PRIX DE THÈSE VÉRON & ASSOCIÉS CONTENTIEUX DES BREVETS D INVENTION 3 e édition, 16 avril 2015



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PRIX DE THÈSE VÉRON & ASSOCIÉS CONTENTIEUX DES BREVETS D INVENTION 3 e édition, 16 avril 2015 PIERRE VÉRON ISABELLE ROMET THOMAS BOUVET SABINE AGÉ AMANDINE MÉTIER FRANÇOISE ESCOFFIER EDDY PROTHIÈRE ISABELLE BERTAUX CAROLINE LEVESQUE MARTA MENDES MOREIRA DORA TALVARD AGATHE CAILLÉ FLORENCE JACQUAND Avocats à la Cour FRANÇOIS PERRIN Conseiller scientifique SOPHIE PLACE Docteur en pharmacie Conseiller scientifique CÉLINE RUSTE Juriste économiste Liste des cinq candidats, par ordre alphabétique 1. Linda Boudour, La saisie-contrefaçon à l aune des droits fondamentaux, Dir. M. Vivant (Montpellier), soutenance le 10 décembre 2012 2. Mathieu Dhenne, Technique et droit des brevets, Dir. J.-Ch. Galloux (Paris II), soutenance 20 nov. 2013 3. Sébastien Drillon, La protection des logiciels par brevet d invention, Contribution à l étude du domaine de la brevetabilité, Dir. Y. Reboul (Strasbourg), soutenance le 17 septembre 2012 4. Axelle Louis, L'évolution contemporaine de la notion de brevetabilité : étude en droit français et européen Dir. Mme Dominique Velardocchio et Mme Jocelyne Cayron (Aix en Provence), soutenance le 27 janvier 2014 5. Dominique Perdreau, Le contentieux des brevets d invention, Dir. J.-P. Clavier (Nantes), soutenance 27 janv. 2014 Composition du jury Jacques Azéma, professeur émérite de l Université Jean Moulin Lyon 3, directeur honoraire du Centre Paul Roubier. PARIS 1, rue Volney 75002 PARIS Tél. +33 (0) 1 47 03 62 62 Fax. +33 (0) 1 47 03 62 69 LYON Christian Le Stanc, professeur émérite à la Faculté de droit de Montpellier, Directeur scientifique de la revue Propriété industrielle, avocat Jérôme Passa, professeur à l'université Panthéon-Assas (Paris II), avocat (Passa Guillot de Haas) Frédéric Pollaud-Dulian, professeur à l'université Panthéon-Sorbonne (Paris 1), directeur du M2 Propriété industrielle et artistique Jacques Raynard, professeur à la Faculté de droit de Montpellier, président de la Fédération Nationale du Droit de l Entreprise (FNDE). 53, avenue Maréchal Foch 69006 LYON Tél. + 33 (0) 4 72 69 39 39 Fax. + 33 (0) 4 72 69 39 49 firstname.name@veron.com www.veron.com

Linda BOUDOUR, La saisie -contrefaçon à l'aune des droits fondamentaux RÉSUMÉ DE LA THÈSE Problématique : Parce qu'elle permet, à l'issue d'une procédure non contradictoire, de pénétrer dans les locaux d'autrui afin d'y procéder à des constatations, des descriptions voire des saisies réelles, en vue d'établir la nature, l'origine, la destination et l'étendue de la contrefaçon alléguée, la saisie -contrefaçon - mesure probatoire spécifique à la propriété intellectuelle particulièrement invasive - porte indubitablement atteinte au droit au respect de la vie privée, du domicile et de la correspondance du saisi ainsi qu'à son droit de propriété, droits fondamentaux qui sont constitutionnellement et conventionnellement garantis. Étant en outre pratiquée sans débat contradictoire préalable, un effet de surprise étant indispensable pour des raisons d'efficacité, et les résultats de la saisie ayant vocation à emporter la conviction du juge du fond quant à la réalité de la contrefaçon alléguée et son imputabilité au présumé contrefacteur, les impératifs du droit à un procès équitable doivent être également observés. Ces constations conduisaient à s'interroger sur la sauvegarde des droits fondamentaux du saisi dans le cadre de la procédure de saisie -contrefaçon. Démarche adoptée : La conciliation des droits fondamentaux entre eux ou entre les droits fondamentaux et les objectifs d'intérêt général étant une mission dévolue au législateur en vertu l'article 34 de la Constitution de 1958, il paraissait opportun d'étudier, dans une première partie, la conciliation opérée par le législateur entre la nécessité de permettre, dans le cadre de la lutte contre la contrefaçon, aux titulaires de droits de propriété intellectuelle de prouver efficacement l'atteinte portée à leurs droits et le nécessaire respect des droits du saisi. Cette conciliation, opérée via un principe de proportionnalité de l'atteinte aux droits en cause à l'objectif poursuivi, devait être analysée afin de vérifier l'effectivité du respect des droits fondamentaux du saisi. A cette fin, il convenait, à la lumière de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l'homme, de soumettre le dispositif législatif de la saisie -contrefaçon tant à l'épreuve des droits de la défense