Le dynamisme de l activité du capital- risque et ses deux modes privilégiés de sortie



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Transcription:

Le dynamisme de l activité du capital- risque et ses deux modes privilégiés de sortie Malika LOUNES 17 avril 2010 Résumé La caractéristique de l auto-alimentation du marché de capital-risque est largement admise, elle suppose que le dynamisme de cette activité dépend fortement des opportunités de sorties qui s offrent aux capital-risqueurs. Black et Gilson (1998) ont vérifié l existence d une corrélation positive entre le nombre d introduction en bourse (IPO à l année t) et la volonté des investisseurs institutionnels d allouer des fonds aux capital-risqueurs (à l année t+1). Toutefois, les deux auteurs ont utilisé les moindres carrées ordinaires comme méthode d estimation sur des séries temporelles et la non stationnarité possible des deux séries fait encourir le risque d estimer une régression fallacieuse, leurs résultats ne sont donc pas robustes. Notre travail propose de tester cette corrélation en intégrant un deuxième mode de sortie qui est la sortie par fusion acquisition (M&A) et en mobilisant les techniques économétriques propres aux séries temporelles. Pour ce faire, nous utilisons des données trimestrielles pour les USA issues de la base Thomson One Banker Private Equity et couvrant la période 1970-2007. Deux approches empiriques sont proposées ici. La première s appuie sur le concept de Cointégration et le Modèle à Correction d Erreur (MCE) qui permet de spécifier une relation stable de long terme entre les investissements en capital-risque (INV) et le nombre d opération de M&A des sociétés soutenues par le capital-risque. La seconde s appuie sur le concept de causalité au sens de Granger qui montre l existence d une causalité unidirectionnelle du nombre d opération de M&A vers le volume des investissements en capital-risque. Toutefois, même si théoriquement la forte liaison entre le dynamisme de capital-risque et les IPO n est pas réfutée, notre travail ne nous permet pas de la valider. JEL Classification : G3, G24, C01. Mots-clés : Capital-risque, IPO, M&A, Cointégration, MCE. Laboratoire Erudite, Université Paris-Est Créteil Val de Marne, 61 avenue du Général de Gaulle 94010 Créteil Cedex France. 1

Introduction Apparu au milieu des années 1940 aux Etats-Unis, le capital-risque est le mode de financement spécifique des jeunes entreprises innovantes appelées aussi start-ups. Il s agit de jeunes sociétés non cotées à fort potentiel de croissance, appartenant essentiellement au secteur des NTIC (Nouvelles Technologies de l Information et de la Communication). Le capital-risque aux Etats-Unis est le plus ancien et le mieux développé des pays de l OCDE. Plusieurs sociétés de haute technologie, qui ont fait leurs preuves dans l informatique et les communications, mais aussi dans les secteurs et services liés à la santé, ont été financés par du capital-risque (Apple, Compaq, Cisco...). Cette activité est née pour répondre à un besoin de financement spécifique suite à l émergence de nombreuses petites entreprises aux fins de la deuxième guerre mondiale. Ces entreprises fortement technologiques et dans les premiers stades de développement pour la plupart, ont un besoin important de capital de démarrage pour financer le développement de leurs produits ou, pour certaines, pour financer leurs croissances auxquels les mécanismes de financement traditionnels ne peuvent pas répondre. Bien que considérées comme des entreprises à fort potentiel de croissance, leur capacité à fournir les garanties nécessaires pour contracter de la dette est extrêmement limitée, leurs actifs étant souvent de nature incorporelle (capital humain, droits, brevets...) et donc difficile à évaluer. Le recours au capital-risque est apparu alors comme l unique moyen de combler des besoins en capitaux nécessaires au développement d une idée, ou d un projet dont les perspectives de croissance sont prometteuses, mais aussi très risquées. Le capital-risque est ainsi assimilé à une forme d intermediation financière particulièrement adaptée au soutien de la création, et de la croissance des entreprises innovantes (Hellmann et Puri, 2000, 2002 ; Kortum et Lerner, 2000 ; Gompers et Lerner, 2001). Le système de capital-risque se compose d un certain nombre d acteurs, entre lesquels circulent un certain nombre de flux. Les fonds, (premier acteur) sont les entités mises en place pour recueillir les engagements d apports, et les capitaux appelés, avant que ceux-ci soient utilisés par les gérants des firmes de capital-risque (deuxième acteur), qui gèrent ces fonds pour financer les compagnies sélectionnées (troisième acteur). Les organismes de capital-risque vont s organiser comme un limited partnership regroupant des investisseurs dont la responsabilité est limitée à l apport de fonds ( limited partners LP ) contrairement aux gestionnaires de fonds (general partners GP ) dont la responsabilité est illimité et l apport en capital réduit. Le fonds est constitué pour une durée limitée, typiquement de sept à dix 2

années. Lors de sa constitution, les limited partners s engagent à fournir aux general partners un montant de capital promis (commited capital), les GP repèrent des opportunités d investissement (des start-ups) et réalisent des transactions (deals) en levant progressivement des fonds auprès des LP dans la limite du plafond du capital promis. À l approche de la date de liquidation du fonds, chaque investissement est liquidé sous la forme d une sortie en bourse (IPO), d une revente à une entreprise (industrial sales) ou d une cession à un autre fonds de capital-investissement (secondary deals). Les GP réinvestissent alors les montants désinvestis dans des nouvelles transactions, ou les redistribuent vers les LP en liquide ou bien en nature sous forme d actions. Pour comprendre l activité de capital-risque il est aussi primordial de comprendre son cycle. To understand the venture capital industry, one must understand the whole venture cycle. The venture capital cycle starts with raising a venture fund ; proceeds through the investment in, monitoring of, and adding value to firms ; continues as the renews itself with the venture capitalist raising additional funds (Gompers et Lerner, 2001). Selon les deux auteurs, l activité du capital-risque peut s analyser comme un cycle d investissement qui comprend au moins trois phases : la première phase correspond à la levée de fonds auprès des investisseurs institutionnels (LP), elle sera suivi par la phase d investissement qui comprend la sélection, le suivi et la surveillance des start-ups auxquelles les capital-risqueurs (GP) apportent fonds propres et conseils, et enfin la dernière phase qui correspond à la sortie qui s effectuera soit par introduction en bourse, où l organisme de capital- risque vend ses participations sur le marché financier spécialisé dans les valeurs de croissance (IPO : initial public offering), soit par fusion-acquisition (M&A : rachat par le groupe investisseur ou par un autre groupe ). La phase de sortie constitue une étape cruciale pour le capital-risqueur, c est durant cette phase qu il va pouvoir rembourser les investisseurs institutionnels (LP) et percevoir le rendement de son effort. Cette phase va aussi déterminer l issue du cycle d investissement. En effet, les performances réalisées à l année t vont permettre un nouveau cycle d investissement en favorisant de nouvelles levées de fonds. Le marché du capital-risque s auto-alimente en partie. Les succès d aujourd hui préfigurent le volume des ressources financières futures. L accueil favorable réservé aux jeunes pousse, que ce soit par l entrée sur le marché financier ou par le rachat par une grande entreprise, oriente de nouveaux fonds vers cette activité et amène les capital-investisseurs à investir dans de nouveaux projets (Dubocage 2004). Cette caractéristique de l auto-alimentation du marché de capital-risque, est 3

