Délimiter la prévoyance



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Transcription:

1 Délimiter la prévoyance Un complément de la sécurité sociale... 4 Les textes définissant la prévoyance... 5 Les risques relevant de la prévoyance : risques vieillesse... 10 maladie et maintien du salaire.. 14 Extension de la prévoyance au-delà des risques de sécurité sociale... 16 Un complément des régimes de sécurité sociale 6 4 En principe, la protection sociale complémentaire d entreprise s articule avec le tronc commun de la sécurité sociale. Une étude systématique des conventions collectives aboutit à détecter un noyau commun de garanties. On retrouve ainsi les garanties contre le risque décès, l atteinte à l intégrité physique, contre les risques d incapacité de travail, d invalidité, contre le risque vieillesse et même des garanties contre certains risques familiaux. Mis à part le risque chômage, ces garanties correspondent au corps des prestations de sécurité sociale telles qu elles sont prévues par le code de la sécurité sociale. C est pourquoi la cohérence de la prévoyance en entreprise réside dans son aptitude à venir en complément de la protection sociale de base offerte notamment par la sécurité sociale. L idée n est pas originale mais elle est étayée par divers éléments : la loi prévoit, dans le cas où il s agit de prestations en nature telles que des remboursements de prescription médicale, que le total des prestations ne peut excéder les dépenses effectivement engagées par l assuré social (c. séc. soc. art. L. 861-3). Dans le cas où il s agit de prestations en espèces comme le maintien du salaire pendant la période d absence pour maladie, le total des prestations ne peut pas dépasser le salaire normalement perçu. Il en va de même pour le remboursement ou les indemnisations de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident: ils ne peuvent excéder le montant des frais restant à la charge de l assuré ou de l adhérent après les remboursements de toute nature auxquels il a droit et avant la prise en charge instaurée par l article L. 861-3 du code de la sécurité sociale. La pratique accrédite également cette complémentarité (loi Évin* art. 9 modifié par la loi 99-641 du 27 juillet 1999). Les accords déterminent en effet le niveau des prestations dues en vertu de la protection d entreprise à partir de la garantie due par la sécurité sociale. Les prestations sont par exemple calculées en fonction du ticket modérateur, du plafond de la sécurité sociale, du remboursement de la sécurité sociale ou en fonction des frais réels.

La prévoyance dans l entreprise Les textes définissant la prévoyance 5 La protection sociale complémentaire des salariés est constituée de l ensemble des garanties collectives* dont bénéficient les salariés, anciens salariés et ayants droit en complément de celles qui résultent de l organisation de la sécurité sociale (c. séc. soc. art. L. 911-1). L organisation de la sécurité sociale est chargée de garantir «les travailleurs et leur famille contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain». Elle couvre également les charges de maternité et les charges de famille Elle assure le service des prestations d assurances sociales, d accidents du travail et maladies professionnelles, des allocations de vieillesse ainsi que le service des prestations familiales (c. séc. soc. art. L. 111-1). Le régime de base obligatoire de la sécurité sociale couvre ainsi les risques maladie, maternité, invalidité et décès, veuvage et vieillesse, et les risques professionnels (accidents du travail et maladies professionnelles). Il assure par ailleurs la couverture des charges de famille. La protection sociale complémentaire a donc pour objectif de couvrir les salariés au-delà des prestations servies par les régimes de base obligatoires. Les risques relevant de la prévoyance 6 L utilisation du vocable prévoyance est largement répandu, toutefois le domaine qu il recouvre peut parfois s avérer incertain. Des domaines différents selon les textes Le code de la sécurité sociale 7 La loi Veil* du 8 août 1994 englobe, dans la protection sociale des salariés, les institutions de prévoyance. Ces institutions ont pour objet de contracter des engagements dont la durée dépend de la durée de la vie humaine, de s engager à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d un enfant ; elles couvrent également les risques de dommages corporels liés aux accidents ou à la maladie et le risque chômage (c. séc. soc. art. L. 931-1). Le code de la mutualité 8 Dans le code de la mutualité, l article L. 111-1 indique que les institutions soumises au code réalisent des opérations de prévoyance, entendues comme la couverture des risques dépendant de la durée de vie humaine, accidents, invalidité, vie-décès. Directives européennes 9 La réglementation relative au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d entreprise (directive 77/187) de même que la directive relative à la protection des salariés en cas d insolvabilité de l employeur (directive 80/987) évoquent les régimes complémentaires de prévoyance professionnels ou interprofessionnels existants en dehors des régimes légaux de sécurité sociale. 7

La prévoyance dans l entreprise Intégration ou exclusion du risque vieillesse 10 Plusieurs analyses peuvent être proposées pour appréhender l acception exacte du vocable prévoyance au regard du risque vieillesse. Intégration par le code de la mutualité 11 Dans une analyse large, la prévoyance inclurait également le risque vieillesse puisque l acte de préparation de l éventuelle future retraite professionnelle constituerait par excellence une démarche de prévoyance (c. mutualité art. L. 111-1). Exclusion par certains textes 12 Dans une analyse restreinte, la prévoyance exclurait non seulement la retraite mais également les prestations en nature d assurance maladie (remboursement de soins). C est en ce sens que certains textes peuvent être interprétés: le régime de prévoyance des cadres, issu de la convention du 14 mars 1947, inclut dans la prévoyance les avantages en cas de décès, les pensions d invalidité, les indemnités journalières en cas de maladie mais ne mentionne pas d autres garanties. Position de la loi du 8 août 1994 : une voie médiane 13 Dans une analyse médiane, la prévoyance inclut la couverture contre les risques décès, incapacité de travail, invalidité, accident, maternité, chômage. Elle inclut également le risque maladie et le risque vieillesse. La loi Veil* du 8 août 1994 distingue les opérations de prévoyance des opérations de retraite complémentaire mises en œuvre par les institutions complémentaires. La loi Évin* exclut également la retraite de son champ d application ; or, elle est couramment dénommée «loi prévoyance». Les limites de la prévoyance 8 Le maintien de rémunération en cas de maladie 14 Quelle est la nature du maintien par l employeur au salarié de sa rémunération pendant une période d absence pour maladie ou invalidité? Cet élément peut-il intégrer la sphère de la prévoyance? La réponse semble devoir être positive. Il ressort en effet que le financement par l employeur de prestations en espèces (s il ne se contente pas d avancer les sommes qui lui seront ensuite remboursées par les caisses de sécurité sociale) correspond à une mise en œuvre d une sécurité sociale indépendante d opérateurs extérieurs. Cette analyse est confortée par l évolution récente du système néerlandais de protection contre les accidents du travail et les maladies, qui prévoit que désormais il reviendra aux employeurs de s assurer eux-mêmes afin de permettre aux salariés de conserver un revenu de remplacement pendant les périodes d absence (en contrepartie, les cotisations autrefois versées pour financer ce risque social seront supprimées). Enfin, la conception large de prestation de sécurité sociale adoptée par la CJCE confirmerait cette analyse : il est très probable que la Cour ne se fierait pas à la nature de l organisme débiteur, mais s en tiendrait au but de la prestation, qui