qu'à l'épreuve des droits fondamentaux substantiels que constituent le droit au respect de la vie privée, du domicile, de la correspondance et le droit de propriété. Toutefois, malgré la volonté du législateur de concilier les nécessités de la preuve de la contrefaçon et le nécessaire respect des droits du saisi, la saisie -contrefaçon demeure déséquilibrée au détriment du saisi, eu égard aux prérogatives exorbitantes du droit commun qu'elle confère au saisissant. Il était alors nécessaire d'étudier, dans une deuxième partie, l'équilibre réalisé par l'autorité judiciaire. L'autorité judiciaire, qui occupe une place centrale dans le dispositif de la saisie -contrefaçon, s'efforce en effet, en tant que gardienne de la liberté individuelle et gardienne de la propriété privée, d'établir, depuis quelques années, un juste équilibre entre les droits du saisissant et ceux du saisi par un encadrement strict de la procédure de saisie -contrefaçon, assurant ainsi la sauvegarde des droits fondamentaux du saisi tant en amont qu'en aval de la saisie. 1

Conclusions : Si l'impératif d'efficacité de la saisie -contrefaçon justifie une absence temporaire de contradiction, le respect des droits de la défense est assuré par le rétablissement a posteriori de cette contradiction. Les droits de la défense sont en effet garantis tant par la faculté d'exercer des voies de recours que par l'obligation faite au saisissant de se pourvoir au fond dans un délai prescrit à peine de nullité de la saisie, lesquelles provoqueront l'ouverture d'un débat contradictoire entre les parties au cours duquel le saisi pourra présenter ses arguments et faire valoir ses droits. L'exigence d'indépendance de l'expert assistant l'huissier instrumentaire au cours des opérations de saisie -contrefaçon, fondée sur l'article 6, 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, contribue quant à elle à assurer l'égalité des armes entre les parties et, partant, l'équité du procès au fond. S'agissant du droit au respect de la vie privée, du domicile, de la correspondance et du droit de propriété, en subordonnant la validité de la saisie à une autorisation judiciaire préalable et à l'engagement d'une action au fond dans un délai précis, la procédure de saisie -contrefaçon répond, en propriété industrielle, aux exigences du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l'homme de proportionnalité de l'atteinte portée aux droits fondamentaux du saisi à l'objectif probatoire poursuivi dans le cadre de la lutte contre la contrefaçon. En revanche, il en va différemment de la saisie -contrefaçon en propriété littéraire et artistique, en particulier en droit d'auteur, logiciels et bases de données. En effet, dans l'hypothèse d'une saisie -contrefaçon pratiquée sur réquisition du commissaire de police, faute d'autorisation judiciaire préalable et de nullité de la saisie à défaut d'action au fond dans un délai prescrit, les droits fondamentaux du saisi sont insuffisamment sauvegardés. Parce qu'elle n'offre pas au saisi des garanties suffisantes contre l'arbitraire et les abus, l'atteinte portée aux droits fondamentaux apparaît disproportionnée à l'objectif probatoire poursuivi. En conséquence, la procédure de saisie -contrefaçon sur réquisition du commissaire de police encourt une censure du Conseil constitutionnel à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité car contraire aux articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et à l'article 66 de la Constitution de 1958. De même qu'un justiciable pourrait soulever, devant les juridictions ordinaires, l'exception d'inconventionnalité des dispositions du Code de la propriété intellectuelle, en raison de leur non -conformité à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et à l'article le` du Protocole n I. Cette étude de la saisie -contrefaçon à travers le prisme des droits fondamentaux appelle une harmonisation complète de la procédure de saisie -contrefaçon par l'adoption d'un régime clarifié, commun à l'ensemble des droits de propriété intellectuelle, s'inspirant de la saisie - contrefaçon en propriété industrielle, laquelle offre les garanties et garde -fous nécessaires. 2