largement admise, elle suppose que le dynamisme du capital-risque dépend fortement des opportunités de sorties qui s offrent aux capital-risqueurs. Toutefois, peu d étude économétrique ont essayé de la valider. Nous allons donc la soumettre à l examen en testant économétriquement une telle relation de dépendance entre le marché du capital-risque et ses deux modes de sorties les plus privilégiés. La littérature aborde le plus souvent le rôle des introductions en bourse en négligeant les sorties par acquisitions qui depuis quelques années sont d une ampleur importante, nous allant donc introduire ce nouveau phénomène dans nos tests empiriques. Notre document est structuré comme suit : la première section sera consacrée à la revue de littérature, dans la deuxième, nous allons examiner les données utilisées, leurs sources et leurs caractéristiques. Les résultats des tests de la racine unitaire, de cointégration sont exposés à la section 3, nous présentant également dans cette même section une analyse par le test de non causalité de Granger pour consacrer la dernière section à la conclusion. 1 Le dynamisme du capital-risque et ses deux modes de sortie Le dynamisme de l activité du capital-risque est reflété par le volume des fonds alloués à cette activité. Ces derniers dépendent essentiellement de la phase de sortie. Si la sortie se déroule avec succès, les plus-values réalisées seront réinjectées en partie dans le circuit de financement et contribuent ainsi à entretenir la dynamique de l activité du capital-risque par un nouveau cycle d investissement (figure 1). Le cas d échec sera interprété comme un signal d une mauvaise rentabilité de l activité, les levés de fonds vont devenir ainsi plus difficiles. Cette corrélation entre les deux phases, la phase de levée de fonds et la phase de sortie a été vérifiée par Black et Gilson (1998), ils ont montré en se basant sur des données américaines l existence d une corrélation positive et significative entre le nombre d introduction en bourse (à l année t) et la volonté des investisseurs institutionnels d allouer des fonds aux capital-risqueurs (à l année t+1). Une augmentation des introductions en bourse (IPO : Initial Public Offering) encouragera ainsi les sociétés de capital-risque à lever plus de fonds. Les deux auteurs vont pousser leurs analyses en conditionnant le développement d un marché du capital-risque par l existence de marchés financiers profonds capables d absorber les entrées en bourse des entreprises soutenues par le capital- 4

Figure 1 Dynamisme de l activité du capital-risque à travers les cycles d investissements. risque. Ils estiment qu un marché boursier bien développé qui offre aux capitalrisqueurs la possibilité de sortir via une IPO est un facteur déterminant pour le dynamisme du capital-risque. C est la raison pour laquelle les tentatives de reproduction du modèle de capital-risque américain dans les pays où les marchés financiers sont peu développés ont échoué : Other countries have openly envied the U.S venture capital market and have unsuccessfully sought to replicate it. We offer an explanation for this failure : We argue that a well developed stock market that permits venture capitalists to exit through an initial public offering (IPO) is critical to the existence of a vibrant venture capital market (Black et Gilson 1999). Ceci n est pas surprenant dans la mesure où des anticipations d introduction en bourse favorables, synonymes de plus-values importantes pour les capital-risqueurs, sont des incitations essentielles pour le marché du capital-risque (Berger et Udell 1998, Black et Gilson 1998, Gompers et Lerner 1998). La littérature insiste sur la relation positive existant entre le montant des fonds investis dans l activité du capital-risque et la situation prévalant sur les marchés financiers. Plus récemment, différents travaux ont affiné les résultats de Black et Gilson 1998 sur le rôle central des marchés financiers dans le développement du capital-risque. Pour Jeng et Wells (2000) l augmentation de volume d IPO a un effet positif sur la demande et l offre de capital-risque. Du côté de la demande, l existence de ce mode de sortie apporte aux entrepreneurs une incitation 5