La prévoyance dans l entreprise consiste ici en l élimination d un risque social. En ce sens, on peut évoquer un arrêt dans lequel la CJCE a admis qu une indemnité de licenciement suspendant l octroi d une prestation de chômage était une prestation de sécurité sociale au sens du droit communautaire, quand bien même la finalité de l indemnité de licenciement (rémunération différée ou réparation du préjudice) et la finalité d une prestation chômage (fournir un revenu de remplacement) ne sont pas identiques. L intéressement et les plans d épargne d entreprise 15 Peut-on considérer que d autres avantages comme ceux liés à l intéressement ou des plans d épargne d entreprise accordés par l employeur intègrent le champ de la prévoyance? La sécurité sociale est le plus souvent liée à la réparation des conséquences de divers éléments, généralement qualifiés de risques sociaux. C est sur cette logique que se cale la prévoyance. Le droit communautaire suit une tendance identique. Les prestations de sécurité sociale sont rattachées à des risques sociaux. Or, majoritairement, les risques sociaux se définissent comme un faisceau d événements contre lesquels les États assurent une protection, ou comme un événement incertain qui ne dépend pas exclusivement de la volonté des parties, accroissant les dépenses ou diminuant les ressources. À ces risques correspondent deux types de prestations: celles qui ont pour objet d assurer un revenu de remplacement aux travailleurs privés d emploi pour diverses raisons (chômage, maladie, vieillesse) et celles qui ont pour objet de compenser une hausse des charges (naissance d un enfant, maladie). Or, les primes d intéressement ou les plans d épargne d entreprise n entrent pas dans l une ou l autre de ces catégories. Ils n intégreraient donc pas la sphère de la prévoyance. Extension du domaine hors des risques de sécurité sociale 16 Dans certains cas, le champ d intervention de la protection sociale complémentaire ne coïncide pas nécessairement avec celui de la sécurité sociale. La liste des risques sociaux propres à délimiter le champ de la prévoyance n est pas invariable. La notion de risque social est susceptible de varier dans le temps et dans l espace. Aussi, le risque dépendance est-il un risque protégé depuis longtemps dans certains pays alors qu il est encore en voie d intégration en France. De même, la protection contre les risques de guerre fait partie des risques de sécurité sociale dans certains pays. De plus, il faudrait peut-être intégrer de nombreux avantages offerts par l employeur dans la catégorie de la protection sociale. Ainsi, les avantages offerts par un comité d entreprise à la naissance d un enfant, les cadeaux et les bons d achat ne relèvent pas de la protection sociale d entreprise et donc de la prévoyance. La même question pourrait être posée pour les aides au logement accordées par l employeur, qui participent d une politique familiale, voire pour les prêts consentis pour l achat d une voiture ou pour un départ en vacances lorsqu ils sont attribués de manière variable selon les revenus de leurs bénéficiaires. Les garanties proposées ne viennent pas uniquement compléter celles du régime de base. Elles couvrent également des risques que celui-ci ne prend pas encore en compte directement. Ainsi en est-il, par exemple, du risque dépendance. 9

La prévoyance dans l entreprise Remarque. La prise en charge de la perte d autonomie des personnes âgées via une allocation personnalisée d autonomie a été adoptée le 2 juillet 2001. Elle entrera en vigueur au 1 er janvier 2002. Cette loi institue une nouvelle allocation qui a vocation à se substituer à l actuelle prestation spécifique dépendance (créée par la loi 97-60 du 21 janvier 1997). Cette allocation est versée aux personnes âgées de 60 ans et plus sans aucune condition de ressource même si elles sont moyennement dépendantes. Les personnes bénéficiaires peuvent vivre à domicile ou en établissement. Cette allocation a une vocation universelle et devrait bénéficier à toute personne dans l incapacité d assumer les conséquences de la perte d autonomie. Cette allocation bénéficie à toutes les personnes qui, outre les soins qu elles peuvent recevoir, ont besoin d être aidées pour l accomplissement des actes essentiels de la vie ou ont besoin d une surveillance régulière. 10

Détecter les règles applicables 2 Les sources en droit interne Les sources classiques : droit du travail... 20 droit des assurances... 21 droit de la mutualité... 22 droit fiscal... 23 Les sources spécifiques : loi Évin... 25 loi Veil... 26 la couverture maladie universelle (CMU)... 28 Les sources du droit européen... 36 Les sources en droit interne 17 La prévoyance en entreprise se situe aux confins d une multitude de sources juridiques. Les sources : droit «classique» et droit spécifique 18 La prévoyance est soumise à deux types de sources. Les sources générales du droit qui ne sont pas spécifiques à la prévoyance et des sources spécifiques à cette matière qui se sont récemment développées. Les sources classiques 19 La mise en œuvre des garanties de prévoyance fait appel à une combinaison de plusieurs droits, principalement le droit du travail, le droit de la sécurité sociale, le droit de la mutualité, le droit des assurances et le droit fiscal. Toutefois, les mécanismes de ces différents droits ne sont pas toujours adaptés aux mécanismes spécifiques de la prévoyance ; il arrive qu une même notion donne lieu à des définitions différentes. 20 Le droit du travail. Le droit du travail concerne plus précisément l acte introductif du système de prévoyance, c est-à-dire sa mise en place (voir 401 à 450). Il convient alors de se référer au titre II du livre I du code du travail qui précise les règles suivant lesquelles s exercent les droits des salariés à la négociation collective de l ensemble de leurs conditions de travail et notamment de leurs garanties sociales. 21 Le droit des assurances. Le droit des assurances constitue une source non négligeable de la prévoyance en entreprise. À l évidence, et bien avant la disparition du monopole des institutions, les sociétés d assurances, relevant du code des assurances, assuraient la gestion de nombreuses opérations de prévoyance. Si 11

