du bilan des mesures et actions prises dans les Etats membres du Conseil de l Europe, 2006). 3 Cf. René Begon, «Stop au classement sans suite», CVFE, février 2005 (http:/ /www.cvfe.be). 4 «Circulaire n COL3/2006 du Collège des Procureur s généraux près les Cours d Appel», Bruxelles, Collège des Procureurs généraux, 01/03/2006, 10 pages. Dans la suite de ce texte, nous abrégerons la référence sous la forme : COL 3, n de la page. 5 «Circulaire n COL4/2006 du Collège des Procureur s généraux près les Cours d Appel», Bruxelles, Collège des Procureurs généraux, 01/03/2006, 22 pages. Dans la suite de ce texte, nous abrégerons la référence sous la forme : COL 4, n de la page. R. Begon «2006-2009 : les Col 3 et 4, trois ans après (1/5)» - 2 -

Le contenu des deux circulaires Bien qu entrées en vigueur au même moment, les COL 3 et 4 ne visent pas le même objectif. La COL 3 a pour but de fournir un ensemble cohérent de définitions susceptibles de faciliter l identification de la spécificité des délits, de manière notamment à permettre l établissement de statistiques valables pour l ensemble du territoire (encadré page suivante). Les données statistiques récoltées grâce à une meilleure identification de la nature des délits pourront être utilisées par les forces de police et les parquets pour mettre en perspective leur travail, mais elles constitueront également un outil de référence dans le cadre d analyses scientifiques 6. Par contre, la COL 4, commune à la ministre de la justice et au Collège des procureurs généraux, poursuit un objectif plus ambitieux dans le sens où elle est «relative à la politique criminelle en matière de violence dans le couple» 7. C est principalement de la présentation et de l évaluation de cette dernière circulaire qu il sera question dans cet article 8. Dès son préambule, la COL 4, s appuyant sur une définition de la politique criminelle émanant du Conseil de l Europe 9, insiste sur le fait que cette politique devra être «intégrée», c est-à-dire inclure d autres aspects que le seul niveau répressif : «Ainsi définie, la politique criminelle dépasse la conduite de l action publique, c est-à-dire la réaction judiciaire à l infraction pénale. Elle intègre les mécanismes de régulation sociale (politiques de prévention, de soins, d aide,...) et concerne ainsi d autres ministres fédéraux, régionaux et communautaires. Tel est assurément le cas du phénomène de la violence dans le couple qui nécessite une action de toutes les autorités publiques compétentes, à quelque niveau de pouvoir qu elles appartiennent» 10. La circulaire définit d abord les objectifs de la politique criminelle en matière de violence dans le couple. Il s agit, d une part, de trouver, «pour chaque cas dénoncé ou constaté, ( ) une solution adéquate qui : respecte, protège et reconnaît la personne victime de violence, garantit également, en cas de nécessité, la protection des enfants du couple ou de l un des partenaires, affirme le caractère pénalement répréhensible du comportement de l auteur des violences, respecte les droits de la personne mise en cause et oriente les mesures prises à son égard vers la prévention de la récidive» 11. 6 COL 3, pages 3 et 4. 7 COL 4, page 1. 8 On trouvera une synthèse des définitions proposées par la COL 3 dans l encadré ci-dessus. 9 Selon le Conseil de l Europe, la politique criminelle est «l ensemble des mesures, à caractère pénal ou non, tendant à assurer la protection de la société contre la criminalité, à aménager le sort des délinquants et à garantir les droits des victimes» («rapport relatif à la recommandation n R (83) 7 sur la participation du public à la politique criminelle», cité dans COL 4, page 1). 10 COL 4, Introduction, page 1. 11 COL 4, Titre I, page 2. R. Begon «2006-2009 : les Col 3 et 4, trois ans après (1/5)» - 3 -

Les définitions proposées par la COL 3 Les deux domaines pour lesquels la COL 3 fournit ses définitions sont la «violence intrafamiliale» et la «maltraitance d enfants extrafamiliale». Concernant la violence intrafamiliale, la circulaire stipule : «Est considérée comme violence intrafamiliale toute forme de violence physique, sexuelle, psychique ou économique entre membres d une même famille, quel que soit leur âge». En ce qui concerne la maltraitance d enfants extrafamiliale, le texte précise : «Est considérée comme maltraitance d enfants extrafamiliale, toute forme de violence physique, sexuelle, psychique ou économique commise sur la personne d un enfant par une personne n appartenant pas à sa famille» 12. Les définitions fournies par la COL 3 pour servir dans l identification des dossiers par la police et le parquet distinguent en définitive quatre niveaux : trois d entre eux concernent la violence intrafamiliale et un la maltraitance d enfants extrafamiliale. Ces niveaux sont donc : La violence intrafamiliale dans le couple, La violence intrafamiliale envers les descendants, La violence intrafamiliale envers d autres membres, La maltraitance d enfants extrafamiliale 13. D autre part, la circulaire insiste sur la portée «sociétale» que revêtira l action publique dans ce domaine : «Les réactions des autorités judiciaires et policières ( ) doivent démontrer l importance qu elles accordent au phénomène, socialement et humainement inacceptable, de la violence dans le couple et leur résolution à lutter contre ses diverses manifestations de manière à inciter la population à un plus grand respect mutuel de l intégrité physique et psychologique au sein du couple» 14. La circulaire décrit ensuite ses objectifs spécifiques : «déterminer les lignes directrices de la politique criminelle ( ) ; développer un système uniforme d identification et d enregistrement des situations de violence dans le couple par les services de police et les parquets ; déterminer les mesures minimales qui devront être appliquées dans tous les arrondissements judiciaires du pays et stimuler des actions locales particulières ; donner aux intervenants judiciaires et policiers des outils et références pouvant servir d appui à leur action» 15. En se référant à la définition de la violence intrafamiliale fournie par la COL 3, elle définit la violence dans le couple comme «toute forme de violence physique, sexuelle, psychique ou économique entre des époux ou personnes cohabitant ou ayant cohabité et entretenant ou ayant entretenu une relation affective et 12 COL 3, page 4. 13 COL 3, page 7. 14 Ibidem. 15 COL 4, Titre II, page 2. R. Begon «2006-2009 : les Col 3 et 4, trois ans après (1/5)» - 4 -

