Sujet. Quelle politique du logement?



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Transcription:

Concours B/L 2010 ECONOMIE EPREUVE COMMUNE SUR DOSSIER : ORAL Jury : Gaël Giraud et Pierre-Cyrille Hautcœur Sujet Quelle politique du logement? Dossier documentaire Document 1 : La politique du logement depuis les années 1950 Document 2 : L effet de l aide au logement sur les loyers Document 3 : Les modalités du crédit au logement Document 4 : Quelques indicateurs du marché du logement sur longue période Document 5 : Evolution du statut d occupation des résidences principales Document 6 : le prêt à taux zéro en France 1

Document 1 : La politique du logement en France depuis les années 1950 L intervention de l État en matière de logement s est développée massivement à partir des années 1950, devant la pénurie de logement causée par le retard accumulé de la construction dans l entredeux-guerres et les destructions lors de la Seconde Guerre mondiale. Jusqu aux années 1970, l intervention de l État s est essentiellement effectuée sous la forme d aide à la pierre, avec la mise en place dans les années 1950 d un dispositif de mesures pour assurer le financement public de la construction d un parc locatif social, dans une période de rareté des capitaux. Un premier désengagement de l État s observe entre les années 1965 et 1975, avec l ouverture sur un financement bancaire d origine privée pour compléter les prêts publics ainsi que des efforts pour favoriser le développement d un secteur libre ou encore l accession à la propriété avec la mise en place des comptes puis des plans d épargne logement. Durant cette période, les allocations de logement existent mais concernent une minorité de ménages, essentiellement des familles avec enfants et des personnes âgées. Aides à la pierre ou aides à la personne? Le tournant majeur de la politique de l État en matière de logement s effectue avec la réforme de 1977 menée sous le gouvernement de Raymond Barre (1). À la suite de cette réforme, l aide à la pierre diminue fortement, remplacée par l aide à la personne, avec en particulier la création de l aide personnalisée au logement (APL), l objectif étant d inverser la proportion entre les deux types d aides: un tiers d aide à la pierre maintenu et deux tiers d aide à la personne. Ce changement de politique correspond à une volonté de l État de se désengager de l intervention directe en matière de logement et de laisser jouer les mécanismes du marché. L efficacité des aides à la pierre est en effet remise en cause sur plusieurs points, en particulier sur la qualité des logements construits, mais aussi sur la réalisation de l objectif de logement des ménages modestes. Les aides à la personne sont privilégiées dans l optique de mieux cibler les dépenses. (1) Les aides au logement, qui prennent la forme d aides à l accession à la propriété et d aides pour les locataires, n ont cessé de s étendre depuis à différentes catégories de personnes. Le principe d universalité de l aide s est progressivement affirmé, d abord avec l aide personnalisée au logement (APL), dont l attribution n est pas réservée à un groupe précis de la population, mais dépend du conventionnement du logement et des ressources du ménage. L extension des aides personnelles à l ensemble de la population a été réalisée au début des années 1990, avec la reconnaissance du droit à l allocation de logement sociale (ALS) pour toute personne non couverte par une autre aide au logement, sur critère de revenu mais sans autre condition particulière (2). Cette réforme a été menée en plusieurs étapes, en commençant par l Île-de-France en 1991, puis les agglomérations de plus de 100 000 habitants en 1992. En 1993, elle était effective sur l ensemble du territoire. Cette extension des aides a conduit à une forte augmentation du nombre de bénéficiaires entre 1991 et 1993. Enfin, en 2001, le barème des différents types d aides a été unifié, pour simplifier le système mais aussi pour supprimer les différences d aides existant entre des ménages de revenus identiques, mais provenant de sources différentes : le barème était jusqu alors plus favorable aux revenus des minima sociaux qu aux revenus d activité. 1. Pour un résumé de la politique du logement depuis les années 1950 ainsi que l exposé des enjeux et des objectifs de la réforme de 1977, cf. Granelle (1998). 2. En 1988, un premier bouclage des aides à la personne dans le parc locatif social avait étendu le champ des APL en facilitant le conventionnement des logements (conventionnement sans travaux). Source : G. Fack, «Pourquoi les ménages à bas revenus paient ils des loyers de plus en plus élevés», Economie et Statistique, 2005. 2

Document 2 : L effet de l aide au logement sur les loyers 3

Source : G. Fack, «Pourquoi les ménages à bas revenus paient ils des loyers de plus en plus élevés», Economie et Statistique, 2005. 4

