LES TUMEURS ENDOCRINES : LE POINT DE VUE DU RADIOLOGUE

Documents pareils
Histoire d une masse pancréatique

Peut-on reconnaître une tumeur de bas-grade en imagerie conventionnelle? S. Foscolo, L. Taillandier, E. Schmitt, A.S. Rivierre, S. Bracard, CHU NANCY

Artéfact en queue de comète à l échographie hépatique: un signe de maladie des voies biliaires intra-hépatiques

UE2 CANCEROLOGIE Place de la Médecine Nucléaire

IRM du Cancer du Rectum

Traitements néoadjuvants des cancers du rectum. Pr. G. Portier CHU Purpan - Toulouse

Apport de l IRM dans la

PLACE DE L IRM DANS LE BILAN D EXTENSION DU CANCER DU RECTUM. Professeur Paul LEGMANN Radiologie A - Cochin Paris

Imagerie des tumeurs endocrines Le point de vue de l imagerie moléculaire

Actualités s cancérologiques : pneumologie

CORRELATION RADIO-ANATOMIQUE DANS LE CARCINOME HEPATOCELLULAIRE TRAITE PAR TRANSPLANTATION HEPATIQUE : IMPACT SUR LA RECIDIVE

Votre guide des définitions des maladies graves de l Assurance maladies graves express

Radiologie Interven/onnelle sur les nodules pulmonaires. J. Palussière, X. Buy Département imagerie

Actualités IRM dans la SEP Thomas Tourdias 1, 2

Métastase unique d un NPC: Une question singulière? Jean Louis Pujol - Xavier Quantin Mohammad Chakra Fabrice Barlési

Recommandations Prise en charge des patients adultes atteints d un mélanome cutané MO

Le point sur les techniques d embolisation des hépatocarcinomes

Intérêt de la TEP-FDG dans les cancers de l ovaire

Cancer du sein. Du CA15-3 à la tomographie à émission de positons.

INTERFERON Traitement adjuvant du mélanome à haut risque de récidive. Dr Ingrid KUPFER-BESSAGUET Dermatologue CH de quimper

Association lymphome malin-traitement par Interféron-α- sarcoïdose

Transplantation hépatique à donneur vivant apparenté. Olivier Scatton, Olivier Soubrane, Service de chirurgie Cochin

ALTO : des outils d information sur les pathologies thromboemboliques veineuses ou artérielles et leur traitement

Incontinence anale du post-partum

Les marqueurs biologiques des tumeurs endocrines digestives

GUIDE PATIENT - AFFECTION DE LONGUE DURÉE. La prise en charge du cancer du rein

Compte rendu d hospitalisation hépatite C. À partir de la IIème année MG, IIIème années MD et Pharmacie

Essai Inter-groupe : FFCD UNICANCER FRENCH - GERCOR

Foscolo (1), J Felblinger (2), S Bracard (1) CHU Hôpital central, service de neuroradiologie, Nancy (1) CHU BRABOIS, Centre d investigation clinique

Cancer du sein in situ

Pierre OLIVIER - Médecine Nucléaire

B06 - CAT devant une ischémie aiguë des membres inférieurs

F JABNOUN, H BERMENT, R KHAYAT, M MOHALLEM, Y BARUKH, P CHEREL Institut Curie Hôpital René Huguenin, Saint Cloud JFR 2010

De la chirurgie du nodule aux ganglions

Imagerie TDM et IRM des obstacles du bas cholédoque

L IRM pas à pas Un module d enseignement interactif des bases physiques de l Imagerie par Résonance Magnétique.

Quel apport de l imagerie dans les traitements anti-angiogéniques?

Ischémie myocardique silencieuse (IMS) et Diabète.

Épreuve d effort électrocardiographique

Recommandations régionales Prise en charge des carcinomes cutanés

Maladie de Hodgkin ou lymphome de Hodgkin

Innovations thérapeutiques en transplantation

TRAITEMENT DES TUMEURS HEPATIQUES. Paul Legmann Radiologie A Pôle Imagerie

1- Parmi les affirmations suivantes, quelles sont les réponses vraies :

Faut-il encore modifier nos pratiques en 2013?

Cancer du rein métastatique Nouvelles approches thérapeutiques. Sophie Abadie-Lacourtoisie 20 mai 2006

INSUFFISANCE CARDIAQUE «AU FIL DES ANNEES»

Cas clinique 2. Florence JOLY, Caen François IBORRA, Montpellier

Document d information dans le cadre de l installation d un cyclotron. à Saint-Louis

Leucémies de l enfant et de l adolescent

Réparation de la communication interauriculaire (CIA) Informations destinées aux patients

Qui et quand opérer. au cours du traitement de l EI?

