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Transcription:

ÉDITORIAL J-BA LETTRE JURIDIQUE BANQUES ET ASSURANCES SPÉCIALE - AOÛT 2015 Les impacts de la Loi n 2015-994 relative au dialogue social et à l emploi dite «loi Rebsamen» sur la composition et le fonctionnement des Instances Représentatives du Personnel. La loi «Rebsamen» a été votée définitivement en juillet et validée pour l essentiel par le Conseil constitutionnel le 13 août 2015. Promulguée au J.O. le 17 août 2015, elle est à présent applicable. Ce texte sera assorti de décrets d application qui ne sont pas pris à l heure où nous écrivons ces lignes. Outre la mise en place des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, la création pour chaque salarié d un compte personnel d activité au 1 er janvier 2017 (revendications portées depuis longtemps par la CFDT) et des «retouches» du contrat de travail, la loi réforme en profondeur les instances représentatives du personnel. Ces évolutions sont importantes notamment sur la composition et le fonctionnement des instances dont une part substantielle est renvoyée à des négociations d entreprise. Les enjeux méritent donc que la Fédération leur consacre une lettre juridique spéciale. Celle-ci a vocation, non pas à traiter de toutes les questions qui se poseront (et qui donneront lieu sans doute à une abondante jurisprudence), mais à présenter les éléments essentiels de la réforme afin que les équipes puissent d ores et déjà se les approprier. Les enjeux de ce texte sur l organisation et le fonctionnement des instances sont forts. Bâti sur l échec des partenaires sociaux cet hiver à rénover le dialogue social, il est loin d être parfait. Le législateur a tenté d y réaliser un difficile compromis entre les nécessités de simplification revendiquées par les organisations patronales et l aspiration des salariés à participer activement à la vie de l entreprise, au travers des instances qui les représentent. Il importe aujourd hui que la modernisation du dialogue social ne se traduise pas pour les équipes et dans l intérêt des salariés par une baisse de moyens. Cette «modernisation» serait alors synonyme de régression, ce que la CFDT ne peut accepter. Bonne rentrée à tous! Par Thierry Tisserand, secrétaire national 1. Dans les entreprises de moins de 300 salariés La loi relative au dialogue social revoit totalement la structure de la représentation du personnel dans les entreprises de moins de 300 salariés. La délégation unique du personnel (DUP), dans sa nouvelle formule, regroupera CE, DP et CHSCT. L article 13 (articles L 2326-1 et suivants du Code du travail) de la loi prévoit à la fois de relever, de 199 à 299, l effectif maximum pour mettre en place une DUP et d y intégrer le CHSCT. Selon l étude d impact du ministère du Travail, cette mesure ouvre la DUP à 3 000 entreprises supplémentaires couvrant plus de 600 000 salariés. Pas de fusion, mais un regroupement des instances La loi ne prévoit pas une fusion, mais un regroupement des instances : «les délégués du personnel, le comité d entreprise et le CHSCT conservent l ensemble de leurs attributions» (article L 2326-3 nouveau du Code du travail). Pour connaître le nombre de mandats à la DUP et les crédits d heures, il faudra attendre les décrets d application de la loi. À noter : en vertu de l article 2326-6 nouveau du Code du travail, les heures de délégation pourront désormais être utilisées cumulativement dans la limite de douze mois. Autrement dit, les heures de délégation non utilisées au cours d un mois pourront être reportées sur les mois suivants. «Cette règle, ne peut conduire un membre à disposer, dans le mois, de plus d une fois et demie le crédit d heures dont il bénéficie», ajoute néanmoins la loi. En outre, les titulaires pourront, chaque mois, répartir entre eux et avec les suppléants leurs heures de délégation. Il faudra en informer l employeur et cette pratique ne devra pas permettre à un élu de recourir à plus d une fois et demie son crédit d heures mensuel. L obligation pour les élus de prévenir l employeur 8 jours avant d utiliser des heures de délégation a été retirée de la loi, mais pourrait être imposée par décret. Mise en place de la DUP L employeur pourra décider de mettre en place la DUP après consultation des délégués du personnel et, s ils existent, du comité d entreprise ainsi que du CHSCT. Ce pouvoir unilatéral reconnu à la direction pourra être exercé lors de la mise en place ou du renouvellement de l une des trois instances (c est-à-dire lors de l élection CE/DP ou de la désignation CHSCT). La durée des mandats des délégués du personnel, des élus CE ou CHSCT peut être prorogée ou réduite «dans la limite de deux années de manière à ce que leur échéance coïncide avec la date de mise en place de la DUP» (article 2326-1 3 du code du travail). Si l entreprise est composée d établissements distincts, une délégation unique du personnel sera mise en place pour chaque établissement.

