ECONOMIE SOCIALE ET FORMATIONS



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Transcription:

ECONOMIE SOCIALE ET FORMATIONS analyse Octobre 2006 Véronique Huens, Responsable éducation permanente SAW-B Utilité sociale des biens et des services produits, promotion de la solidarité et du lien social sur les intérêts individuels : autant de valeurs et enjeux qui ne sont que rarement mis en valeur au sein des enseignements supérieurs. Comment aujourd hui donner une place (et laquelle) à l économie sociale au sein des enseignements et des formations? Comment informer et sensibiliser les jeunes à l existence d une autre forme d économie que celle traditionnellement enseignée? Comment susciter l envie de s y investir en tant que travailleur ou consommateur? Comment enfin former les futurs entrepreneurs, dirigeants, cadres et travailleurs de l économie sociale? Un constat peu brillant... Si les premières entreprises de «la nouvelle économie sociale» ont été le fait de nombreux travailleurs sociaux militants qui face à des problèmes de société graves, ont développé parfois dans l urgence et souvent de manière informelle des structures pour y faire face, le visage de l économie sociale a aujourd hui bien changé! Reconnaissance politique avec en contre partie des exigences de qualité et de «rentabilité», croissance et maturation des entreprises ont entraîné une professionnalisation importante des structures d économie sociale. Pour diriger une entreprise à finalité sociale aujourd hui, il faut ressembler à un mouton à 5 pattes : être un bon gestionnaire, un commercial, connaître le métier, gérer le personnel et surtout, la 5 è patte, posséder la fibre «économie sociale», en d autres mots savoir inscrire au sein du projet les valeurs de solidarité, de démocratie participative, de respect, etc. Autant dire que ces moutons sont difficiles à trouver! Surtout lorsque l attrait salarial de tel type de poste est très faible. Que fait-on en Belgique francophone pour favoriser l éclosion d entrepreneurs sociaux? Quelles actions de sensibilisation sont développées au sein des universités et hautes écoles? Quels mécanismes (stages, parrainage ou compagnonnage) existent-ils pour permettre à des jeunes qui ont le profil entrepreneurial et la fibre «sociale» mais encore trop peu d expérience, de se former progressivement? Quelles formations existe-il en «gestion d entreprises d économie sociale» ou combien de professeurs abordent des questions liées à l économie sociale dans leurs cours de droit, de gestion, de marketing, etc.? La réponse à l ensemble de ces questions est malheureusement aujourd hui peu brillante en Belgique francophone! Les stages sont encore trop peu nombreux et non coordonnés. Ce sont donc finalement toujours les mêmes entreprises d économie sociale qui, par le bouche à oreille, accueillent des stagiaires (1). Plusieurs actions de sensibilisation ont été menées au sein des hautes écoles et des universités, telles que les Semaines de l économie sociale organisées par Cera, Febecoop, Syneco et SAW-B à Louvain-la-Neuve, Liège et Bruxelles. Mais ce travail de titan nécessite un financement structurel pour éviter que ces actions ne soient que des gouttes d eau dans l océan. Les formations qui proposent un «accompagnement complet» (2) des porteurs de projets d économie sociale sont très peu nombreuses. Il n existe en tout et pour tout qu un post-graduat en gestion d entreprise d économie

sociale donné par l EPFC (3) à Bruxelles et une formation «économie sociale et gestion d entreprise» donnée par le réseau IDEES à Verviers. Quelques cours «isolés» existent également. Un séminaire d économie sociale, un cours en entreprenariat et management en économie sociale et un séminaire des théories de l économie sociale sont dispensés par le Centre d économie sociale pour les élèves de l ULg et HEC. A l UCL, un seul cours à option «économie du non-marchand» existe, accessible aux seuls étudiants en deuxième licence en sciences économiques (4). Un séminaire doctoral «Economie sociale et solidaire, économie populaire, organisations non-profit» est également dispensé pour les élèves des deux universités ULg et UCL. A l ULB, un cours d économie sociale est donné mais uniquement pour les élèves des licences en sciences du travail à horaire décalé. Un cours intitulé «économie sociale et mouvement coopératif» est dispensé à la FOPES une année sur deux (5). Il faut toutefois noter, qu à partir de janvier 2007, plusieurs formations verront le jour, dont une à l ICHECentreprises qui traitera du non-marchand (6) cadre juridique, gestion financière, stratégie et financement, marketing et direction quotidienne et l autre à l ULB sous le titre «management associatif». Quels types de formation développer? Une formation spécifique à l économie sociale? La première question qui se pose est celle de la nécessité ou non d organiser des programmes de cours spécifiques à l économie sociale. Une des difficultés de l enseignement en lien avec l économie sociale est sans doute le manque de «métiers» clairement identifiables au sein du troisième secteur. L économie sociale touche à pratiquement tous les domaines d activités, à tous les métiers et à toutes les formations : maçon, ébéniste, imprimeur, ménagère, comptable, assistant(e) social(e), fromager, agriculteur(trice), médecins,... tous peuvent choisir d exercer leur métier «différemment». Il s agirait donc plus d enseigner des valeurs que des compétences ou en d autres termes, de sensibiliser que de former. Mais n existent-il toutefois pas certains outils spécifiques à l économie sociale qu