La prévoyance dans l entreprise l entreprise qui gère la prévoyance est une entreprise d assurance, l opération se matérialisera par la souscription d un contrat d assurance de groupe et sera régie par le droit des assurances applicable au contrat (c. séc. soc. art. L. 140-1). 22 Le droit de la mutualité. Le droit de la mutualité est également applicable lorsque c est une mutuelle qui prend en charge l opération de prévoyance. L article L. 111-1 du code de la mutualité précise que les mutuelles sont des personnes morales de droit privé à but non lucratif qui mènent des actions de prévoyance. 23 Le droit fiscal. Le droit fiscal est présent à deux niveaux. Dans un premier temps, le droit fiscal concerne les organismes assureurs. Les régimes fiscaux sont différents selon qu il s agit de sociétés d assurance dont l objet est la recherche du profit, ou bien d organismes à but non lucratif comme les institutions ou les mutuelles. Cette différence apparaît tant sur le taux de TVA que sur la fiscalité des résultats et doit être prise en compte dans les éléments de l évaluation et de tarification de la prime. Dans un second temps, le droit fiscal concerne les entreprises qui mettent en place une couverture de prévoyance ou de retraite pour leurs salariés. Le coût assumé par l entreprise pour financer les couvertures de retraite ou de prévoyance représente en principe une charge déductible du résultat fiscalisable de l entreprise. Le montant des cotisations versées par l entreprise et/ou le salarié constitue ou non un complément de rémunération assujetti à l impôt sur le revenu selon la nature de la couverture (couverture obligatoire ou facultative) et la nature des prestations servies (maladie, remboursements des frais médicaux, retraite). Les sources spécifiques : les lois Veil et Évin 24 À côté des sources de droit général coexistent des lois qui ont pour domaine précis la protection sociale complémentaire dont l objectif est de tenter d harmoniser le droit applicable dans le domaine de la prévoyance. 25 La loi Évin*. Une première harmonisation des différentes dispositions relatives à la prévoyance a été réalisée par la loi 89-1009 du 31 décembre 1989 (dite «loi Évin» ; JO du 2 janvier 1990) en matière de prévoyance complémentaire. Cette loi a pour objectif d harmoniser le contenu du contrat de prévoyance et de rendre celui-ci protecteur des intérêts des salariés assurés (voir 560). 26 La loi Veil*. Le 8 août 1994, fut votée la loi 94-678 relative à la protection sociale complémentaire des salariés et portant transposition des directives 92-49 et 92-96 des 18 juillet et 10 novembre 1992 du Conseil des communautés (voir encadré p. 13). Remarque. Neuf décrets d application étaient prévus (rép. Mathieu, JO 11 avril 1996, Déb. Sén. quest. pp. 862 et 863). Deux seulement sont déjà parus : il s agit du décret 96-394 du 2 avril 1996 relatif à l agrément administratif des institutions de prévoyance et du décret 96-800 du 9 septembre 1996 (JO du 14) relatif aux opérations des institutions de prévoyance et à leur contrôle. Cette loi reprend le principe de spécialisation des institutions selon leurs activités qui avait été posé par la loi DMOS 93-121 du 27 janvier 1993. La retraite doit ainsi être séparée de la prévoyance, et la retraite complémentaire obligatoire de la retraite supplémentaire. 12

Les sources : droit interne La loi Veil du 8 août 1994 Objectifs de la loi Cette loi, parfois dénommée loi Veil, a pour double objectif de mettre en conformité le droit français avec le droit communautaire et d établir des règles communes de mise en place des garanties collectives, quel que soit le statut de l organisme qui gère la prévoyance. Contenu de la loi Dans un chapitre premier, la loi impose certaines règles de forme applicables lors de la création, la modification ou encore la dénonciation de l acte générateur de la prévoyance en entreprise. Un chapitre deuxième impose certaines clauses dans l acte fondateur des garanties collectives alors qu un troisième chapitre prohibe certaines clauses. Le domaine de la loi Mise en place de la prévoyance. La loi énumère les différents actes permettant la mise en place d une protection sociale complémentaire. La loi Veil n a pas élargi le champ d application de la loi Évin (voir p. 12) à l ensemble de la protection sociale complémentaire, telle que définie à l article L. 911-2 du code de la sécurité sociale, à l exception de l obligation faite aux organismes assureurs de fournir chaque année aux entreprises un rapport sur les comptes de la convention ou du contrat qui résulte de l article 15 de la loi Évin (loi du 8 août 1994, art. 14-III). Les salariés concernés. La loi Veil s aligne sur les bénéficiaires de la loi Évin (voir p. 12), elle concerne donc les salariés du groupe, que ceux-ci soient actifs ou en invalidité (sur ces notions, voir 352 à 358). La refonte du code de la sécurité sociale La loi Veil a procédé à une refonte du cadre juridique des institutions paritaires régies par le code de la sécurité sociale (institutions de retraite complémentaire, institutions de prévoyance et institutions de retraite supplémentaire) afin de le rendre conforme aux dispositions communautaires. Elle reprend le principe de spécialisation des institutions selon leurs activités qui avait été posé par la loi DMOS 93-121 du 27 janvier 1993 (voir 121 à 125). La retraite doit ainsi être séparée de la prévoyance, et la retraite complémentaire obligatoire distinguée de la retraite supplémentaire. Suite à la refonte de la loi Veil, le code de la sécurité sociale consacre son livre IX à la protection sociale complémentaire des salariés. Sa partie législative a été créée par la loi du 8 août 1994, tandis que sa partie réglementaire l a été par le décret en Conseil d État 96-294 du 2 avril 1996 (JO du 6). Auparavant, seul le titre III du livre VII du code de la sécurité sociale était consacré aux régimes et institutions de retraite ou de prévoyance complémentaires des salariés. Certains de ses articles ont été repris dans le livre IX. Un certain nombre de décrets et de décrets en Conseil d État restent encore à paraître pour permettre l application de l ensemble des dispositions législatives du livre IX. 13

