RETRECISSEMENT DE L'URETRE
Table des matières Table des matières 3 I - Rappel anatomique 9 II - Physiopathologie et étiologies 11 A. Mécanisme des sténoses...11 B. Etiologies...11 1. Sténoses congénitales... 11 2. Sténoses iatrogènes... 11 3. Sténoses post-traumatiques...12 4. Sténoses post-infectieuses : (ou inflammatoires)... 12 III - Etude clinique 13 A. Manifestations cliniques...14 1. Symptômes liés à l'obstruction urinaire...14 2. Complications infectieuses aiguës ou chroniques... 14 B. Examen clinique...14 IV - Examens complémentaires 15 V - Diagnostique différentiel 17 VI - Traitement 19 A. Méthodes...19 1. Méthodes endo-urétrales... 19 2. Chirurgie conventionnelle...20 B. Indications...21 VII - QCM 23 3
Objectifs 1. Expliquer les mécanismes physiopathologiques d'un rétrécissement de l'urètre. 2. Enumérer les différentes étiologies d'un rétrécissement de l'urètre. 3. Décrire les manifestations cliniques évoquant un rétrécissement de l'urètre. 4. Confirmer, grâce à des examens para-cliniques, le diagnostic d'un rétrécissement de l'urètre. 5. Organiser une prise en charge thérapeutique d'un rétrécissement de l'urètre en fonction du degré de sa sévérité et de son caractère évolutif. 5
Introduction A l'état normal, l'urètre masculin est un canal souple, circulaire et élastique dont la lumière est virtuelle, s'ouvrant sous l'effet du flux mictionnel. Le rétrécissement, ou plus précisément la sténose de l'urètre peut être définie comme une réduction du calibre, plus ou moins étendue, du canal urétral. C'est une affection fréquente qui fait partie du quotidien de l'urologue. Son incidence est en augmentation régulière. En fait, le rétrécissement urétral est avant tout une affection de l'homme. L'origine infectieuse n'est plus prédominante, devancée par les causes traumatiques et surtout iatrogènes. Les sténoses de l'urètre féminin sont très rares, et elles intéressent la partie la plus distale : sténose congénitale, sclérose du méat, et très rarement cancer de l'urètre. 7
Rappel anatomique I - I L'urètre masculin, conduit évacuateur des urines et du sperme, est défini anatomiquement par deux portions : une portion postérieure fixe, regroupant l'urètre prostatique et l'urètre membraneux et une portion antérieure mobile, constituée de l'urètre bulbaire et de l'urètre pénien (figure 1). L'urètre membraneux, long de 2cm, s'étend de l'urètre prostatique à l'urètre bulbaire en traversant le diaphragme uro-génital. Cette portion particulièrement fixe de l'urètre est la plus vulnérable lors des traumatismes du bassin. Au repos, la longueur de l'urètre est de 16 à 17 cm. Le calibre de la lumière urétrale est variable, en rapport avec la miction : virtuelle en dehors des mictions, elle atteint 9 mm lors des mictions avec 3 zones plus dilatées : sinus prostatique, sinus bulbaire, et fosse naviculaire La paroi urétrale est constituée d'une muqueuse, d'une sous-muqueuse et d'une couche externe. Cette dernière est musculeuse dans la portion postérieure et érectile dans la partie antérieure, constituée par le corps spongieux, dont la partie la plus distale s'émancipe pour former le gland 9
Rappel anatomique Image 1 : Figure 1 : Représentation schématique de l'urètre masculin 10
Physiopathologie et II - étiologies II Il existe 4 types étiologiques de sténoses de l'urètre : congénitales, iatrogènes, post-traumatiques, et post-infectieuses. A. Mécanisme des sténoses Quelle que la cause, la physiopathologie reste la même. La lésion initiale est une rupture de la continuité urétrale en rapport avec une abrasion, une ulcération, une perforation, ou une dilacération de tout ou une partie de la paroi. La cicatrisation, considérablement favorisée par une dérivation des urines vésicales, est obtenue par épithélialisation de la blessure urétrale. En l'absence de dérivation urinaire, la plaie urétrale reste «agressée» par le flux urinaire. Le tissu péri-urétral est irrité, ce qui entraîne une fibrose autour de laquelle le calibre de la lumière urétrale diminue au fur et à mesure que l'épithélialisation couvre la blessure. La fibrose, en particulier sur la paroi antérieure, peut être si intense qu'elle peut s'organiser à distance de la blessure initiale, réalisant parfois des sténoses moniliformes d'une grande longueur (en particulier en cas de sténose post-infectieuse). B. Etiologies 1. Sténoses congénitales Elles sont rares. Il s'agit d'une perméabilisation incomplète de la membrane uro-génitale. Leur localisation est toujours située à la jonction de l'urètre membraneux (d'origine endodermique) et de l'urètre bulbaire (d'origine ectodermique) Il existe aussi des sténoses méatiques congénitales Elle sont souvent bien tolérées et peuvent se manifester tardivement à l'âge adulte. 2. Sténoses iatrogènes Elles représentent la cause la plus fréquente actuellement. 11
