Xavier Demondion a,b, *, Nathalie Boutry a, Régis Bry b, Chadi Khalil a, Matthieu Jaspart a,b, Anne Cotten a



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Revue du Rhumatisme 74 (2007) 409 414 http://france.elsevier.com/direct/revrhu/ Imagerie des syndromes canalaires du nerf tibial et de ses branches à la cheville et au pied Tibial nerve entrapment syndromes at the ankle and foot level: imaging assessment Xavier Demondion a,b, *, Nathalie Boutry a, Régis Bry b, Chadi Khalil a, Matthieu Jaspart a,b, Anne Cotten a a Service de radiologie ostéoarticulaire, hôpital R.-Salengro, CHRU de Lille, 59000 Lille, France b Laboratoire d anatomie, faculté de médecine de Lille, France Reçu le 15 octobre 2006 ; accepté le 2 février 2007 Disponible sur internet le 23 mars 2007 Mots clés : Nerf tibial ; Syndrome canalaire ; Pied ; Cheville ; IRM ; Échographie ; Anatomie Keywords: Tibial nerve; Entrapment; Foot; Ankle; Anatomy; MRI; Sonography 1. Introduction * Auteur correspondant. Adresse e-mail : xdemondion@chru-lille.fr (X. Demondion). Le nerf tibial est la branche terminale médiale du nerf sciatique. C est un nerf mixte constitué de fibres nerveuses provenant des nerfs lombaires L4, L5, et sacrés S1, S2 et S3. Le nerf tibial suit d abord l axe médian de la fosse poplitée puis, à la jambe, il descend médialement pour traverser successivement la région rétromalléolaire médiale et la région du tunnel tarsien. Il se divise classiquement dans le tunnel tarsien en deux branches terminales qui vont rejoindre la plante du pied : le nerf plantaire médial et le nerf plantaire latéral. Ainsi depuis l extrémité distale de la jambe jusqu au pied, le nerf tibial et ses branches de division traversent des tunnels ostéofibreux et des compartiments anatomiques étroits. Si le rôle princeps de ces tunnels et compartiments anatomiques est de protéger ces nerfs ainsi que les vaisseaux qui les accompagnent, un certain nombre de processus pathologiques (tumoraux, inflammatoires, traumatiques) et de variations anatomiques peuvent entraîner une compression de ces derniers au niveau de la cheville et du pied. La compression de ces nerfs peut être à l origine d une symptomatologie clinique invalidante. Outre le traitement de la cause, des infiltrations in situ peuvent soulager transitoirement ou définitivement les patients. La mise en évidence d un syndrome canalaire en imagerie repose avant tout sur la bonne connaissance des rapports anatomiques entre les structures nerveuses et leur environnement. 2. Région rétromalléolaire médiale Au tiers distal de la jambe, le nerf tibial devient relativement superficiel, situé entre le muscle long fléchisseur de l hallux médialement, le tendon du muscle long fléchisseur des orteils en avant et le fascia crural en arrière. Le nerf est alors accompagné médialement, au sein de ce compartiment par l artère tibiale et ses deux veines (Figs. 1 3). À ce niveau, le nerf tibial peut être comprimé par un muscle surnuméraire, comme un muscle soléaire accessoire ou un muscle long fléchisseur accessoire des orteils (Fig. 4). La recherche de telles variations musculaires est au mieux réalisée par l IRM ou l échographie. 3. Tunnel tarsien Après son passage dans la région rétromalléolaire médiale, le nerf tibial change de direction, il se dirige vers l avant et le 1169-8330/$ - see front matter 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2007.02.002

410 X. Demondion et al. / Revue du Rhumatisme 74 (2007) 409 414 Fig. 2. Dissection de la face médiale de la cheville mettant en évidence le nerf tibial (flèche), l artère tibiale et les veines tibiales au sein du tunnel tarsien (flèche courbe), après résection du rétinaculum des muscles fléchisseurs. NPL : nerf plantaire latéral ; NPM : nerf plantaire médial ; NCM : nerf calcanéen médial ; NCI : nerf calcanéen inférieur. Fig. 1. Schémas anatomiques de la face médiale de la cheville (a) et de la plante du pied (b) mettant en évidence le trajet et les rapports du nerf tibial et de ses branches. Flèche sinueuse : nerf tibial ; flèche courbe rouge : artère tibiale postérieure ; tête de flèche jaune : nerf calcanéen médial ; flèche : nerf plantaire médial ; flèche courbe noire : nerf plantaire latéral ; tête de flèche : nerf calcanéen inférieur ; TP : tendon du muscle tibial postérieur ; LFO : tendon du muscle long fléchisseur des orteils ; LFH : tendon du muscle long fléchisseur de l hallux ; ret : rétinaculum des muscles fléchisseurs ; AH : muscle