Résumé de la thèse INTRODUCTION. Le droit des brevets a pour objet l appropriation d enseignements techniques nouveaux afin d encourager le développement de la recherche dans le domaine de la technique. Ainsi, la technicité constitue une exigence fondamentale de l apparition du droit de brevet. Pourtant, les études relatives à cette notion sont, à notre connaissance, rares. Surtout, elles sont toutes focalisées sur sa définition sans ne jamais tenir compte de sa finalité normative. Or, avant de déterminer ce qu est la technique en droit des brevets, il convient de rechercher quelle en est la fonction normative. L examen de la fonction de la notion de technique en droit des brevets conduit à s interroger sur le fonctionnement de cette norme. MOUSSERON a démontré que le droit de brevet constituait une propriété. On est alors amené à s interroger sur ce qu est la propriété. Qu est-ce que la propriété? On distingue généralement deux approches de ce concept. Selon une approche qualifiable de «matérialiste», c est le fait pour une chose d appartenir en propre à une personne. Il faut en déduire que seuls des choses corporelles et des droits sont appropriables. En droit des brevets, ce raisonnement invite à confondre l invention avec une chose inventée dont elle autorise la réalisation. Au sein de ce système, la technicité constitue la justification du caractère corporel attribué à cette chose inventée. L invention doit, en ce sens, impliquer une transformation de la Nature (PARTIE I). Les nombreuses incohérences que connaît le raisonnement matérialiste appellent sa remise en cause. La redondance de la double reconnaissance de la propriété, par la reconnaissance du bien puis du rapport, en est l aspect le plus critiqué. Il n est toutefois pas le seul à l être. Comment justifier, par ailleurs, la classification entre les choses corporelles et les droits? L adoption d une conception «idéaliste» de la propriété échappe à ces critiques. La propriété n est plus alors le propre d une chose, mais le propre d une personne. Toute réalité, corporelle ou incorporelle, est appropriable. Ainsi, la chose incorporelle de l invention serait, en elle-même, appropriable. Il n importe plus de savoir si la chose inventée à laquelle sa réalisation aboutit implique une transformation de la Nature. La technicité constitue alors un critère de l appropriation, une forme d utilité propre au droit des brevets, qu il convient de rapprocher de l exigence d utilité que connaît le droit commun des biens (PARTIE II). PARTIE I. Selon l approche matérialiste, la propriété ne concerne que des choses corporelles et des droits. Dans le domaine de la propriété intellectuelle, ce raisonnement suppose, par exemple, que le droit d auteur se confonde avec l œuvre pour donner naissance à un bien. L auteur exerce ses prérogatives sur le droit lui-même, c est-à-dire sur la possibilité d autoriser ou d interdire l utilisation de sa réalisation intellectuelle. Cependant, cette argumentation est inopérante en droit des brevets, puisque la demande de brevet s intercale entre le rapport de propriété et la chose de l invention. Toute confusion du droit et de l invention est impossible. Il en résulte que, en vertu de la conception matérialiste, ce droit ne peut atteindre qu une chose corporelle, laquelle consiste soit dans une chose réalisée en amont à l aide de l invention (une chose inventée) soit dans le titre du brevet représentant cette réalisation. En tous cas, l approche matérialiste de la propriété conduit à confondre la réalité incorporelle de l invention avec une chose inventée de nature corporelle. Comment justifier cette confusion? L exigence de technicité en constitue la justification. En effet, la technique est couramment entendue comme l exigence d une maîtrise de la Nature. Cette proximité avec la Nature aboutit souvent à un amalgame avec l exigence d une transformation de la Nature. Un tel rapprochement a été fait en droit des brevets par le biais d une assimilation des notions de technique et d industrie. Il s agit en ce sens d estimer que la technicité requiert une production se manifestant par un effet sensible, c est-à-dire qui soit accessible au toucher. Dès lors, une chose n est brevetable que sous réserve d être technique. En d autres termes, elle doit être de nature corporelle. De fait, cette exigence de corporéité permet l instauration d un domaine de la technique excluant, a priori, le caractère appropriable des choses naturelles et des choses abstraites (découvertes, théories scientifiques, programmes d ordinateur, méthodes intellectuelles et présentations d informations). L exclusion de l appropriation d une chose est aisée quand elle consiste toute entière dans un élément naturel ou dans un élément abstrait. Toutefois, dans la pratique, on est le plus souvent confronté à des situations où la chose revendiquée ne consiste pas dans un de ces éléments en tant que tel. En présence de ce type de réalisations mixtes, comprenant des aspects techniques et non techniques, il devient obligatoire d examiner la structure de la chose inventée pour déterminer si elle relève ou non, pour l essentiel, du domaine de la - 2 -

