La néphropathie diabétique cause première d insuffisance rénale chronique



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Transcription:

L I N S U F F I S A N C E R É N A L E I La néphropathie diabétique cause première d insuffisance rénale chronique par Martine Raymond M. Dan Sucrey, qui a fort négligé sa santé au cours des dernières années, vient tout juste d avoir un diagnostic de diabète de type 2. Sensibilisé par son meilleur ami, actuellement en dialyse, il craint que son diabète l y conduise aussi. Mais avant tout, il désire avoir une bonne évaluation, et surtout, l information pertinente sur sa maladie. LE DIABÈTE EST SANS CONTREDIT la cause première d insuffisance rénale au Canada et dans tous les pays industrialisés. Les diabétiques représentent une proportion croissante des patients qui entreprennent un traitement de suppléance rénale, comptant pour 29,6 % des 12 800 patients traités pour insuffisance rénale, selon les dernières statistiques canadiennes disponibles 1. Alors que la prévalence du diabète dans le monde doublera dans les 10 à 20 prochaines années, sans parler des complications médicales nettement plus nombreuses chez ces patients, les coûts humains et financiers liés à une telle maladie sont considérables (encadré). Définition de la microalbuminurie Le dépistage d une néphropathie diabétique à un stade précoce chez les personnes à risque est d une importance cruciale. La microalbuminurie est devenue le paramètre de référence pour le dépistage de l atteinte rénale diabétique (figure), sur lequel se fonde maintenant l évaluation. Elle nous donne également une idée de la progression et du pronostic de la maladie. Elle constitue en outre un facteur de risque non négligeable sur le plan cardiovasculaire. La D re Martine Raymond, interniste et néphrologue, exerce à la Cité de la Santé de Laval. E N C A D R É Néphropathie diabétique et dialyse Prévalence i 29,6 % des dialysés (Canada, 1998) i 40 % des dialysés (États-Unis, 1998) Coûts i 30 000 à 85 000 $/an/dialysé (Canada, 1998) i 50 000 $/an/dialysé, soit plus de 12 milliards de dollars annuellement (États-Unis, 1998) Mortalité i 50 % trois ans après le début de la dialyse i 67 % cinq ans après le début de la dialyse 1-3 L évolution naturelle de l atteinte rénale diabétique passe par certaines étapes d évolution clinique : Hyperfiltration glomérulaire. Plus de 125 ml/min/1,73 m 2. Elle mène à une hypertension glomérulaire et, ultimement, à des atteintes glomérulaires et tubulaires. Elle est réversible. Microalbuminurie. Taux d excrétion urinaire d albumine de 30 à 300 mg par jour. Marqueur du début de lésions dommageables aux reins et à d autres organes cibles. Néphropathie diabétique débutante potentiellement réversible. Protéinurie franche. Plus de 300 mg de protéinurie par 69 Le diabète est sans contredit la cause première d insuffisance rénale au Canada et dans tous les pays industrialisés. La microalbuminurie est devenue le paramètre de référence pour le dépistage de l atteinte rénale diabétique, sur lequel se fonde maintenant l évaluation. Elle nous donne également une idée de la progression et du pronostic de la maladie. R E P È R E S

F I G U R E Comment utiliser la microalbuminurie comme test de dépistage et de suivi? Analyse d urine de base : protéinurie - + Tests de dépistage : Bandelette réactive spéciale pour détecter la microalbuminurie Rapport albumine-créatinine - Refaire le test annuellement. Néphropathie diabétique franche Commencer un traitement. + 2,0 mg d albumine par mmol de créatinine chez l homme 2,8 mg d albumine par mmol de créatinine chez la femme 70 Tests de confirmation et de suivi : Collecte des urines de 24 heures : résultat positif si de 30 à 300 mg d albumine sont excrétés Collecte des urines de la nuit : résultat positif : 20 à 200 µg d albumine/min Rapport albumine-créatinine : résultat positif si 2 échantillons sur 3, prélevés sur une période de 3 mois, sont affirmatifs + Néphropathie diabétique débutante Commencer un traitement. Refaire les tests de microalbuminurie tous les 3 mois jusqu à stabilisation, puis tous les 6 mois. jour. Détectable avec une bandelette réactive ordinaire. Souvent accompagnée d hypertension artérielle, et évoluant invariablement vers une détérioration rapide de la fonction rénale si elle n