La dyspnée Aspects pharmacologiques
Opiacés: efficacité Jennings, Thorax 2002; 57: 939
Opiacés: dépression respiratoire A redouter uniquement si doses excessives Introduction à faible dose et titration prudente Il y a des signes avant-coureurs : po2 et pco2 sont toujours précédés par une somnolence, une hypoventilation, une fréquence respiratoire
Opiacés: mécanisme d action Mécanisme d action complexe Au niveau des récepteurs morphiniques du SNC et du système cardiorespiratoire Réduit la sensation déplaisante de dyspnée
Opiacés: modalités pratiques La morphine est l opioide le mieux étudié dans cette indication: Dose initiale : - Patient naïf d opioide: 15 à 30 mg de morphine orale par 24 h - Patient sous opioide à titre antalgique: + 25 à 50 % de la dose antérieure - Patient âgé, fragile, BPCO, insuffisant rénal : réduire la posologie Entre-dose: 1/10 e de la dose de 24 h, toutes les 4 heures ou toutes les 2 heures sous surveillance médicale. Titration par palier de 25 à 50 %, en fonction de la réponse clinique.
Opiacés: modalités pratiques Privilégier la voie orale sauf en cas d urgence. - Les formes à libération immédiate ou retardée peuvent être utilisées. - L efficacité de la morphine par aérosol est controversée. Les effets secondaires (constipation, nausées, etc) sont anticipés et gérés comme lorsque la morphine est prescrite à titre antalgique. En cas de contre-indication ou de toxicité intolérable, la morphine peut être remplacée par un autre opioide (ex. hydromorphone, fentanyl, oxycodone ) mais leur place n a pas encore pu être bien documentée.
Opiacés: aérosol Mécanisme d action - Action sur les récepteurs morphiniques alvéolaires - < 15 % résorption systémique Efficacité sur la dyspnée de 5 à 30 mg de morphine nébulisée Posologie - A diluer dans 2 à 3 ml sérum ϕ - 2,5 à 10 mg par 4 h - 25-50 % Toxicité - Toxicité systémique réduite - Bronchospasme (conservateur) - Gout amer, picotements
Opiacés: cas clinique Femme de 68 ans Hypernéphrome généralisé Lymphangite pulmonaire Dyspnée au moindre effort Opiacé naïve Administration d un opiacé? Solution orale de morphine (Oramorph ) 2,5 à 5 mg toutes les 4 h ou éventuellement à la demande Laxatif (et antiémétique)
Opiacés: cas clinique (2) Femme de 68 ans Hypernéphrome généralisé Lymphangite pulmonaire Dyspnée au moindre effort FG < 30 ml/minute Opiacé naïve Solution orale de morphine (Oramorph ) 2,5 mg toutes les 6 h ou éventuellement à la demande Laxatif (et antiémétique) Administration d un opiacé?
Opiacés: cas clinique (3) Femme de 68 ans Hypernéphrome généralisé Lymphangite pulmonaire Dyspnée persistante malgré 5 mg de solution orale de morphine toutes les 4 h Adaptation de l opiacé? Solution orale de morphine (Oramorph ) 7,5 mg toutes les 4 h En réserve: 4,5 mg, maximum toutes les 4 heures
Opiacés: cas clinique (4) Femme de 68 ans Hypernéphrome généralisé Lymphangite pulmonaire Dyspnée soulagée par 10 mg de solution orale de morphine toutes les 4 h Adaptation de l opiacé? Comprimé de morphine à libération retard (MS Contin 10 mg) 30 mg toutes les 12 h En réserve: 6 mg, maximum toutes les 4 heures
Opiacés: cas clinique (5) Femme de 68 ans Hypernéphrome généralisé Métastases osseuses Lymphangite pulmonaire Douleur bien soulagée par Durogésic 50 µgr/h (= ± 120 mg morphine po /24h) Poursuite du Durogésic Solution orale de morphine (Oramorph ) 5 à 10 mg toutes les 4 h ou éventuellement à la demande Dyspnée au moindre effort Adaptation de l opiacé?
