La part des salaires dans la valeur ajoutée en France : une approche macroéconomique



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Transcription:

PARTAGE DU REVENU La art des salaires dans la valeur ajoutée en France : une aroche macroéconomique Céline Prigent * * Céline Prigent aartient à la division Croissance et olitiques macroéconomiques de l Insee. L auteur tient à remercier our leurs remarques et suggestions E. Dubois, S. Grégoir, G. Laroque, F. Maurel, G. de Monchy, B. Salanié et D. Temam, ainsi que L. Fauvet our son aide récieuse dans la construction des données. Les noms et dates entre arenthèses renvoient à la bibliograhie en fin d article. La valeur ajoutée rerésente la richesse engendrée au cours du rocessus de roduction ar la mise en œuvre des facteurs de roduction, notamment le travail et le caital. Or, le artage de cette richesse entre salaires et rémunération du caital a fortement fluctué en France deuis la fin des années 60. Arès avoir sensiblement augmenté à la suite des accords de Grenelle en 968 et des chocs étroliers de la décennie 70, la art des revenus du travail a reculé au cours des années 80. Elle a retrouvé, deuis le début des années 90, un niveau roche de celui du début de la décennie 60. Une remière décomosition urement comtable met en évidence le rôle des chocs étroliers, au travers de la déformation des termes de l échange. Par ailleurs, une analyse théorique de ce rocessus suggère l influence ossible des coûts relatifs des facteurs (caital et travail), et donc, in fine, du taux d intérêt réel. Même si les résultats économétriques n aortent as tous une réonse tranchée, ils ne araissent as en contradiction avec cette analyse théorique : les chocs de termes de l échange auraient oussé à la hausse la art des salaires dans la valeur ajoutée en 974 et au début des années 80 et à la baisse au milieu de cette décennie. Dans une moindre mesure, les chocs de taux d intérêt l auraient également oussée à la baisse endant les années 80. En outre, l analyse économétrique met en évidence l influence de la conjoncture, les hases de forte croissance L a valeur ajoutée rerésente la richesse engendrée au cours du rocessus de roduction ar la mise en œuvre des facteurs de roduction, notamment le travail et le caital. Le artage de cette richesse entre ces facteurs de roduction résulte de multiles interactions des agents et de leurs réactions aux chocs qui affectent l économie. Ainsi, l organisation de la roduction, l intégration du rogrès technique ou les modalités de rémunération du travail face, ar exemle, aux chocs étroliers doivent concourir à l évolution du artage des salaires dans la valeur ajoutée. De fortes fluctuations sur les 30 dernières années... On retient en général de l évolution de la art des salaires dans la valeur ajoutée sa forte décrue deuis le début des années 80. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 73

Ceendant, cette vision n est que artielle : cette forte baisse a été récédée, à la fin des années 60 et au cours de la décennie 70, ar une augmentation tout aussi imortante.... mais un niveau aujourd hui roche de celui des années 60 Sur le cham des seules sociétés rivées (sociétés et quasi-sociétés - SQS - hors grandes entrerises nationales - GEN -), ces fluctuations ont été de l ordre de 0 oints sur les trente dernières années (cf. grahique I). De 959 à 968, la art des salaires dans la valeur ajoutée a oscillé entre 58 % et 60 %. Ont ensuite suivi trois hases de hausse : en 968, à la suite des accords de Grahique I Part des salaires dans la valeur ajoutée Cham : sociétés et quasi-sociétés hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. Grahique II Part des salaires dans la valeur ajoutée Grenelle, en 974-975 et 980 arès les deux chocs étroliers. Ce n est que dans la remière moitié de la décennie 80 que cette tendance s inverse : la baisse se oursuit alors sur une dizaine d années. Au total, arès être restée à un niveau suérieur à 65 % endant une dizaine d années (de 975 à 985), la art des salaires dans la valeur ajoutée a retrouvé, au début de la décennie 