Physiopathologie et étiologies Elles sont secondaires à une éraillure de la muqueuse au cours d'une manœuvre instrumentale (après sondage urétral ou geste endoscopique). Ces sténoses peuvent intéresser n'importe quel segment de l'urètre mais surviennent surtout au niveau des zones les plus étroites ou fixes (méat urétral, fosse naviculaire, cul de sac bulbaire). Les mécanismes impliqués sont la fosse route, la nécrose par pression de contact, ou l'urétrite méconnue sur sonde entraînant une cicatrice sténosante. 3. Sténoses post-traumatiques Elles succèdent habituellement aux ruptures de l'urètre. Certaines ruptures partielles peuvent passer inaperçues et se manifester seulement par le rétrécissement ultérieur. Selon le mécanisme du traumatisme, la localisation sera membraneuse ou bulbaire. Il faut insister à nouveau de ne jamais sonder un malade ayant un traumatisme ou une suspicion de traumatisme du bassin avant d'avoir éliminer une rupture de l'urètre. Quelques cas particuliers sont mis à part comme la rupture de l'urètre antérieur associée à une fracture de verge ou les traumatismes intraurétraux volontaires lors de conduites sexuelles déviantes, ou de pathologies psychiatriques. 4. Sténoses post-infectieuses : (ou inflammatoires) Survenant rarement après une urétrite banale, le rétrécissement inflammatoire a une cause essentielle : la blennorragie. En effet, la sténose de l'urètre représente la complication classique des urétrites gonococciques non ou mal traitées et peuvent survenir plusieurs années après l'épisode infectieux. La sténose est le plus souvent longue, intéressant la lumière du canal et tout le tissu péri-urétral en rapport avec l'infection et l'inflammation des glandes péri-urétrales. Les sténoses inflammatoires sont devenues aujourd'hui beaucoup moins fréquentes grâce au traitement adéquat et rapide des urétrites. Les rétrécissements inflammatoires d'origine tuberculeuse sont très rares. 12
Etude clinique III - III A. Manifestations cliniques Une sténose de l'urètre doit être évoquée devant des symptômes liés à l'obstruction urinaire ou à ses complications, en particulier infectieuses aiguës ou chroniques. 1. Symptômes liés à l'obstruction urinaire La symptomatologie est faite de troubles mictionnels avec : Dysurie ++ : d'installation progressive avec une miction lente, un jet faible interrompu, et des gouttes retardataires ou la classique miction «goutte à goutte». - La dysurie peut aboutir d'une manière brutale à une rétention aiguë d'urines qui peut être le symptôme révélateur du rétrécissement Ou lentement, à une rétention vésicale chronique avec miction par regorgement 2. Complications infectieuses aiguës ou chroniques Prostatite aiguë Orchi-épididymite aiguë Urétrite chronique avec goutte matinale Insuffisance rénale chronique B. Examen clinique L'examen clinique est souvent pauvre. L'interrogatoire doit rechercher des antécédents d'urétrites, de sondages, de manœuvres endoscopiques ou de traumatismes. Le toucher rectal, souvent normal, peut retrouver des séquelles de prostatite L'examen de la verge et surtout du méat recherche un orifice punctiforme ou une sclérose. L'examen des bourses recherche des séquelles d'épididymites. Enfin, la palpation de l'hypogastre peut retrouver un globe vésical. 13
IV - Examens complémentaires IV 1. Biologie : On réalise systématiquement un ECBU et une créatinémie pour éliminer respectivement une infection urinaire et une insuffisance rénale. 2. Débitmétrie : La débitmétrie a souvent un aspect caractéristique «en plateau» (courbe plate avec un débit maximum très diminué inférieur à 10 ml/sec.) 3. UIV avec clichés mictionnels : L'UIV visualise la sténose, précise son siège, sa longueur, et l'aspect du reste de l'urètre. Elle permet en même temps d'apprécier le retentissement sur l'appareil urinaire 4. Urétro-cystographie mictionnelle : - Au mieux antérograde par ponction sus-pubienne pour éviter trauma l'urètre. - Rétrograde : caractérise au mieux la sténose, mais son indication doit rester prudente (risque infectieux) 5. Urétrocystoscopie : Elle réalisée en cas de doute diagnostique. Image 2 : Figure 2 : UCR : sténose de l'urètre bulbaire 15
V - Diagnostique différentiel V Il est facile d'éliminer les autres causes de troubles mictionnels chroniques : Hypertrophie bénigne de la prostate (TR, échographie) Cancer de la prostate (TR, PSA) Prostatite chronique Maladie du col vésical (UCR) Vessie neurologique acontractile (bilan urodynamique) 17
