Généralisation de la complémentaire santé: quelles obligations pour l employeur?



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Transcription:

Généralisation de la complémentaire santé: quelles obligations pour l employeur?

Au 1 er janvier 2016, les salariés doivent bénéficier d'une couverture de santé complémentaire cofinancée par l'employeur. Quels employeurs sont concernés? Quels salariés? Comment la mettre en place? Quelles garanties minimales?

Par accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, les partenaires sociaux ont décidé de créer un droit, pour les salariés entrant dans son champ d'application, à bénéficier d'une couverture complémentaire santé financée pour moitié au moins par leur employeur. Ils ont souhaité que cette obligation n'entre en application qu'à compter du 1 er janvier 2016, à l'issue d'une négociation collective dans les branches ou à défaut dans les entreprises.

Le champ d'application de l'accord ne couvre pas l'ensemble des professions. En effet, les signataires de l'ani n'étant pas représentatifs dans les secteurs de l'agriculture, des professions libérales, de l'économie sociale, du monde associatif, de la presse ou de l'audiovisuel, de la mutualité, notamment, leurs salariés ne sont pas concernés, sauf si leur employeur adhère, directement ou indirectement, à une organisation patronale signataire de l'ani, ou en cas d'application volontaire au niveau de la branche professionnelle ou de l'entreprise. Afin de généraliser cette obligation, le législateur l'a transposée dans la loi (CSS art. L 911-7). Les modalités de mise en œuvre ont été précisées par un décret du 8 septembre 2014, qui définit un «panier de soins» minimal que les employeurs devront assurer et aménage le caractère obligatoire du dispositif pour tenir compte de la situation des salariés et de leurs ayants droit.

Les principales questions qui se posent en pratique ont trait : - à la définition des bénéficiaires de ce droit ; - au contenu des obligations tant en matière de prestations qu'en ce qui concerne le financement des garanties ; - à l'articulation des obligations conventionnelles avec les garanties qui seront mises en place dans l'entreprise. Ces questions doivent être appréhendées au regard des règles relatives au traitement fiscal et social de faveur, applicable au financement des garanties.

Quels sont les employeurs concernés? Il résulte de l'article 1 er de la loi 2013-504 du 14 juin 2013 que tous les employeurs de salariés de droit privé sont concernés par la couverture minimale obligatoire de remboursement des frais de santé et de maternité. Le fait que l'obligation ne soit pas prévue dans le Code du travail ne réduit pas son caractère obligatoire, l'article L 2221-3 de ce Code renvoyant pour ces sujets au Code de Sécurité Sociale. Plus précisément, le titre 1 er du livre IX du CSS (articles L 911-1 et suivants) régit le fonctionnement des normes collectives applicables aux garanties de prévoyance, de couverture des frais de santé et de retraite des salariés.

Quel est le calendrier de mise en place? Les partenaires sociaux, puis le législateur, ont édicté un calendrier de négociations, conduisant à une généralisation de la complémentaire santé dans lesentreprises,effectiveauplustardle 1 er janvier 2016. Cette généralisation est mise en place au moyen d'un dispositif «à trois étages», faisant appel à la négociation de branche, à défaut, à la négociation d'entreprise, à défaut, à la décision unilatérale de l'employeur.

Du 1 er juin 2013 au 30 juin 2014 : accord de branche Au sein de chaque branche professionnelle, des négociations devaient être engagées en vue de la conclusion, au plus tard le 1 er juillet 2014, d'un accord instituant une couverture des frais de santé au moins aussi favorable que les garanties minimales définies par décret L'accord ne devait pas générer d'obligation à l'égard des employeurs avant le 1 er janvier 2016.