technique. La jurisprudence a élaboré plusieurs méthodes pour apprécier cette appartenance. La recherche de l élément essentiel de l invention demeure la méthode la plus fréquemment employée dans ce but. PARTIE II. Selon l approche idéaliste, qui emporte notre conviction, la propriété peut porter sur des choses corporelles et sur des choses incorporelles. En droit des brevets, cette conception idéaliste permet d éviter toute confusion de l invention avec la chose inventée issue de sa réalisation. Comment entend-on alors la technique au sein de ce système? Une invention n est susceptible de devenir un bien qu à la condition de représenter une valeur, c est-à-dire sous réserve d être utile et rare. Ainsi, la technicité et l inventivité sont, en droit des brevets, les équivalents respectifs de l utilité et de la rareté du droit commun des biens. Il en résulte que la constatation de la technicité dépend de l utilité opérationnelle de la chose revendiquée. Cette utilité effective peut être appréciée grâce au critère de la suffisance de la description. Une description suffisante pour exécuter l invention démontre, en effet, l utilité opérationnelle de celle-ci. La conception idéaliste contredit l idée d un domaine de la technique. Le rejet a priori du caractère appropriable devient impossible pour deux raisons. D abord, ce caractère ne dépend plus de la capacité d une chose à constituer un objet de propriété, mais il dépend désormais de la capacité d une personne à s approprier une chose. Ensuite, il faut distinguer l invention et son objet. L invention est une chose incorporelle. La nature de l objet sur lequel elle porte n intervient pas lors de l appréciation de sa brevetabilité. On ne s approprie jamais une chose naturelle ou une chose abstraite. On s approprie une invention relative à l une de ces choses. Ces raisons expliquent que le domaine de la technique, qui est composé d objets non appropriables, ait été vidé de sa substance par la jurisprudence. Cette disparition est aussi synonyme d un changement du rôle de l exigence de technicité. Ce n est plus une limite à l appropriation, mais un critère de l appropriation. Il ne s agit plus de rechercher si une chose est appropriable, mais si un objet est susceptible de constituer un bien au sens du droit des brevets. L approche idéaliste de la propriété rend son incorporéité à l invention. Sous cet angle, la technicité n est plus réduite à une justification de la corporéité de la chose revendiquée. Il ne s agit plus d une limite à l appropriation, autrement dit ce n est plus le critère du caractère appropriable. C est dorénavant une condition de l appropriation. Cette technicité est, plus précisément, une forme d utilité propre au droit des brevets. Toute chose est qualifiable d invention, sous réserve d être utile et rare. Dans ce cadre, l idée d un domaine de la technique n a plus de raison d être. On comprend ainsi pourquoi la jurisprudence a vidé ce domaine de sa substance en admettant la brevetabilité des inventions biotechnologiques (notamment des séquences génétiques) et des inventions informatiques (notamment des logiciels et des méthodes d affaires). En présence d une réalisation mixte (composée d éléments techniques et non techniques), l approche classique est concentrée sur la structure de la chose inventée. Il s agit de rechercher l élément essentiel de cette chose. L étude de la jurisprudence démontre qu elle a mis en place certains critères de qualification de la technicité destinés à juger de cette appartenance, qui correspondent à la vision moderne de la propriété. Cette dernière amène à ne plus se concentrer sur la chose inventée. Nous devons à présent déterminer si la chose incorporelle de l invention est qualifiable de technique. Il convient pour ce faire de déterminer cette technicité par le biais de la suffisance de la description par rapport à l exécution de l invention. CONCLUSION. Le renouvellement de la conception de la technique par le droit des brevets apporte un nouveau regard sur les conditions de brevetabilité. L appropriabilité de la réalisation que l invention pourrait engendrer n importe plus au stade de l examen de la brevetabilité. Ainsi, l instauration d un domaine de la technique par l exclusion de choses non techniques perd sa raison