il est nécessaire de connaître et maîtriser, particulièrement lorsqu on est amené à diriger une entreprise du troisième secteur? Les outils en terme de démocratie participative, de marketing «social», le cadre juridique de l économie sociale, les statuts de travail, etc. peuventils simplement s apprendre «sur le tas» ou nécessitent-ils une formation spécifique? Nos voisins français ont déjà depuis longtemps donné leur réponse à cette question. De nombreuses universités ont en effet développé des Masters en gestion des organisations sociales, en développement local, en économie solidaire, etc. Un campus numérique a également été mis en place par l Université de Valenciennes. En dehors des universités classiques, quatre collèges coopératifs ont vu le jour dans l hexagone et proposent chacun un ensemble de programme de cours lié à l économie sociale et solidaire et des méthodes d enseignement spécifiques (méthodes coopératives). En Belgique, les acteurs semblent relativement partagés sur la question. Une étude réalisée pour le Comité subrégional de l Emploi et de la Formation de Liège en 1998 montre clairement une divergence d avis sur la nécessité de mettre en place une formation spécifique en économie sociale. Pour certains, diriger une entreprise d économie sociale ou une entreprise classique ne diffère pas fortement et c est avant tout de bonnes compétences de gestion dont le futur entrepreneur social aura besoin. D autant plus que les valeurs, l esprit et la culture particulière de l économie sociale ne s apprennent pas en un an mais sont en quelque sorte des qualités innées ou à développer dès le plus jeune âge. «Des formations lourdes et importantes spécifiquement orientées vers l économie sociale paraissent inutiles. Pour être vraiment efficace, toute sensibilisation à l économie sociale doit se faire le plus tôt possible et de manière régulière, pour donner aux étudiants des ouvertures sur la réalité sociale du monde actuel. Cela pourrait prendre la forme d une levée de voile au sein de quelques cours de gestion. La formation pourrait aussi impliquer une certaine sensibilisation aux principes éthiques de l économie sociale et ce dès l enseignement secondaire général, technique et professionnel (7).»

D autres défendent clairement le point de vue d une formation spécifique qui permet d aborder en profondeur les compétences et les caractéristiques propres à l économie sociale tout en appuyant sur le fait qu il est alors nécessaire de plonger l étudiant dans le concret (soit via des stages, soit via l étude de la mise en place d une entreprise d économie sociale réelle). Sensibiliser et accompagner Plus qu en réelle opposition, les deux approches décrites ci-dessus se complètent et permettent de pointer deux besoins à satisfaire pour permettre la création de nouvelles entreprises d économie sociale professionnelles et performantes : d une part, la sensibilisation à une autre économie et une «autre manière d entreprendre» qui fait actuellement encore cruellement défaut dans nos enseignements ; et d autre part, un accompagnement à la création d entreprises d économie sociale. La plupart des cours d économie politique dispensés dans les universités et hautes écoles de gestion ne proposent aujourd hui qu un seul paradigme : celui de la logique de marché, la recherche du profit et de la lutte où seul le plus fort et le plus concurrentiel sort gagnant. Il est donc indispensable et urgent que différentes actions de sensibilisation à une économie sociale, humaine et durable soient mises en place. D autant plus qu il existe une demande réelle des étudiants à trouver du sens dans leur futur emploi. Le rôle des fédérations d économie sociale est ici essentiel. Nous devons nous mobiliser pour trouver du temps et des moyens sur le long terme afin de développer des partenariats et des actions de sensibilisation durables et efficaces. Sans une action dans la durée, c est tout le fruit des efforts que nécessite le premier contact qui sera à chaque fois perdu. Il est nécessaire d habituer les établissements et les professeurs à la notion d économie sociale pour qu à terme, ils intègrent celle-ci de manière structurelle dans leurs cours. Et pour cela, les habituer à l organisation de Semaines de sensibilisation ou d interventions d acteurs de terrain au sein des cours, à l existence de mini-entreprises à finalité sociale, à la possibilité de stages au sein du secteur, etc. Mais les fédérations ne peuvent venir qu en soutien des acteurs de terrain. Ce sont en effet les entreprises d économie sociale qui, in fine, doivent s engager dans cette démarche de formation par l accueil de stagiaires, la participation aux évènements de sensibilisation, l intervention dans des cours, etc. Or, un manque de temps et de moyens ou parfois un sentiment d inutilité par rapport à la démarche rend cet engagement lourd et difficile pour certaines entreprises d économie sociale. Un autre frein est la dépendance du secteur vis-à-vis du politique pour le financement de ce type d actions. Chaque nouvelle législature amène une ouverture différente par rapport à la question et une préférence pour tel ou tel type d actions qui empêche la mise en place d une stratégie de long terme et cohérente. Malgré ces freins, de nombreuses pistes sont à (re)explorer : développer des partenariat avec des organismes qui travaillent à la sensibilisation des jeunes à l entrepreneuriat, contacter des professeurs en marketing, gestion financière, GRH, etc. pour les inciter à inviter des acteurs de terrain dans leurs cours (8) et, à terme, à introduire la notion d économie