CAS PRATIQUES Cas n 1 : Dans une entreprise de 250 salariés, le CE et les DP ont été élus le 1 er janvier 2013 pour une durée de 4 ans. Le CHSCT doit, quant à lui, être renouvelé le 1 er décembre 2015, soit en principe après l entrée en vigueur de la réforme des IRP. À l occasion du renouvellement du CHSCT, l employeur sera fondé à vouloir imposer le regroupement des instances au sein de la nouvelle DUP compte tenu de l effectif, inférieur à 300 salariés. À cette occasion, la direction pourra réduire la durée des mandats CE/DP pour la période restante, soit 13 mois. Cas n 2 : Dans une entreprise de 250 salariés également, le CE et les DP ont été élus le 1 er juin 2015 pour une durée de 4 ans. Le CHSCT doit être renouvelé le 1 er décembre 2015. Comme dans le premier exemple, l effectif permet de mettre en place la nouvelle DUP. En revanche, la durée restante pour les mandats CE/DP au jour du renouvellement du CHSCT en 2015 sera supérieure à 2 ans. Il semble que la nouvelle DUP ne pourra dès lors pas être immédiatement instituée. La direction devra attendre le prochain renouvellement du CE et des DP en juin 2019 pour instituer la DUP (inutile de réduire la durée du mandat au CHSCT car l article 16 de la de loi prévoit que les mandats au CHSCT prennent désormais fin au même moment que ceux aux CE/DP). Au moins une réunion tous les deux mois Par défaut, CE, DP et CHSCT conserveront leurs règles de fonctionnement respectives. Les aménagements prévus par la loi sont toutefois nombreux. Tout d abord, les réunions de la DUP ne seront plus mensuelles, mais bimestrielles, c est-à-dire une fois tous les deux mois. Afin de préserver le rythme actuel des réunions CHSCT, qui est trimestriel, au moins quatre des six réunions obligatoires de la DUP devront porter en tout ou partie sur des sujets relevant des attributions du CHSCT. Un bureau à deux têtes Le secrétaire de la DUP assumera la fonction de secrétaire du CE. Afin de préserver l autonomie du CHSCT, il a été décidé que le secrétaire adjoint de la DUP exercera les fonctions dévolues au secrétaire du CHSCT (article 2326-4 nouveau du Code du travail). Les modalités de leur désignation seront fixées par décret. L ordre du jour des réunions plénières sera établi conjointement par le secrétaire de la DUP et l employeur, les consultations obligatoires étant inscrites de plein droit. Cet ordre du jour sera impérativement communiqué aux «représentants ayant qualité pour siéger» 8 jours au moins avant la séance. Compétences partagées CE/CHSCT : un avis et une expertise uniques Lorsqu un point inscrit à l ordre du jour de la DUP concernera à la fois les attributions exercées au titre du CE et du CHSCT, l employeur pourra recueillir un avis unique sous réserve que les membres extérieurs du CHSCT (inspecteur du travail, médecin du travail, ingénieur de la Carsat) aient été invités en réunion. Dans ce cadre, l expertise décidée sera également commune aux deux institutions. La loi ne prévoit rien sur le financement de ces expertises, mais le ministère du travail assure que l employeur restera tenu de payer les expertises CHSCT. L avis devra être rendu dans les délais applicables au comité d entreprise. Les suppléants siègent aux réunions Le droit pour les suppléants de siéger aux réunions plénières de la DUP est préservé. Ils «participent aux réunions avec voix consultative», est-il indiqué. C est-à-dire que, et c est déjà le cas aujourd hui, leur voix n est pas prise en compte pour savoir si l avis de l instance est positif ou négatif sauf s ils remplacent le suppléant empêché. Modalités de dissolution de la DUP À l échéance des mandats, et après avis des membres de la DUP, l employeur pourra décider d un retour aux instances séparées. Si l effectif de l entreprise passe sous le seuil de cinquante salariés pendant 24 mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédant le renouvellement de l instance, l employeur pourra supprimer la DUP. Inutile, donc, pour la direction de négocier un accord avec les