Opiacés: cas clinique (6) Femme de 68 ans Hypernéphrome généralisé Lymphangite pulmonaire Dyspnée habituellement soulagée par la prise de 20 mg de solution orale de morphine toutes les 4 heures Crise de dyspnée importante après une mobilisation Adaptation de l opiacé? Ampoule de sulfate de morphine (10 mg/ml) 6 mg morphine sous cutané immédiatement Poursuite de la solution orale de morphine 20 mg toutes les 4 heures Anticiper la survenue d une nouvelle crise avec 12 mg de solution orale de morphine (45 min avant mobilisation)
Benzodiazépines: efficacité 1. Aucun effet significatif sur la dyspnée 2. Pas d effet préventif sur l apparition de la crise de dyspnée 3. Toxicité (somnolence) : Morphine > BZD > placebo 4. Pas liée au type de BZD, dose, voie, fréquence, durée de tt Simon, Cochrane 2011: issue 3
Benzodiazépines: modalités pratiques Pas d indication en première intention dans le traitement symptomatique de la dyspnée. A utiliser en association avec la morphine pour traiter l anxiété et gérer les crises de panique respiratoire. Peuvent également être administrées en cas d échec d un opioïde seul.
Benzodiazépines: modalités pratiques Choisir de préférence une benzodiazépine à demi-vie courte. Adapter la posologie à la situation clinique et titrer. Prévoir des entre-doses. Crise de panique respiratoire - Alprazolam: 0,5 à 1 mg per os - Lorazépam: 0,5 à 2 mg per os - Midazolam: 2,5 à 5 mg sc Anxiété chronique - Alprazolam: 0,5 à 1 mg per os, toutes les 4 à 6 h - Lorazépam: 0,5 à 2 mg per os ou sc, toutes les 6 à 8 h Remplacer éventuellement la benzodiazépine par un neuroleptique sédatif chez le patient présentant simultanément une anxiété et une confusion
Corticoïdes: modalités pratiques Utiles en cas de composante inflammatoire: compression tumorale, syndrome cave supérieur, lymphangite carcinomateuse, fibrose pulmonaire, exacerbation de BPCO, etc. Dexamethasone: 5 mg po, sc ou iv par 24 h Methylprednisolone : 32 mg po ou iv par 24 h Administrer le corticoïde de préférence en début de journée Evaluer l efficacité après 1 semaine, arrêter complètement le médicament s il est inefficace ou réduire graduellement sa posologie jusqu à la dose minimale efficace. Associer la prise à celle d un inhibiteur de la pompe à protons chez les patients traités par un anti-coagulant, un AINS ou en cas d antécédent d ulcère gastroduodénal.
Oxygène: efficacité Source Population Etude Résultat Philip 2006 J Pain Symptom Manage; 32: 541 51 cancer 17 Sa O2 < 90 % RCT vs AC 4 l/min Pas d effet Booth 1996 Am J Resp Crit Care Med; 153: 1515 38 cancer 6 Sa O2 < 90 % RCT vs AC 4 l/min Pas d effet Abernathy 2010 Lancet 4; 376: 784 239 (64 % cancer) PaO2 >55 mmg Hg RCT vs AC 2 l/min Pas d effet Ahmedzai 2004 Br J Cancer; 90: 366 12 cancer Sa O2 > 90 % Effort (marche) RCT vs AC 8-10 l/min Pas d effet Bruera 2003 Palliat Med; 17: 659 33 cancer SaO2 > 90 % Hb > 10 gr% RCT vs AC 5 l/min Pas d effet Bruera 1993 Lancet; 342: 13 14 cancer Sa O2 < 90 % RCT vs AC 5 l/min Effet +
Oxygène : efficacité Survie chez le patient BPCO avec pao2 < 55 mm Hg Si > 16 heures sur 24 h (y compris durant la nuit)
Oxygène : modalités pratiques A réserver aux patients qui se plaignent d une dyspnée Chez le patient cancéreux non hypoxique : pas plus efficace qu un souffle d air froid dirigé sur le visage du malade Faire un test thérapeutique, évaluer l efficacité et poursuivre uniquement si amélioration du symptôme. Ne pas se fier à une mesure de la saturation car il n y a pas de corrélation entre la présence ou l intensité d une dyspnée et la sévérité de l hypoxémie.