La prévoyance dans l entreprise Loi Veil : textes parus et à paraître Principales dispositions Décrets C. séc. soc. (partie en L.) Mise en place des garanties Retraite complémentaire (institutions et fédérations de retraite complémentaire) Prévoyance complémentaire (institutions de prévoyance) Institutions de retraite supplémentaire Commission de contrôle Décrets et décrets CE à paraître Décrets et décrets CE à paraître Décrets CE 96-294 et 96-800 des 2 avril et 9 septembre 1996 (c. séc. soc. art. R. 931-1 à R. 932-4-21) Décrets et décrets CE à paraître Décret 96-800 du 9 septembre 1996 (c. séc. soc. art. R. 951-1-1 à R. 951-5-1) Titre I, livre IX Titre II, livre IX Titre III, livre IX Titre IV, livre IX Titre V, livre IX 27 Domaines respectifs des lois Évin et Veil. À la différence de la loi Évin* qui avait pour objectif d harmoniser le contenu du contrat de prévoyance, la loi Veil* du 8 août 1994 concerne avant tout le rapport «employeur-salarié». La couverture maladie universelle (CMU) 28 But de la CMU. La loi du 27 juillet 1999 portant création de la couverture maladie universelle emporte également la mise en place d une couverture maladie complémentaire gratuite pour les salariés les moins fortunés. Cette prévoyance complémentaire assure la prise en charge de la participation de l assuré au tarif de responsabilité, déterminé par arrêté et constitué sur la base de calcul des remboursements effectués en vertu des régimes obligatoires par la sécurité sociale. La loi du 27 juillet 1999 permet donc l accès à une couverture sociale sans cotisations pour les personnes dont les ressources n excèdent pas le plafond fixé à 43 200 F pour une personne seule pour 2001 (décret 2001-24 du 9 janvier 2001, JO du 11). L accès à une protection sociale complémentaire est désormais garanti alors qu il résultait jusqu à présent soit d une démarche volontaire individuelle, soit d une démarche collective qui pouvait être obligatoire ou individuelle. Cette CMU complémentaire gratuite est financée par le fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie (c. séc. soc. art. L. 862-1). Afin d abonder ce fonds, mutuelles, sociétés d assurance et institutions de prévoyance sont redevables d une contribution de 1,75 % du montant hors taxe des primes ou cotisations émises au cours d un trimestre civil (c. séc. soc. art. L. 862-4). Les personnes susceptibles de bénéficier de la CMU complémentaire à titre gratuit doivent s adresser pour l obtenir auprès des caisses primaires d assurance maladie, auprès des mutuelles, sociétés d assurance ou encore institutions de prévoyance qui se sont déclarées à la préfecture. Cette protection sociale complémentaire assure également la prise en charge du forfait journalier (c. séc. soc. art. L. 174-4-3 ) ainsi que les frais mis en œuvre audelà du tarif de responsabilité pour les frais dentaires, de prothèses (c. séc. soc. art. L. 821-3). Dispensés de l avance de frais, les personnes pouvant bénéficier de la CMU complémentaire n ont plus à s acquitter du ticket modérateur, ni des frais qui pourraient être mis à leur charge. 14

Les sources : droit interne 29 La CMU et la négociation annuelle. Au sein des entreprises dans lesquelles existent une ou des sections syndicales, l employeur est désormais tenu de négocier annuellement les salaires effectifs, la durée effective, l organisation du temps de travail et, en l absence d accord d entreprise et de branche à ce sujet, l épargne salariale et les modalités de la prévoyance maladie (art. L. 132-27 complété par l article 21 de la loi du 27 juillet 1999). Cette obligation a pour objectif de pallier l absence de couverture dans l accord de branche ou d entreprise. Pour savoir si l employeur est soumis à cette obligation de négociation annuelle, il faut savoir s il existe des garanties préexistantes et quelle en est l origine: si les garanties sont issues d un accord avec le comité d entreprise, l employeur sera tenu de mettre en œuvre une négociation collective car cette décision du comité d entreprise ne peut être assimilée à un accord d entreprise prévoyance ; si les garanties sont issues d une décision unilatérale du chef d entreprise (c. séc. soc. art. L. 911-1), l employeur aura l obligation de prendre l initiative d une négociation, la décision unilatérale n étant pas, par nature, une négociation collective; si les garanties sont issues d un référendum. Peut-on considérer qu il s agit d un accord collectif? Le doute est permis. 30 La CMU et les régimes de prévoyance maladie de branche. L extension d une convention collective est désormais conditionnée à des dispositions concernant les modalités d accès à un régime de prévoyance maladie (c. trav. art. L. 133-5 modifié par art. 22 de la loi du 27 juillet 1999). Les influences sur les contrats en cours Le bénéficiaire de la CMU complémentaire à titre gratuit peut demander soit la résiliation totale de son contrat dans l hypothèse où l organisme assureur qui le garantit n est pas répertorié sur la liste des organisme participant à la CMU complémentaire, soit demander l alignement de sa garantie sur une garantie issue de la CMU complémentaire. Il faut toutefois réserver le cas des garanties souscrites dans le cadre d un accord collectif obligatoire d entreprise. Même si certaines personnes de l entreprise ont vocation à bénéficier de la CMU complémentaire, elles ne pourront se soustraire à l accord collectif de l entreprise et, par la même, ne pourront se soustraire aux cotisations obligatoires Dans l hypothèse où le salarié est couvert par un accord collectif obligatoire d entreprise, alors qu il pourrait bénéficier de la CMU complémentaire, deux cas doivent être distingués : si les garanties offertes par l entreprise sont supérieures à celles de la CMU et que le système organise le tiers payant, rien ne sera modifié ; si les garanties offertes par l entreprise sont supérieures à celles de la CMU mais que le tiers payant n est pas offert dans le système d entreprise, le salarié pourra en bénéficier au titre la dispense de frais pour toutes les prestations ; si les garanties offertes par l entreprise sont inférieures à celles proposées dans le cadre de la CMU, le salarié pourra demander à bénéficier du tiers payant en ce qui concerne les prestations servies dans le cadre de l entreprise et un complément de prestations au titre de la CMU pour les garanties inférieures fournies dans le cadre de l entreprise. Pour l employeur, le cumul «accord collectif-cmu» l oblige à se renseigner à propos de l inscription de son organisme assureur sur la liste des organismes intervenant dans la CMU complémentaire. En l absence d une telle inscription, les salariés pourraient bénéficier des compléments CMU par le biais des CPAM. 15