Document 3 : Les modalités du crédit au logement PTZ : prêt à taux zéro. PAP Prêt d accès à la propriété. Source : J. Friggit, «Le prix du logement sur le long terme», CGEDD 2010 5

Document 4 : Quelques indicateurs du marché du logement sur longue période Source : J. Friggit, «Le prix du logement sur le long terme», CGEDD 2010 Document 5 : Evolution du statut d occupation des résidences principales Source : Données sociales, 2006 Document 6 : le prêt à taux zéro en France 6

La propriété a toujours suscité l attention des gouvernements successifs depuis la deuxième guerre mondiale. En 1977, une réforme du programme de subventions au logement a créé des subventions directes aux nouveaux propriétaires, sous la forme d un système de prêts aidés, appelés PAP (prêt d accession à la propriété) et PC (prêt conventionné). Entre 1977 et 1984, presque 60 % des nouveaux accédants ont eu recours à un PAP ou à un PC. Au cours de ces années, le taux de propriété a nettement augmenté (de 45 % en 1970 à 54 % en 1988). Le succès du système peut être attribué au fait que pendant cette période, l inflation élevée engendrait des taux d intérêt réels négatifs. À partir de 1984, cette situation a changé. La politique économique, alors centrée sur la réduction de l inflation, a fait passer celle-ci de 11 % à 4 % en 1987 et l inflation s est depuis lors stabilisée à un niveau très bas. Dans le même temps, les taux d intérêt des PAP et des PC ne sont pas descendus en dessous de 7 ou 8 %. Les taux d intérêt réels ont ainsi augmenté brusquement. Ceci, ajouté à des types de prêts inadaptés à cette situation (comme par exemple les prêts à remboursements croissants), a provoqué à la fin des années 1980 une vague de défauts de remboursement d accédants ayant obtenu des prêts à des taux très élevés. En réaction, les prêteurs privés sont devenus plus restrictifs sur l attribution des prêts (Lacroix, 1995). Dans ce contexte, les contraintes d emprunt devenaient l une des principales barrières à l accession à la propriété pour les familles à faible revenu. Fin 1995, le PAP, moribond, a été remplacé par le prêt à taux zéro (PTZ). Le dispositif est applicable depuis le 1er octobre 1995 et s est substitué également aux avantages fiscaux attachés à l accession à la propriété (exonération de longue durée des PAP, déductibilité des intérêts d emprunt des impôts). Le PTZ ne peut d ailleurs pas être cumulé avec les anciens PAP ( ). Par ailleurs, il ne peut être accordé qu un PTZ par opération et par ménage. En revanche, le PC et le système d aides personnelles sont demeurés inchangés. Un prêt sans intérêt Le PTZ est un prêt sans intérêt, accordé aux primo-accédants, et venant en complément des autres prêts obtenus sur le marché du crédit immobilier. L éligibilité au PTZ est soumise à un critère de revenu. La valeur maximale du prêt augmente avec la taille de la famille et dépend de la zone géographique considérée. Le PTZ ne peut pas excéder 20 % de la valeur d achat et 50 % du montant total du crédit. Pour les ménages ayant les revenus les moins élevés, le PTZ peut être remboursé avec différé, généralement après que tous autres prêts ont été totalement remboursés (15 à19 ans après la date d achat). Enfin, comme souvent en France, le prêt à taux zéro, conçu à la fois pour solvabiliser la demande et pour soutenir la construction de logement neufs, est un produit hybride. Ainsi, le programme a-t-il été conçu de telle sorte que ce soient principalement des ménages souhaitant acheter un logement neuf qui puissent y avoir accès ( ). Environ 600 000 ménages ont bénéficié du PTZ entre 1996 et 1999. Ceci représente environ 35 % des flux vers l accession à la propriété au cours de cette période. La valeur moyenne des prêts accordés était alors de l ordre de 15 000 euros. Depuis, le nombre de PTZ accordés chaque année varie de 100 à 110 000 par an. Le PTZ représente ainsi une charge budgétaire importante pour l État, comprise depuis quatre ans entre 800 et 900 millions d euros (Assemblée nationale, 2003). 1. Au début 2005, les pouvoirs publics ont revalorisé les paramètres du barème du PTZ et ouvert le dispositif à l acquisition d un logement ancien sans quotité minimale de travaux. L enquêtelogement ayant été réalisée avant cette refonte, l évaluation présentée ici porte sur l ancien dispositif. Source : L. Gobillon et D. Le Blanc «Quelques effets économiques du prêt à taux zéro», Economie et Statistiques, 2005 7