est pas traitée (perte de 1 ml/min/mois si le patient n est pas suivi). Néphropathie diabétique franche possiblement stabilisable. Insuffisance rénale terminale. Moins de 10 à 15 % de fonction rénale résiduelle. Une suppléance rénale doit donc être envisagée. Chez qui doit-on faire un dépistage? Recommandations officielles de l Association canadienne du diabète 4 : Diabète de type 1 : patients âgés de plus de 15 ans et souffrant de diabète depuis plus de cinq ans. Diabète de type 2 : tous les patients au moment du diagnostic de diabète. En reconnaissant certaines caractéristiques, il est possible d établir un profil des patients diabétiques dont l état risque d évoluer vers une atteinte rénale grave (tableau I). Une intervention précoce, un suivi attentif ainsi qu un traitement rigoureux doivent leur être réservés. Stratégies de traitement La pierre angulaire de la thérapie d un patient atteint de néphropathie débutante ou avancée repose sur trois éléments : i Contrôle glycémique ;

i Contrôle de la tension artérielle ; i Blocage du système rénine-angiotensine-aldostérone. Il va de soi que la prise en charge optimale est intensive et cible une intervention multifactorielle. Le contrôle glycémique strict Son efficacité et ses répercussions dépendent du niveau d évolution clinique. Par exemple, une néphropathie débutante peut être normalisée par cette intervention. Les meilleures preuves d efficacité ont été établies pour le diabète de type 1. Le DCCT (Diabetes Complications and Control Trial) a comparé les bénéfices d un contrôle intensif (hémoglobine glyquée : HbA 1c 0,07) à ceux d un suivi régulier (hémoglobine glyquée : HbA 1c 0,09) chez 1400 patients. On a pu observer une diminution des complications globales du diabète et, en ce qui nous concerne, une baisse de 50 % de la progression de la néphropathie diabétique par rapport aux résultats du traitement standard 6. Quant au diabète de type 2, le but du traitement est de normaliser l hémoglobine glyquée. L UKPDS (United Kingdom Prospective Diabetes Study) fait état d une diminution du risque de microangiopathie de l ordre de 25 % chez les sujets qui assurent un suivi plus serré de leur contrôle glycémique 7. Il faut favoriser les mesures visant à contrôler l hyperinsulinémie, car elles sont susceptibles de ralentir le développement de la glomérulosclérose en plus de réduire le risque cardiovasculaire. Il s agit en soi de sensibiliser les obèses à perdre du poids, de prôner l exercice physique et de choisir, s il y a lieu, un hypoglycémiant oral comme la metformine (attention à l insuffisance rénale), la rosiglitazone ou l acarbose 8. Le contrôle de la tension artérielle L hypertension artérielle touche plus de 80 % des diabétiques, augmentant ainsi la morbidité et la mortalité chez ces patients. Une maîtrise rigoureuse de la tension artérielle en dessous des valeurs recommandées dans un contexte d hypertension essentielle va non seulement augmenter la survie des patients et diminuer l incidence des maladies cardiovasculaires, mais également limiter l incidence et la progression des complications microvasculaires. Recommandations : i Objectif thérapeutique en présence d une protéinurie de moins de 1 g/jour : 130/80 mmhg ; i Objectif thérapeutique en présence d une protéinurie T A B L E A U Facteurs prédictifs d un risque élevé de néphropathie diabétique 5 i Mauvais contrôle glycémique i Hypertension artérielle i Hyperfiltration glomérulaire et (ou) hypertrophie rénale i Antécédents familiaux : + hypertension + maladie cardiovasculaire + néphropathie i Ethnie : + Mexicains + Américains + Indiens Pima + Afro-Américains de plus de 1 g/jour : 125/75 mmhg ; i Suivi de la tension tous les trois mois une fois les cibles atteintes. Les études principales ayant contribué à l élaboration de ces recommandations sont : i MDRD (Modification of Diet in Renal Disease) 9 ; i HOT (Hypertension Optimal Treatment) 10 : réduction des événements cardiovasculaires majeurs de moitié chez les 1501 patients diabétiques de l étude avec le maintien d une tension artérielle diastolique de 80 mmhg par rapport au maintien d une tension de 90 mmhg ; i UKPDS ; i SYST-EUR (SYSTolic Hypertension in EURope Trial Investigators) 11. Le blocage du système rénine-angiotensine Depuis plusieurs années maintenant, il est démontré qu une intervention au niveau de l axe rénine-angiotensine confère une néphroprotection toute particulière. Les IECA (inhibiteurs de l enzyme de conversion de l angiotensine), en atténuant l action de l angiotensine II, c est-à-dire en relâchant la vasoconstriction de l artériole L hypertension artérielle touche plus de 80% des diabétiques, augmentant ainsi la morbidité et la mortalité chez ces patients. R E P È R E I Formation continue 71

