Les Dix Commandements (3) Exode 20.7

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1 Église É vangéliq ue Libre d'aix e n Prove nce BP Avenue du Deffens Aix en Provence Cedex 02 Pasteur Frédéric Baudin Prédication du 17 février 2013 Les Dix Commandements (3) Exode 20.7 Frédéric Baudin Lecture Exode (= Deutéronome 5.11) «Tu ne prendras pas le nom du Seigneur, ton Dieu, en vain ; car le Seigneur ne tiendra pas pour innocent celui qui prendra son nom en vain.» Prédication : Nous avons vu la dernière fois que Dieu exige de son peuple qu il entretienne avec lui une relation exclusive : «Tu n auras pas d autre dieu». Il est évident que ce 2 ème commandement a un lien étroit avec le troisième commandement, qui ordonne de ne pas prendre le nom du Seigneur en vain Mais qu est-ce que cela signifie, au juste, de ne pas «prendre le nom du Seigneur en vain»? Cette parole est un peu énigmatique, et il faut sans doute commencer par en expliquer un peu les termes : La traduction ne pose pas beaucoup de problème, c est surtout l expression «en vain» qui pourrait être mal interprétée Mais, commençons par la première partie de cette phrase, ou plutôt par le premier verbe de cette phrase : On peut le traduire : 1. Avec un sens qui fait référence à une forme de prière, d appel à l aide : «Tu n invoqueras pas» ; «Tu ne prononceras pas le nom du Seigneur» 2. Avec un sens «utilitaire» : «Tu ne prendras pas» ; «Tu n utiliseras pas» ; «Tu ne te serviras pas» ; «Tu ne feras pas usage du nom du Seigneur» 3. Ou plus littéralement : «Tu ne porteras pas», «tu n élèveras pas» le nom du Seigneur (même sens que 1 dans ce cas = tu n invoqueras pas ) Toutes ces traductions proposées par nos bibles françaises sont valables, mais la plus juste est : «Tu n invoqueras pas le nom du Seigneur», ou «Tu ne prononceras pas le nom du Seigneur» Frédéric Baudin Page 1 / 6 Prédication du 17 février 2013

2 Ces deux traductions laissent apparaître une nuance : il peut s agir d une prière (invocation), ou simplement d une parole, lors d un serment ou dans une discussion. Les deux mots qui suivent cette première partie sont très importants : «Tu ne prononceras pas le nom du Seigneur, ton Dieu» C'est par eux que les trois premiers commandements sont liés. Rappelons-nous que les tables de la loi commencent précisément par ces termes : «Je suis le Seigneur ton Dieu qui t'ai fait sortir d'égypte où tu étais esclave». Il s agit donc bien, dans le 3 ème commandement, du Dieu d Israël, ce Dieu qui s est révélé à Moïse, et qui lui a précisément révélé son nom. Ce Dieu s adresse maintenant à chaque individu de son peuple. Encore une fois, c est un Dieu personnel, qui entre en relation avec chaque être humain qui le reconnaît comme Dieu, qui connaît son nom, ce que précise aussi ce texte de l Exode, au chapitre 3 : Exode Dieu dit (à Moïse) : «Je serai avec toi. Voici pour toi le signe que c est moi qui t envoie : quand tu auras fait sortir le peuple d Égypte, vous servirez Dieu sur cette montagne.» Moïse dit à Dieu : «J irai donc trouver les Israélites et je leur dirai : 'Le Dieu de vos ancêtres m envoie vers vous.' Mais s ils me demandent quel est son nom, que leur répondrai-je?» Dieu dit à Moïse : «Je suis celui qui suis.» Et il ajouta : «Voici ce que tu diras aux Israélites : 'Je suis m a envoyé vers vous.'» Dieu dit encore à Moïse : «Voici ce que tu diras aux Israélites : 'Je suis (l Éternel), le Dieu de vos ancêtres, le Dieu d Abraham, le Dieu d Isaac et le Dieu de Jacob, m envoie vers vous.' Tel est mon nom pour toujours, mon nom pour l éternité (de génération en génération).» Dieu a donc révélé son nom à Moïse et au peuple d Israël. Le nom du Seigneur, du Dieu unique, se distingue de ceux de tous les dieux inventés par les hommes. Ce nom (YHWH - Yahvé) vient de la racine du verbe «être», il peut se traduire par «Je suis», ou «il est». Le nom complet que Dieu révèle à Moïse peut se traduire par «Je suis qui je suis» : Dieu est l Être par excellence, et il est éternel. On traduit d ailleurs souvent ce nom par «l Éternel». On peut ajouter, toujours à partir de ce verbe être, que ce nom nous révèle un être vivant et actif : Frédéric Baudin Page 2 / 6 Prédication du 17 février 2013