supplémentaire pour créer de nouvelles compagnies. Du côté de l offre, s exerce le même effet positif puisque la majorité des investisseurs sont incités à fournir des fonds pour les capital-risqueurs s ils anticipent une éventuelle sortie en bourse, qui leur permettra de réaliser des plus- values importantes. D autres études montrent que la liquidité du marché, représentée par la capitalisation boursière (Schertler, 2003), a un impact positif sur le développement des investissements en capital-risque. Enfin, plus récemment, Gompers, Kovner, Lerner et Scharfstein (2005) dans leur étude sur les liens entre les investissements en capital-risque et les signaux émis par les marchés financiers à savoir le Q de Tobin et le volume des IPO montrent que les fonds expérimentés et spécialisés sont les mieux placés pour utiliser ces signaux pour réaliser des investissements performants. Ainsi, le rôle important des IPO sur la levée de fonds peut être expliqué par l effet de signal : plus le volume des IPO est important, plus les anticipations des capital-risqueurs sont favorables et plus ils sont incités à investir. Toutefois, la démonstration du rôle des IPO dans le dynamisme et la croissance du capital-risque ne peut-être complète tant que l on n a pas pris en compte le second mode de sortie qui est la sortie par rachat. La plupart des études ne tiennent pas compte de ce second mode de sortie bien que, depuis le début des années 1990, il soit une alternative crédible. L intégration du rachat des entreprises financées par le capital-risque parmi les facteurs explicatifs de la dynamique de ce mode de financement apportera une information supplémentaire. 1.1 Les deux modes de sorties La sortie est une étape clé du cycle du capital-risque dont la modalité ne va pas satisfaire nécessairement au même niveau, le dirigeant fondateur de la startup, la société de capital-risque et les investisseurs. Le choix du moment et celui de la modalité vont jouer un rôle dans la rentabilité de l opération d investissement, dans la réputation de la société de capital-risque et dans l avenir de dirigeant qui pourra être amené à demeurer ou non à la tête de l entreprise. Ainsi, les conditions dans lesquelles se réalise la sortie sont considérées comme le facteur le plus déterminant de la rentabilité de l investissement en capital-risque. Il est certes difficile de faire le partage entre la qualité du projet initial, l efficacité de l intervention en conseil, en assistance et en gestion du capital-risqueur, les conditions strictement financières de l investissement et les conditions qui entourent la cession des parts détenues dans la compagnie soutenue. Néanmoins, la sortie constitue la phase de réalisation des plus values éventuellement créées, et la phase ultime du cycle d investissement en capital-risque. La sortie comme on l a 6

déjà mentionné peut se réaliser essentiellement selon deux modalités : l IPO et la sortie par fusion acquisition. 1.1.1 La sortie par IPO L introduction en bourse comme objectif à court ou à moyen terme a le mérite de motiver les dirigeants-fondateurs, et les capital-risqueurs. Cette opération permet en effet, au capital-risqueur de vendre ses participations sur le marché boursier, elle lui offre ainsi la possibilité de réaliser un retour sur investissement lui permettant de libérer des fonds pour d autres projets. Pour Hege, Palomino et Schwienbacher (2006) l IPO semble être la voie royale pour les sorties d investissement et garantit les rendements les plus élevés aux fonds d investissement que ce soit aux Etats-Unis ou en Europe. Sur ce point Black et Gilson (1999) sont très clairs : la sortie par IPO est généralement préférable à la sortie industrielle, elle permet des rendements plus élevés aux organismes du capital-risque. En effet,ce type de sortie est considérée comme plus valorisante et représente un élément positif pour la réputation des capital-risqueurs qui utilisent les IPO passées comme un outil de marketing avec lequel ils tentent d attirer des nouveaux capitaux lors des prochains tours de financement, Barry et al (1990). Cependant, la sortie du capital-risqueur via le marché financier est plus risquée, la réalisation des plus-values est arbitraire, car elle est liée à la conjoncture financière et plus précisément au cours des actions. Contrairement au capital-risqueur, le dirigeant-fondateur s intéresse également à la pérennité et au dynamisme de long terme de la start-up. Ces motivations concernant l introduction en bourse de son entreprise ne sont donc pas purement financière. Pour lui, le but principal d une IPO, c est l accès au marché des capitaux qui permettra à la start-up d obtenir un financement important en une seule étape, d augmenter sa capacité d endettement, d assurer une liquidité de ses titres et de diversifier son actionnariat par une ouverture au public. L entrée en bourse est ainsi un outil de financement flexible et efficace qui offre au dirigent-fondateur une certaine indépendance ainsi qu une opportunité d augmenter ses revenus par l exercice d éventuels stocks options en dehors de la période du Lock-up 1 1.1.2 La sortie par M&A Cette modalité de sortie repose sur une logique totalement différente de celle de l introduction en bourse. Dans ce cas l acquéreur n est pas motivé uniquement 1. Une période de verrouillage qui s applique aux capital-risqueurs et les dirigeants fondateurs. 7

par des critères financiers, mais plutôt par des critères économiques et industriels. Il compte exploiter l entreprise acquise souvent sur le long terme pour bénéficier des synergies industrielles ou commerciales. Dans certain cas, il peut s agir d une acquisition purement stratégique, visant à pénétrer un nouveau marché. Ce mode de sortie ne constitue souvent pas le choix prioritaire des capital-risqueurs. Leurs espérances purement financières se trouvent le plus souvent très éloignées de l objectif de l acquéreur. Dans ce cadre, la société cible (la start-up) a moins de chance de faire l objet d une survalorisation. L acheteur est en effet moins sensible aux bulles engendrées par l engouement des analystes financiers pour certains secteurs ou certains types de société. Cependant, la forte croissance des M&A peut nous amener à relativiser l importance des sorties par IPO. Les cycles boursiers sont tels qu en période haussière, les analystes financiers et les investisseurs vont avoir un comportement irrationnel caractérisé par un fort emballement pour certaines valeurs, ainsi, les introductions en bourse vont avoir tendance à se multiplier. L inverse est vrai, en période de morosité des marchés financiers, les introductions en bourse se font plus rares et les entreprises en quête de sortie doivent se tourner vers la sortie par acquisition qui est un moyen beaucoup plus sûr. 2 Les données 2.1 Source et description Les données utilisées proviennent de la base Thomson One Banker Private Equity (SDC Platinum et VentureXpert) commercialisée par la société Thomson Financial Reuters, c est la base la plus complète dont on puisse disposer sur le capital-risque. Cette base est utilisable selon deux modalités : la première, par l écriture de requêtes dans un langage SQL (Structured Query Language) permettant l accès à toutes les informations disponibles dans la base sollicitée ; la seconde par consultation interactive via le Web qui nous contraint à inscrire la demande dans des formats pré-établis et donc relativement limités. Il convient de souligner que les bases étant mises à jour en permanence, y compris pour des périodes parfois anciennes, les résultats des requêtes sont variables selon le moment où elles sont effectuées. Bien évidemment, les variations sont très faibles voire inexistantes lorsqu il s agit d opérations très anciennes. Mais lorsque l on effectue des requêtes destinées à obtenir des statistiques globales, les chiffres varient, notamment à cause des corrections effectuées sur les années les plus récentes. Les données utilisées concernent les États-Unis et couvrent la période s étalant du 1er trimestre 1970 au 4e trimestre 2007. Soit 152 observations trimestrielles 8