72 T A B L E A U Traitement pharmacologique du diabétique souffrant d hypertension artérielle et (ou) de néphropathie Premier choix... Inhibiteur de l enzyme de conversion de l angiotensine (IECA) : i Posologie à augmenter par paliers jusqu à la dose maximale i Ajouter (si la clairance de la créatinine est 30 ml/min) : + diurétique thiazidique (12,5 ou 25 mg/jour) ou + indapamide (1,25 ou 2,5 mg/jour) i si la clairance de la créatinine est 30 ml/min : + furosémide Deuxième choix... ARA (antagonistes des récepteurs de l angiotensine) (solution de rechange à l IECA) Troisième choix Quatrième choix... Cinquième choix... II... BCC-ND (bloqueurs des canaux calciques de type nondihydropyridine BB (bêta-bloquant) Agoniste central (exemple : clonidine), etc. efférente des glomérules, réduisent la pression intraglomérulaire et, par le fait même, épargnent l usure prématurée des néphrons menant à la glomérulosclérose. Nombre d études sur le sujet se sont succédées dans la dernière décennie, et la grande majorité d entre elles ont démontré la supériorité des IECA sur les autres molécules pour réduire les complications, tant macrovasculaires que microvasculaires, du diabète. Il est donc prouvé qu ils réduisent la tension artérielle, la mortalité cardiovasculaire, la microalbuminurie et la protéinurie à tous les stades d évolution clinique, et même surtout dans les cas de néphropathie avancée. i Lewis et le Collaborative Study Group 12 : chez des sujets atteints du diabète de type 1 ayant une néphropathie franche, le captopril a réduit de 50 % la progression de l insuffisance rénale. i ABCD (Appropriate Blood pressure Control in Diabetes trial) 13 : a montré les bienfaits des IECA en ce qui concerne les événements cardiovasculaires. i FACET (Fosinopril Amlodipine Cardiovascular Events Trial) 14 : a montré les bienfaits des IECA en ce qui concerne les événements cardiovasculaires. Les IECA se sont imposés comme traitement de première intention du diabète. R E P È R E i HOPE (Heart Outcomes Prevention Evaluation) 15 : a montré que les IECA réduisaient les complications macrovasculaires et microvasculaires. Autre avantage, les IECA sont neutres sur le plan métabolique, ne perturbant pas l équilibre glycémique et lipidique. Attention, toutefois : il faut toujours contrôler la créatininémie et la kaliémie une semaine après l introduction d un IECA ou l augmentation de la posologie. Une hausse des taux de créatinine plasmatique de plus de 20 à 30 % par rapport au niveau de base et une élévation de la kaliémie de plus de 5,5 mmol/l nous obligeront à interrompre la prise du médicament. Donc, les IECA se sont imposés comme traitement de première intention du diabète, même si leur efficacité semble moins bien confirmée pour le diabète de type 2. Indications des IECA : i Diabétiques (types 1 et 2) ; i Normotendus ou hypertendus ; i Prévention primaire (normoalbuminurie) chez les hypertendus ; i Prévention secondaire (microalbuminurie) ; i Prévention tertiaire (protéinurie). L usage des ARA (antagonistes des récepteurs de l angiotensine) émerge, et ces derniers s avèrent probablement aussi néphroprotecteurs que les IECA pour les patients diabétiques. Leur profil d effets secondaires serait meilleur avec moins de toux, d angio-œdème et d hyperkaliémie. Les études récentes principales sur le sujet sont : i RENAAL (Reduction of End-points in NIDDM with the AII Antagonist Losartan) 16 ; i IDNT (Irbesartan Diabetic Nephropathy Trial) 17 ; i IRMA (Irbesartan in patients with type II diabetes and Microalbuminuria study) 18. Que penser de l association IECA-ARA? Jusqu à maintenant, on y trouve un avantage théorique à cause de la complémentarité des mécanismes de néphroprotection de chaque classe. Des études sur le sujet sont en cours. Traitement pharmacologique recommandé de l hypertension artérielle chez le diabétique Le contrôle de la tension artérielle en visant les cibles