En pratique,peud'accordsdebrancheontpuêtreconclusavantle1 er juillet2014, en raison de la publication tardive des textes d'application. Malgré les termes de la loi, on peut douter que l'arrivée de cette échéance calendaire puisse priver les partenaires sociaux de pouvoir négocier sur ce thème dans les branches professionnelles. Or, selon les principes du droit du travail, lorsqu'un accord de branche est conclu, les accords collectifs existants au sein des entreprises doivent être adaptés afin de s'y conformer. En revanche, un accord collectif se substitue, dès son entrée en vigueur, aux engagements unilatéraux (décisions unilatérales, au cas d'espèce), dont seules les dispositions plus favorables aux salariés demeurent applicables.

Du 1 er juillet 2014 au 31 décembre 2015 : accord d'entreprise En l'absence d'accord de branche conclu au 1 er juillet 2014, les entreprises de plus de 50 salariés doivent ouvrir leur propre négociation, afin d'instituer au moins la couverture minimaleobligatoire,d'icile1 er janvier2016.

Au 1 er janvier 2016 au plus tard : tous les salariés doivent bénéficier au moins du «panier de soins» Les entreprises non couvertespar un accord de branche ou un accord d'entreprise (échec des négociations ou entreprises de moins de 50 salariés) devront mettre en place la couverture minimale obligatoire par décision unilatérale, prenant effet au plus tard le 1 er janvier 2016. Dans tous les cas, l'entreprise devra financer au moins 50 %des cotisations de cette couverture santé, le reste étant à la charge des salariés.

Que faire le 1 er janvier 2016? Les contraintes pesant sur les entreprises dépendent de leur situation au regard de cette obligation: 1. Celles dont tous les salariés bénéficient déjà d'une complémentaire santé doivent vérifier: que leur couverture prévoit au moins les garanties minimales obligatoires, décrites par l'articled911-1ducss; que ces garanties minimales sont financées au moins pour moitié par l'employeur. Les niveaux de couverture ou les modalités de financement peuvent être différents suivant la catégorie professionnelle à laquelle appartiennent les salariés : il suffit que le dispositif le moins favorable réponde à ces deux exigences. 2. Celles dont seuls certains salariés (ou aucun) ne bénéficient pas d'une telle couverture doivent impérativement mettre en place, pour ceux qui n'en ont pas, un dispositif au moins égal à la couverture minimale obligatoire, avec un financement patronal au moins égal à 50 %.

Que faire lorsque des garanties existent déjà au niveau de la branche? Un accord d'entreprise ne peut pas déroger à un accord professionnel de branche instituant des garanties collectives présentant un degré élevé de solidarité et recommandant éventuellement un ou plusieurs organismes assureurs (accord conforme aux prévisions de l'article L 912-1 du CSS). En pratique, les accords professionnels n'autorisent généralement pas les dérogations, et la norme conventionnelle de branche demeure un minimum applicable. En tout état de cause, l'accord d'entreprise doit respecter les garanties minimales et les financeràhauteurdelamoitiéaumoinsdelacotisation. En cas de mise en place des garanties par décision unilatérale, l'employeur ne pourra pas réduirelesgarantiesnilapartdefinancementmiseàsacharge. Il est également recommandé de ne pas introduire de cas de dispenses d'adhésion supplémentaire..

Quel est le contenu du «panier de soins»? Nature des soins Soins de ville Honoraires et actes techniques Frais d'hospitalisation Prestations minimales Minimum TM 1 (sauf cure thermale) Maximum : voir contrat responsable 2 Prestations -TM 1 Forfait Journalier Hospitalier Sans limitation de durée Pharmacie TM 1 (sauf SMR 3 faible et modéré = anciennes vignettes bleues et orange) et homéopathie Dentaire Prothèses TM 1 + 25 % des dépassements Orthodontie remboursable Optique 4 Verres simples 5 Minimum 100 Verres complexes 6 Minimum 200 1 verre simple + 1 verre complexe Minimum 150 (1) TM (ticket modérateur) somme restant à la charge de l'assuré après remboursement de la sécurité sociale, dans la limite du tarif de la sécurité sociale. (2) Contrat responsable : contrat respectant des obligations, interdictions et plafonds de prise en charge, afin de bénéficier d'un traitement fiscal et social favorable. (3) SMR : service médical rendu. (4) Optique : prise en charge d'un équipement (monture + 2 verres) au moins tous les 2 ans, sauf pour les mineurs ou en cas d'évolution de la vue, où la prise en charge doit être au moins annuelle. (5) Verres simple foyer dont la sphère est comprise entre -6,00 et + 6,00 dioptries ou dont le cylindre est inférieur ou égal à+ 4,00 dioptries. (6) Verres simple foyer dont la sphère est supérieure à -6,00 ou + 6,00 dioptries ou dont le cylindre est supérieur à + 4,00 dioptries et verres multifocaux ou ogressifs.