La prévoyance dans l entreprise Les influences de la CMU pour les salariés des entreprises. Certains salariés peuvent être concernés par la CMU complémentaire puisque pour un couple avec deux enfants, le seuil des revenus nets pour bénéficier gratuitement de la CMU complémentaire est de 88 200 F par an (décret 99-1004 du 1 er décembre 1999, JO du 2 décembre). Les influences sur le niveau des garanties. La couverture maladie universelle constitue un plancher en dessous duquel il est difficile de proposer des garanties. D autre part, la mise en place automatique du tiers payant devrait se généraliser. La coordination des sources 31 Le législateur, tout en voulant contribuer au perfectionnement du cadre juridique de la protection sociale complémentaire, a contribué à la multiplication des sources, ce qui engendre des problèmes dans leur coordination. Il faut donc en permanence avoir à l esprit qu il est nécessaire d appliquer plusieurs textes pour la mise en place et le fonctionnement d une même garantie. Les sources en conflit à propos de la notion de groupe 32 Les lois relatives à la protection sociale complémentaire adoptent deux conceptions de l entreprise : selon qu elle constitue un cadre obligatoire ou facultatif de souscription d une prévoyance, cette conception détermine la notion de groupe de salariés à garantir. Les différentes conceptions de l entreprise L entreprise, cadre obligatoire de souscription. Une première conception, classique, se fonde sur l entreprise comme un cadre fixe, obligatoire, à l intérieur duquel se constitue un groupe aussi homogène qu assurable. Dans ce cas, il est fait obligation à l organisme assureur de garantir le groupe constitué par les membres de l entreprise. L entreprise, cadre facultatif de souscription. Une seconde conception, contemporaine, perçoit uniquement l entreprise comme un support qui présente le principal avantage de permettre de rassembler le plus grand nombre d adhérents. Dans ce cas, il est permis à l organisme de prévoyance de segmenter l entreprise et ses membres pour constituer des catégories homogènes à garantir. Ainsi, l organisme de prévoyance peut, à l intérieur de l entreprise, définir la catégorie de la population assurée et ainsi contourner les restrictions de sélection opérées par la loi Évin. Les contraintes issues du groupe peuvent donc être contournées en établissant des catégories prédéterminées ou en créant des associations spécifiques à chaque catégorie de personnel. Il a même été admis qu une catégorie objective de salariés pouvait être composée d une seule personne (cass. soc. 18 novembre 1999, BC V n 445). Dans ce contexte, le droit de la protection sociale tend donc à une individualisation de la protection (ne seraitce qu au travers des plans «cafétéria»). Le cadre collectif n est qu un prétexte pour atteindre un grand nombre d individus. 16 Les difficultés de coordination relatives aux modalités d exclusion 33 Les différentes lois élaborées dans le domaine de la prévoyance en entreprise l ont souvent été en considération de difficultés ponctuelles et de données propres à une matière. Ainsi, il apparaît que les différentes lois applicables mettent en œuvre certaines dispositions qui ne sont pas homogènes.

Les sources : droit interne Les difficultés de coordination relatives aux modalités d exclusion Faculté d exclusion double dans le code des assurances. La souscription d un contrat d assurance de groupe entraîne la double faculté d exclusion de l assuré par le souscripteur. Le souscripteur peut exclure un assuré du bénéfice du contrat d assurance de groupe uniquement si le lien est rompu ou si l adhérent cesse de payer la prime en application de l article L. 140-4 du code des assurances. La cause de la garantie par un contrat d assurance se situe dans le lien qui unit l assuré au souscripteur; il est donc logique juridiquement de considérer que l exclusion est automatiquement liée à la rupture du lien contractuel qui existe préalablement au contrat d assurance de groupe entre le souscripteur et l assuré. Faculté d exclusion limitée dans la loi Évin*. La logique n est remise en cause qu en apparence par les termes de la loi 89-1009 du 31 décembre 1989 dite loi Évin, dont l article 4 dispose que le salarié bénéficiant d une couverture collective obligatoire de remboursements de frais médicaux doit pouvoir bénéficier, lui ou ses ayants droits, du maintien d une couverture équivalente au cas où son contrat viendrait à être rompu. L article 4 précité, s il prévoit des conditions tarifaires particulières, précise toutefois que ces conditions naîtront dans le cadre d un nouveau contrat. Dès lors, une cohérence entre le code des assurances et la loi Évin peut tout de même être établie. Cette cohérence peut toutefois être difficile à trouver dans l hypothèse où l intéressé bénéficie d une couverture facultative lorsque celle-ci relève du domaine de l article 6 de la loi Évin. En effet, l article 6 de la loi Évin dispose que sous réserve du paiement des primes, après expiration d un délai de deux ans suivant l adhésion de l intéressé ou de la souscription du contrat, l organisme ne peut refuser de maintenir aux intéressés le remboursement. Certes, l article 6 susvisé ne vise pas expressément la poursuite du contrat initial mais en précisant que les conditions tarifaires initiales doivent être maintenues, le texte postule le maintien du contrat initial. Or, les conditions du contrat d assurance ne peuvent évoluer qu en fonction de l évolution du groupe auquel appartient l intéressé. L assuré bénéficie donc de la poursuite de son contrat d assurance de groupe, support de la protection sociale complémentaire, alors qu il ne justifie plus d un lien contractuel nécessaire pour avoir droit à la garantie du contrat d assurance de groupe. Les dispositions de la loi Évin, inspirées par la volonté d instiller une dose de solidarité dans les opérations de prévoyance, s accommodent mal de la logique du droit des assurances. Les difficultés de coordination relatives aux obligations d information 34 Les contrariétés de textes. Un autre exemple de contrariété entre les lois peut être présenté. Tant en application de la loi Évin* que du code des assurances, le souscripteur est tenu d une véritable obligation d information envers les assurés. Toutefois, les modalités de mise en œuvre de celle-ci ne sont pas identiques dans les deux lois. L article 12 de la loi Évin* impose au souscripteur d une convention ou d un contrat avec un organisme assureur de remettre à l adhérent une notice d information détaillée qui définit notamment les garanties prévues par la convention et leurs modalités d application. Le code des assurances est plus précis puisque la notice établie par le souscripteur doit définir les garanties et leurs modalités d entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre (c. ass. art. L 140-4). Le souscripteur est également tenu d informer par écrit les adhérents de modifications qu il est prévu, le cas échéant, d apporter à leurs droits et obligations. La preuve de la remise de la notice à l adhérent et de l information relative aux modifications contractuelles incombe au souscripteur. Votées le même jour, ces deux lois ne mettent pas en œuvre des règles identiques quant à l information de l assuré. Par exemple, le code des assurances précise le débiteur de la rédaction de la notice, alors que la loi Évin* n en fait pas mention. De même, le code des assurances prévoit l information de l assuré des modifications du contrat. La loi Évin* est restrictive sur ce point en ne prévoyant une information qu en cas de réduction de garanties. 17