Figure 2 Volume des investissements en capital-risque aux États-Unis en million de dollars par trimestre. pour chacune des trois variables, à savoir, les investissements des sociétés de capital-risque (INV), le nombre d introduction en bourse des sociétés soutenues par le capital-risque (IPO) et le nombre de fusion-acquisition (M&A) concernant toujours les sociétés soutenues par un financement en capital-risque. La base rassemble en juillet 2008, 318 736 opérations d investissement (Venture related deals), 3 820 opérations d IPO (Venture-Backed Companies) et 4 178 opérations de M&A (Venture-Backed Companies) tous stades et secteurs confondus. 2.2 Evolution trimestrielle des investissements en capital-risque aux USA La Figure 2 rend compte des flux d investissements trimestriels en millions de dollars depuis 1970, représentés par une série de cycles caractérisée par des périodes d expansions suivies par des périodes de récessions. Si l on se tient qu à ce graphique, on peut être amené à penser que le capital-risque n a véritablement décollé qu à partir de 1993. En fait, il n en est rien, le graphique en question écrase les premières années de l histoire du capital-risque simplement parce que les niveaux d activité atteints ces dernières années sont disproportionnés par rapport à ceux des années soixante-dix et quatre-vingt. 9

Ainsi, on a choisit de représenter les investissements en capital -risque durant les années soixante-dix et quatre-vingt sur un autre graphique (Figure 6, annexe A.1) qui nous révèle les différents mouvements à la baisse et à la hausse qui ont affecté cette activité durant cette période. Les premiers symptômes de la bulle technologique apparaissent en 1995, pendant environ cinq ans, les gains promis par les sociétés du secteur des TIC (Technologie de l Information et de la Communication) aiguisent l appétit d un nombre croissant d investisseurs, grands et petits, ce qui se traduit par des volumes de fonds importants alloués au secteur de capital-risque. En 1999, le capital-risque aux États-Unis est dans un cycle de croissance fulgurant, les investissements ont atteint au premier trimestre 1999 un montant de 9 962 millions de dollars qui augmentera pour atteindre un pic de 40 238 millions de dollars au premier trimestre 2000. L année 2001 a été marquée par un fort ralentissement dû à l éclatement de la bulle internet, seulement 20 766 millions de dollars ont été dépensé au premier trimestre 2001, ce montant va baisser de la moitié, on va enregistrer uniquement 10 449 million de dollars au premier trimestre 2002. En effet, pour qu un fonds investisse, il faut notamment qu il juge que les perspectives sont bonnes. Quand on traverse des phases économiques où les sorties sont limitées, les cotations en baisse, tout comme les fusions-acquisitions, le fonds est amené à ralentir ses décisions d investir. Cette réalité va caractériser les années 2001, 2002 et 2003 considérées comme des années noires pour l investissement en capital-risque. Alors que l éclatement de la bulle Internet avait sérieusement remis en cause la pérennité du capital- risque, celui-ci retrouve une certaine vigueur à partir de 2004, le secteur semble avoir surmonté les effets de l éclatement de la bulle des valeurs technologiques. Les investisseurs ont à nouveau confiance dans le capital-risque, les investissements n ont cessé de progresser, on enregistre un montant de 19 622 millions de dollars au dernier trimestre de l année 2007, un montant nettement inférieur aux records enregistrés lors de la bulle internet. 2.3 Evolution trimestrielle du nombre des IPO aux États-Unis La dynamique globale des IPO de compagnies américaines soutenues par le capital-risque (Figure 3) est caractérisée par des cycles relativement courts, de l ordre de 3 ou 4 ans en général et par une assez forte volatilité. La configuration en cycles courts de 3 ou 4 ans est assez nette. Outre cette suite de cycles courts, on peut remarquer deux phénomènes originaux : D abord, Le pic des introductions en bourse n est pas atteint, comme on peut s y attendre, à la fin des années quatre-vingt dix, mais en 1986 où l on dénombre 365 opérations dont 232 au premier trimestre. A titre de comparaison, on peut signaler 91 opérations au dernier trimestre de l année 1999, maximum des années 1990. Le cycle qui démarre en 10

Figure 3 L évolution du nombre des IPO des entreprises américaines soutenues par le capital risque 1988 est beaucoup plus long car si l on ne tient pas compte de la légère chute en 1994, le cycle dure presque une dizaine d années. Il se caractérise par un trend croissant entre 1988 et 1996, une fluctuation forte entre 1996 et 1999 puis une chute rapide en 2001. En cette période de crise les introductions en bourse se font plus rares, le redressement ne sera ressenti qu à partir de l année 2004 même si on est très loin des niveaux enregistrés durant les années quatre-vingt-dix. 2.4 Evolution trimestrielle du nombre des M&A aux États-Unis La première opération recensée remonte à 1973, jusqu en 1982 le nombre annuel d opérations est d une ou deux unités (Figure 4). À partir de 1997 on va constater la montée en puissance des sorties par M&A, qui dépassent en nombre les sorties par IPO. On dénombre 41 opérations de Fusion-Acquisition au premier trimestre de l année 1997 contre 34 opérations d IPO. En 1984 on recense 4 opérations et ce nombre sera relativement en croissance continue jusqu en 2006 où le nombre annuel de sorties va atteindre un pic de 387 opérations dont 114 et 117 au premier et deuxième trimestre. Le mouvement devrait se poursuivre à l avenir. La recherche de l innovation va 11