Prise en charge de l embolie pulmonaire

Cancers de l hypopharynx

Les différents types de cancers et leurs stades. Dr Richard V Oncologie MédicaleM RHMS Baudour et Erasme La Hulpe 1/12/07

GHUPC Projet de transformation du site Hôtel Dieu. Pr S CHAUSSADE, Dr I. FERRAND

SYNOPSIS INFORMATIONS GÉNÉRALES

La Dysplasie Ventriculaire Droite Arythmogène

Exposition de la population française aux rayonnements ionisants liée aux actes de diagnostic médical en 2012

Evaluation d un nouveau vidéo endoscope bronchique à usage unique avec canal opérateur en réanimation

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la scintigraphie osseuse et le TEP-SCAN

G U I D E - A F F E C T I O N D E L O N G U E D U R É E. La prise en charge de votre mélanome cutané


UN PATIENT QUI REVIENT DE LOIN. Abdelmalek AZZOUZ GRCI 29/11/2012 Service de Cardiologie A2 CHU Mustapha. Alger Centre. Algérie

Traitement des Pseudarthroses des Os Longs par Greffe Percutanée de Moelle Osseuse Autologue Concentrée

Réflexions sur les possibilités de réponse aux demandes des chirurgiens orthopédistes avant arthroplastie

G U I D E P A T I E N T - A F F E C T I O N D E L O N G U E D U R É E. La prise en charge du cancer du foie

IRM hépatique: ce que le manipulateur doit savoir

CEPHALEES POST-BRECHE DURALE. Post Dural Puncture Headache (PDPH)

Module digestif. II. Prévention du reflux gastro-œsophagien :

Marchés des groupes à affinités

dossier de presse nouvelle activité au CHU de Tours p a r t e n a r i a t T o u r s - P o i t i e r s - O r l é a n s

Collection Soins infirmiers

Les nouveaux anticoagulants oraux (NAC)

Résultat du traitement de la varicocèle chez l'adolescent par l'association coils-sclérosants.

Médecine Nucléaire : PET-scan et imagerie hybride

Informations sur le rivaroxaban (Xarelto md ) et l apixaban (Eliquis md )

Intérêt diagnostic du dosage de la CRP et de la leucocyte-estérase dans le liquide articulaire d une prothèse de genou infectée

Assurance maladie grave

Définitions. PrioritéVie Enfant MC. Assurance contre le risque de maladie grave

Quels sont les facteurs qui font augmenter les risques de cancer du rein?

Ordonnance du DFI sur les prestations dans l assurance obligatoire des soins en cas de maladie

L'œsophage L'œsophage est un tube musculaire qui traverse de la bouche à l'estomac. Causes

MODULE D EXERCICE PROFESSIONNEL NOTION MÉDICO-ÉCONOMIQUE DES DE RADIOLOGIE ET IMAGERIE MÉDICALE. Dr F Lefèvre (1-2), Pr M Claudon (2)

J. Goupil (1), A. Fohlen (1), V. Le Pennec (1), O. Lepage (2), M. Hamon (2), M. Hamon-Kérautret (1)

Don d organes et mort cérébrale. Drs JL Frances & F Hervé Praticiens hospitaliers en réanimation polyvalente Hôpital Laennec, Quimper

Après chirurgie bariatrique, quel type de tissu adipeux est perdu? Dr Emilie Montastier Hôpital Larrey, Toulouse

PET/CT et Sarcoïdose. Daniel O Slosman

CHIMIOTHERAPIE DES CANCERS DU POUMON DES SUJETS AGES

Certificat SSO de formation postgrade en médecine dentaire générale

Montréal, 24 mars David Levine Président et chef de la direction DL Strategic Consulting. DL Consulting Strategies in Healthcare

Définitions. MALADIES GRAVES Protection de base Protection de luxe. PROTECTION MULTIPLE pour enfant

Nouveaux anticoagulants oraux : aspects pratiques

IRM APRES TRAITEMENT RADICAL OU FOCAL du cancer de prostate. Raphaële Renard Penna Emmanuel Banayan Hôpital Pitié Salpétrière

Apport de l IRM dans le bilan préthérapeutique du cancer du rectum

Découvrez L INSTITUT UNIVERSITAIRE DU CANCER DE TOULOUSE

Qu est-ce que le cancer du pancréas?