90, un niveau roche de celui du début des années 60. Un constat emirique indéendant du cham d étude Pour mesurer l évolution de la art des salaires dans la valeur ajoutée, le cham d étude le lus arorié araît être celui des seules sociétés du secteur rivé, c est-à-dire hors entrereneurs individuels dont le traitement statistique ose roblème, et hors GEN, dans la mesure où les rix y sont administrés. On exclut également les institutions financières et les entrerises d assurance, dont les notions de roduction, et ar contrecou de valeur ajoutée, ont un sens très différent de celui qu elles ont dans les entrerises non financières. Ceendant, le mouvement général se retrouve à eu rès, quel que soit le cham d étude. Ainsi, l introduction des grandes entrerises nationales ne modifie as significativement la forme de la courbe (cf. grahique II). Celle des entrereneurs individuels imose, elle, un traitement sécifique. En effet, la majeure artie de leur valeur ajoutée est comtabilisée en excédent brut d exloitation des entrerises. Ce dernier Grahique III Part des salaires dans la valeur ajoutée Source : Comtabilité nationale, Insee. Cham : sociétés, quasi-sociétés et entrerises individuelles hors agriculture. Source : Comtabilité nationale, Insee. 74 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

contient une grande artie de la rémunération qu ils consacrent à leur activité roductive. La art des salaires dans la valeur ajoutée est donc lus faible, lorsque l on étend le cham aux entrereneurs individuels (EI) (cf. grahique III). Par ailleurs, l écart des séries avec et sans entrereneurs individuels se comble sur la ériode d étude, traduisant la tendance à la baisse de la art de cette catégorie dans l emloi total deuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Néanmoins, our des raisons de disonibilité statistique, on sera arfois contraint de raisonner sur un cham lus large que les seules sociétés rivées, et englobant les entrereneurs individuels (en excluant le secteur de l agriculture, dont les entrereneurs individuels ont un rofil très différent, en terme de rémunération du facteur travail, de celui des salariés du secteur marchand non financier). Pour analyser la art des salaires sur ce cham, une correction, dite «our salarisation croissante», doit donc être aortée. Elle consiste à réaffecter conventionnellement un revenu du travail aux entrereneurs individuels, basé sur le salaire moyen des salariés (cf. encadré ). Cette correction a our résultat d augmenter la art des salaires dans la valeur ajoutée sur le cham SQS-EI non agricoles, ar raort à celle calculée sur les séries brutes, et de la ramener à des niveaux très comarables à ceux des chams SQS et SQS hors GEN. Elle rend ainsi lus aarent son retour, au début des années 90, vers les niveaux des années 60. Un examen visuel de l évolution de la valeur ajoutée en France ermet de fournir un remier diagnostic, quant aux déterminants de la art des salaires dans la valeur ajoutée : les deux remiers chocs étroliers s accomagnent d un fort mouvement à la hausse, qui ne se comense intégralement que lors de la longue hase de baisse de la décennie 80, reflet tant du contrechoc étrolier que de la olitique de désinflation cométitive (cf. grahiques I à III). Deuis le début de la décennie 90, quels que soient les chams étudiés, la art des salaires dans la valeur ajoutée est à eu rès stabilisée, à un niveau très roche de celui du début des années 60. Si on raisonne au coût des facteurs, le taux de marge, c est-à-dire la rémunération du facteur caital, est l exact comlémentaire à 00 % de la art des salaires dans la valeur ajoutée (cf. encadré ). Lorsque, comme c était le cas jusqu à maintenant, on raisonne au rix de marché, il faut ajouter aux rémunérations de ces deux facteurs les imôts à la roduction nets des subventions our obtenir la valeur ajoutée. Néanmoins, que le taux de marge soit calculé au rix de marché ou au coût des facteurs, son rofil sur les 30 dernières années résente des évolutions oosées à celles de la art des salaires : il a ainsi fortement décru dans le