Forme et contenu du contrat de travail Le salarié peut-il exiger la remise d un contrat de travail? Non, la rédaction d un contrat est facultative (sauf s il est conclu à durée déterminée ou à temps partiel, ou qu un accord collectif l impose). Toutefois, la directive du 14 octobre 1991 impose une information du salarié sur ses conditions d emploi (poste occupé, rémunération, durée du travail, lieu de travail, durée du congé payé, convention collective applicable ). Ces informations sont partiellement reprises dans le bulletin de paie et le document remis par l employeur au salarié comprenant les informations contenues dans la déclaration préalable à l embauche. Le contrat de travail peut-il contenir des clauses particulières? Oui, à condition : qu elles ne soient pas moins favorables pour le salarié que les dispositions légales ou conventionnelles ; qu elles ne dérogent pas au principe d égalité femmeshommes ; qu elles soient indispensables à la protection des intérêts légitimes de l entreprise, justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché lorsqu elles portent atteinte aux droits et aux libertés individuelles et collectives (art. 1121-1 C. trav.). Ces clauses ne s appliquent que si le salarié a signé le contrat (Cass. soc. 02/04/98, n 95-43.541). 175
Les clauses les plus fréquentes sont relatives à : 1) la période d essai (voir ci-après). 2) la non-concurrence (voir fiche n 8). 3) les conventions de forfait (voir fiche n 22). 4) la mobilité géographique : elle permet à l employeur d imposer au salarié un changement de lieu de travail. Pour être valable, la clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d application : par exemple, une clause ne peut pas prévoir que le salarié peut être muté dans toutes les zones géographiques où la société exerce son activité, car cette clause n est pas suffisamment précise (Cass. soc. 26/05/2010, n 08-45324 et Cass. soc. 16/02/2012, n 10-26.542). L employeur doit mettre en œuvre la clause de mobilité dans l intérêt de l entreprise et de bonne foi (Cass. soc. 14/06/2002 n 99 44845). Cela signifie en particulier que l employeur doit laisser un délai raisonnable pour permettre au salarié de s organiser, notamment lorsque la mutation implique un changement de résidence. En outre, la mise en œuvre de la clause de mobilité ne doit pas porter atteinte de manière disproportionnée au droit du salarié à une vie personnelle et familiale (Cass. soc. 23/03/2011, n 09-69127 pour une mutation injustifiée de Compiègne à Paris). Le juge doit rechercher si cette atteinte est justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché (Cass. soc. 13/01/2009, n 06-45562) (voir fiche n 7 sur la conciliation vie familiale vie professionnelle). La clause de mobilité est parfois associée à une clause d obligation de résidence. La restriction au libre choix du domicile personnel et familial n est valable qu à la condition d être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l entreprise et proportionnée, compte tenu de l emploi occupé et du travail demandé, au but recherché (Cass. soc. 12/01/1999, n 96-40755). 176
Fiche 23 5) l exclusivité : c est une clause qui interdit au salarié, pendant l exécution de son contrat, l exercice d une autre activité, même non concurrente, pour son compte ou pour un autre employeur. Pour la jurisprudence, cette clause porte atteinte au principe de la liberté du travail (préambule de la Constitution du 27 octobre 1946). En application de l article L. 1221-1 du Code du travail, la validité d une telle clause n est donc admise que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l entreprise, justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché (Cass. soc. 11/07/00, n 98-43.240). 6) les objectifs et la rémunération variable : elle consiste à fixer au salarié un objectif à atteindre. On retrouve fréquemment cette clause, associée à une rémunération variable. Pour que cette clause soit valable, les objectifs doivent être réalistes et compatibles avec le marché (Cass. soc. 13/01/09, n 06-46208). La rémunération variable doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l employeur, ne pas faire porter le risque d entreprise sur le salarié et ne pas avoir pour effet de réduire la rémunération en dessous du SMIC et des minimas conventionnels. Qu est-ce qu une période d essai? Elle permet à l employeur de juger des capacités professionnelles du salarié et au salarié d apprécier l intérêt de son poste et la qualité de ses conditions de travail (art. L. 1221-20 C. trav.). Durant cette période, l employeur et le salarié peuvent mettre fin au contrat sans justification ni procédure, sous réserve du respect d un délai de prévenance. La période d essai ne peut pas être détournée de son objet pour apprécier la viabilité économique d un emploi. 177
