Pacte d Avenir pour la Bretagne Contribution pour la compétitivité de l industrie bretonne Dans un contexte économique et social (international, national) qui pèse (et pèsera) lourdement sur les entreprises industrielles en Bretagne, cette contribution souligne la fragilité de l économie industrielle bretonne et exprime les propositions, les attentes des entrepreneurs et leurs représentants professionnels. 1) Le constat : Le climat des affaires dans l industrie s est stabilisé par rapport à la même période que 2012 (indice 90) mais est toujours nettement en retrait de sa moyenne de longue période (indice 110 sur la période 2004 à 2008). Pour la fin d année et 2014, les chefs d entreprise font état d une petite augmentation de la production, mais encore insuffisante pour enrayer la poursuite de la réduction des effectifs. Les secteurs de la sous-traitance industrielle (sauf dans le secteur de l aéronautique), des équipements industriels souffrent de : la morosité des marchés de l agro-alimentaire (au 1 er semestre 13, les défaillances d entreprises ont augmenté de 10% par rapport à 2012 avec une baisse de la production agro-alimentaire de 12% depuis le début de l année) ; la situation économique du bâtiment en Bretagne qui reste orientée à la baisse. Globalement, les piliers de l économie régionale vacillent : certes, le secteur agricole, notamment l élevage (volaille, porc, lait), rencontre des difficultés majeures avec une crispation très forte des producteurs, des industriels de l agroalimentaire fortement fragilisés comme Doux, Tilly Sabco ou Gad. Mais aussi le secteur automobile subit une véritable hémorragie (25 000 salariés en 2005, moins de 15 000 aujourd hui), l électronique de production ne va pas bien et la construction et réparation navale va connaître une période difficile du fait de la nouvelle loi de programmation militaire qui va réduire l activité et donc l emploi, notamment sur Lorient. De même, la crise agricole et agro-alimentaire aura inévitablement des répercutions sur des secteurs comme le machinisme agricole et les équipementiers mécaniques. Depuis le début 2013, plus de 30 entreprises adhérentes aux chambres syndicales des UIMM de Bretagne ont sollicité nos services pour des licenciements économiques pour l équivalent de 800 emplois. Avec les 1 400 emplois de PSA, on arrive à un potentiel de 2 200 emplois, soit 4% des effectifs de la métallurgie (54 000 emplois) en un an. Il faut donc préserver la compétitivité «coûts» des entreprises industrielles. 1
Pour cela, il faut s attaquer à la faiblesse des marges de nos entreprises qui gonfle leur endettement : les marges des industries technologiques sont très faibles à un niveau de 21.5% de la valeur ajoutée (29% dans l ensemble de l industrie contre 38% dans la zone euro et 39% en Allemagne). Cette faiblesse des marges réduit la capacité d autofinancement des entreprises : le taux d autofinancement est passé de 90% début 2000 à 65% en 2013. On perd du terrain sur les entreprises de la zone euro qui reste à 100%. Cette chute du taux d autofinancement entraîne logiquement un gonflement de la dette des entreprises industrielles de notre région qui atteint près de 140% de leur valeur ajoutée contre 110% avant la crise de 2008 (Allemagne : 80%). Et cela dans un contexte où les taux d intérêt s inscrivent de nouveau à la hausse. Nous sommes à un seuil fatidique où toute nouvelle hausse des impôts et taxes n aura pour effet que de replonger les entreprises industrielles dans la récession et donc de peser encore plus sur l emploi. 2) 4 propositions concrètes pour relancer l industrie en Bretagne en 2014 : Si les ministres de l agriculture et de l agroalimentaire ont annoncé des aides cumulées pour 1 milliard pour les filières bretonnes dont le doublement du FEADER dans les 6 ans qui viennent (368 M ), c est l ensemble de l industrie bretonne qui doit voir se restaurer sa compétitivité. A) Réduire la pression fiscale décidée par les collectivités locales et qui pèse sur la compétitivité des entreprises bretonnes : Objectif : Engagement des collectivités locales à réduire la dépense publique en Bretagne de 5% par an afin de contribuer à la compétitivité «coûts» des industries. Illustration : a minima une stabilité des impôts des collectivités locales en Bretagne en valeur qui pèsent sur les entreprises dès 2014 et une baisse de 5% en 2015 et en 2016. B) Soutenir et dynamiser les territoires bretons en difficulté, notamment les zones rurales touchées par les fermetures de sites industriels : Objectif : favoriser le