syndicats ou de saisir l administration du travail comme l exige aujourd hui le Code du travail. Si vous être déjà en DUP à la date d entrée en vigueur de ces nouvelles règles, l employeur peut conserver un CHSCT distinct, «dans la limite de deux mandats suivant la fin des mandats en cours». Entrée en application de la mesure Cette nouvelle organisation de la représentation du personnel dans les entreprises de moins de 300 salariés entrera immédiatement en application le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, sous réserve de la publication des décrets déterminant : le nombre de représentants à élire (article L. 2326-2-1 nouveau du Code du travail) ; les conditions de désignation du secrétaire et du secrétaire adjoint (article L. 2326-4 nouveau du Code du travail) ; les conditions de l expertise commune (article L. 2326-5 nouveau du Code du travail) ; le nombre et les conditions d utilisation du crédit d heures (article L. 2326-6 nouveau du Code du travail) Lettre juridique de la fédération Cfdt Banques et Assurances - Spéciale - Août 2015 2

2. Dans les entreprises de plus de 300 salariés : À partir de 300 salariés, la loi sur le dialogue social laisse une grande latitude aux partenaires sociaux pour organiser la représentation du personnel. Un regroupement partiel ou total des IRP sera possible, sous réserve d un accord collectif majoritaire (article 14 de la loi, articles L 2391-1 et suivants du Code du travail). Selon le ministère du Travail, 7 000 entreprises couvrant 7 millions de salariés seraient potentiellement concernées. Un accord majoritaire permet le regroupement des instances À partir de 300 salariés, l entreprise pourra proposer un regroupement des instances représentatives séparées. Cet important changement ne pourra intervenir qu en cas d accord collectif signé par des syndicats ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles (il faudra donc impérativement un accord majoritaire). Les cas possibles de regroupement des institutions : le regroupement des instances envisagé par l accord collectif pourra prendre 4 formes différentes : soit le regroupement des CE, DP et CHSCT (comme dans la nouvelle DUP) ; soit le regroupement de deux de ces institutions, ce qui donne les combinaisons possibles suivantes : CE et DP ; CE et CHSCT ; CHSCT et DP. De plus, dans les entreprises comportant des établissements distincts, l accord collectif pourra prévoir un regroupement différent selon les établissements. Important : même sans accord collectif global, un accord collectif majoritaire conclu au niveau de l établissement pourra créer un regroupement des instances pour cet établissement. En cas d unité économique et sociale (UES) d au moins 300 salariés, un accord sera possible au niveau d une ou plusieurs entreprises ou au niveau de l UES. Le statut de l instance L instance créée par accord collectif aura la personnalité morale et pourra donc agir en justice. Elle pourra aussi gérer son patrimoine. À ce sujet, si l instance correspond à un gros CE [Rappel : si 2 des 3 critères suivants sont dépassés : emploi de 50 salariés, 3,1 millions d de ressources annuelles, 1,55 million d de bilan], elle devra obligatoirement mettre en place la commission des marchés prévue par la loi du 5 mars 2014 au nom de la transparence financière des CE. Cette commission devra alors se réunir pour tout marché dont le montant est supérieur à 30 000. Création de la nouvelle instance La mise en place de la nouvelle instance se fait à l occasion du renouvellement électoral de l une des trois instances concernées. L élection des représentants suivra les règles de l élection du comité d entreprise (article L. 2324-1 et suivants), sauf dans le cas d une instance regroupant DP et CHSCT : dans ce cas, l élection suivra les règles de celle des délégués du personnel (article L.2314-1). La durée du mandat du CHSCT est aligné sur celle du CE (article L.4613-1 modifié du Code du travail). La composition de l instance et les heures de délégation Un