abducteur de l hallux ; CP : muscle carré plantaire ; AV : muscle abducteur du petit orteil. bas pour s engager dans le tunnel tarsien où il se divise classiquement en ses deux branches terminales (Figs. 1,5,6). Le tunnel tarsien est un canal ostéofibromusculaire inextensible. Il présente un toit, constitué à sa partie haute par le rétinaculum des fléchisseurs et à sa partie basse par le muscle abducteur de l hallux, et un plancher osseux constitué par la face postéromédiale du talus, le sustentaculum tali et la face médiale du calcanéus. Il comporte ainsi deux étages, l un supérieur tibiotalaire et l autre inférieur talocalcanéen [1]. Dans ce tunnel transitent donc le nerf tibial ainsi que classiquement la partie initiale des nerfs plantaires médial et latéral, l artère et les veines tibiales postérieures ainsi que les tendons des muscles long fléchisseur de l hallux, long fléchisseur des orteils et tibial postérieur. Le tendon du muscle long fléchisseur de l hallux est situé latéralement au nerf tibial ou à la partie initiale de ses branches de division. Les tendons des muscles tibial postérieur et long fléchisseur des orteils situés au-dessus des structures nerveuses (Figs. 1,5,6). Nous soulignerons le fait que le nerf calcanéen médial, principale branche collatérale du nerf tibial, dont l origine habituelle est la région retromalléolaire médiale, peut parfois naître dans le tunnel tarsien. Le syndrome du tunnel tarsien correspond à une neuropathie par compression ou étirement du nerf tibial ou de ses branches dans ce tunnel. Les patients présentent une hypoesthésie, des dysesthésies, des paresthésies ou des douleurs de type neurogène dans le territoire des nerfs concernés. Ces symptômes, accrus par l activité physique, sont calmés par le repos et la surélévation du pied. Ils peuvent être reproduits par l éversion et la dorsiflexion de la cheville [2]. La percussion de la face médiale du calcanéus en arrière de la malléole médiale provoque une décharge électrique dans le territoire nerveux concerné (signe de Tinel positif) [3]. Les signes moteurs sont très exceptionnels. Un électromyogramme confirmera la souffrance nerveuse dans au moins 85 % des cas. Tout syndrome de masse au sein du tunnel tarsien peut être à l origine d un syndrome du tunnel tarsien [3,4]. Ces syndromes de masse peuvent être représentés par : des varicosités ou thrombophlébites [5], un kyste mucoïde (Fig. 7), une tumeur nerveuse ou autre masse des parties molles, une ténosynovite

X. Demondion et al. / Revue du Rhumatisme 74 (2007) 409 414 411 Fig. 3. Coupes anatomiques (a) et IRM (b) axiales de la cheville, mettant en évidence au niveau de la région rétromalléolaire médiale le nerf tibial (flèche) et l artère tibiale (tête de flèche) entre, en avant les tendons des muscles tibial postérieur (TP) et long fléchisseur des orteils (LFO), et en arrière le tendon du muscle long fléchisseur de l hallux (LFH). Fig. 5. Coupes anatomiques (a) et IRM (b) axiales de la cheville, mettant en évidence au niveau du tunnel tarsien le nerf plantaire médial (NPM) et le nerf plantaire latéral (NPL). TP : tendon du muscle tibial postérieur ; LFO : tendon du muscle long fléchisseur des orteils ; LFH : tendon du muscle long fléchisseur de l hallux. Fig. 4. Coupe IRM axiale de la cheville mettant en évidence un muscle fléchisseur accessoire des orteils (flèche courbe) situé en arrière du nerf tibial (flèche) dans la région rétromalléolaire médiale. des tendons des muscles fléchisseurs [3,4], un muscle accessoire ou son tendon terminal (long fléchisseur accessoire des orteils, soléaire accessoire, péronéocalcanéen interne) [6,7], une hypertrophie du rétinaculum des fléchisseurs, une l hypertrophie du muscle abducteur de l hallux ou encore une synostose talocalcanéenne (Fig. 8) [8] ou une hypertrophie du sustentaculum tali [9]. Les traumatismes et leurs séquelles, en particulier les fractures déplacées de l extrémité distale du tibia, des tubercules postérieurs du talus ou du calcanéus peuvent entraîner un étirement du nerf et être, par conséquent, à l origine d un syndrome du tunnel tarsien. En dehors des séquelles osseuses post-traumatiques, l exploration radiologique d un syndrome du tunnel tarsien repose sur l échographie ou l IRM. Il importe d identifier un épaississement fusiforme du nerf, une augmentation de sa vascularisation, une image d addition susceptible de comprimer le nerf, ou encore un épaississement du rétinaculum des fléchisseurs [10].