3 Dieu donne l existence à ses créatures, il est présent et il agit dans l histoire des hommes. Il le montre d ailleurs de façon éclatante pour le peuple d Israël lorsqu il le libère de l esclavage en Égypte. Dieu révèle son nom à son peuple afin qu il soit reconnu comme le seul vrai Dieu, le seul Dieu qui est à l origine de toute chose et de tout être humain : «Écoute Israël, le Seigneur ton Dieu est l Unique Seigneur» (Deutéronome 6.4) Il est le seul capable d agir en faveur de sa création, et surtout en faveur des hommes et des femmes, et encore plus particulièrement en faveur du peuple qui lui appartient en propre, comme le livre de l Exode ne cesse de le souligner. On ne peut pas confondre ce Dieu avec un être humain, ni avec rien de ce qui est sur la terre, dans le ciel ou dans la mer. Par conséquent, on ne doit pas prendre ou invoquer ce nom «en vain», comme si on s adressait, ou comme si on se référait à une idole quelconque Le 3 ème commandement nous rappelle que le Dieu d Israël n est pas un dieu parmi les autres, il est le seul, l unique et le véritable Dieu dans ce monde On peut compléter ce commandement par cet ordre qui est donné un peu plus loin : Exode «Observez scrupuleusement ce que moi, le Seigneur, je vous ai ordonné. Veillez particulièrement à ne jamais invoquer des dieux étrangers ; qu'on ne vous entende même pas mentionner leurs noms.» Maintenant, que signifie plus précisément ce fameux «en vain»? Là encore, plusieurs traductions ont été proposées. On peut donc regrouper ces propositions dans deux traductions possibles : 1. Tout ce qui relève d un usage abusif ou frivole, tout ce qui dépasse le cadre du culte rendu à Dieu, ou rendu au seul vrai Dieu : Ne pas prononcer de manière abusive (FC) ; ne pas se servir n importe comment (PDV) ; ne pas utiliser à la légère (S21). 2. Ou encore, tout ce qui relève d un usage avec une mauvaise intention, notamment pour tromper : Ne pas utiliser pour tromper (NBS SEM) ; ne pas prononcer à tort (TOB). En d autres termes, on ne peut pas invoquer, ou prononcer le nom de Dieu pour demander tout et n importe quoi, ou encore pour défendre sa propre cause, alors qu elle est mauvaise, en prenant Dieu pour témoin. Cela vise en particulier les incantations païennes, les prières adressées à d autres dieux, à des idoles, ou encore les prières sans réel contenu, sans véritable sens, comme ces paroles ou ces mots, ces «mantras», que l on répète indéfiniment dans les religions orientales ou dans les techniques mystiques. Frédéric Baudin Page 3 / 6 Prédication du 17 février 2013

4 Cela vise également les paroles qui contiennent le nom du Seigneur sans qu elles soient précisément une prière ou une louange adressées à Dieu avec tout le respect, la foi et l amour qu il faudrait. - C est par exemple le fait de jurer au nom du Seigneur, de prêter serment en prenant Dieu à témoin, comme un gage de vérité (ce qui était permis s il s agit de prouver son innocence ou sa bonne foi : voir Exode 22.11). - Mais jurer en vain, c est prêter serment au nom du Seigneur, alors qu il s agit en réalité de couvrir un mensonge auquel on veut donner l apparence et la force de la vérité, en général pour défendre ses intérêts les plus douteux (voir aussi le cas prévu dans Exode 22). Comme le conseille Jésus, il vaut mieux ne pas jurer du tout en invoquant le nom de Dieu : il suffit de dire oui ou non, et donc de s en tenir dans tous les cas à la vérité! Il peut enfin s agir tout simplement des jurons qui mêlent le nom de Dieu, ce qui rejoint les propos dénués de sens, les paroles dites à la légère, auxquels on associe Dieu ou son nom Certains ont pensé qu à cause de ce verset, il ne fallait plus du tout prononcer le nom hébreu de Dieu (YHWH) qu ils ont alors remplacé par «Seigneur» (Adonaï). L idée vient que seul le souverain sacrificateur aurait pu le prononcer lors de la fête de Yom Kippour, le jour des expiations, où il entrait dans le lieu très saint, dans la dernière pièce du temple pour obtenir le pardon des péchés d Israël. C est une preuve de grand respect, et peut être de sagesse pour éviter d enfreindre ce commandement, mais dans les Psaumes, David, invoque souvent le nom du Seigneur (voir par exemple Ps ), sans redouter un châtiment quelconque, avec respect et confiance Il reste encore une dernière partie à éclairer sur cette phrase : «Car le Seigneur ne tient pas pour innocent quiconque prend son nom en vain» Là encore, les traductions sont un peu différentes, mais dans tous les cas on comprend bien le sens de cette dernière partie, qui pourrait aussi se traduire par : «Le Seigneur ne laisse pas le coupable impuni» Le sens est clair : invoquer ou prononcer le nom de Dieu sans rapport avec Dieu, sans croire qu il le seul vrai Dieu, sans lien avec le culte que nous pouvons lui rendre en tant que Créateur et Seigneur, c est une faute grave que le Seigneur ne laisse pas passer, car elle le concerne tout particulièrement. N oublions pas que le nom, dans la culture hébraïque, représente en tous points la personne, et c est cette personne qu on insulte si l on fait un mauvais usage de son nom Les païens pensaient ainsi avoir prise sur leur dieu dès lors qu ils connaissaient son nom, ce qui était une conception magique du rapport à Dieu. Frédéric Baudin Page 4 / 6 Prédication du 17 février 2013