décret fixera le nombre minimal de mandats et d heures de délégation en fonction de l effectif de l entreprise et, pour les heures de délégation, des compétences de l instance. L accord pourra bien sûr aller au-delà de ces seuils. Les représentants syndicaux assisteront aux réunions de l instance portant sur les attributions dévolues au CE. De grandes latitudes laissées aux partenaires sociaux L accord sur l instance regroupant plusieurs IRP devra prévoir pour son fonctionnement : au moins une réunion tous les deux mois de l instance (dont 4 pour les attributions liées aux conditions de travail) ; les modalités de l établissement et communication de l ordre du jour ; le rôle respectif des titulaires et suppléants ; le nombre d heures de délégation et leur éventuelle mutualisation (dans le respect du plancher qui sera fixé par décret). De plus, lorsque l instance englobera le CHSCT, l accord devra aussi prévoir : une commission d hygiène, de sécurité et de conditions de travail «à laquelle peuvent être confiées tout ou partie des attributions reconnues au CHSCT» ; la composition et le fonctionnement de cette commission ; au moins 4 réunions par an de cette commission. Outre la commission des marchés (lire plus haut), l accord pourra prévoir la mise en place des commissions du CE suivantes : la commission économique, actuellement obligatoire dans les CE d entreprises comptant au moins 1 000 salariés (article L. 2325-23) ; la commission formation, actuellement obligatoire dans les CE à partir de 200 salariés (article L. 2325-26) ; la commission d information et d aide au logement, actuellement obligatoire dans les CE à partir de 300 salariés (article L. 2325-27) ; la commission de l égalité professionnelle, actuellement obligatoire dans les CE à partir de 200 salariés (article L. 2325-34). Lettre juridique de la fédération Cfdt Banques et Assurances - Spéciale - Août 2015 3

Suppression de l instance Habituellement, la dénonciation d un accord collectif n entraîne sa suppression qu à l entrée en vigueur d un nouvel accord, ou à défaut au bout de 15 mois (article L. 2261-1). Ce ne sera pas le cas pour l accord regroupant les IRP. Sa dénonciation prendra effet dès la fin du préavis de 3 mois qui doit la précéder (article L. 2261-9). Autrement dit, 3 mois après la dénonciation de l accord, l entreprise devra organiser le retour à des instances séparées. Selon le nouvel article L. 2394-1, l employeur devra procéder «sans délai à l élection des membres ou à la désignation des institutions qui étaient regroupées, conformément aux dispositions relatives à chacune d elles». Cette possibilité de regrouper les IRP par accord majoritaire entrera en application dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, sous réserve de la publication des décrets en Conseil d État déterminant : le nombre minimum de représentants élus (article L. 2392-1 nouveau du Code du travail) ; le nombre minimum d heures de délégation (article L. 2393-1 nouveau du Code du travail) ; les règles de fonctionnement de l instance à défaut de stipulations dans l accord (nombre de représentants, de jours de formation et d heures de délégation) (article L. 2393-3 nouveau du Code du travail). À noter : la loi organise aussi la tenue de réunions des élus par visioconférence (article 17, articles L 2325-5-1, L 2327-13-1, L 2334-2, L 2341-12, L 23-101-1 et L 2352-27-1 nouveaux du Code du travail). À défaut d accord avec l employeur, le recours à la visioconférence est limité à 3 réunions par an et la loi permet désormais un vote à bulletin secret lors de la tenue de telles réunions. 