courant des années 70, et n a recommencé à croître que dans la décennie 80, our se stabiliser au début des années 90. Desfluctuationslusamles dans l industrie que dans les services Les fluctuations du artage de la valeur ajoutée ont été lus grandes dans l industrie. De lus, la baisse de la art des salaires dans la valeur ajoutée s y est oursuivie au cours du dernier cycle, contrairement à ce qui aaraît dans le secteur non industriel (cf. grahique IV). Ceendant, une certaine rudence est de mise dans l interrétation de ces évolutions infra-sectorielles. En effet, au travers du mouvement d externalisation d une artie des activités des branches manufacturières vers celles des services deuis le début des années 80, les entrerises du secteur industriel ont rogressivement sous-traité un certain nombre de leurs activités annexes (nettoyage, gardiennage, comtabilité, etc.). Or ces activités, relativement intensives en travail, se caractérisent ar une art des salaires dans la valeur ajoutée lutôt suérieure à la valeur Grahique IV Part des salaires dans la valeur ajoutée ar branche* * On ne disose as des données ermettant de calculer la art des salaires à ce niveau de désagrégation au-delà de 992. Cham : activité roductive hors agriculture, services financiers et services non marchands. Source : Comtabilité nationale, Insee. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 75

moyenne dans l économie. Il est toutefois très difficile, à l aide de ces seuls chiffres agrégés, de distinguer, dans l évolution du artage de la valeur ajoutée de chaque secteur, ce qui est dû à ses évolutions rores et ce qui est la conséquence de ce hénomène d externalisation. L évolution différenciée de ces deux secteurs n est as, our autant, un facteur imortant d exlication des fluctuations de la art des salaires dans la valeur ajoutée au niveau agrégé, même si leur oids relatif a beaucou évolué deuis trente ans (la art des services dans la valeur ajoutée du secteur marchand non agricole non financier est assée de 54 % en 970 à 65 % en 997). Une décomosition comtable de l évolution de la art des salaires, au niveau agrégé, en deux termes, d un côté, la art imutable aux changements de structure de la valeur ajoutée, et de l autre, celle due aux modifications de la art des salaires rores à chaque secteur, montre que les effets de structure sont négligeables. Le basculement d une artie de la valeur ajoutée vers le secteur des services n a as généré, à lui seul, d évolution de la art des salaires dans l économie rise dans sa totalité. Encadré LE PARTAGE DE LA VALEUR AJOUTÉE ET LES SOURCES DE COMPTABILITÉ NATIONALE La valeur ajoutée aurixdumarché se décomose en trois termes : une remière art est consacrée au aiement des imôts nets, à savoir les imôts dits «liés à la roduction et à l imortation» moins les subventions d exloitation touchées ar les firmes. La deuxième rémunère le facteur travail, tel qu il est ayé ar les entrerises, et comrend donc les salaires nets ainsi que les cotisations sociales. La troisième art, le taux de marge, sedéduit ar solde, et corresond à la rémunération du facteur caital (Cette et Mahfouz, 996). Les données utilisées, issues du comte d exloitation des sociétés et quasi-sociétés, sont : - R0 : la masse salariale -R0x effectiftotal : la masse salariale une fois effectif salarié effectuéelacorrectiondite«oursalarisationcroissante». Cette correction consiste à réattribuer aux non-salariés un salaire fictif estimé ar le salaire moyen des salariés duchamd étude, dans la mesure où, dans les données de la Comtabilité nationale, une majeure artie de la rémunération du travail des entrereneurs individuels est comtabilisée enexcédent brut d exloitation. - R20 : les imôts liés à la roduction et à l imortation. - R3 : les subventions d exloitation -N2 :l excédent brut d exloitation La valeur ajoutée au rixdemarché, N, est obtenue comtablement ar : N R0 x N2 R0 x effectif total effectif salarié effectif non salarié effectif salarié R20 R3 Par ailleurs, our calculer la art des salaires dans la valeur ajoutée, ilestnécessaire de tenir comte