Comment s'apprécie l'obligation de financement Quel est le contenu de l'employeur du «panier? de soins»? L'employeurdoitfinanceraumoins 50 % du coût de la couverture. Lorsqu'ilmetenplaceuniquementle«panierdesoins»,iln'yapasdedifficultés: sa contribution doit représenter au moins la moitié du coût de l'assurance. En revanche, l'amélioration de la couverture entraîne-t-elle une augmentation proportionnelle de son obligation de financement? Le texte ne prévoit pas une obligation généralisée de prise en charge à hauteur de 50 % de la couverture santé. Il précise au contraire que lorsque les salariés ne disposent pas d'une couverture minimale dont l'employeur finance au moins la moitié, ce dernier doit mettre en place au moins le «panier de soins» et payer 50 % du coût afférent. On doit donc pouvoir considérer que, en cas d'amélioration de la couverture, l'employeur peut librement choisirson niveau de contribution, dès lors qu'elle correspond, au moins, à la moitié du coût du «panier de soins».

Les garanties peuvent-elles être différentes suivant les catégories professionnelles? Jusqu'à une série d'arrêts du 27 janvier 2015 ayant profondément modifié la jurisprudence applicable aux avantages catégoriels conventionnels au regard du principe d'égalité de traitement en droit du travail, la seule différence de catégories professionnelles ne suffisait pas à justifier, pour l'attribution d'avantages, une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard de ces avantages. Toute différence de traitement entre les catégories professionnelles devait être justifiée par des raisons objectives et pertinentes.

Cependant, en matière de protection sociale complémentaire, cette jurisprudence ne s'appliquait pas, la Cour de cassation ayant admis des différences de traitement entre des salariés de catégories professionnelles distinctes, sans qu'elles aient à être justifiées(cass. soc. 13-3-2013 n 11-20.490: RJS 5/13 n 341). Cette solution est toujours valable, que le régime soit institué par un accord collectif ou par une décision unilatérale de l'employeur. En revanche, pour que les cotisations versées par l'employeur ne soient pas considérées comme un avantage de rémunération soumis à cotisations sociales et que la part salariale soit déductible de l'assiette de l'impôt sur le revenu, chaque système de garanties doit s'appliquer à une catégorie objective de personnel.

Pour cela, l'employeur ne peut prendre en compte que les critères définis par l'article R 242-1-1 du CSS et faire référence : - au statut de cadres ou de non-cadres ; - à un seuil de rémunération déterminé à partir de l'une des limites inférieures fixées pour le calcul des cotisations Agirc et Arrco ; - à la place dans les classifications conventionnelles ou dans les sous-classifications résultant du niveau de responsabilité, du type de fonctions, du degré d'autonomie ou de l'ancienneté dans le travail ;

- à l'appartenance: au champ d'application d'un régime légalement ou réglementairement obligatoire pour la couverture du même risque; à certaines catégories spécifiques de salariés définies par les stipulations d'une convention collective, d'un accord de branche ou d'un accord national interprofessionnel caractérisant des conditions d'emploi ou des activités particulières; aux catégories définies clairement et de manière non restrictive à partir des usages constants, généraux et fixes en vigueur dans la profession. L'employeur doit, en outre, sauf si les catégories sont établies sur la base des deux premiers critères et si l'ensemble des salariés est couvert, établir qu'il couvre ainsi tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties. Enfin, les catégories ne peuvent pas être définies en fonction de critères relatifs au tempsdetravail,àlanatureducontratouàl'âgedessalariés.