La prévoyance dans l entreprise 35 La résolution des contrariétés de textes. Quelle loi appliquer? Votées le même jour, il est impossible d utiliser le critère de postériorité d une loi. À défaut, il convient de considérer que le code des assurances constitue une loi spéciale dans le domaine de la protection sociale complémentaire d entreprise; lorsqu une opération de protection sociale complémentaire aura pour origine un contrat d assurance de groupe, il conviendra de faire application des dispositions du code des assurances et non de la loi Évin*. Ces divergences mettent clairement en évidence le manque de coordination entre les différentes lois qui trouvent à s appliquer dans le domaine de la protection sociale complémentaire. Les sources du droit européen Plusieurs logiques d intervention du droit communautaire coexistent en matière de protection sociale complémentaire 36 Le règlement CEE 1408-71 du 14 juin 1971 coordonnant les régimes de sécurité sociale pour les travailleurs salariés et non salariés et leurs familles se déplaçant dans la Communauté ne s applique pas aux régimes conventionnels, y compris les régimes obligatoires de retraite complémentaire. Il exclut en effet de son champ d application «les dispositions conventionnelles existantes ou futures, qu elles aient fait ou non l objet d une décision des pouvoirs publics les rendant obligatoires ou étendant leur champ d application». Cette disposition emporte d importantes conséquences pratiques. Ainsi, par exemple, les avantages de retraite complémentaire peuvent être assujettis à une cotisation d assurance maladie en France, même s ils sont servis à des personnes résidant dans un autre État membre et ne bénéficiant pas des prestations françaises (CJCE 16 janvier 1992, Commission des Communautés européennes c/ République française). L influence européenne est néanmoins forte dans le domaine de la protection sociale complémentaire, en raison notamment de la transposition en droit interne par la loi Veil* du 8 août 1994 de deux directives européennes. La loi du 8 août 1994 a transposé en droit interne la directive 92-49 du 18 juin 1992 (3 e directive «assurance non-vie») et la directive 92-96 du 10 novembre 1992 (3 e directive «assurance-vie»). Les dispositions communautaires s appliquent désormais aux sociétés d assurances et aux institutions de prévoyance, ces dernières ayant la qualité d entreprises d assurances au regard des directives. Ces dispositions s appliquent, depuis très récemment, aux mutuelles. Enfin, à l instar de la jurisprudence interne, les règles dégagées par la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) participent également à l évolution du droit de la protection sociale complémentaire. Elle y a notamment introduit des principes relevant du droit de la concurrence. La libre concurrence en matière de protection sociale 37 La CJCE veille au respect de la libre concurrence dans le domaine de la protection sociale et condamne notamment les ententes illicites et les abus de position 18

Droit européen dominante visés par les articles 85 et 86 du traité CEE. Ce faisant, elle a été amenée à définir quels sont les régimes de sécurité sociale pour lesquels le principe de la libre concurrence est ou non applicable. Régimes de base de la sécurité sociale 38 La CJCE a exclu du champ de la libre concurrence «les organismes chargés de la gestion de régimes obligatoires de sécurité sociale fondés sur un principe de solidarité» (CJCE 13 février 1993, Poucet et Pistre, deux aff. ; 26 mars 1996, Garcia), ces organismes ne constituant pas des entreprises au sens des articles 85 et 86 du traité CEE dès lors qu ils gèrent des régimes de cette nature (CJCE 16 novembre 1995, arrêt COREVA en cas de gestion de régimes de nature différente). Régimes obligatoires de retraite complémentaire et de prévoyance 39 La CJCE n a pas encore eu à se prononcer sur l assujettissement ou non au principe de la libre concurrence des organismes chargés de la gestion de régimes obligatoires de retraite complémentaire. La Cour de cassation a, pour sa part, d ores et déjà considéré que les «régimes de sécurité sociale complémentaires qui reposent, comme les régimes de sécurité sociale de base, sur des mécanismes d affiliation obligatoire pour les employeurs et travailleurs compris dans son champ d application et qui imposent aux établissements qui perçoivent les cotisations et répartissent les prestations, quelle que soit leur nature juridique, des sujétions particulières en vue de répondre à la mission sociale qui leur est confiée» ne sont pas visés par les dispositions internes et communautaires relatives à la libre concurrence (cass. soc. 10 mars 1994, BC V n 87). Notons que la Cour tout comme la CJCE ne tiennent pas compte de la nature juridique de l organisme gérant le régime complémentaire (en l occurrence, il s agissait d une institution de prévoyance). 19

3 Saisir les enjeux de la prévoyance Obligations issues de la loi de mensualisation... 41 Adaptation dans l entreprise des obligations légales... 48 Convention collective nationale des cadres... 49 Convention collective de branche... 51 Extension et élargissement des accords : page 23 Élémént de politique salariale... 58 40 Par la mise en place d une protection sociale complémentaire, l entreprise peut souhaiter répondre à une obligation légale ou conventionnelle. L organsime assureur se substitue alors à l entreprise dans ses engagements de couverture sociale complémentaire. Il est en effet rare que les entreprises puissent assumer financièrement le risque que représente la couverture du risque invalidité mise à sa charge par les conventions collectives qui la régissent. Inversement, il peut s agir, pour l entreprise, d une démarche purement volontaire qui s inscrit dans une politique salariale de rémunérations indirectes. Une réponse aux obligations de l employeur Les obligations en matière de maladie issues de la loi de mensualisation 41 L accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977 conforté par la loi du 19 janvier 1978 (dite «loi de mensualisation» a généralisé deux types de dispositions susceptibles d être gérées par une convention d assurance : parmi elles, un complément de salaire en cas de maladie ou d accident (accord du 10 décembre 1977, art. 7). Le champ d application de l accord de mensualisation 42 Les différents secteurs. Sont concernés par cet accord l ensemble des professions industrielles et commerciales, les professions libérales, les employés de maisons, les concierges d immeuble à usage d habitation. Seuls sont exclus du champ d indemnisation de la loi les travailleurs à domicile, les travailleurs saisonniers ou intermittents, les travailleurs intérimaires (circ. min. du 27 juin 1978). 43 Le secteur agricole. Les salariés relevant du secteur agricole sont également concernés. Seuls en sont exclus les métayers et les salariés des groupements professionnels agricoles. 20