sociale dans leur enseignement, contacter les universités et les hautes écoles pour envisager la mise en place de cours d économie sociale (ou du moins, lorsqu ils existent, pour les rendre accessibles à plus d étudiants) et promouvoir les possibilités de stages au sein d entreprises à finalité sociale, contacter des groupes d étudiants (kots à projets, associations d étudiants, etc.) qui pourraient être des relais au sein de leurs établissements, réfléchir à des outils «pédagogiques» expositions, jeux de société, petits films, etc. qui pourraient être utilisés par les professeurs dans leurs cours ou par des étudiants. Au delà de la sensibilisation, la question de l accompagnement des personnes qui désirent lancer un projet d économie sociale reste essentielle. Parmi les récents créateurs d entreprises d économie sociale, certains n ont pas suivi de formation spécifique au secteur et ont su, avec les outils acquis d expériences professionnelles précédentes ou de formations classiques, développer une entreprise à finalité sociale viable et performante. Toutefois, il est évident qu il existe une diversité de porteurs de projets et de demandes, et qu à cette diversité, doit répondre une offre plurielle de conseils, de formation et d accompagnement. Il semble qu en dehors des agence-conseils qui interviennent souvent dans les phases plus avancées du projet et sur des aspects

spécifiques, il existe une réelle demande (9) pour un «accompagnement complet» au développement d entreprise d économie sociale. Les formations de type «gestion d entreprises d économie sociale» ont donc toute leur pertinence. Elles doivent toutefois pouvoir répondre à des demandes variées : faire émerger des projets chez les personnes qui ont simplement un intérêt pour la démarche, accompagner les personnes qui ont déjà une idée précise de leur future entreprise et les aider à la consolider, la structurer et la tester, tout en leur donnant un ensemble d outils performants adaptés à la spécificité des entreprises à finalité sociale. Pour remplir ces différents rôles, les formations doivent être régulièrement évaluées et développer une flexibilité qui leur permette de s adapter (10). En guise de conclusion Cette analyse a pour objectif premier de lancer un débat au sein du secteur mais aussi avec toutes les personnes concernées. Il apparaît en effet évident que le développement d une stratégie ambitieuse en terme de sensibilisation et de formation-accompagnement à l entrepreneuriat social nécessite la mobilisation et une coordination de toutes les parties prenantes : établissements d enseignement, acteurs de terrains et monde politique. Aujourd hui, comme nous l avons mentionné, seules deux formations offrent un accompagnement global au développement de projet en économie sociale. Or, des outils pour appuyer des gens qui sont en projets et en faire émerger d autres sont nécessaires. Le modèle mérite donc d être étendu, notamment dans les régions qui n en disposent pas encore et où la demande est pourtant présente. Une analyse de cette demande devrait dès lors être réalisée de manière approfondie. Des problèmes se posent toutefois pour trouver des établissements prêts à accueillir ce type de formation. L enveloppe fermée accordée par la Communauté française obligerait en effet l établissement à renoncer à d autres formations tout en prenant le risque, pour les premières années, de devoir consacrer beaucoup d énergie, de temps et d argent pour un public relativement restreint. Les petites structures sont donc souvent dans l impossibilité de développer ce type de formation (11). Quelles sont les pistes à explorer pour dépasser ce problème? Du côté de la Communauté française? Du côté des «grosses structures»? Des universités (12) mais aussi des hautes écoles? Enfin, une autre question qui devra être abordée est celle de l évaluation des formations et cours existants. Qui évalue? Quelle pertinence des formations par rapport aux besoins du secteur? Comment développer le lien entre l enseignement et le monde professionnel? Enfin, il est urgent de travailler sur la sensibilisation des étudiants et professeurs (!) au modèle économique alternatif que représente l économie sociale et solidaire. Il faut pour cela, comme nous l avons mentionné, non seulement développer des actions de sensibilisation larges (Semaines de l économie sociale, Autre pack, etc) mais aussi procéder à un travail de fond avec professeurs et dirigeants des universités et hautes écoles. Cela pour ouvrir progressivement des cours à option (voir même obligatoires) dans les sections telles que «gestion d entreprise», «ingénieur de gestion», «ingénieur commercial», «marketing», etc. C est là que se situe le plus gros du travail mais aussi le plus pertinent sur le long terme. Parce que l économie sociale doit s intégrer dans les cursus traditionnels et non pas rester uniquement confinées dans des formations «spécialisées». Le travail est évidemment énorme et, comme nous l avons déjà mentionné, il nous faudra mettre tous les acteurs concernés autour de la table pour l entreprendre... Pour en savoir plus : - http://www.ces-ulg : Centre d économie sociale - http://cerisis.opes.ucl.ac.be : site du Cerisis - http://www.epfc-bxl.org/site.html?page=60 : site de la formation en «gestion d entreprises d économie sociale» dispensée à l EPFC - IDEES ou Institut de Développement Européen de l Economie Sociale (Rue des déportés, 91 à 4800 Verviers Tél.: 087 33 74 88 - E-mail : idees@ideesasbl.org) - http://www.ccra.asso.fr/presentation/groupement.htm : groupement des Collèges coopératifs français.