Figure 4 L évolution du nombre des M&A des entreprises américaines soutenues par le capital risque inciter les industriels à se regrouper et fera augmenter ainsi le nombre de M&A. En effet, l innovation étant une nécessité vitale pour toutes les sociétés soutenues par le capital-risque qui sont en situation de concurrence globalisée. Ces dernières doivent développer de nouvelles technologies afin de rester compétitives. Or, il est difficile, même pour les grandes sociétés, d innover en permanence. La croissance rapide des connaissances techniques et les incertitudes liées au changement technologique rendent difficile et complexe la création constante d innovation. Dès lors, les fusions-acquisitions se présentent comme une stratégie de réponse à l innovation. Le rapprochement entre deux sociétés est censé favoriser l acquisition et l appropriation de nouveaux actifs incorporels (nouveau savoir faire, compétences clés permettant de développer de nouvelles technologies...). 3 Résultats empiriques Pour tester la relation de dépendance entre le marché du capital- risque et l un de ses deux marchés de sortie, Black et Gilson (1998) vont tester la corrélation entre les engagements en capital-risque de l année (t+1) et le nombre d introduction en bourse de l année (t), les deux auteurs ont utilisé les moindres carrées ordinaires comme méthode d estimation sur des séries temporelles. Toutefois, la 12

non stationnarité possible des deux séries fait encourir le risque d estimer une régression fallacieuse et donc d interpréter les résultats de manière erronée. La notion de stationnarité est très importante dans la modélisation d une série temporelle, le fait qu un processus soit stationnaire ou non conditionne le choix de la modélisation à adopter. Ainsi, la première étape de notre démarche de modélisation consiste à vérifier la stationnarité des processus générateurs de nos données. Généralement, on se limite à vérifier la stationnarité du second ordre qui se définit comme suit : Un processus est stationnaire au second ordre si l ensemble de ses moments d ordre un l espérance et d ordre deux la variance sont indépendants du temps. Par opposition, un processus non stationnaire est un processus qui ne satisfait pas l une ou l autre de ces deux conditions. La deuxième étape sera consacrée à l examen d une éventuelle dépendance entre le dynamisme du capital-risque et les opportunités de sorties les plus privilégiées qui s offrent aux capital-risqueurs. Deux axes de réflexions sont proposés ici, le premier s appuie sur le concept de cointégration et le Modèle à Correction d Erreur qui permet la prise en compte simultanément de la dynamique du court et long terme. Le second axe s appuie sur le concept de causalité au sens de Granger. Celui-ci permet de déterminer dans quelle mesure la valeur courante de la variable INV peut être expliquée par ses valeurs passées et si le fait d ajouter successivement des valeurs retardées de la variable IPO et la variable M&A supposées chacune comme étant une cause au sens de Granger permet d améliorer la qualité de la prévision. 3.1 Test de non stationnarité Une première intuition concernant la stationnarité des trois séries INV, IPO, M&A peut être fournis par l étude graphique et par celle des corrélogrammes (annexe A.2). Un simple examen graphique met clairement en évidence le fait que les séries INV et M&A sont a priori non stationnaires. Les processus générateurs correspondants ne semblent pas satisfaire la condition d invariance dans le temps de l espérance, et il en va de même pour la variance. Cette intuition peut être renforcée par l étude des corrélogrammes des deux séries. On constate que toutes les autocorrélations de la série INV et la série M&A sont significativement différentes de zéro et diminuent très lentement. Ceci est un signe de non stationnarité. Il est ensuite nécessaire de vérifier cette intuition en appliquant des tests statistiques de non stationnarité. 13

3.1.1 Application des tests de Dickey-Fuller Augmentés ADF Pour appréhender la stationnarité de nos trois séries, on va appliquer le test de non stationnarité le plus utilisé, il s agit du test de racine unitaire proposé par Dickey et Fuller (1979, 1981). L hypothèse nulle du ce test est la présence de racine unitaire, soit la non stationnarité de type stochastique contre l hypothèse alternative de stationnarité. On teste ainsi l hypothèse : H0 : contre H1 : φ = 0 φ < 0 dans trois modèles. Un modèle 1 sans constante ni tendance déterministe (équation (6)), un modèle 2 avec constante sans tendance déterministe (équation(5)) et un modèle 3 avec constante et tendance déterministe (équation(4)),(annexe A.3). Pour mener ce test, on calcule la statistique de Student du coefficient φ qu on compare aux valeurs critiques tabulées par Dickey Fuller. L hypothèse nulle est rejetée si la valeur calculée est inférieure à la valeur critique. Cette statistique ne suit plus sous l hypothèse nulle une loi de Student, puisque, sous l hypothèse nulle, le processus est non stationnaire et les propriétés asymptotiques ne sont plus standards. Ainsi, la différence avec un test du student standard repose sur les valeurs critiques à utiliser pour conclure le test. Eviews nous indique les valeurs critiques qui ont été tabulées par Mackinnon (1996). Il est fondamental de noter que l on n effectue pas le test de racine unitaire sur les trois modèles. En pratique, on adopte une stratégie séquentielle. On commence par tester la significativité de la tendance dans le modèle 3, si elle est significative, en conserve le modèle et on teste l hypothèse de racine unitaire. Si non on passe au modèle 2 et on test la significativité de la constante. Si cette dernière s avère non significative on testera l hypothèse H0 sur le modèle 1 sans constante ni tendance. L application de cette stratégie nous conduit à retenir le modèle sans tendance ni constante pour la série INV et la série M&A, alors qu on retient le modèle avec constante et sans tendance pour la série IPO. Pour conclure le test on va comparer la valeur calculée de la statistique ADF (Table 1) aux valeurs critiques de Dickey-Fuller 2.Il convient de noter aussi que l application du test ADF nécessite au préalable de choisir le nombre de retard p* à introduire dans la régression afin de prendre en compte l autocorrélation des perturbations et donc de blanchir les résidus, on parle de correction paramétrique 2. Les valeurs critiques à 1% pour le modèle (1) et (2) sont successivement : -2.58, -3.51, *** dénote la significativité au seuil de 1% 14