Loi de mensualisation Les conditions à remplir pour bénéficier du maintien de salaire 44 Conditions d ancienneté. Les salariés peuvent faire valoir leurs droits après trois ans d ancienneté dans l entreprise ou l établissement. 45 Conditions d obtention. L absence au travail, justifiée par une incapacité résultant de maladie ou d accident, constatée par certificat médical et éventuellement contre-visite, peut donner lieu pour les salariés au bénéfice d un complément de salaire à la triple condition de : justifier dans les 48 heures de l incapacité de travail ; être pris en charge par la sécurité sociale ; être soigné sur le territoire français ou dans l un des autres pays de l Union européenne. Prestations 46 Le complément de salaire est égal pendant 30 jours à 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait gagnée s il avait continué à travailler ; pendant les 30 jours suivants, ce complément est porté aux deux tiers de cette rémunération. Les temps d indemnisation sont augmentés de dix jours par période entière de cinq ans d ancienneté, au-delà des trois ans requis pour l ouverture du droit (voir 45). Lors de chaque arrêt de travail, les délais d indemnisation commencent à courir à compter du premier jour d absence si celle-ci est consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, à l exclusion des accidents de trajet et à compter du onzième jour d absence dans tous les autres cas. Pour le calcul des indemnités dues au titre d une période de paie, il est tenu compte des indemnités déjà perçues par l intéressé durant les douze mois antérieurs, de telle sorte que si plusieurs absences pour maladie ou accident ont été indemnisées au cours des 12 derniers mois, la durée totale d indemnisation ne dépasse pas celle applicable en fonction du barème fixé. Mode de gestion 47 L entreprise peut choisir d être son propre assureur (dans ce cas, elle autofinance le risque) ou, au contraire, de souscrire une police d assurance permettant à l organisme assureur de se substituer à l entreprise dans l exécution de ses engagements issus de la loi de mensualisation. Adaptation dans l entreprise des obligations légales 48 Il est possible d adapter, au sein de l entreprise, des dispositions des accords de branche ou des accords professionnels ou interprofessionnels dès lors qu ils comportent des dispositions nouvelles ou plus favorables aux salariés (c. trav. art. L. 132-23). La difficulté se cristallise autour de la notion de dispositions plus favorables au salarié. Faut-il vérifier si, individuellement et dans tous les cas, le système d entreprise est plus favorable ou faut-il se contenter d une évaluation globale? Pour la Cour de cassation, il n est pas nécessaire d effectuer ce strict bilan comparatif (cass. soc. 17 janvier 1996, BC V n 15). 21

La prévoyance dans l entreprise Remarque. Selon cette décision de la Cour de cassation du 17 janvier 1996, bien que l accord national du 10 décembre 1977 ait acquis un caractère législatif du fait de son annexion à la loi 78-49 du 19 janvier 1978, ce caractère ne fait pas obstacle à ce qu une convention ou un accord collectif déroge à l accord de mensualisation dans un sens plus favorable, ainsi que le prévoit l article L. 132-4 du code du travail. La détermination du régime le plus favorable doit résulter d une appréciation globale, avantage par avantage. En l espèce, il s agit de comparer les avantages accordés au titre de la maladie et de l accident aux salariés ayant plus de trois mois d ancienneté. Il a été admis que le régime instauré sur ce point par l accord d entreprise était plus favorable que celui qui résulte de l article 7 de l accord interprofessionnel du 10 décembre 1977. Les obligations conventionnelles à la charge des entreprises La convention collective nationale des cadres 49 Principe. L article 7 de la convention collective du 14 mars 1947 de retraite et de prévoyance des cadres oblige les employeurs à consacrer un budget de cotisation de 15 % de la tranche A du salaire (entre 0 franc et le plafond de la sécurité sociale) au bénéfice de leur personnel cadre et assimilé. Cette cotisation est destinée au financement de prestations de prévoyance (voir RF 888, fiche 39). 50 Sanction. Si l employeur ne respecte pas cette obligation, il sera sanctionné en cas de décès du cadre par le paiement d une indemnité de trois plafonds annuels de la sécurité sociale. La prise en charge de la pénalité par l AGS Après certaines hésitations, la Cour de cassation s est prononcée sur la question de la prise en charge par l AGS de la pénalité prévue par la convention collective en cas de décès de l assuré et défaut d assurance de l employeur. En l espèce, l employeur avait été mis en règlement judiciaire le 22 février 1985 et en liquidation de biens le 17 juin 1988. Il n avait pas souscrit d assurance pour le risque décès au profit du salarié cadre. Le salarié étant décédé, la société avait été condamnée avant l ouverture de la procédure collective à payer le capital décès aux ayants droit. La cour d appel a décidé que l AGS devait garantir à la veuve le paiement du capital-décès. La Cour de cassation approuve le raisonnement de la cour d appel en retenant que la créance avait pour origine l application des dispositions de la convention collective qui en fixent le mode de calcul et les conditions d attribution (cass. soc. 8 novembre 1994, BC V n 293). La Cour de cassation a donc considéré que la créance résultait d une obligation de l employeur, indissociable du contrat de travail qui devait, par conséquent, bénéficier de la garantie AGS. La convention collective de branche Deux hypothèses sont à distinguer, selon que la convention est étendue ou non. 51 Accord non étendu. Si l accord de branche n est pas étendu, l accord sera applicable aux seules entreprises adhérant de l un des syndicats patronaux signataires de l accord et dont l activité principale entre dans le champ d application de l accord. 52 Accord étendu. Si l accord de branche est étendu, il a vocation à s appliquer à l ensemble des entreprises dont l activité principale entre dans son champ d ap- 22

Conventions collectives plication et ce, que les entreprises soient ou non adhérentes des syndicats patronaux signataires. 53 Conditions particulières. La loi Veil* du 8 août 1994 institue des conditions particulières à l extension des accords de prévoyance. Là encore deux situations sont à distinguer : soit la convention et l accord collectif portent sur un ensemble de thèmes dont celui de la prévoyance: dans ce cas, l arrêté d extension est signé par le ministère chargé du Travail, soit l accord a pour objet exclusif la prévoyance : dans ce cas, il convient de se référer aux articles L. 911-3 et L. 911-4 du code de la sécurité sociale, exposés dans le tableau ci-après. Comme les accords collectifs de droit commun, les accords conclus en matière de protection sociale complémentaire peuvent concerner les salariés d une branche professionnelle ou les salariés de toutes les professions. Ces accords peuvent être conclus au niveau national, régional ou local (c. trav. art. L. 132-11). Extension et élargissement des accords L extension* de l article L. 911-3 du code de la sécurité sociale Elle rend la convention ou l accord obligatoire dans toutes les entreprises entrant dans son champ d application. Elle résulte, en principe, d un arrêté du ministre du Travail (c. trav. art. L. 133-8). Toutefois, lorsque les accords et conventions ont pour objet exclusif la détermination d une couverture de protection sociale complémentaire, leur extension aux salariés, aux anciens salariés, à leurs ayants droit et aux employeurs qui relèvent de leur champ d application est décidée par arrêté du ministre chargé de la Sécurité sociale et du ministre chargé du Budget. Elle ne peut intervenir qu après un avis motivé d une commission dont la composition est fixée par décret (c. séc. soc. art. L. 911-3). À défaut de décret d application, la composition de la commission reste celle initialement fixée par un arrêté du 11 octobre 1994 (JO du 22, p. 15046). Un arrêt du Conseil d État (CE 7 juillet 2000, n 198564) a décidé qu un arrêté d extension pouvait être signé par le seul ministre chargé de la Sécurité sociale si l accord étendu est annexé à une convention collective. L élargissement* de l article L. 911-4 du code de la sécurité sociale Il consiste à rendre obligatoire une convention ou un accord de branche déjà étendu dans le secteur territorial considéré (élargissement territorial) ou à rendre obligatoire une convention ou un accord professionnel déjà étendu dans le secteur professionnel considéré. Une procédure spécifique pour l élargissement des conventions et accords collectifs relatifs à la protection sociale complémentaire (c. séc. soc. art. L. 911-4). L élargissement doit résulter d arrêtés du ministre chargé de la Sécurité sociale et du ministre chargé du Budget. Il intervient sur demande ou après avis motivé de la commission visée à l article L. 911-3 (voir ci-avant) et concerne tout ou partie des dispositions d accords étendus, selon les modalités prévues à l article L. 911-3, à des employeurs, des salariés ou d anciens salariés et à leurs ayants droit qui ne sont pas compris dans le champ d application des accords. Le contrôle par l entreprise des conditions d extension est fondamental dans la mesure où un arrêté ministériel pris par une autorité incompétente rend inopposable l extension aux entreprises non adhérentes du syndicat patronal signataire. Le contenu de l accord de branche 54 La fixation d un niveau de cotisations. L accord peut se borner à imposer à une entreprise un taux de financement minimal affecté à la couverture sociale complémentaire. Il revient alors à l employeur de négocier auprès de l assureur de son choix le contrat le plus adéquat à la mise en œuvre des obligations issues de l accord. 55 La fixation d un niveau de prestations. L accord peut se borner à imposer à l employeur de garantir les salariés, en cas d incapacité, d invalidité, de décès ou garan- 23