T A B L E A U Mesures non pharmacologiques et pharmacologiques complémentaires au suivi du patient diabétique Mode de vie i Poids raisonnable : IMC 27 i Cesser de fumer. i Pratiquer régulièrement des activités physiques adaptées. Diète i Réduire la consommation de sel. i Réduire la consommation d alcool à une ou deux consommations par jour au maximum. Hyperlipidémie i Adopter d emblée les stratégies de prévention secondaire si le patient est exposé à un risque très élevé (Consensus canadien sur le cholestérol, 2000). Aspirine : 80 mg par jour III i Si la tension artérielle est contrôlée. précitées semble très difficile à atteindre. Par exemple, dans l étude UKPDS, où les objectifs de tension n étaient pourtant pas si stricts, déjà 30 % des patients nécessitaient plus de trois antihypertenseurs. Les choix médicamenteux sont présentés par ordre de préséance au tableau II. La prise en charge optimale du diabétique vise également le contrôle de tout facteur de risque de maladie cardiovasculaire actuellement reconnu (voir le tableau III). Quand faut-il adresser le patient en néphrologie? Certains problèmes ou certaines situations exigeront probablement l opinion, les conseils, voire la prise en charge d un spécialiste néphrologue. Les principaux motifs d orientation sont énumérés au tableau IV. ONNEPEUT ACTUELLEMENT QUE CONSTATER à quel point le diabète est devenu une maladie florissante dans les sociétés industrialisées. Le diabète est lourd de conséquences diverses et occupe la première place comme cause d insuffisance rénale et d entrée en dialyse. Les coûts humains et financiers sont considérables. T A B L E A U Indications d orientation en néphrologie i Hypertension artérielle réfractaire i Néphropathie diabétique avec protéinurie non stabilisée i Détérioration de la fonction rénale malgré un traitement intensif i Néphropathie avancée avec clairance de la créatinine inférieure à 30 ml/min, patient qu il faut préparer à moyen terme à une suppléance rénale i Hyperkaliémie réfractaire C est une pratique axée sur la prévention que nous devons adopter pour ces patients. D innombrables études nous guident vers les stratégies dites optimales en 2002 pour le dépistage précoce de la néphropathie diabétique, le suivi et le traitement. C est grâce à une prise en charge globale et énergique que nous parviendrons à éviter l épidémie à venir, ou tout au moins à réduire une partie des problèmes liés au diabète. c Date de réception : 11 avril 2002. Date d acceptation : 15 avril 2002. Mots clés : néphropathie diabétique, microalbuminurie, inhibiteurs de l enzyme de conversion de l angiotensine, antagonistes des récepteurs de l angiotensine II. Bibliographie IV 1. Registre canadien des insuffisances et des transplantations d organes. Rapport de 2000, volume 1 : Dialyse et transplantations rénales. Ottawa : Institut canadien d information sur la santé, 2000. 2. US Renal Data System. USRDS 1999 Annual Data Report. Bethesda, MD : National Institutes of Health, National Institute of Diabetes and Digestive and Kidney Diseases, 1999 : 25-38. 3. Conseil d évaluation des technologies de la santé du Québec. Hémodialyse et dialyse péritonéale : analyse comparative des rapports coûtsefficacité. Montréal : CETS 98-3RF, 1998 : XI-37. 4. Meltzer S, Leiter L, Daneman D, Gerstein H, Lau D, Lidwig S, et al. Lignes directrices de pratique clinique 1998 pour le traitement du diabète au Canada. JAMC 1998 ; 159 (8 Suppl). La prise en charge optimale du diabétique vise également le contrôle de tout facteur de risque de maladie cardiovasculaire actuellement reconnu. R E P È R E Formation continue 73