Table 1 Résultats des tests ADF Variables Modèle Nombre de ADF en ADF en première retenu retards P* niveau différence INV Modèle 1 4-1.12-6.60*** IPO Modèle 2 1-4.68*** - M&A Modèle 1 0-1.03-12.16*** de l autocorrélation. Plusieurs méthodes sont possibles pour effectuer ce choix, nous utilisons directement la fonction disponible dans Eviews pour déterminer le nombre de retards par la minimisation des critères d information d Akaike et de Schwartz (annexe A.4). Les résultats figurant dans le tableau ci-dessus nous permettent de confirmer notre intuition concernant la non stationnarité de la série INV et la série M&A et la stationnarité de la série IPO. On rejette donc l hypothèse H0 de non stationnarité pour la série IPO au seuil de 1%. Mais, on ne peut pas la rejeter pour les séries INV et M&A, il s agit donc de séries intégrées. Afin de déterminer leurs ordres d intégrations, on procède à l application du test ADF en adoptant la même stratégie séquentielle sur chaque série en différence premières. En comparant les valeurs calculées de la statistique ADF aux valeurs critiques au seuil de 1%, on rejette l hypothèse nulle de non stationnarité pour la série INV et la série M&A. On en déduit que INV et M&A sont stationnaires, c est-àdire intégrées d ordre 0. Il s ensuit que les deux séries INV et M&A sont intégrées d ordre 1 puisqu il faut les différencier une fois pour les rendre stationnaires. 3.2 La cointégration entre la série INV et M&A La théorie de la cointégration a été introduite par Granger (1981) afin d étudier les séries temporelles non stationnaires. Ainsi que nous l avons précédemment mentionné, les deux séries INV et M&A sont non stationnaires et intégrées d ordre 1. Si on applique les méthodes habituelles de l économétrie à des séries non stationnaires, on risque d avoir une régression fallacieuse. Une procédure très fréquente utilisée pour éviter ce problème consiste à différencier les séries non stationnaires afin de les rendre stationnaires. Cette opération de différenciation a cependant pour limite essentielle de masquer les propriétés de long terme des séries étudiées puisque les relations entre les niveaux des variables ne sont plus considérées. La théorie de cointégration permet de pallier ce problème en offrant la possibilité de spécifier des relations stables à long terme tout en analysant conjointement la dynamique de court terme des variables considérées. 15

Figure 5 La relation de long terme entre la série INV et M&A. La Figure (5) nous représente l évolution conjointe des deux séries INV et M&A, les deux séries semblent être caractérisées par une tendance commune sur l ensemble de la période. Ainsi, dans la mesure où les deux séries sont non stationnaires et intégrées du même ordre et qu elles exhibent une évolution similaire, il est légitime de supposer qu elles sont cointégrées. L idée sous- jacente est la suivante, à court terme, INV et M&A peuvent avoir une évolution divergente (elles sont toutes les deux non stationnaires), mais elles vont évoluer ensemble à long terme. Il existe donc une relation stable à long terme entre les deux séries INV et M&A. Nous nous proposons de vérifier cette intuition par l application du test de cointégration d Engle et Granger. 3.2.1 Test de cointégration d Engle et Granger Selon Engle et Granger (1987), tester la cointégration entre les deux séries INV et M&A, revient à opérer un test de racine unitaire sur les résidus de la relation statique ou de long terme. Concrètement, il s agit dans un premier temps d estimer par la méthode des MCO la relation de long terme entre INV et M&A (équation 1). Tester dans un deuxième temps la stationnarité des résidus issue de 16

Table 2 Résultats du test de Cointégration INV-M&A Statistique ADF Valeur critique Modèle sans constante ni tendance -4.97-3.90 cette régression par un test de Dickey-Fuller Augmenter (ADF). Il est important de souligner que ce test d absence de cointégration est basé sur les résidus estimés et non pas sur les vraies valeurs. Les valeurs critiques de Dickey et Fuller ne sont plus utilisables. Il convient dès lors d utiliser les valeurs critiques tabulées par Engle et Yoo (1987) ou par Mackinnon (1991). INV t = α + β.m&a t + Z t (1) Si les résidus sont non stationnaires, l équation estimée (1) est une régression fallacieuse, dans le cas contraire, on parle de relation de cointégration. Afin de discriminer entre ces deux possibilités, on applique le test ADF sur la série résiduelle avec P* égal à 2. A cette fin, on suit la stratégie précédemment présentée à savoir, l estimation d un modèle avec tendance et constante, puis l estimation d un modèle avec constante sans tendance, si cette dernière n est pas significative et enfin un modèle sans constante ni tendance si ni l une ni l autre ne se sont avérées significatives. L application de cette stratégie nous conduit à retenir le modèle sans tendance ni constante. Pour conclure le test on va comparer la valeur calculée de la statistique ADF (Table 2) aux valeurs critiques de Mackinnon (1991). La valeur calculée étant égale à -4.97, elle est inférieure à la valeur critique au seuil de 1%, en conséquence, l hypothèse nulle de non stationnarité de la série résiduelle est rejetée au seuil de 1%. Les deux séries INV et M&A sont donc cointégrées, ce qui implique l existence d une relation stable à long terme entre les deux séries qui peuvent avoir une évolution divergente à court terme si elles sont soumises à des facteurs saisonniers différents. Cependant, ceci ne durera pas car des forces économiques, telle que le marché ou les interventions étatiques, devraient les ramener à la situation d équilibre. La cointégration des deux séries implique aussi la possibilité de représenter la relation entre les deux séries par un Modèle à Correction d Erreur. 3.3 Le Modèle à Correction d Erreur Lorsque des séries sont non stationnaires et cointégrées, il convient d estimer leurs relations au travers d un Modèle à Correction d Erreur. Engle et Granger (1987) ont démontré que toutes les séries cointégrées peuvent être représentées 17