412 X. Demondion et al. / Revue du Rhumatisme 74 (2007) 409 414 Fig. 6. Coupes anatomiques (a) et IRM (b) frontales de la cheville, mettant en évidence au niveau du tunnel tarsien le nerf plantaire médial (NPM) et le nerf plantaire latéral (NPL). TP : tendon du muscle tibial postérieur ; LFO : tendon du muscle long fléchisseur des orteils ; LFH : tendon du muscle long fléchisseur de l hallux. 4. Plante du pied À la plante du pied, les compressions nerveuses peuvent concerner le nerf plantaire médial, le nerf calcanéen inférieur qui est la première branche collatérale du nerf plantaire latéral, et le nerf calcanéen médial. Fig. 7. Coupe IRM axiale en pondération T2 avec saturation du signal de la graisse (a) et coupe échographique axiale (b) mettant en évidence un kyste mucoïde (flèche courbe) à l origine d une compression du nerf tibial (flèche). 4.1. Nerf plantaire médial Le nerf plantaire médial, plus volumineux que le nerf plantaire latéral, se sépare classiquement de ce dernier à angle aigu. Il se dirige vers la plante du pied en s insinuant entre la face médiale du calcanéus et le muscle abducteur de l hallux. Arrivé à la plante du pied, accompagné de l artère plantaire médiale, le nerf se place dans l interstice longitudinal situé entre le muscle abducteur de l hallux et le muscle court fléchisseur des orteils, à la face superficielle des tendons du muscle long fléchisseur des orteils. Le nerf se divise en ses branches terminales à la base des métatarsiens. Le nerf plantaire médial peut être comprimé de façon chronique et répétée chez le sportif pratiquant la course à pied (jogger s foot) au niveau de la plante du Fig. 8. Coupe scanographique frontale, en constantes osseuses montrant une synostose talocalcanéenne (étoile). (Image reproduite avec autorisation d après la référence [11]).

X. Demondion et al. / Revue du Rhumatisme 74 (2007) 409 414 413 pied. Ces phénomènes compressifs surviennent essentiellement lors d un valgus excessif de l arrière pied ou lors d une pronation excessive, en particulier lors de la course ou du port de talons hauts. Le nerf plantaire médial peut également être comprimé au contact d une ténosynovite ou d un kyste mucoïde [10,11]. Les patients présentent des douleurs de la face plantaire des premiers et seconds orteils. 4.2. Nerf calcanéen inférieur (neuropathie de Baxter) Ce nerf est la première branche collatérale du nerf plantaire latéral (Fig. 1,2,9). Ce nerf est dévolu à l innervation du muscle abducteur du cinquième orteil. On décrit trois portions à son trajet depuis son origine jusqu à sa terminaison. La première est une portion verticale où, le nerf se dirige en avant et latéralement, cheminant dans un canal limité médialement par le muscle abducteur de l hallux et latéralement par le muscle carré plantaire et la face médiale du calcanéus. La deuxième portion correspond à son changement de direction où il devient horizontal et se dirige latéralement pour se positionner entre le muscle abducteur de l hallux et la partie inférieure de la face médiale du calcanéus en passant en avant du processus médial du calcanéus. La troisième portion du nerf est une portion où le nerf se dirige horizontalement en avant et latéralement en s insinuant entre le ligament plantaire long et le muscle court fléchisseur des orteils. C est au niveau de cette troisième portion que le nerf peut être lésé alors qu il se situe à proximité de l insertion de l aponévrose plantaire. Les étiologies sont : une enthésopathie ou une fasciite plantaire (15 20 % des cas), notamment lorsqu il existe une réaction œdémateuse importante des parties molles adjacentes, une épine calcanéenne qui, selon Baxter [9,12,13], pourrait entraîner une compression nerveuse, ou encore un syndrome de masse (thrombophlébite ou varicosités accompagnant le nerf, tumeur des parties molles, muscle accessoire, bursite). L existence d un pied-plat représente le principal facteur anatomique favorisant les compressions nerveuses. Un signe indirect de la neuropathie du nerf calcanéen inférieur en IRM est l amyotrophie graisseuse isolée du muscle abducteur du petit orteil [14]. La compression de ce nerf concernerait 15 à 20 % des jeunes athlètes présentant une talalgie chronique, mais elle peut également s observer chez des sujets non sportifs. 