Dons, prélèvements et greffes

La prise en charge de l AVC ischémique à l urgence

Transcription:

LES TUMEURS ENDOCRINES : LE POINT DE VUE DU RADIOLOGUE JP Tasu, MD, PhD Chu de Poitiers Faculté de médecine de Poitiers j.p.tasu@chu-poitiers.fr

Quelles questions en pratique? Comment évoquer en imagerie le diagnostic de tumeur endocrine? Quel bilan d extension? Quels traitements radiologiques et quand? Quels facteurs pronostics et quelle surveillance?

Comment évoquer le diagnostic? Lésion hyper-vasculaire +++ Rehaussement franc et massif au temps artériel Souvent hétérogène si volumineuse Homogène si < 3cm Quelque soit la méthode d imagerie

Comment évoquer le diagnostic? Au niveau thoracique ; n Tumeurs petites svt < 3 n n n Hypervascularisées Endobronchique (obstruction rapide) Ou thymique

Comment évoquer le diagnostic? Au niveau pancréatique ; Tumeurs < 3 cm : hypervascularisées Tumeurs de grande taille > 3 cm non fonctionnelles le plus souvent kystiques nécrotico-hémorragiques calcifiées 20% Rarement purement kystiques avec une capsule Canal pancréatique rarement dilaté mais 35% de tumeurs fibreuses Sheth et al AJR 2002

Comment évoquer le diagnostic? n Au niveau digestif ; La lésion pariétale est hypervasculaire et fibreuse u PdC artériel u Réhaussement tardif u Rétraction pariétale n n Masse mésentérique rétractile u Souvent calcifiée u Centrale Occlusion rare

Quelles questions en pratique? Comment évoquer en imagerie le diagnostic de tumeur(s) endocrine(s)? Quel bilan d extension? Quels traitements radiologiques et quand? Quels facteurs pronostics et quelle surveillance?

Quel bilan? Faut-il des explorations complémentaires? Où est la lésion primitive? En cas de tumeur connue, quel bilan d extension demander?

Quel bilan? Aucun si ; TE appendiculaire et rectale bien différenciées < 1cm (T1a) si la résection a été totale. Tumeurs endocrines fundiques bien différenciées < 1cm (T1) dans un contexte de gastrite atrophique fundique chronique.

Quel bilan si primitif inconnu? Si changement de stratégie (métastases hépatiques résésables ) Imagerie «corps entier» Scanner TAP avec un temps artériel Ostréoscan, et si négatif, TEP FDG, TEP F-dopa, scintigraphie Ga 68 DOTATOC Exploration du tube digestif et des bronches Endoscopies haute et basse, fibro bronchique Vidéo capsule, entéroscanner > entéro IRM, Exploration du pancréas Écho-endoscopie haute

Quel bilan pour rechercher une lésion pancréatique? L écho endoscopie est l examen de référence sensibilité pour TE pancréatiques fonctionnelles : 82-94% sensibilité pour TE < 2 cm : 88% écho-endoscopie > scanner /IRM/octréoscan MAIS la sensibilité dépend de la localisation Insulinome de la tête : sensibilité 83% Insulinome de la queue : sensibilité 38% Ponction à l aiguille fine +++ Thomas-Marques et al Am J Gastroenterol 2006 Jahla et al Ann Diagn Pathol 2002

EE octréoscan

? Norton et al Ann Surg 2004

Quel bilan d extension métastatique? L histoire naturelle de l extension métastatique dépend du primitif En cas de TE digestive, l atteinte hépatique est un marqueur du risque de dissémination extra hépatique Une présentation osseuse isolée évoque un primitif extra digestif Leboulleux et al, J Clin Endocrinol Metab 2008

Quel bilan d extension? Bilan d extension métastatique Scanner TAP avec un passage au temps artériel IRM foie, rachis ± corps entier Techniques de Médecine Nucléaire

Quel bilan d extension? En cas de TE bien différenciée Scanner TAP avec une phase artérielle IRM hépatique (en particulier si décision chirurgicale) Octréoscan TEP FDG si octréoscan négatif et indice de prolifération Ki 67> 10% Recherche de métastases osseuses si méta hépatique ou primitif bronchique Scinti osseuse ou IRM corps entier

TEP FDG

Quel bilan d extension? En cas de TE peu différenciée Scanner TAP avec une phase artérielle IRM hépatique TEP FDG IRM cérébrale Recherche de métastases osseuses si méta hépatique ou primitif bronchique Scinti osseuse ou IRM corps entier