du déveloement des mesures d aide à l emloi sous forme d allégements des charges sociales et de rimes à l embauche, en articulier sur les bas salaires. Ces sommes sont, en effet, enregistrées, en base 80 de la Comtabilité nationale, en subventions d exloitation (R322 : subventions sur rémunérations) et non directement en allégements des charges salariales, alors qu elles ont bien our effet de diminuer le coût du travail dans le rocessus de roduction. Il convient donc de les soustraire de la rémunération du travail dans le calcul de la art des salaires dans la valeur ajoutée. On obtient alors la art des salaires dans la valeur ajoutée aurixdemarché, corrigée de la non-salarisation, : R0 x effectiftotal effectif salarié R322 N On eut également raisonner au coût des facteurs (), c est-à-dire sur la valeur ajoutée imôts exclus. Dans ce cas, il faut retirer les imôts nets de la valeur ajoutée aurixdemarché. La valeur ajoutée au coût des facteurs est égale à N R20 R3. La art des salaires dans la valeur ajoutée aucoût des facteurs est alors : R0x effectif total effectifsalarié R322 N R20 R3 Ce n est que dans un calcul au coût des facteurs que le taux de marge (rémunération du facteur caital) est le strict comlémentaire à de la art des salaires.. Ce qui n a as été retenu ici, mais le constat général résenté ne s en trouve as significativement modifié. 76 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

En effet, d une art, la différence entre les niveaux des arts des salaires dans l industrie et dans les services ne déasse jamais 5 oints sur la ériode : une modification de 0 oints du oids des services dans la valeur ajoutée ne eut induire une hausse de la art des salaires dans l ensemble de l économie de lus d un demi oint. D autre art, l évolution de la structure de la valeur ajoutée, même si elle conduit sur la totalité de la ériode à une hausse de 0 oints du oids des services dans l économie, ne se Tableau Les subventions sur rémunérations Valeur (en millions de francs courants) Part dans la valeur ajoutée du cham (en %) Moyenne annuelle 980-989 3 727 0,2 990 3 598 0, 99 5 555 0,2 992 7 4 0,2 993 020 0,3 994 20 832 0,6 995 30 252 0,8 996 58 349,5 997 69 793,8 Cham : sociétés et quasi-sociétés, hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. Grahique V Effet des subventions sur rémunérations sur la art des salaires dans la valeur ajoutée Lecture : la courbe en trait gras rerésente la art des salaires dans la valeur ajoutée, une fois rises en comte les subventions sur rémunérations liées aux olitiques de l emloi. La courbe en trait fin rerésente cette art avant rise en comte de ces subventions, c est-à-dire sans soustraire des charges sociales atronales le montant de ces subventions. Ce calcul montre que la baisse deuis 994 est, en artie, liée aux olitiques de l emloi. Cham : sociétés et quasi-sociétés hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. fait que lentement, la variation moyenne de ce oids des services étant de l ordre d un demi oint ar an. L effet des olitiques de l emloi deuis 993 Deuis 993, les exonérations de charges sociales et les aides à l embauche accordées aux firmes ont fortement rogressé (cf. tableau ). Elles intègrent, en articulier, les allégements de charges sociales sur les bas salaires, mais également les disositifs concernant les contrats de qualification et les aides à l embauche des arentis ou des chômeurs de longue durée. L ensemble de ces mesures induit une moindre évolution de la rémunération du facteur travail, qui se retrouve dans le artage de la valeur ajoutée. Ainsi, deuis 993, la art des salaires dans la valeur ajoutée, qui intègre les cotisations sociales, semble être à nouveau légèrement inscrite à la baisse : elle était de 6 % en 993 et s établit à 58 % en 997 (). Le mouvement de baisse est ceendant moins accentué que endant la décennie 80. De lus, si on ne rend as en comte ces subventions sur rémunérations, la art s est stabilisée autour d une valeur de 60 % sur l ensemble des années 90 (cf. grahique V). Une remière aroche comtable Un remier tye d analyse eut