3. Regroupement des consultations du CE et des obligations de négociations à compter du 1 er janvier 2016 : (art. L 2323-6 et suivants du code du travail) La loi veut rationaliser les obligations qui pèsent sur les entreprises en matière de dialogue social et modifie la possibilité de négociation avec les élus. Les obligations annuelles d information-consultation sont regroupées en 3 consultations La situation économique et financière de l entreprise La politique sociale de l entreprise : conditions de travail et l emploi (évolutions, qualifications) Les orientations stratégiques de l entreprise (GPAC, Formation professionnelle ). Un accord d entreprise pourra adapter les modalités d information-consultation et de fonctionnement du CE. À noter : l avis du CE ne sera plus requis pour la révision, la dénonciation ou la conclusion d accords collectifs. Les négociations obligatoires d entreprises sont regroupées en 3 thèmes Sur la rémunération, le temps de travail et la valeur ajoutée (salaires effectifs et organisation du temps de travail, intéressement, participation, etc.) ; Sur l égalité professionnelle, la qualité de vie au travail (dont la pénibilité) ; Dans les entreprises d au moins 300 salariés : la négociation triennale sur la GPEC sera étoffée qui pourra porter sur le déroulement des carrières et l exercice des fonctions syndicales. Cette négociation pourra porter sur le contrat de génération. Un accord majoritaire pourra modifier la périodicité de ces négociations sans pour autant en supprimer des thèmes. À noter : l article 21 de la loi (articles L 2232-21, L 2232-21-1 nouveau et L 2232-22 modifié) ouvre à toutes les entreprises la possibilité de négocier avec un élu du personnel prioritairement mandaté par une organisation syndicale représentative de la branche ou au niveau interprofessionnel et national en l absence de délégué syndical. Le champ de négociation ne sera pas limité et l accord devra être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés. Si l élu n est pas mandaté, la négociation ne pourra porter que sur un accord collectif dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à la conclusion d un accord collectif, à l exception d un PSE. Un tel accord ne sera valable que s il est conclu par des membres titulaires représentant la majorité des salariés et s il est approuvé par la commission de branche. Une clarification des compétences des IRP : l instance centrale La loi prévoit que seul le CCE et l instance de coordination des CHSCT seront consultés sur les projets de l entreprise, relevant de leurs compétences, s ils ne comportent pas de mesures d adaptation spécifiques à un ou plusieurs établissements ou lorsque les mesures de mise en œuvre devant faire l objet d une consultation ne sont pas encore définies. Lorsque le CCE, l instance des CHSCT et un ou plusieurs comités d établissement ou CHSCT doivent être consultés, l avis rendu par chaque comité d établissement ou CHSCT est transmis au CCE ou à l instance des CHSCT (délais à préciser par décret). Lettre juridique de la fédération Cfdt Banques et Assurances - Spéciale- Août 2015 4

4. Les nouveaux droits des représentants des salariés : Le texte contient des dispositions qui visent à favoriser et à élargir l engagement syndical et la représentativité syndicale. Financement de la formation économique et sociale L article 25 de la loi (article L 3142-8 modifié du Code du travail) dispose que le salarié qui bénéficie d un tel congé a droit au maintien total ou partiel par l employeur de sa rémunération. La demande doit en être faite par une organisation syndicale satisfaisant au respect des valeurs républicaines et d indépendance, légalement constituée depuis au moins 2 ans et couvrant le champ professionnel de l entreprise ou de l établissement. Cette demande doit être expresse et écrite, préciser le niveau demandé de maintien de la rémunération et contenir l accord du salarié sur la demande. Une convention conclue entre l OS et l employeur fixe le montant que celle-ci lui rembourse (subrogation). L entreprise peut être couverte par un accord prévoyant une prise en charge intégrale. En cas de non-remboursement, l employeur peut procéder à une retenue sur le salaire du bénéficiaire, dans des conditions et limites prévues par décret en Conseil d État. Garantie de non-discrimination salariale L article 6 de la loi (article L 2141-5-1 nouveau du Code du