5 Dans la pensée biblique, c est l inverse : on ne cherche pas à contrôler Dieu en utilisant son nom, comme le font les païens qui rendent un culte à des images qui représentent les astres, les créatures humaines ou animales, voire les forces de la nature et qui tentent de se concilier leur puissance pour leur bien. Au contraire, l être humain qui invoque le nom de Dieu est appelé à se laisser «contrôler» par ce Dieu dont il connaît le nom, en se mettant à son service, en lui rendant un culte. On le reconnaît alors comme le Seigneur, qui règne sur toute sa création. John Stott, qui commente ce verset, ajoute une précision très importante : «Il existe un mauvais usage du nom de Dieu, qui vient du fait que le nom est plus qu une parole ; il est la personne et la nature même de cette personne. Nous faisons donc un mauvais usage du nom de Dieu chaque fois que notre comportement est incompatible avec ce qu il est. Appeler Dieu «Père» et ne pas lui faire confiance, ou appeler Jésus «Seigneur» et lui désobéir, voilà ce qui est abuser du nom de Dieu.» Il y a donc un lien entre notre prière et notre vie. Ne pas prendre le nom de Dieu en vain, c est aussi s adresser à Dieu avec respect, avec confiance, et avec le désir de lui obéir, précisément parce qu il est digne de confiance, parce qu il nous aime. Comme le dit Jésus : «Au jour du Jugement, beaucoup me diront : Seigneur, Seigneur, c est en ton nom que nous avons été prophètes ; c est en ton nom que nous avons chassé des esprits mauvais ; c est en ton nom que nous avons accompli de nombreux miracles. Ne le sais-tu pas? Alors je leur déclarerai : Je ne vous ai jamais connus ; allez-vous-en loin de moi, vous qui commettez le mal!» (Matthieu ). N oublions pas que ce Dieu dont nous connaissons le nom est juste, il ne tient pas le coupable pour innocent, comme nous l avons vu une fois de plus dans ces versets. Mais il est aussi le Dieu qui est amour, on pourrait l appeler : «Je suis amour» (1 Jean 4.8). C est donc avec respect et amour que nous invoquons son nom, et nous voulons vivre en témoignant de cet amour dans tout ce que nous faisons en son nom. J aimerais ajouter une dernière chose, et non des moindres, car nous avons le privilège de connaître un autre nom du Seigneur. En effet, tout ce que nous savons à propos du Dieu d Israël et de son nom s applique également à Jésus, le Fils de Dieu. Le nom même de Jésus signifie «Dieu sauve», comme le précise Matthieu (Dieu s adresse à Joseph) : «Marie mettra au monde un fils, que tu appelleras Jésus, car il sauvera son peuple de ses péchés.» (Matthieu 1.21) Frédéric Baudin Page 5 / 6 Prédication du 17 février 2013

6 Lors de sa première prédication à Jérusalem, l apôtre Pierre cite un verset de l Ancien Testament en le rapportant à Jésus, le Messie d Israël : «Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé!» (Actes 2.21). Pour nous qui «avons cru en son nom» et qui sommes devenus ainsi des «enfants de Dieu» (Jean 1.12), il s agit aussi de ne pas invoquer le nom du Seigneur en vain, et de nous rappeler, par exemple, cette parole de Jésus : «Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d eux.» (Matthieu 18.20) Car Jésus lui-même est venu «au nom de son Père» ( Jean 5.43) : il le représentait en tout point car il était Dieu fait homme : le Père et le Fils ne sont qu un seul Dieu ( Jean ) Jésus nous a sauvés du péché comme autrefois le Dieu d Israël a sauvé Israël de l esclavage en Égypte (Romains 6). Il nous a ainsi fait connaître le nom de Dieu ( Jean 17.6), et il nous a laissés une promesse extraordinaire : «Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils» (Jean ). Il ne s agit pas bien sûr de demander n importe quoi, ni n importe comment, et donc de ne pas invoquer le nom du Seigneur en vain Nous pouvons donc invoquer ensemble le Seigneur, au nom du Père, le Dieu d Israël ; au nom du Fils, le Dieu qui nous sauve de nos péchés ; et au nom du Saint-Esprit, qui nous donne la sagesse pour ne pas invoquer ce nom en vain, et qui nous donne aussi la force et l amour pour vivre d une façon conforme à la volonté de Dieu, le Seigneur Lecture Jean Voici mon commandement : «Aimez-vous les uns les autres comme je vous aime. Le plus grand amour que quelqu un puisse montrer, c est de donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Je vous appelle amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j ai appris de mon Père. Ce n est pas vous qui m avez choisi, c est moi qui vous ai choisis ; je vous ai chargés d aller, de porter des fruits et des fruits durables. Alors, le Père vous donnera tout ce que vous lui demanderez en mon nom. Ce que je vous commande, donc, c est de vous aimer les uns les autres.» Frédéric Baudin Page 6 / 6 Prédication du 17 février 2013