d être. Ces exclusions ne sauraient concerner l invention, mais seulement les réalisations en résultant. Les listes des articles 52 (2) et 53 (b) de la Convention sur le brevet européen ne se justifient plus, puisqu elles ne concernent pas la propriété de l invention, mais la propriété d une chose inventée. Or, cette dernière n est pas l objet du droit des brevets. Finalement, notre recherche conduit à penser que la technicité de l invention est une condition de son appropriation et qu elle peut être rapprochée de l utilité du droit commun des biens. Néanmoins, cette utilité ne suffit pas pour que l invention puisse être appropriée, il convient que cette invention constitue une valeur. Elle doit donc être utile et rare. On en vient ainsi à considérer que la condition d activité inventive, que connaît le droit des brevets, pourrait être le critère de la rareté de la chose. Les évolutions contemporaines dans les domaines des biotechnologies et de l informatique, ainsi que les résultats de notre travail, ouvrent de nouvelles perspectives pour de futures recherches relatives à cette notion d activité inventive. - 3 -

LA PROTECTION DES LOGICIELS PAR BREVET D'INVENTION CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DU DOMAINE DE LA BREVETABILITÉ Pour encourager la création, la plupart des législations nationales et des textes internationaux, reconnaissent des droits privatifs temporaires sur des créations ou obtentions qui répondent à certains critères. Ces protections s'acquièrent souvent par l'accomplissement de formalités et aboutissent à une publication rendant la connaissance intellectuellement accessible au tiers, y compris aux concurrents. Ces conditions strictes sont justifiées par le caractère dérogatoire du monopole qui entrave la circulation des connaissances et restreint donc la liberté du commerce et de l'industrie. Ainsi, à côté du régime de droit commun que constitue le régime du secret qui ignore toute appropriation, la réservation des informations techniques est assurée par le régime du brevet, régime d'exception au principe constitutionnel de la liberté d'entreprendre. De nos jours, les économies des pays industrialisés dépendent de plus en plus du secteur tertiaire - industrie de services -, qui comprend le secteur des services financiers. Les nouveaux développements des entreprises de services sont généralement basés sur de nouvelles méthodes de travail mises en oeuvre par l'utilisation de réseaux informatiques. Dans ce cadre, les inventions liées à des ordinateurs pénètrent pratiquement tous les domaines de la technologie. Dans la plupart des cas, ces inventions concernent une nouvelle fonctionnalité à exécuter au moyen d'un ordinateur ou autre dispositif programmable. On peut citer par exemple les modes de transmission de données qui accélèrent les télécommunications, les procédés de cryptage de données qui rendent les communications plus sûres, la commande de véhicules par des procédés modernes d'injection de carburant ou de commande d'un système hybride ou encore, l'assistance à la conduite d'un véhicule permettant d'apporter des solutions optimisées en réponse à une situation dangereuse, voire critique. Le corolaire à cette fabuleuse montée en puissance de l'outil informatique dans notre économie est un piratage et une contrefaçon accrue du fait de l'interconnexion sans cesse croissante des supports physiques sur lesquels les logiciels fonctionnent. Les techniques de reproductions illicites sont plus que jamais performantes. L'importance économique du logiciel a très vite fait prendre conscience de la nécessité d'une protection juridique destinée à lutter contre la piraterie et le parasitisme sous toutes ses formes dans un secteur où les investissements sont énormes et la copie très facile. A titre d'exemple, aux Etats -Unis, environ 13 milliards de dollars sont dépensés chaque année pour la création et la maintenance des systèmes informatiques. Dans ce contexte, tout pays a été ou sera conduit à examiner deux questions fondamentales : le logiciel nécessite -t -il une protection juridique? Les formes de protection adoptées sont - elles satisfaisantes? Les législations qui se sont confrontées à ces questions ont rencontré et rencontrent toujours beaucoup de difficultés pour arriver à une protection adaptée à cette création. 1