développement et l implantation d entreprises sur ces territoires pour créer des emplois en mettant en place un système breton de «zones franches rurales» sur les bassins d emploi touchés par les fermetures de site ou des suppressions de postes importantes (5 à 10 000 emplois sur 5 ans). Illustration : Proposer une franchise de cotisations sociales aux entreprises qui maintiennent et créent des emplois sur ces bassins d emploi touchés par des licenciements massifs de toutes les industries pendant au moins 5 ans avec dégressivité. - Faciliter le prêt participatif avec garantie pour les entreprises en développement ; - Mettre en place à l échelle de la Bretagne le dispositif de fonds mutualisés de la revitalisation d Ille et Vilaine avec une gestion dans chaque département. 2
C) Développer l épargne de proximité pour financer les entreprises industrielles et ainsi favoriser la montée en gamme par l innovation et l exportation : Objectif : mobiliser 1 milliard (public et privé) pendant 3 ans pour financer les entreprises industrielles en difficulté et celles en développement. Pour faciliter l accès aux entreprises à ces financements, il est recommandé de mettre en place en Bretagne un guichet unique «financement d entreprise» piloté par BPI Bretagne. Illustration 1 : Lancer un emprunt régional breton de proximité pour conforter l économie industrielle comme a pu le faire les Pays de Loire avec succès (115 millions en 2012). Utiliser cet emprunt pour développer des prêts régionaux de redéploiement industriel pour les PMI confrontées à des difficultés de marché et celles en besoin de financement pour leur développement (taux 0, différé de remboursement et garantie BPI). Illustration 2 : Mettre en place à l échelle de la Bretagne le dispositif de fonds mutualisés de la revitalisation d Ille et Vilaine avec une gestion dans chaque département pour financer prioritairement les entreprises industrielles et les services aux industries en développement. D) Expérimenter concrètement des mesures de simplification pour les entreprises bretonnes : Objectif : mettre en place en 2014 3 à 4 mesures simples, à impact fort et duplicables après expérimentation en Bretagne. Illustration 1 : Favoriser le retour à l emploi des demandeurs d emploi en versant une allocation différentielle entre l indemnisation chômage et le salaire versé de façon dégressive et pendant 3 ans (expérimentation avec UNEDIC et POLE EMPLOI). Illustration 2 : Orienter une partie de la commande publique des collectivités locales vers les entreprises bretonnes (50%) et consacrer 2 à 5% de cette commande publique à des innovations ou des prototypes élaborés par des PMI/ETI. Illustration 3 : Réduire les délais de traitement des autorisations administratives pour les entreprises en Bretagne (maximum 6 mois?) et instaurer un moratoire sur les contrôles fiscaux sur les différents crédits impôt en faveur des entreprises pour leur permettre de se consacrer au business et à l innovation. Illustration 4 : Favoriser en Bretagne la relance de l apprentissage industriel en pérennisant les aides régionales aux PMI (jusqu à 250 salariés), en concentrant l effort de financement pour augmenter les effectifs (+25% sur 3 ans?) et en expérimentant une simplification administrative pour les jeunes, les entreprises et les CFA. Au-delà de mesures ponctuelles, il est primordial de distiller une culture de la simplification administrative à chaque rouage des directions, services, sous-services de l Etat, des collectivités locales et des agences ou établissements publics. Pour cela, nous proposons que la Bretagne expérimente une méthode de travail associant, de façon permanente, les acteurs concernés pour identifier les lourdeurs administratives, les analyser et mettre en oeuvre des mesures concrètes de simplification. 3
3) Un Pacte d Avenir pour la Bretagne qui ne suffira pas sans des mesures fortes à l échelle nationale et européenne en faveur de la compétitivité des entreprises : Le Pacte d Avenir pour la Bretagne doit intégrer des projets et actions qui sont à la portée de la Bretagne. Cependant, il appartient à l Etat et aux collectivités locales de créer l écosystème favorable au redressement de la compétitivité des entreprises industrielles fortement exposées à la concurrence internationale. Nous identifions cinq leviers d action au niveau national et européen : Encourager l innovation et la recherche. Pour cela, les dispositifs type Crédits d impôt recherche et Innovation doivent être pérennisés et sécurisés pour les entreprises ; les Plan d