Une condition d'ancienneté peut-elle être fixée pour l'accès aux garanties? En principe, le fait de subordonner l'accès aux garanties de santé à une condition d'ancienneté inférieure ou égale à 6 mois ne remet pas en cause le caractère collectif des garanties, au regard du traitement social de faveur applicable aux cotisations. Cependant, la généralisation de la couverture «frais de santé» suppose que tous les salariés soient couverts, sauf à se prévaloir des cas de dispenses prévus dans l'acte juridique. Cela semble remettre en cause la possibilité de subordonner l'accès aux garanties minimalesàuneconditiond'anciennetéàcompterdu1 er janvier2016. En l'absence de précisions dans les textes ou de doctrine administrative sur ce point, il est donc fortement recommandé de ne pas assortir les régimes mis en place au titre de l'obligation minimale de conditions d'ancienneté.

Quels salariés peuvent être dispensés d'affiliation et comment? Selon le CSS, l'employeur peut prévoir des cas de dispense d'affiliation sans remettre en cause l'application du traitement social de faveur applicable aux cotisations, à condition que: - ils figurent dans l'acte juridique, - les salariés s'en prévalant formulent leur demande de dispense dans un écrit, mentionnant que leur choix a été parfaitement éclairé, - les salariés produisent, le cas échéant, les justificatifs requis. A défaut, le régime ne serait pas considéré comme obligatoire et son financement serait entièrement soumis à cotisations de sécurité sociale et charges alignées.

Les cas de dispense sont énumérés dans l'article R 242-1-6 du CSS etdansunarrêtédu26mars2012. Globalement, ces dérogations au caractère obligatoire ont pour objet d'atténuer la contrainte que représentent ces dispositifs de protection sociale complémentaire collective, en autorisant à ne pas adhérer au dispositif les salariés suivants: - salariés qui n'ont pas vocation à demeurer dans l'entreprise (CDD, apprentis, contrats de mission), - salariés qui travaillent à temps partiel et pour lesquels la cotisation d'assurance représenterait plus de 10 % de leur rémunération brute,

- ou salariés qui bénéficient déjà, en propre ou en qualité d'ayant droit, d'une couverture de même nature:. salariés multi- employeurs. ou assurés par la couverture obligatoire de leur conjoint,. ou couverts au titre de l'assurance complémentaire mise en place dans la branche des industries électriques et gazières. ou, par tolérance, à la SNCF ou par le régime Enim (Etablissement national des invalides de la marine). ou dans la fonction publique de l'etat ou des collectivités territoriales,. ou en qualité d'ayant droit d'une couverture complémentaire couvrantunparent«travailleurnonsalarié»,dite«loimadelin».

En outre, lorsque le régime a été institué par voie de décision unilatérale de l'employeur, les salariés embauchés avant la mise en place des garanties ne peuvent se voir imposer une cotisation. Il s'agit d'une dispense légale(«loi Evin»). Dans tous les cas, l'employeur doit être en mesure, en cas de contrôle Urssaf, de produire la demande écrite de dispense des salariés concernés et les justificatifs requis.

Quelle est la situation des ayants droit? L'article D 911-3 du CSS prévoit que lorsque l'employeur décide d'étendre la couverture minimale obligatoire, par décision unilatérale, aux ayants droit des salariés (généralement leurs conjoint et enfants), ces derniers doivent avoir la faculté de ne pas les affilier, dès lors que les ayants droit justifient d'une couverture similaire dans le cadre de leur activité professionnelle. L'employeur peut également prévoir pour les ayants droit, dans l'acte, les mêmes dérogations que celles ouvertes aux salariés.