être mené à un niveau urement comtable (cf. encadré 2). Il consiste à décomoser la art des salaires dans la valeur ajoutée en, d un côté, l écart entre le salaire réel déflaté du rix de consommation et la roductivité aarente du travail, et de l autre, les termes de l échange. La art de la rémunération du travail reste stable dès lors que la rémunération réelle du travail, mesurée ar raort au rix de valeur ajoutée (otique de l entrerise) évolue comme la roductivité aarente du travail. Ceendant, du oint de vue des ménages, le ouvoir d achat se calcule ar référence au rix à la consommation. Aussi, avec cette définition usuelle, une évolution du ouvoir d achat des salaires en hase avec la roductivité aarente du travail. Les données relatives aux années 995 à 997, issues de la Comtabilité nationale, ne sont as définitives. Elles sont suscetibles d évoluer, notamment our la dernière année. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 77

n assure une stabilité de la art des salaires que si, ar ailleurs, les rix à la consommation et de valeur ajoutée ont la même évolution. Une évolution différente du rix à la consommation et de celui de la valeur ajoutée est, en général, le reflet d une modification notable des termes de l échange, notamment suite aux chocs étroliers ou aux chocs sur la TVA, qui affectent lus vite le rix à la consommation que celui de la valeur ajoutée. La décomosition récédente est uniquement comtable. Si elle souligne l effet imortant à court terme des chocs étroliers au travers de l évolution du rix à la consommation ar raort au rix de valeur ajoutée, elle ne rend, en aucun cas, en considération l influence otentielle des chocs étroliers sur la structure de l économie française, notamment sur la croissance de long terme, qui a également u avoir un imact sur le artage de la valeur ajoutée. On ne met donc en évidence ici que l imact direct des chocs étroliers, là où l analyse économétrique rendra en comte tous les mécanismes ar lesquels l évolution des rix relatifs de l énergie a u influencer le artage de la valeur ajoutée. En outre, la décomosition comtable conduit à donner un rôle central à l écart entre le salaire réel et la roductivité aarente du travail. Or, si cette décomosition a un sens économique à court terme, dans la mesure où ces grandeurs sont à cet horizon largement indéendantes, il n en est as de même à lus long terme. Ainsi, ar exemle, dans un monde où le caital est arfaitement mobile, le taux d intérêt réel est imosé ar l extérieur et détermine entièrement, à long terme, le coût réel du travail (ar le biais de la frontière des rix des facteurs, cf. infra);ex ost, les salaires se seront donc indexés sur les rix de la valeur ajoutée. De même, la roductivité du travail s ajuste, à moyen terme, à l évolution du coût relatif des facteurs et ne eut donc as être considérée, au-delà du très court terme, comme indéendante du salaire réel. Néanmoins, en déit de ces limitations, l aroche comtable ermet une remière lecture de l histoire économique sur les années 960-997. Des effets onctuels des chocs de termes de l échange Sur les trente dernières années, la dégradation des termes de l échange a oussé la art du re- Encadré 2 UNE DÉCOMPOSITION COMPTABLE DE LA PART DES SALAIRES DANS LA VALEUR AJOUTÉE Soit la art des salaires dans la valeur ajoutée. R x LT LS x P x VA où R est la masse salariale, LS est l effectif salarié, LT l effectif total, R x LT est la masse salariale une fois effectuée la LS correction our les non-salariés, P est le rix de la valeur ajoutée, VA la valeur ajoutée en volume. De manière classique, on décomose comtablement en deux termes : R LS x Pc W Pc x VA LT x VA LT x Pc P x Pc P où W est le coût du travail (salaire ar tête, y comris cotisations sociales des emloyeurs), Pc est le rix à la consommation. Le remier terme mesure l écart entre le salaire réel (déflaté du rix à la consommation et donc tel qu il est vu ar les ménages) et la roductivité aarente du travail. Cette décomosition, certes comtable, retrace néanmoins un mécanisme économique dans la mesure où les salaires aaraissent emiriquement rincialement déterminés, au moins à court terme, ar les rix à la consommation lutôt que ar les rix de valeur ajoutée. Le second terme est une mesure des variations des termes de l échange, dans la mesure où les rix d imortation rentrent dans la formation des rix de consommation et les rix d exortation dans celle des rix de la valeur ajoutée. Ainsi, lorsque les rix du étrole montent, les rix à la consommation augmentent lus vite que ceux de la valeur ajoutée. 78 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