4.3. Nerf calcanéen médial Il s agit de la principale branche collatérale du nerf tibial à la cheville (Fig. 1). Son origine se situe en amont du tunnel tarsien ou en son sein. Ce nerf longe initialement le bord médial du tendon calcanéen, puis il se divise en une branche postérieure sensitive pour la partie postéromédiale du talon et en une ou plusieurs branches antérieures sensitives longeant la face médiale du calcanéus et se terminant dans le coussinet graisseux du tiers postérieur du pied qu elle(s) innerve(nt) [11]. Des microtraumatismes répétés du coussinet adipeux calcanéen lors de la course à pied par exemple, ou une atrophie graisseuse, en particulier après une perte de poids rapide ou chez le diabétique, peuvent entraîner une neuropathie calcanéenne médiale [15]. La place de l imagerie dans cette exploration reste encore incertaine en raison d un manque de résolution suffisante pour objectiver ces fines branches nerveuses. 5. Conclusion La recherche en imagerie des syndromes canalaires du nerf tibial et de ses branches à la cheville et au pied repose avant tout sur une bonne connaissance de l anatomie topographique. En l absence de cause osseuse évidente sur les radiographies standard, l IRM fournit actuellement, grâce à son excellente résolution en contraste et à ses possibilités de caractérisation tissulaire, certainement le meilleur outil diagnostic. En effet, elle permet de rechercher, non seulement les différentes causes de compression nerveuse, mais également les modifications morphologiques et de signal du nerf lui-même. L échographie représente une alternative à l IRM dans l exploration de première intention des syndromes canalaires étant donné sa plus grande accessibilité. Toutefois, cet examen reste un examen opérateur dépendant. Références Fig. 9. Coupes sagittales anatomiques (a) et IRM (b) en pondération T1 mettant en évidence le paquet vasculonerveux calcanéen inférieur (zone cerclée) lors de son passage entre le calcanéus (C) et le muscle court fléchisseur des orteils (CFO). [1] Sarrafian SK. Anatomy of the foot and ankle. Philadelphia: Lippincott Company; 1993.

414 X. Demondion et al. / Revue du Rhumatisme 74 (2007) 409 414 [2] Kinoshita M, Okuda R, Morikawa J, Jotoku T, Abe M. The dorsiflexion eversion test for diagnosis of tarsal tunnel syndrome. J Bone Joint Surg 2001;83:1835 9. [3] Lau JTC, Daniels TR. Tarsal tunnel syndrome: a review of the literature. Foot Ankle Int 1999;20:201 9. [4] Erickson SJ, Quinn SF, Kneeland JB, Smith JW, Johnson JE, Carrera GF, et al. MR imaging of the tarsal tunnel and related spaces: normal and abnormal findings with anatomic correlation. Am J Roentgenol 1990;155:323 8. [5] Gould N, Alvarez R. Bilateral tarsal tunnel syndrome caused by varicosities. Foot Ankle 1983;3:290 2. [6] Ho VW, Peterfy C, Helms CA. Tarsal tunnel syndrome caused by strain of an anomalous muscle: an MRI-specific diagnosis. J Comput Assist Tomogr 1993;17:822 3. [7] Sammarco GJ, Conti SF. Tarsal tunnel syndrome caused by an anomalous muscle. J Bone Joint Surg Am 1994;76:1308 14. [8] Lee MF, Chan PT, Chau LF, Yu KS. Tarsal tunnel syndrome caused by talocalcaneal coalition. Clin Imaging 2002;26:140 3. [9] Garchar DJ, Lewis JE, DiDomenico LA. Hypertrophic sustentaculum tali causing a tarsal tunnel syndrome: a case report. J Foot Ankle Surg 2001; 40:110 2. [10] Delfaut E, Demondion X, Bieganski A, Thiron MC, Mestdagh H, Cotten A. Imaging of foot and ankle entrapment syndromes: from well demonstrated to unfamiliar sites. Radiographics 2003;23:613 23. [11] Cotten A. Imagerie musculosquelettique. Pathologies locorégionales. Paris: Masson; 2007 (In press). [12] Tanz SS. Heel pain. Clin Orthop Relat Res 1963;23:169 78. [13] Baxter DE, Thigpen CM. Heel pain-operative results. Foot Ankle 1984;5: 16 25. [14] Stanczak JD, Mc Lean VA, Yao L. Atrophy of the abductor minimi muscle: marker of a neuropathic heel pain syndrome. Radiology 2001;1198:522 (abstr). [15] Mabin D. Compressions nerveuses distales du membre inférieur. Étude clinique et électrophysiologique. Neurophysiol Clin 1997;27:9 24.