La période d essai est-elle obligatoire? Non, c est une simple faculté. Elle doit être expressément prévue dans le contrat de travail ou la lettre d engagement (art. L. 1221-23 C. trav.). En outre, le contrat doit être signé par le salarié. À défaut, la période d essai lui est inopposable (Cass. soc. 13/12/00, n 98-44.464). Quelle est la durée de la période d essai? Pour les CDI, elle est fixée à : 2 mois pour les ouvriers et les employés ; 3 mois pour les agents de maîtrise et les techniciens ; 4 mois pour les cadres (art. L. 1221-19 trav.). Un accord collectif, ou le contrat de travail, peut prévoir des durées plus courtes à la condition d avoir été conclu après le 26 juin 2008. Une convention de branche étendue conclue avant le 26 juin 2008, peut prévoir des durées plus longues, à condition qu elles restent raisonnables (sont considérées comme déraisonnables une durée de 6 mois pour une assistante commerciale, Cass. soc. 10/05/2012, n 10-28512 et d un an pour un chargé d affaire, Cass. soc. 04/06/2009, n 08-41359, ou pour un directeur de magasin, Cass. soc. 11/01/2012, n 10-17945). Toute suspension du contrat de travail (congés payés, congé sans solde, arrêt de travail pour maladie ) entraîne une prolongation de la période d essai pour une durée équivalente. L employeur peut-il renouveler la période d essai? Le renouvellement de la période d essai n est possible qu une seule fois à condition qu un accord de branche étendu et le contrat de travail (ou la lettre d engagement) en prévoient la possibilité (art. L. 1221-21 et L. 1221-23 C. trav.). À défaut, le renouvellement est nul. En outre, le salarié doit donner son accord au renouvellement qui doit être exprès et non équivoque. La seule apposition par 178
Fiche 23 le salarié de sa signature sur la lettre remise en main propre prolongeant l essai ne vaut pas acceptation du renouvellement de la période d essai (Cass. soc. 08/07/15, n 14-11762). En revanche, la signature du salarié, accompagnée de la mention «lu et approuvé» sur la lettre notifiant le renouvellement de la période d essai vaut accord exprès de sa part (Cass. soc. 21/01/15, n 13-23018). La durée de la période d essai, renouvellement inclus, ne peut pas dépasser : 4 mois pour les ouvriers et employés ; 6 mois pour les agents de maîtrise et les techniciens ; 8 mois pour les cadres (art. L. 1221-21 C. trav.). Quelle sont les règles applicables à la rupture de la période d essai? La période d essai permet d écarter l application des règles légales régissant la rupture du contrat de travail (art. L. 1231-1, alinéa 2, C. trav.). Le contrat peut donc être rompu, avant le terme de la période d essai, sans motivation ni procédure par le salarié comme par l employeur. Toutefois, la rupture de la période d essai est fautive en cas d abus dans l exercice du droit de résiliation. C est le cas lorsqu elle repose sur des considérations autres que l appréciation de la valeur professionnelle du salarié (par exemple, si elle résulte du refus d une réduction de salaire, Cass. soc. 10/03/2008, n 07-42445, ou de la suppression du poste, Cass. soc. 20/11/2007, n 06-41212), ou si l employeur fait preuve d une légèreté blâmable (par exemple, lorsqu il ne prend pas le temps suffisant pour apprécier les capacités professionnelles du salarié, Cass. soc. 15/11/2005, n 03-47546). Dans le cas, le salarié peut obtenir des dommages et intérêts. Si le salarié rompt la période d essai, il doit respecter un préavis de : 24 heures s il a moins de 8 jours de présence, 48 heures à partir de 8 jours (art. 1221-26 C. trav.). 179
Si l employeur rompt la période d essai, il doit respecter un préavis de : 24 heures si le salarié a moins de 8 jours de présence ; 48 heures entre 8 jours et un mois de présence ; 2 semaines après un mois de présence ; 1 mois après trois mois de présence (art. L. 1221-25 C. trav.). La durée du préavis ne doit pas avoir pour effet de prolonger la période d essai, renouvellement inclus (art. L. 1221-25 C. trav.). Le contrat doit donc prendre fin au plus tard à l expiration de la période d essai, même si le salarié ne peut pas exécuter tout ou partie de son préavis. Dans ce cas, l employeur devra verser au salarié une indemnité pour la partie du préavis qui n aura pas été exécutée. À défaut, la poursuite de la relation contractuelle au-delà du terme de la période d essai fait naître un nouveau contrat à durée indéterminée auquel l employeur ne peut mettre fin que par un licenciement (Cass. soc. 05/11/14, n 13-18114). 180