travail) prévoit que les salariés munis d un mandat de DS, RSS, etc. bénéficieront, à défaut d accord collectif plus favorable et si leurs heures de délégation dépassent 30 % de leur temps de travail annuel, d une évolution de rémunération au moins égale, sur l ensemble de leur mandat, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés dont la situation est comparable. Entretiens professionnels de début et de fin de mandat, valorisation des compétences acquises et heures de délégation du DS Article 4 (article L 2141-5 modifié du Code du travail) : au début de son mandat, le représentant du personnel titulaire, le délégué syndical ou le titulaire d un mandat syndical, bénéficie à sa demande d un entretien individuel avec son employeur. Cet entretien porte sur les modalités pratiques d exercice du mandat au sein de l entreprise au regard de l emploi occupé. Le représentant du personnel peut se faire assister à l entretien d une personne de son choix, cet entretien ne se substituant pas à l entretien professionnel. Lorsque l entretien est réalisé au terme du mandat, il permet de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l expérience. Par ailleurs (article 5), un dispositif de valorisation des compétences sera créé afin de faciliter le travail de reconnaissance des compétences acquises au cours du mandat. Pour ce faire, les compétences seront listées. Elles feront l objet d une certification inscrite à l inventaire (éligibles au titre du CPF). Cette certification sera enregistrée en blocs de compétences afin d obtenir des dispenses dans le cadre notamment d une VAE. En vertu de l article 9 (article L2143-16-1 nouveau du Code du travail), le DS peut utiliser ses heures de délégation pour participer, au titre de son organisation, à des négociations ou des concertations à un autre niveau que celui de l entreprise ou aux réunions d instance organisées dans l intérêt des salariés de l entreprise ou de la branche. Les heures de délégation de la section syndicale pour préparer la négociation des accords collectifs en sont exclues. Le renforcement de la parité des IRP et l abaissement des seuils des représentants des salariés au Conseil d administration L article L 2324-22-1 du Code du travail prévoit que pour chaque collège électoral les listes comportant plusieurs candidats sont composées d un nombre de femmes et d hommes correspondant à la part de femmes et d hommes inscrits sur la liste électorale. Les listes sont composées alternativement d un candidat de chaque sexe jusqu à épuisement des candidats d un des sexes. Le juge d instance reste compétent pour connaître de ce contentieux et aura la faculté d annuler l élection du ou des candidats surreprésentés, l employeur n étant pas contraint de réorganiser des élections partielles. Cette disposition sera applicable à compter du 1 er janvier 2017. Cette parité est applicable à l élection des salariés au Conseil d administration ainsi qu aux listes prud homales. Le parlement a abaissé le seuil à partir duquel le conseil d administration doit comprendre des administrateurs salariés : 1 000 salariés contre 5 000 lorsque le siège est en France, 5 000 salariés contre 10 000 si le siège social est situé en France et à l étranger. Lorsqu elles sont le lieu de prises de décision, les holdings de tête même inférieures à 50 salariés devront avoir des administrateurs salariés. Les holdings partrimoniales de moins de 50 salariés en sont exclues lorsqu elles détiennent les filiales soumises à cette obligation. Par Thierry Tisserand Remerciements à Yolande Solé, secrétaire nationale et à Karine Vlassoff, secrétaire fédérale, pour leur relecture attentive. Sources et emprunts : Actuel RH/liaisons sociales, texte de la Loi J-BA LETTRE JURIDIQUE BANQUES ET ASSURANCES Rédaction : Thierry Tisserand, secrétaire national. Maquette : Nadia Ladjeroud Contact : ttisserand@fba.cfdt.fr CFDT BANQUES ET ASSURANCES 47-49 AVENUE SIMON BOLIVAR 75 950 PARIS CEDEX 19 5

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