investissements d avenir doivent être accélérés dans leur mise en œuvre, notamment en Bretagne. Réformer le marché du travail qui doit inciter à la reprise du travail et non à rester au chômage et la possibilité d avoir désormais la primauté des négociations internes à l entreprise par rapport aux autres textes réglementaires. Mettre en œuvre réellement des mesures de simplification pour les entreprises : la simplification de l environnement législatif et réglementaire des entreprises est un élément clé de la compétitivité. La simplification des règles et réglementations, notamment environnementales et sociales, doit être en permanence recherchée. Trop de règles et réglementations, parfois contradictoires viennent perdre et entraver l action des chefs d entreprise. Il nous faut de la simplicité et de la sécurité juridique. Les fédérations professionnelles de l industrie bretonne proposent à l Etat pour commencer, d engager 15 mesures de simplification (en annexe de cette contribution). Combattre le «dumping» social en harmonisant la législation européenne : les acteurs économiques bretons sont prêts à s engager auprès de l Etat français pour faire pression sur la Communauté européenne et le Parlement européen pour harmoniser la législation sociale et faire converger les charges sociales, tout en limitant le recours à la main d œuvre étrangère par l application du régime social du pays d accueil. Créer un environnement de compétitivité : les opportunités d équipement des consommateurs d Asie peuvent nous permettre de faire remonter la part de l industrie dans le PIB à 20 % d ici à 2025. Pour y arriver, il faut réduire de 120 milliards le poids des prélèvements obligatoires sur les entreprises, et surtout sur les entreprises industrielles qui exportent. Malgré le CICE qui portera sur 10 milliards en 2014, sur les années 2012 à 2014, on constate une hausse de 0.5% du PIB dans les prélèvements sur les entreprises (+ 21 milliard en 2012 et 2013). Avec le CICE, il est impératif de baisser le coût du travail de 50 milliards d euros en cinq ans et en faire autant pour la fiscalité. 20 milliards par an, cela ne représente que 5% par rapport aux 1 150 milliards de dépenses publiques. Les acteurs professionnels de l industrie bretonne insistent sur la nécessité de faire un effort sans précédent de baisse des dépenses publiques, préalable à toute baisse des prélèvements durables. Les «assises de la fiscalité» qui seront lancées prochainement doivent aboutir sur des résultats : baisser d au moins 5% les dépenses publiques par an. Le renoncement définitif à l écotaxe doit en être la première étape. 4
Annexe : 15 propositions de simplification administrative et réglementaire pour les entreprises : 1 - COMBATTRE le «dumping» social en harmonisant la législation européenne ; 2 - ENCOURAGER le recours à l apprentissage et simplifier les contraintes administratives pour les jeunes, les entreprises et les CFA ; 3 - EXIGER que tous les textes d application soient publiés avant l entrée en vigueur de toute nouvelle disposition législative ; 4 - SECURISER la déclaration et la contestation de l inaptitude physique des salariés ; 5 - FACILITER l information des entreprises en matière d arrêts de travail de leur personnel ; 6 - SECURISER la notion d employeur au sein des groupes d entreprises ; 7 - INTERDIRE que la JURISPRUDENCE puisse remettre en cause des pratiques ancestrales résultant de dispositions légales ou conventionnelles, en modifiant subitement leur interprétation ; 8 - SECURISER juridiquement les dispositions législatives, et les conventions et accords collectifs de branche portant sur les aménagements collectifs du temps de travail ; 9 - SECURISER les conditions de validité des protocoles électoraux ; 10 - SECURISER le champ d application des accords d entreprise susceptibles d être validés par une Commission paritaire de validation ; 11 - SIMPLIFIER et HARMONISER les délais de paiement ; 12 - PROSCRIRE la mise en place d une TVA à 5,5 % pour les seuls travaux de rénovation énergétique (concerne plus particulièrement les entreprises de la métallurgie et de la plasturgie) ; 13 - TROIS MESURES complémentaires pour SIMPLIFIER LA VIE DES ENTREPRISES : - 13 - Harmoniser les références aux jours ouvrés, jours ouvrables, jours calendaires, jours francs qui peuvent être source d erreurs involontaires ; - 14 - Réduire le nombre des obligations liées au franchissement du seuil de 50 salariés ; - 15 - Etendre les possibilités d accompagnement des entreprises par leur organisation professionnelle. 5