sexuelle durable» 16. Elle donne aussi des instructions concernant «l identification et l enregistrement des dossiers par la police et le parquet» 17. La circulaire décrit également les missions du procureur du roi qui «détermine les modalités de gestion des dossiers de violence dans le couple par les magistrats de son parquet», en veillant notamment à ce que ceux-ci reçoivent une formation adéquate. Il doit notamment désigner, parmi les substituts de son parquet, un «magistrat de référence» pour les questions de violence dans le couple, établir «un plan d action en vue de lutter contre le phénomène de la violence dans le couple dans son arrondissement» et mettre cette question à l ordre du jour du «Conseil d arrondissement pour une politique en faveur des victimes» au moins une fois par an 18. Chargé de la «coordination du traitement, au sein du parquet, des dossiers de violence dans le couple», le magistrat de référence «est l interlocuteur privilégié des services de police, de la maison de justice et des institutions et services publics ainsi que des associations privées intervenant dans la prise en charge des victimes et des auteurs de violence dans le couple (collectifs pour femmes battues, centres d accueil, associations encadrant des mesures alternatives, )». Il participe aux réunions du Conseil d arrondissement 19. Un officier de police de référence chargé de la violence dans le couple devra également être désigné par les chefs de corps 20. Enfin, la circulaire stipule qu elle devra faire l objet d une évaluation «par le Collège des procureurs généraux avec l appui du Service de la politique criminelle», un premier rapport sur l application de la COL devant être établi pour fin 2007 et ensuite tous les deux ans 21. L évaluation après deux ans : le dispositif mis en place La COL 4 indique également que «l évaluation portera notamment sur l adéquation des moyens mis à la disposition des parquets, des services de police et des maisons de justice, pour mettre en œuvre le modèle d intervention défini dans la circulaire commune (capacités matérielles et humaines et possibilités de prise en charge des victimes et des auteurs de violence dans le couple)» 22. 16 COL 4, Titre III, page 3. 17 COL 4, Titre III, pages 4-5. 18 COL 4, Titre IV, page 5. 19 COL 4, Titre IV, pages 6-7. 20 COL 4, Titre IV, page 7. 21 COL 4, Titre X, page 22. 22 Ibidem. R. Begon «2006-2009 : les Col 3 et 4, trois ans après (1/5)» - 5 -

Pour mener à bien ce processus d évaluation, le Collège des procureurs généraux a mis sur pied en 2007, avec la collaboration du Service de la politique criminelle (SPC), un groupe de travail qui a rassemblé les résultats de plusieurs recherches : Le SPC a fait parvenir un questionnaire d évaluation aux parquets et services de police ; Une analyse statistique de l application des COL 3 et 4/2006 a été mise en œuvre (pratiques d enregistrement des dossiers et analyses des décisions prises par les parquets) ; L asbl Engender a été chargée par l Institut pour l égalité des femmes et des hommes de réaliser un outil d évaluation ; La COL4 a également fait l objet d une évaluation par le Direction générale des maisons de justice. Pour présenter les conclusions provisoires de ce travail d évaluation et récolter l avis des associations de terrain sur la mise en œuvre des circulaires, le Collège des procureurs généraux a chargé le Forum national pour une politique en faveur des victimes d organiser une première journée d étude le 9 juin 2008 qui a été suivie par 120 professionnels du milieu des associations de terrain. Celle-ci a été prolongée par une deuxième journée d étude (dédoublée) qui a eu lieu les 29 et 30 avril 2009, avec comme objectif de compléter le dispositif d évaluation en recueillant les recommandations formulées par les différents acteurs (magistrats, services d aide sociale aux victimes, maisons de Justice, forces de police et associations de terrain) en vue d améliorer l application des deux circulaires. Dans les articles suivants de notre série, nous reviendrons sur les éléments principaux de ce processus d évaluation. Violences conjugales et intrafamiliales : Les circulaires fédérales Col 3/2006 et Col 4/2006 Collectif contre les violences conjugales et l exclusion (CVFE asbl) : rue Maghin, 11-4000 Liège Publications (analyses et études) : www.cvfe.be Contact : René Begon - renebegon@cvfe.be - 04 250 96 87 Avec le soutien du Service de l Education permanente de la Communauté française et de la Région wallonne R. Begon «2006-2009 : les Col 3 et 4, trois ans après (1/5)» - 6 -