par un ECM (Error Correction Model). Le Modèle à Correction d Erreur (ECM) nous permet de modéliser les ajustements de court terme qui conduisent à une situation d équilibre de long terme. Il s agit d un modèle dynamique qui intègre à la fois les évolutions de court terme et de long terme des variables. Dans notre cas, l estimation d un ECM revient à l estimation de l équation suivante par les moindres carrés ordinaires : INV t = β. M&A t + δ. resid t 1 + µ t (2) Avec µ est un bruit blanc et resid t 1 est le résidu retardé issu de l estimation de la relation de cointégration entre les deux séries INV et M&A (1). Le coefficient δ représente la force de rappel vers l équilibre de long terme, donnée par la relation de cointégration. Ce coefficient doit être significativement négatif pour que le mécanisme à correction d erreur existe. Le modèle à correction d erreur décrit ainsi un processus d ajustement et combine deux types de variables. Des variables en différence première (stationnaires) qui représentent les fluctuations de court terme, et des variables en niveau, ici la variable qui assure la prise en compte du long terme. Le résultat de l estimation est donné par : INV = 46, 12 M&A 0, 08 resid t 1 (3) Les résultats figurant dans l équation estimée 3 montrent que la série INV dépend positivement du nombre du fusion-acquisition (M&A) 3. Le coefficient de la force de rappel est négatif (-0.08) et significativement différent de zéro. Il existe donc bien un mécanisme à correction d erreur avec une vitesse de convergence de 8% : à long terme, les écarts ou déséquilibres entre les deux variables INV et M&A se compensent, conduisant les variables à évoluer ensemble. En effet, tant que le modèle est sur un sentier d équilibre les séries INV et M&A seront très colinéaires et le terme resid t 1 ne va pas beaucoup varier, on pourra même le confondre avec le terme constant. Mais, dès que l on s écarte de la situation d équilibre, les niveaux des deux séries INV et M&A vont diverger temporairement. Si INV est supérieur à son niveau d équilibre, le terme resid t 1 est positif mais comme δ est négatif, le terme INV va être rappelé vers le bas. On va avoir donc une correction de l erreur, d où le nom de Modèle à Correction d Erreur. 3. Les variables étant toutes stationnaires, nous pouvons utiliser les tests de Student, tous les coefficients sont significativement différents de 0. Les statistiques calculées de student sont données successivement par 2,38 et -2,42 18

3.4 Une analyse par la causalité Le but de cette section est de déterminer s il existe des liens de causalité telle qu ils ont été proposé par Granger (1969) entre le dynamisme du capital-risque mesuré par le volume des investissements en capital-risque et ses deux modes de sorties les plus privilégiés (IPO et M&A). Si ces liens existent, il est particulièrement intéressant de déterminer dans quel sens ils vont. Il est extrêmement passionnant de se lancer dans ce type de lien sur de telles variables car d après nos larges recherches, rien n a encore été publié à ce sujet. 3.4.1 La Non-Causalité au sens de Granger Granger (1969) a introduit une notion de non-causalité qui repose sur les propriétés de prévision des modèles VAR. La causalité au sens de Granger énonce qu une série cause une autre série si la connaissance du passé de la première améliore la prévision de la seconde. L idée est que si une variable X affecte une variable Y, X sera utile pour améliorer la prévision de Y. Expliqué d une manière synthétique, il s agit simplement de déterminer si une variable X cause selon Granger une variable Y en observant tout d abord dans quelle mesure les valeurs passées de Y arrivent à expliquer la valeur actuelle de Y et de voir par la suite l amélioration de la prévision grâce à la prise en compte de valeurs retardées de la variable X. Y peut être considérée comme causée selon Granger par X si la variable X est déterminante dans la prévision de Y ou encore, d une manière équivalente, si les coefficients des valeurs retardées de la variable X sont significativement différents de zéro. On dit donc que la variable X cause Y au sens de granger si la prévision de Y est améliorée lorsque l information relative à X est incorporée dans l analyse. Pour autant, le fait d affirmer que X cause Y au sens de Granger ne signifie pas que Y est la conséquence de X, la causalité au sens de Granger est différente de la notion de causalité du langage courant. l affirmation X cause Y n est que l abréviation de celle, plus précise mais plus longue : X contient des informations utiles pour prédire Y (dans le sens linéaire des moindres carrés) en plus du passé historique des autres variables du système Francis et Diebold (2001). Tester l hypothèse d absence de causalité de X vers Y, revient à effectuer un test de restriction sur les coefficients de la variable X dans la représentation VAR (annexe A.5). Il est important de spécifier que ce test se fait selon l hypothèse que les résidus suivent asymptotiquement une distribution du Fisher. Cela peut être le cas si les résidus sont des bruits blancs ; ceci revient donc à dire que les séries considérées doivent être des séries stationnaires. Il est aussi important de signaler qu une double causalité n est jamais à exclure lors de ce test. 19

3.4.2 Résultats du test de non-causalité au sens de Granger Afin d étudier la possibilité de causalité au sens de Granger entre les couples de variables suivants : ( INV, IPO) et ( INV, M&A) nous avons appliqué le test de non causalité de Granger à l aide d un test de Fisher classique de nullité de coefficients, équation par équation. Les résultats obtenus, pour un nombre de retard P* égal à 4 (annexe A.5), sont présentés dans la Table 3. Table 3 Test de non causalité au sens de Granger H0 F-Stat Prob Décision H01 : M&A ne cause pas 3.626 0.007 Rejeter H0 INV au sens de Granger H02 : IN V ne cause pas 0.422 0.792 Ne pas rejeter H0 M&A au sens de Granger H03 : IPO ne cause pas 0.906 0.462 Ne pas rejeter H0 INV au sens de Granger H04 : IN V ne cause pas 1.390 0.240 Ne pas rejeter H0 IPO au sens de Grange Concernant l hypothèse nulle (H01) selon laquelle le nombre d opérations de fusion-acquisitions ne cause pas au sens de Granger le volume des investissements en capital-risque. La probabilité associée est de 0.007 : elle est inférieure au seuil statistique de 1%. On rejette donc l hypothèse nulle au seuil de 1%, le nombre d opérations de fusion-acquisitions des sociétés soutenues par le capital-risque cause au sens de Granger le volume des investissements. A l inverse, on constate que l hypothèse nulle (H02) selon laquelle la série INV ne cause pas M&A est acceptée au seuil de 1% (Prob 0.01), il s agit donc d une causalité unidirectionnelle. Le test de non causalité de Granger nous confirme ainsi la liaison qui existe entre la série INV et la série M&A démontrée par le test de cointégration. Les résultats de test concernant l hypothèse (H03) selon laquelle le nombre d introduction en Bourse ne cause pas au sens de Granger le volume des investissements en capital-risque nous contraint à l accepter. On va également accepter l hypothèse (H04) selon laquelle la série INV ne cause pas au sens de Granger la série IPO, on peut ainsi suggérée une certaine indépendance entre les deux séries. 20