74 S U M M A R Y Diabetic nephropathy: primary cause of chronic renal failure. Diabetes is the leading cause of kidney failure in Canada, and for most of the industrialized countries in the world. The incidence of diabetes and its complications will double in the next 10 to 20 years; diabetic nephropathy and dialysis entail considerable costs, and that is why the identification of early diabetic nephropathy, the clinical microalbuminuria, seems to be the basis of any intervention. We recommend to test for microalbuminuria five years after diagnosis of diabetes for patients over 15 years old suffering from type I diabetes, and at the diagnosis of diabetes in type II. When nephropathy is confirmed, therapy is based on three complementary interventions. First, strict glycemic control, which can prevent or slow down the evolution of nephropathy. Then, since high blood pressure concerns more than 80% of diabetic people and adds to global morbidity and mortality, a control to less than 130/80 mmhg is recommended. Finally, the use of an ACEI (angiotensin-converting enzyme inhibitor) that blocks the renin-angiotensin system is well known for its very effective nephroprotective action either in the normotensive with early nephropathy or in the hypertensive with more advanced nephropathy. It is more and more proven that the use of ARAs (angiotensin II receptor antagonists) presents the same benefits and finally, the efficacy of combination of ACEI-ARA is to be officially proven. An intensive management with a multifactorial intervention includes the control of any known cardiovascular risk factor. Nephrology referral should be proposed when there is a problem controlling blood pressure, proteinuria, or when progressive kidney failure becomes more important. Key words: diabetic nephropathy, microalbuminuria, angiotensinconverting enzyme inhibitor, angiotensin II receptor antagonist. 5. Rosenberg ME, Correa-Rotter R. Pathogenesis and risk factors for diabetic nephropathy. Dans : Jacobson HR, Striker GE, Klehr S, réd. The Principles and Practice of Nephrology. 2 e éd. Philadelphie : Mosby ; 1995 : 330-6. 6. Diabetes Control and Complications Trial Research Group (DCCT). The effect of intensive treatment of diabetes on the development and progression of long-term complications in insulin-dependent diabetes mellitus. N Engl J Med 1993 ; 329 : 977-86. 7. United Kingdom Prospective Diabetes Study Group. Intensive blood glucose control with sulfonylureas or insulin compared with conventional treatment and risk of complications in patients with type 2 diabetes (UKPDS 33). Lancet 1998 ; 352 : 837-53. 8. Hebert LA, Wilmer WA, et al. Renoprotection: One or Many Therapies? Kidney Int 2001 ; 59 : 1211-26. 9. Hunsicker LG, Adler S, Caggiula A, et al. Predictors of the progression of renal disease in the modification of diet in renal disease study. Kidney Int 1997 ; 51 : 1908-19. 10. Hansson L, Zanchetti A, Carruthers SG, et al. Effects of intensive blood-pressure lowering and low-dose aspirin in patients with hypertension: principal results of the hypertension optimal treatment (HOT) randomised trial. Lancet 1998 ; 351 : 1755-62. 11. Staessen JA, Fagard R, Thijs L, et al. Randomised double-blind comparison of placebo and active treatment for older patients with isolated systolic hypertension. The Systolic Hypertension in Europe (Syst-Eur) Trial Investigators. Lancet 1997 ; 350 (9080) : 757-64. 12. Lewis SB, Hunsicker LG, Bain RP, et al. The effect of angiotensinconverting enzyme inhibition on diabetic nephropathy. N Engl J Med 1993 ; 329 : 1456-62. 13. Estacio RO, Jeffers BW, Hiatt WR, et al. The effect of nisoldipine as compared with enalapril on cardiovascular outcomes in patients with non-insulin-dependent diabetes and hypertension. N Engl J Med 1998 ; 338 : 645-52. 14. Tatti P, Pahor M, Byington RP, et al. Outcomes results of the fosinopril versus amlodipine cardiovascular events randomized trial (FACET) in patients with hypertension and NIDDM. Diabetes Care 1998 ; 21 : 297-603. 15. The Heart Outcomes Prevention Evaluation Study Investigators. Effects of an angiotensin-converting enzyme inhibitor, ramipril, on cardiovascular events in high-risk patients. N Engl J Med 2000 ; 342 : 145-53. 16. Brenner BM, Cooper ME, et al. Effects of losartan on renal and cardiovascular outcomes in patients with type 2 diabetes and nephropathy. N Engl J Med 2001 ; 345 : 861-9. 17. Lewis EJ, Hunsicker LG, et al. Renoprotective effects of the angiotensin-receptor antagonist irbesartan in patients with nephropathy due to type 2 diabetes. N Engl J Med 2001 ; 345 : 851-60. 18. Parving, HH, Lehnert H, et al. The effect of irbesartan on the development of diabetic nephropathy in patients with type 2 diabetes. N Engl J Med 2001 ; 345 : 870-8. FMOQ Formation continue La a santé mentale 12 et 13 septembre 2002, Hôtel Radisson Québec, Québec Renseignements : (514) 878-1911 ou 1 800 361-8499