Oxygène : modalités pratiques Administrer par lunettes (souvent mieux tolérées) ou au masque, à un débit adapté à la pathologie (prudence chez le BPCO) et à la clinique, en continu ou de façon intermittente! Assèchement des muqueuses et dépendance psychologique. Limiter le risque de dépendance en informant le patient du principe du test thérapeutique et de la possibilité d une administration intermittente. Chez un patient qui séjourne à domicile et bénéficie du statut palliatif, la prescription doit comporter : - le type d oxygénothérapie demandée (ex. oxyconcentrateur), - la période (maximum 1 mois, renouvelable de façon illimité), - le dosage (litres/minute et nombre d heures/jour), - l humidificateur, - la bouteille de réserve de 1 m 3, - la mention «tiers payant applicable»
Oxygène : modalités pratiques Message aux proches «Il ne semble vraiment pas souffrir. Dans ces circonstances, nous essayons habituellement de passer tous les soins en revue pour nous assurer qu ils apportent un certain confort au patient et ne prolongent pas le processus au-delà du cours normal de la maladie. Et justement, l oxygène risque de prolonger son agonie sans lui procurer aucun confort, maintenant. Je voudrais vous suggérer de réduire l oxygène pendant quelques heures, voire cesser d en administrer tant que Monsieur ne semble pas souffrir.» http://www.virtualhospice.ca
L encombrement respiratoire ASPECTS PHARMACOLOGIQUES
Encombrement respiratoire: introduction Symptomatologie durant les 48 dernières heures de vie Bruits respiratoires anormaux 56 % Troubles urinaires 53 % Douleur 51 % Agitation 42 % Dyspnée 22 % Nausée et vomissement 14 % Transpiration 14 % Mouvement clonique, spasme 12 % Confusion 9 % Lichter, J Palliative Care 1990; 6 : 7
Encombrement respiratoire: introduction Prévalence: 41 à 92 % des patients en fin de vie Délai médian: 57 (± 23) h avant le décès Origine de l encombrement respiratoire Sécrétions salivaires et bronchiques Œdème pulmonaire Aspiration de solides et de liquides Facteurs de risque Cancer du poumon Agonie de longue durée Bennett. Palliative Medecine 2002; 16: 369 Kass. J Pain Symptom Manage 2003; 26: 897
Encombrement respiratoire: introduction Vécu des proches face à l encombrement respiratoire 0 (pas du tout stressant) 0 % des proches 1 4,6 % 2 15 % 3 26 % 4 (très stressant) 52 % Étude rétrospective (n = 208 proches) Morita. J Pain Symptom Management 2004; 27: 98
Anticholinergiques: efficacité Mécanisme d action sécrétions salivaires et respiratoires Effet broncho-dilatateur Efficace dans 2/3 des cas [ 48 à 92 % ] 1/2 réponse précoce (< 4 h) 1/2 réponse tardive Sécrétions oro-pharyngées > bronchiques? Surinfection, œdème pulmonaire, aspiration Prévient l apparition de nouvelles sécrétions! N assèche pas les sécrétions déjà présentes Bennett, Palliative Medecine 2002; 16: 369 Kass, J Pain Symptom Manage 2003; 26: 897
Anticholinergiques: modalités pratiques Choix de la médication et posologie Hyoscine Scopolamine (0,25 mg/1 ml) Glycopyrronium Robinul (0,2 mg/1 ml) Voie sc, iv sc, iv Posologie 0,25 à 0,5 mg/ 4 h 0,2 à 0,4 mg/ 4 h Atropine (0,5 mg/ 1 ml) sc, iv 0,25 à 0,5 mg/2 à 4 h Butylhyoscine Buscopan (20 mg/1 ml) sc, iv 5 à 10 mg/ 4 à 6 h
Anticholinergiques: modalités pratiques Toxicité Rétention urinaire Constipation Sécheresse buccale Troubles de l accommodation (mydriase) Modification du rythme cardiaque dose dépendant Bradycardie à faible dose Tachycardie à dose élevée Robinul < Scopolamine Toxicité neurologique centrale Scopolamine : sédation, confusion, agitation paradoxale Atropine : Agitation, confusion Robinul : Pas de toxicité centrale