Octréoscan TEP FDG

IRM de diffusion corps entier

Quel bilan d extension métastatique? Les lésions hépatiques secondaires sont fréquentes Souvent révélatrices (TE abdo) Souvent volumineuses et nécrotiques Si petites hypervasculaires Etat général conservé alors que l envahissement peut être massif +++ Place centrale de l IRM du foie +++

Quel bilan d extension métastatique? Les lésions osseuses ne sont pas rares L association IRM + octréoscan détecte 83% des sites métastatiques chez 92% des patients atteints Leboulleux et al, J Clin Endocrinol Metab 2008

Quel bilan d extension? En cas de NEM1 (à rechercher si TE duodénale, pancréatique, thymique ou bronchique et SZE) En fonction de l age et du contexte ; IRM hypohysaire Un bilan parathyroïdien Fibroscopie bronchique Relecture scanner TAP (surrénale? Thymus?)

Quelles questions en pratique? Comment évoquer en imagerie le diagnostic de tumeur(s) endocrine(s)? Quel bilan d extension? Quels traitements radiologiques et quand? Quels facteurs pronostics et quelle surveillance?

Les traitements curatifs Ablatif Radio-fréquence, micro-ondes Equivalent de la chirurgie Recommandations au niveau hépatique: Résection chirurgicale non retenue, tumeur 30-35mm, moins de 5 lésions Contre-indications locales : proximité hile, structures digestives, péricarde, gros vaisseaux, dérivation biliodigestive, prothèse biliaire

Les traitements palliatifs Objectifs Traitement du syndrome sécrétoire Augmentation de la qualité de vie, de la survie Nombreuses options ; Embolisation, Chimio-embolisation, DEBIRI Radio-embolisation

Protocole de chimio embolisation Choix du produit : Adriamycine (50mg/m2) Streptozotocine (1500 mg/m2) Adriamycine (50mg/m2) + cisplatine (150mg) 5-FU (350mg) + Streptozotocine (1000-2000mg) Toutes les 8 à 12 semaines jusqu à stabilisation (minimum 2 cures) N emboliser qu un lobe à la fois (surtout si envahissement hépatique > 60%) Nécessité d anesthésie générale si streptozotocine En cas de syndrome carcinoïde, octréotide avant CEL (48H)

Techniques palliatives Indications ; Progression significative de la maladie Progression des symptômes cliniques et/ou Envahissement 50% du foie Insuffisance cardiaque

Chimio embolisation Résultats Taux de réponse clinique : 93% Taux de réponse morphologique : 74% Taux de réponse biologique : 52% Mortalité > si plus de 70% du foie envahit Efficacité meilleure si envahissement < 30% Cohen H et al, Hepatogastroenterology 2006

Traitement des autres lésions A discuter au cas par cas (poumon, os ) Selon les compétences locales Curateur ou palliatif (antalgique )

Images T de Baere, IGR

Quelles questions en pratique? Comment évoquer en imagerie le diagnostic de tumeur(s) endocrine(s)? Quel bilan d extension? Quels traitements radiologiques et quand? Quels facteurs pronostics et quelle surveillance?

Facteurs pronostiques Critères reconnus Taille Index mitotique, de prolifération (Ki 67) Angioinvasion, atypies cellulaires Lien pauvreté en vaisseaux et malignité Evaluation possible par TDM de perfusion

Marquage CD 34 faible Gaspard d Assignies, Radiology 2009

Facteurs pronostiques Pente de progression Variation de la taille sur un équivalent de 6 mois Pente équivalent 6 mois Nombre de patients (66) Survie à 5 ans nulle < 20% > 20% 37 3 26 77% - 39% Données IGR, Clarisse Dromain

Quelle surveillance? Quelle méthode utiliser? IRM hépatique (idéale?) Résolution en contraste excellente (=mesures précises, estimation de la nécrose) Non irradiante +++ TAP Poumon, os Disponibilité, coûts Echoendoscopie pour les lésions pancréatiques Octéoscan, IRM corps entier

T2 T1 gado B 600 ADC

Comment évaluer l évolution? RECIST 1.1 Les critères de Choi plus adaptés pour les thérapies ciblées* Mieux corrélé à la SSP Survie globale? Imagerie «fonctionnelle» Imagerie de perfusion (écho de contraste, scanner ou IRM), IRM de diffusion Techniques de médecine nucléaire *Ohentic Dhomé, SNFGE 2010

Diffusion b 600 TEP

Conclusion Place centrale de l imagerie Diagnostic Thérapeutique Surveillance Difficile d aborder tous les aspects en 25 minutes Intérêt d une confrontation pluri disciplinaire.

Merci à l équipe de Poitiers

MERCI DE VOTRE ATTENTION