venu du travail à la hausse de + 2 % en 969 (dévaluation du franc), de + 2 % en 974 (remier choc étrolier), de + 4 % en 980-98 (choc dollar et deuxième choc étrolier) et notablement à la baisse de - 4,5 % en 985-986 (contre-chocs dollar et étrolier), comme le montre le raort entre le rix à la consommation et le rix de la valeur ajoutée (Pc/P) (cf. grahique VI). La remontée, en fin de ériode, du raort entre le rix à la consommation et celui de la valeur ajoutée est, en artie, imutable au relèvement des taux de TVA de l été 995. Les chocs de termes de l échange ou de taux de TVA ont donc exercé des effets onctuels imortants sur la art des salaires dans la valeur ajoutée. Ils ne sont, en revanche, as à même d exliquer directement l intégralité de la montée de la art des salaires dans la valeur ajoutée au cours des années 70, ni la totalité de la baisse corresondante de la décennie 80. Cette constatation, basée sur une décomosition comtable, ne signifie as our autant que les chocs étroliers n ont qu une resonsabilité modeste dans les fluctuations du artage de la valeur ajoutée ; en effet, leur influence eut avoir transité ar les autres éléments de la décomosition comtable, ce que tendra à confirmer l analyse économétrique (cf. infra). Grahique VI Décomosition comtable de la art des salaires dans la valeur ajoutée Lecture : la art des salaires dans la valeur ajoutée (courbe en trait gras) se lit comme le roduit du rix relatifdelaconsommation (courbe en trait ointillé) et de l écart entre le salaire réel et la roductivité aarente du travail (courbe en trait fin). Cham : sociétés, quasi-sociétés et entrerises individuelles hors agriculture, corrigées de la non-salarisation. Source : Comtabilité nationale, Insee. De cette remière analyse, il ressort que l écart entre le rix à la consommation et celui de la valeur ajoutée n a as été un facteur de déformation durable de la art des salaires. Plus récisément si, comme au cours des années 60 et au début de la décennie 70, la croissance du salaire réel avait été, en moyenne, en hase avec celle de la roductivité aarente du travail, la art du travail dans la valeur ajoutée n aurait enregistré que les effets des variations des termes de l échange et serait revenue à l issue du contre-choc étrolier de 986 à son niveau de 968 ou d entre les deux chocs étroliers. De 975 à 990, rémunération réelle du travail lus élevée que roductivité aarente Les grahiques VII font aaraître, en renant 970 comme année de base, les niveaux resectifs de la rémunération réelle du travail y comris les charges sociales des emloyeurs (courbe A), et de la roductivité aarente du travail (courbe B), de façon à mettre en évidence l origine de l écart entre le salaire réel et la roductivité (courbe C). Des années 60 jusqu au remier choc étrolier, la rémunération réelle du travail croît à eu rès en hase avec la roductivité et le choc salarial de 968 est absorbé dès l année suivante ar des gains de roductivité. L année 975 est marquée à la fois ar une forte hausse du ouvoir d achat du salaire réel et une stagnation de la roductivité. Il aaraît alors un écart imortant entre ces deux comosantes, de l ordre de 0 % ar raort à l année 970, et qui tarde à se réduire. Tout d abord, il semble que la formation des revenus du travail ne se soit adatée que très rogressivement au ralentissement des gains de roductivité. Le ralentissement de la croissance a sontanément déséquilibré les comtes sociaux. Les hausses de cotisations des emloyeurs, oérées dans la seconde moitié des années 70, ont freiné l ajustement qui s était oéré sur le salaire brut ar tête. À l inverse, lors du deuxième choc étrolier, il n aaraît as d écart entre le salaire réel et la roductivité. C est donc essentiellement la dégradation des termes de l échange qui ousse à la hausse, au début des années 80, la art de la rémunération du travail. À artir de 983, l écart entre rémunération réelle et roductivité, aaru en 975, se réduit our s annuler en quatre ans, ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 79