Anticholinergiques: modalités pratiques Mesures associées Réduction de l apport hydrique Arrêt des fluidifiants (mucolytiques) Drainage postural (position semi-assise, décubitus ¾ latéral) Aspiration naso-pharyngée et/ou bronchique (à évaluer) Discussion d un traitement par furosémide Information et soutien des proches Bennett, Palliative Medecine 2002; 16: 369
Anticholinergiques: aspiration bronchique Utile en cas d échec ou avant l introduction des anticholinergiques! Acte traumatique, parfois vécu comme une agression! L aspiration appelle l aspiration
La toux ASPECT PHARMACOLOGIQUE
Toux: introduction Incidence 50 % des cancers terminaux 80 % des cancers pulmonaires Physio pathogénie Réflexe visant à éliminer des voies respiratoires du matériel étranger ou des sécrétions excessives > stimulation des nerfs sensitifs V.A.R supérieure et inférieure, cavum, oreille, plèvre, oesophage nerf vague centre de la toux réflexe moteur = inhalation d air fermeture de la glotte pression thoracique expiration brutale sous pression Souvent corrélée à l insomnie, la fatigue, les nausées, la douleur
Toux: traitement symptomatique Toux grasse productive -Humidification de l air inspiré -Nébulisation sérum physio. -Mucolytique -Aérosol de bronchodilatateur -Drainage postural, kiné Toux grasse et non productive -Antitussif -Anticholinergique -Aspiration Toux sèche irritative -Antitussif -Corticoïde -Aérosol d anesthésique local
Antitussifs : opiacés Codéine, morphine, oxycodone, hydromorphone, méthadone et dextrométhorphane (antag. NMDA) Pas de données suffisantes pour recommander une molécule Si opioïde administré pour une douleur ou une dyspnée: 25 à 30 % posologie de départ Association 2 morphiniques Effet synergique dextrométhorphane Codéine 10 à 20 mg DA : 4 heures! Métaboliseur lent Sédation, nausées, constipation Dextrométhorphane 10 à 15 mg DA : 4 à 6 heures Peu de sédation, nausées
Antitussifs : anesthésiques locaux Quelques report case encourageants Lingerfelt 2007, Support Oncol; 5: 301 Burns 2000, Hosp Pharm; 35: 1349 Mécanisme d action inconnu? Action sur les récepteurs alvéolaires juxta-capillaires Posologie Bupivicaine 0,25 % 5 ml ttes 4-8 h Lidocaine 2 % 5 ml ttes 4 6 h Nébulisation à faible débit Toxicité Bronchospasme (? conservant) - CI asthme Fausse déglutition - Eviter alimentation < 30 à 60 Mauvais goût, raucité de la voix
Les hémoptysies Aspect pharmacologique
Hémoptysies: introduction Est-ce une hémoptysie? Un rejet par la bouche de sang provenant des voies aériennes sous-glottiques Quel est son degré de gravité? 1.L importance du saignement (! > 50 à 100 ml) 1 cuillère à soupe = 10 ml 2.Un contexte d insuffisance respiratoire La mort est causée par l asphyxie du patient et non par un choc hémorragique
Hémoptysies: introduction Épidémiologie 20 à 25 % des cancers du poumon < 5 % hémoptysie grave 0,007 % hémoptysie unique et mortelle Étiologie 47 à 70 % > cancer du poumon Cancer primitif > métastases pulmonaires Carcinome carcinoïde > autres histologies risque si surinfection pulmonaire (abcès, aspergillose ), bronchectasies, embolie pulmonaire
Hémostatiques: modalités pratiques Hémoptysie modérée et répétée Arrêt des anticoagulants, anti-agrégants, AINS Hémostatique oral Acide tranexamique 1 gr suivi par 500 mg po ou iv / 8 h Support psychosocial Hémoptysie massive Définir le projet thérapeutique Prévoir un protocole de sédation Positionnement (décubitus contro-latéral), présence.