La prévoyance dans l entreprise tir le remboursement de frais médicaux. Il revient alors à l employeur de négocier, auprès d un organisme assureur de son choix, le contrat qui permet de respecter au mieux les obligations issues de l accord. La liberté de négociation existe alors même que l accord met à la charge du salarié une partie de la cotisation. 56 La fixation d un double niveau de cotisations et de prestations. L accord peut à la fois imposer un niveau de cotisations et un niveau de prestations. Dans ce cas, la plupart du temps, l accord désigne l organisme assureur. Se pose alors le problème de la validité des clauses bénéficiaires qui, après avoir fait l objet d un large débat, semble avoir été résolu par les dispositions de la loi Veil du 8 août 1994. Les clauses de désignation d un organisme assureur Définition et fonctions. Sont appelées clauses de désignation les dispositions conventionnelles en vertu desquelles les partenaires sociaux affectent la gestion des garanties prévoyance à un organisme particulier et prédéterminé. Ce mécanisme de désignation est utile sur le plan de la technique de mutualisation. Puisque cette technique permet de répartir les risques sur une plus large population notamment sur une population qui peut concerner une branche professionnelle dans son intégralité. De plus, cette technique permet d assurer des groupes qui ne seraient pas, à l origine, en mesure de trouver un assureur qui accepte de les garantir. En effet, un groupe peut ne pas trouver à s assurer à raison d une probabilité statistique forte de sinistre. Ce groupe noyé dans d autres groupes présentant une sinistralité plus faible ou différente permet de rendre effectives les obligations conventionnelles en matière de prévoyance. Validité. Les clauses de désignation des organismes assureurs emportent certaines contestations quant à leur validité au regard du droit de la concurrence interne et du droit européen. En droit interne, la jurisprudence s est toujours montrée favorable aux clauses de désignation. Elle a pu, à ce propos, considérer que les régimes de prévoyance conventionnels échappent au droit commun de la concurrence, notamment en raison du fait que les institutions de prévoyance ne sont pas des entreprises au regard de l article 85 du traité de Rome. Cette solution a été confirmée par une réponse ministérielle (rép. min 34683, JO AN 5 février 1996) et par deux avis du Conseil de la concurrence. Toutefois, le Conseil d État vient d admettre qu un tel accord ne pouvait atteindre une partie substantielle du marché. Sanction de la non-affiliation consécutive à une clause de désignation. Le refus d une entreprise d adhérer à une institution de prévoyance mettant en œuvre une mutualisation professionnelle en application d un accord de branche étendu est constitutive d un manquement à une obligation conventionnelle La responsabilité de l employeur peut être engagée à l égard : des salariés ; de l organisme assureur désigné dans l accord ; des partenaires signataires de l accord. L employeur peut alors être condamné non seulement à assurer le financement des garanties prévues par l accord, mais également au paiement des cotisations dues à l organisme qui gère la mutualisation professionnelle. 24

Élément de politique salariale La force des accords et conventions collectives 57 La mise en place par accords ou conventions collectives d une prévoyance d entreprise rend, en principe, l adhésion obligatoire pour tous les salariés concernés et permet de précompter une cotisation sur leur rémunération. Toutefois, il faut réserver l hypothèse du contrat d assurance de groupe qui bénéficie d une réglementation spéciale (voir 80). Une modalité de politique sociale de l entreprise La prise en charge des cotisations prévoyance Une augmentation du pouvoir d achat des salariés 58 La mise en place volontaire d une couverture prévoyance d entreprise peut correspondre à un élément de politique sociale de l entreprise et constituer un outil efficace de politique de ressources humaines. En effet, la prise en charge des cotisations salariales de prévoyance peut constituer une technique intéressante pour améliorer le salaire net des salariés. Chaque mois, les cotisations du salarié à une couverture prévoyance viennent en déduction de son salaire brut, ce qui aboutit à un net minoré. Un outil de gestion du personnel pour l employeur 59 L utilité de mettre en place une politique de prise en charge des cotisations de prévoyance peut se percevoir à un triple niveau. 60 Un outil de contrôle des rémunérations. Tout d abord, la prise en charge des cotisations permet d optimiser et contrôler les coûts salariaux. La prise en charge des cotisations fait réaliser une économie réelle au salarié puisqu en diminuant le montant des prélèvements effectués sur son salaire brut, elle provoque par effet automatique une augmentation du salaire net. La prise en charge fait réaliser une économie au salarié en diminuant le montant des prélèvements opérés sur le salaire brut. Par un effet mécanique, il y aura augmentation du salaire net. Cette opération est en partie exonérée de cotisations sociales (voir 760 à 800). 61 Un outil de négociation. Le mode de mise en place de la prise en charge des cotisations relève de la décision de l employeur. Plusieurs options se présentent : L'employeur peut préférer un mode qui se dénonce via un formalisme réduit et sans incorporation de l avantage dans le contrat de travail. Il se tournera alors prioritairement vers un avantage unilatéral*, un accord atypique* ou encore un usage*. L employeur peut souhaiter tester la prise en charge et, dans ce cas, il pourra avoir recours à un accord collectif à durée déterminée qui, en cas de non-renouvellement à terme, cessera de générer l avantage. 25