4 Conclusion Au total, même si théoriquement la forte liaison entre le dynamisme de capitalrisque et les IPO n est pas réfutée, en revanche notre travail ne nous permet pas de la valider. C est aussi le cas d un certain nombre de travaux empiriques qui se sont intéressés à cette relation. Gompers et Lerner (1998) qui n ont pas exclu le rôle très important des IPO dans la création de la liquidité pour le secteur du capital-risque, ne retrouvent aucun effet significatif dans leur régression. Jeng et Well (2000) considèrent les IPO comme le moteur le plus puissant du dynamisme de capital-risque, mais leurs tests économétriques ne vont valider la relation positive existante entre l activité de capital-risque et le nombre d IPO que pour les stades les plus avancé du capital-risque (la phase d expansion) : IPO have ne effect on early stage venture capital investing across countries, but are a significant determinant of later stage venture capital investing across countries Jeng et Well (2000). Notre résultat va dans le même sens, accepter l hypothèse selon laquelle le nombre d introduction en Bourse ne cause pas au sens de Granger le volume des investissements en capital-risque revient à accepter que tous les coefficients des valeurs retardées de la variable IPO sont non significatifs dans la représentation VAR. La variable IPO ne contient donc pas d informations utiles pour prédire les investissements en capital-risque. les montants investis aux USA dans le capitalrisque semblent sêtre sensiblement déconnectés de l évolution des marchés financiers. Pour la deuxième modalité de sortie (M&A), le test réalisé nous a permet de valider l hypothèse de cointégration entre les investissements en capital-risque (INV) et le nombre de fusion-acquisition des sociétés soutenues par le capitalrisque. Ainsi, à court terme, les deux séries INV et M&A peuvent avoir une évolution divergente (elles sont toutes les deux non stationnaires), mais elles vont évoluer ensemble à long terme. Il existe donc une relation stable à long terme entre les deux séries qu on va modéliser par un Modèle à Correction d Erreur qui nous montre que la série INV dépend positivement du nombre du fusion-acquisition (M&A) et qu il existe bien un mécanisme à correction d erreur : à long terme, les écarts ou déséquilibres entre les deux variables INV et M&A se compensent, les deux séries vont présenter une tendance commune. Le test de non causalité de Granger nous permet de valider l hypothèse selon laquelle le nombre d opérations de fusion-acquisitions des sociétés soutenues par le capital-risque cause au sens de Granger le volume des investissements. Ce test nous confirme ainsi la liaison qui existe entre la série INV et la série M&A. 21

A Annexes A.1 Figure 6 Les investissements en capital-risque durant les années soixante-dix et quatre-vingt. 22

A.2 Corrélograme des séries étudiées Figure 7 Corrélogramme de la série IPO. Figure 8 Corrélogramme de la série INV. 23

Figure 9 Corrélogramme de la série M&A. A.3 Les trois specifications du test ADF Les trois modèles utilisés pour développer le test ADF (1979) sont les suivants : 4 Y t = φy t 1 + c + B.t + λ i Y t i + υ t (4) i=1 4 Y t = φy t 1 + c + λ i Y t i + υ t (5) i=1 4 Y t = φy t 1 + λ i Y t i + υ t (6) On teste l hypothèse nulle φ = 0 contre l hypothèse alternative φ 0 i=1 A.4 Choix optimal des retards pour le test ADF L application du test ADF nécessite la détermination du nombre de retards P* à introduire dans la régression du test pour blanchir les résidus. Le choix de p* est très important dans la mesure où l introduction d un nombre insuffisant de retards peut affecter la qualité du test. Pour les différents tests, on a retenu le nombre de retards qui minimise les critères d informations (Akaike et Schwarz), pour les cas divergents, on a retenu le retard correspondant à la dernière autocorrélation partielle significativement différente de zéro. Tout en vérifiant dans tous les cas notre choix en testant l absence de l autocorrélation des résidus (test 24

de Ljung- Box). Si les résidus correspondent à un bruit blanc, on suppose que le modèle est bien spécifié, si non, on augmente le nombre de retards pour corriger l autocorrélation des résidus. Pour la série INV, quel que soit le modèle retenu, on a constaté que le critère d Akaike conduit à un choix de retard optimal P* = 4, tandis que le critère de Schwartz conduit à P* = 4 pour le modèle 3 et à P* = 3 pour les deux autres modèles. On est donc ici en présence d une divergence de diagnostic quant à l utilisation de ces deux critères d information, ce qui arrive souvent dans la pratique. Dans ce cas, il est nécessaire de bien comprendre que l objectif de l introduction des termes retardés consiste à blanchir les résidus, c est à dire à contrôler l autocorrélation des innovations. Dès lors, on cherche la structure qui permet d atteindre cet objectif. On adopte donc ici un choix optimal de retard P* = 4 et nous vérifierons ex-post dans le modèle retenu que l introduction de quatre termes différenciés retardés a permis d éliminer totalement l autocorrélation des résidus. Pour la série M&A, quel que soit le modèle retenu, les deux critères d information conduisent à un choix de retard optimal P* = 3. Pour la série IPO, les deux critères d informations nous conduisent à choisir un retard optimal P* = 1. A.5 Test de causalité Tester la possibilité d une éventuelle causalité au sens de Granger entre les séries étudiées INV, M&A et IPO nécessite au préalable l estimation d un modèle VAR (P) (Vector Autoregressive Model). P* est le nombre de retards qu il convient de retenir pour assurer que les résidus du modèle sont des bruits blancs. Afin de déterminer l ordre P* du processus VAR, on peut utiliser des critères d information. On estime un certain nombre de modèles VAR pour un ordre allant de 0 à h où h est le retard maximum (ici 8). On retient le retard P*=4 qui minimise le maximum de critères. Les trois critères d information traditionnels retenu sont le critère d Akaike, de Hannan et Quinn et de Schwarz. Soit le modèle VAR(4) pour lequel les variables INV, M&A et IPO sont stationnaires et ε 1t, ε 2t et ε 3t des bruits blancs : 4 4 4 INV t = c 1 + α i INV t i + β i IP O t i + δ i M&A t i + ε 1t (7) i=1 i=1 i=1 25