En France, on a d'abord pensé au brevet pour offrir une protection efficace pour les logiciels. Cependant, après avoir hésité, le législateur français a décidé d'exclure expressément en 1968, la possibilité de breveter les logiciels, solution qui a été reprise par la Convention de Munich en 1973. La loi du 3 juillet 1985 fut une solution de compromis en ajoutant les logiciels à la liste de l'article 3 de la loi du 11 mars 1957, tout en prévoyant pour eux un régime dérogatoire. Quelque mois plus tard, l'assemblée plénière de la Cour de cassation, statuant sous l'emprise de la loi de 1985, a rendu le 7 mars 1986, trois arrêts de principe qui marquèrent l'entrée des logiciels dans la famille des oeuvres de l'esprit. Au niveau européen, l'accord ne fut pas long à trouver sur le principe d'une protection des programmes d'ordinateur par le droit d'auteur. Le consensus se fit autour de la directive n 91/250 le 14 mai 1991. Cependant, il fallait trancher l'irritante question de leur originalité. La protection des programmes d'ordinateurs par le droit d'auteur uniquement ne permet cependant pas d'atteindre une protection optimale en ce sens qu'elle ne permet pas de protéger les moyens d'atteindre un résultat technique. C'est à la suite de la consultation organisée en juin 1997, autour du "Livre vert" sur le brevet communautaire et le système des brevets en Europe, que la brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur a été identifiée comme l'une des priorités pour lesquelles la Commission européenne devait rapidement prendre des mesures ; mesures qui devaient être destinées à améliorer le système des brevets dans l'union européenne. Dans ce document, le principal instrument était l'adoption d'une directive visant à harmoniser les conditions de brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur. Au terme d'une procédure de près de trois ans et demi, la proposition de directive de la Commission européenne sur la brevetabilité des inventions mises en ceuvre par ordinateur a été rejetée par le Parlement européen. Si le texte n'a pas été adopté, il n'en reste pas moins intéressant de s'y arrêter dans le cadre de cette étude. En l'absence de réglementations nouvelles sur la question, les tribunaux nationaux et les chambres de recours techniques de l'office européen des brevets ont donc poursuivi respectivement l'interprétation des dispositions nationales et européennes pour trancher les affaires qui leur étaient soumises. Le constat que nous pouvons faire à l'heure actuelle est celui d'une situation ambigue sur la protection à laquelle peut accéder un programme d'ordinateur, tant au niveau français, qu'au niveau européen. En effet, les textes français et européen considèrent que les programmes d'ordinateurs sont exclus de la qualification d'invention dès lors que la demande de brevet ou le brevet ne concerne qu'un programme d'ordinateur considéré en tant que tel. Il conviendra dans le cadre de notre analyse, de s'arrêter sur les notions de "logiciel ", "programme d'ordinateur ", mais également sur les termes "en tant que tel ", qui ont fait l'objet de développements par les chambres de recours techniques de l'office européen des brevets. 2

Si l'on s'intéresse à l'objet de la protection, à savoir le logiciel, malgré la compréhension divergente des réalités qu'il recouvre, il existe un dénominateur commun à tous les logiciels : ils traitent en effet tous de l'information. L'information est utilisée par le logiciel et constitue même sa matière première. Elle circule sous la forme d'un message diffusé à l'ordinateur et directement compris par lui. Dès lors, soit le programme d'ordinateur est considéré à partir de son écriture, il est alors l'expression d'une ceuvre originale et il répond dans ce cas aux exigences du droit d'auteur. Soit il correspond à une analyse conceptuelle d'un problème, permettant de trouver la solution technique adéquate, et il pourra potentiellement relever du droit des brevets. S'agissant des protections possibles, avec le droit d'auteur, c'est le code proprement dit qui se trouve protégé ; toute copie du code source se trouvant de la sorte interdite, indépendamment de ce que permet de réaliser le programme d'ordinateur. Avec le droit des brevets, ce sont les idées et principes qui sont sous-jacents aux dits codes, matérialisés par une réalisation concrète - le programme d'ordinateur -, qui vont pouvoir être protégés. La protection du logiciel par le seul droit d'auteur semble donc inadaptée : la protection de la forme, efficace contre la reproduction servile du logiciel est vite apparue insuffisante pour protéger une création dont la valeur essentielle réside dans sa fonction. Pour cette étude, nous nous intéresserons de façon conjointe à la