VI - Traitement VI Le traitement des sténoses de l'urètre est difficile à cause des récidives fréquentes. De nombreuses techniques ont été proposées pour traiter les sténoses de l'urètre. A. Méthodes 1. Méthodes endo-urétrales a/ Dilatations urétrales : On utilise des sondes rigides de calibre de plus en plus important qui sont enduites d'un gel lubrifiant et anesthésiant. C'est un geste simple, effectué en consultation sous anesthésie locale et peut être renouvelé facilement. Il est néanmoins rare qu'une dilatation permette à elle seule d'obtenir des guérisons définitives. On peut être amené à proposer à certains patients «récidivistes» de s'autosonder régulièrement pour maintenir béante la lumière urétrale. b/ Urétrotomie interne endoscopique : Le principe est de réaliser une incision de toute l'épaisseur de la paroi urétrale au niveau de la zone sténosée, à l'aide d'une lame froide tranchante, sous contrôle de la vue. Cette intervention est réalisée sous anesthésie générale ou locorégionale au cours d'une courte hospitalisation. L'urétrotomie doit intéresser toute la longueur de la sténose. Une sonde trans-urétrale est mise en place pendant 1 à 5 jours, de façon à drainer les urines et faciliter la cicatrisation. L'urétrotomie endoscopique est surtout efficace en cas de sténose peu étendue, sans réaction péri-sténotique fibreuse. D'une façon générale, les récidives ne sont pas rares et il semble illusoire, pour guérir le patient, de répéter les urétrotomies au-delà de 3 ou 4 tentatives. c/ Endoprothèses urétrales : Il s'agit de petits tubes insérés par voie endoscopique à l'intérieur du canal urétral. Il existe différents types de prothèses selon leur composition. Elles peuvent être enlevées au bout de quelques semaines ou laissées en place définitivement et sont alors réhabitées par l'urothélium. 19
Traitement L'inconvénient est la réaction inflammatoire importante au contact de la prothèse. Image 3 : Figure 3 : UIE technique 2. Chirurgie conventionnelle Elle est indiquée en cas de sténoses multi opérées, multi récidivées (échec de 2 urétrotomies). Il existe plusieurs techniques opératoires d'urétroplastie, en un ou deux temps : a/ Urétroplasties en un temps : Résection anastomose termino-terminale : intervention de choix si la sténose est courte de (2 à 3 cm). C'est souvent la technique employée dans les lésions de l'urètre après fracture du bassin. Greffes (peau pénienne, prépuce, muqueuse buccale) Lambeaux (prépuce, scrotum) : en cas de rétrécissements compliqués, opérés péalablement. b/ Interventions en 2 temps : Le principe est de mettre à plat l'urètre largement en zone sténosée, puis reconstruire après quelques mois un tube urétral en utilisant la peau. Cette technique est réservée aux cas très difficiles. 20
Traitement Image 4 : Figure 4 : Urétroplastie chirurgicale B. Indications Elles dépendent de la nature de la sténose, de sa localisation, de sa longueur, de son ancienneté, des traitements déjà effectués, et des souhaits du patient. On peut proposer le schéma suivant : - Traitement de 1ère intention : Urétrotomie interne endoscopique (renouvelable 1 à 2 fois en cas de récidive) - Si récidive : Dilatations itératives Chirurgie ouverte Prothèse urétrale - Sténoses très étendues : chirurgie ouverte (en particulier urétroplastie en en 2 temps) 21
VII - QCM VII Exercice 1 Parmi les étiologies suivantes, quelle est celle qui ne peut être mise en cause en cas de rétrécissement urétral : Urétrite gonococcique Antécédents de sondage vésical Traumatisme du bassin Fracture de la verge Pyélonéphrite aiguë Exercice 2 Un rétrécissement urétral peut se manifester par : Une dysurie. Une rétention aiguë d'urine. Une rétention vésicale chronique. Une hématurie récidivante. Une cystite aiguë. Exercice 3 Parmi les examens para-cliniques suivants, quels sont ceux qui sont utiles pour le diagnostic d'un rétrécissement urétral? Urétroscopie. Débitmètre. Uro-scanner. Echographie vésicale. Urétro-cystographie rétrograde (UCR). Exercice 4 23
QCM Quel est le traitement de première intention devant un rétrécissement inflammatoire serré étendu sur 2 cm au niveau de l'urètre bulbaire de primo découverte? Prothèse urétrale Urétroplastie en un temps Urétrotomie interne endoscopique Dilatations urétrales Chirurgie reconstructive par lambeau scrotal. 24
Conclusion Le rétrécissement de l'urètre est une pathologie fréquente de l'homme dont l'incidence augmente avec la multiplicité des gestes endoscopiques et l'usage immodéré du sondage urétral. Son traitement est difficile avec un risque élevé de récidives dont la majorité surviennent au cours de la première année. Plus la sténose est longue, fibrotique, et incisée préalablement, plus le succès est limité. Bien que l'urétrotomie interne soit le premier choix dans la majorité des rétrécissements urétraux, il reste un bon nombre de cas à traiter par chirurgie ouverte. 25