(1) Une base de données recueillant les propositions de stages et de mémoires auprès des entreprises d économie sociale a été lancée en 2005 par SAW-B et la Chaire Cera. Mais cette «compilation» nécessite une mise à jour régulière mais surtout une diffusion auprès de nombreuses universités et hautes écoles, ce qui demande un travail important que n ont plus pu fournir les deux organisations en 2006. La base de données reste toutefois accessible et est hébergée sur le site de SAW-B. http://www.saw-b.be/outils/stage/listestage.php. (2) Nous entendons par là un enseignement long qui regroupe des cours sur des matières variées (marketing, droit, comptabilité, gestion des ressources humaines, etc) avec une approche de terrain (outils concrets, etc) et un accompagnement des étudiants sur base d un projet qu ils souhaitent développer. Il ne s agit donc pas de formations, telles que dispensées par certaines agence-conseil, qui sont quant à elle ciblées et courtes. (3) Enseignement de promotion sociale de type court. La formation dure un an (de septembre à juin) est se donne à horaire décalé. Elle comprend 21 périodes /semaines mais le système modulaire permet de composer des programmes sur mesure. (4) Il n est donc pas accessible aux étudiants en sciences de gestion. (5) A noter également que les assistant sociaux reçoivent un cours de 45h en deuxième année portant sur l économie sociale. (6) A noter que les droits d inscription à ce diplôme spécialisé sont très élevés, à savoir 3100 euros pour 12,5 jours de formation! Des réductions sont toutefois possibles pour les acteurs du non-marchand mais laissent encore le coût de la formation fort élevé. (7) Rapport final de l étude menée par le Ciriec et la FAR pour le CSEF de Liège sur «le développement d une banque d idées à l usage des opérateurs de formation en économie sociale». (8) A la manière des cours «meta-métis» qui se déroulent chaque année pendant une semaine à l UCL. (9) Cette demande apparaît clairement au travers du succès relatif des formations données par l EPFC et par IDEES. Chacune compte en effet près de 30 élèves et l EPFC doit depuis deux ans refuser certaines personnes. (10) Dans le cadre de Creasoc, la formation donnée par l EPFC fait l objet d une évaluation. Une première évaluation avait toutefois déjà été menée après la première année. Cette évaluation a permis des premières adaptations notamment pour différencier plus rapidement les deux types de publics présents : ceux qui viennent chercher une meilleure compréhension de l économie sociale sans réel projet à l entrée de la formation et ceux qui arrivent avec un projet déjà relativement clair et la volonté de le réaliser qui nécessitent un tout autre type d accompagnement. La majorité des cours restent en commun mais une plus grande partie de l enseignement a été consacré au suivi de projet pour ceux qui le souhaitaient. Une demande d actualisation du référentiel sur lequel se base la formation devrait d ailleurs être posée prochainement. (11) L école industrielle de Mont-sur-Marchienne a lancé en 2003 une formation sur base du même référentiel que celui de l EPFC. Fautes de moyens adéquats, la formation a du s étaler sur 2 ans et demi et n a attiré que très peu d élèves. La formation a été annulée après 2 ans. (12) Suite à la Semaine de l économie sociale à l UCL en 2004 et au nombre de demande croissant venant d étudiants, une démarche a été lancée par le Cerisis auprès de l Institut d administration et de gestion (IAG) de l UCL en vue de développer un cours de gestion d entreprise d économie sociale et du non-marchand et à plus long terme envisager une filière «économie sociale». Suite au changement de président de l IAG, la démarche a été pour le moment mise entre parenthèse.