jurisprudence française et aux décisions de l'office européen des brevets, en nous attachant à relever les convergences et les divergences. Nous aborderons également le système juridique applicable aux Etats -Unis et au Japon sur la question. Pour bien cerner le sujet, un autre aspect essentiel qui fera l'objet de développements, concerne la question du nombre de conditions de brevetabilité. On peut voir dans le terme "invention" le simple support des exigences manifestées en termes de qualificatifs. On peut également y voir une exigence propre à laquelle viennent s'adjoindre trois conditions. Enfin, il apparaît important de justifier le titre retenu, à savoir, "la protection des logiciels par brevet d'invention ", largement débattue à travers l'expression "brevetabilité des logiciels ". Cette question de la protection des logiciels par l'instrument du brevet est appréhendée par l'oeb ainsi que dans le projet de directive communautaire sous l'expression "brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur ". En l'espèce, notre choix vise à aborder, sous cet intitulé, la question de façon globale pour arriver au coeur de la question qui est celle de la protection des programmes d'ordinateur par brevet. 3

Résumé de thèse : L'EVOLUTION CONTEMPORAINE DE LA NOTION DE BREVETABILITE : ETUDE EN DROIT FRANÇAIS ET EUROPEEN L'impressionnante augmentation du nombre de dépôts de brevets, l'arrivée de nouvelles technologies mais également les nombreuses contestations du système des brevets invitent à se pencher sur la façon dont la notion de brevetabilité a su faire face à l'évolution des sciences et techniques et des pratiques des utilisateurs. La présente étude propose d'analyser l'évolution contemporaine de la notion de brevetabilité en observant d'abord l'élargissement du domaine de la brevetabilité, avant de s'intéresser à l'assouplissement des conditions de brevetabilité. La lacune législative en matière de définition de l'invention et le recul successif des exclusions à la brevetabilité ont été les vecteurs de cette évolution vers une protection qui s'est élargie plus que ce que la simple appréhension des nouvelles technologies aurait nécessité. Il ressort en outre de l'étude que le critère d'application industrielle doit être vu comme participant de la nature de l'invention, et non comme une condition de brevetabilité. Il apparaît également qu'en réaction à la complexité des nouvelles technologies, à la pression des acteurs économiques et aux modes d'examen des brevets, les conditions de nouveauté et d'activité inventive se sont vues particulièrement assouplies. L'étude conclut à un abaissement du seuil de brevetabilité et à la prolifération de brevets de mauvaise qualité ayant un impact négatif sur l'innovation.

Le contentieux du brevet d'invention Etude des rapports entre le droit des brevets et le droit judiciaire privé Résumé Le contentieux du brevet d'invention offre une image complexe qui n'attire pas les journaux du vingt heures. La complexité des rapports entre le droit des brevets et le droit judiciaire privé tient d'abord à "l'étroite symbiose des aspects techniques et juridiques" qui caractérise la matière des brevets d'invention et qui nécessite, en particulier pour le contentieux de la contrefaçon, des règles dérogatoires au droit commun de la procédure civile dans ses différentes composantes. Cette thèse tente de démontrer la pertinence d'un droit processuel d'application spécifique au contentieux du brevet d'invention. Dans l'ordre interne, le contentieux technique du brevet d'invention justifie la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris et une spécialisation des magistrats. Le droit de l'action en justice contient certains ajustements qui dépendent étroitement de la technique du droit des brevets et le droit de l'instance, spécialement en matière probatoire et conservatoire, nécessite diverses adaptations du droit commun de la procédure en raison des spécificités de l'objet du droit de brevet. Dans l'ordre international, la complexité de ce contentieux est amplifiée par la territorialité du droit de brevet. En Europe, l'absence de brevet communautaire ainsi que l'inadaptation du droit international privé et du droit judiciaire européen pour répondre efficacement aux défis des brevets européens justifient la création récente d'un brevet européen à effet unitaire et d'une Juridiction unifiée des brevets à caractère supranational. Ce nouveau système juridictionnel européen vient consacrer un véritable modèle de droit processuel des brevets.