sous l effet notamment de la olitique de modération salariale. Au début de la décennie 90, le coût réel du travail évolue à nouveau à eu rès en hase avec la roductivité tendancielle. En revanche, deuis 993, l écart se creuse mais, cette fois-ci, du fait d une moindre rogression du coût ar raort à la roductivité. Sur les deux dernières années, 996 et 997 (données non définitives), le coût réel du travail au niveau agrégé semble même diminuer, en artie sous l effet des olitiques d aide à l emloi. La décomosition comtable constitue une remière descrition des évolutions observées. Néanmoins, d un oint de vue du choix de la firme, l analyse microéconomique nous enseigne que c est la roductivité marginale et non la roductivité aarente qui doit être égalisée au coût réel du travail. Afin de tenir comte exlicitement des choix roductifs, on déveloe un modèle théorique, comlété ar une étude économétrique, qui ermet de mettre en évidence les mécanismes macroéconomiques de formation du artage de la valeur ajoutée. Dans l analyse économétrique, les coûts réels des facteurs de roduction... L a formalisation théorique du rocessus de artage de la valeur ajoutée nécessite une rerésentation de la fonction de roduction agrégée, combinant à la fois le travail et le caital, voire les consommations intermédiaires. On suose également que les rendements d échelle sont unitaires, que le travail et le caital sont substituables. En revanche, les consommations intermédiaires sont considérées comme comlémentaires au caital. Dans la suite de l analyse, on ne retiendra que celles en énergie, eu égard à l imortance des variations de leur rix sur les trente dernières années.... comme déterminants arioride la art des salaires dans la valeur ajoutée Lorsque le coût relatif d un facteur évolue, les firmes sont amenées à modifier les roortions des différents facteurs rentrant dans le rocessus de roduction. Plus récisément, si le coût relatif d un facteur augmente de %, il sera moins utilisé, et ceci d autant moins que la substitution entre les facteurs ourra se faire lus facilement : l intensité relative de ce facteur dans le rocessus de roduction diminuera de %, où est l élasticité de substitution entre les facteurs. Si cette élasticité de substitution entre les facteurs est unitaire, il est otimal our les entrerises de modifier de % les roortions des facteurs de roduction, à la suite d une modificationde%durixrelatifdesfacteurs.la Grahiques VII Écart entre salaire réel et roductivité aarente du travail A - Salaire réel et roductivité aarente du travail B - Écart entre salaire et roductivité Cham : sociétés, quasi-sociétés et entrerises individuelles hors agriculture, corrigées de la non-salarisation. Source : Comtabilité nationale, Insee. 80 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

art des salaires dans la roduction sera alors constante, indéendante du coût d usage du caital, du salaire réel ou encore des rix des consommations intermédiaires. C est vrai, en articulier, lorsque la fonction de roduction agrégée de l économie eut être rerésentée ar une fonction de Cobb-Douglas. En effet, dans ce cas, le rogramme de maximisation de la firme la conduit à faire évoluer la roductivité aarente du travail roortionnellement au salaire réel, ce qui corresond à maintenir constante à l otimum la art des salaires dans la roduction. Les rix des facteurs n influeront sur la art des salaires dans la valeur ajoutée qu au travers du oids de cette dernière dans la roduction, oids qui fluctue avec la quantité d énergie utilisée ar unité de roduction : une hausse du rix relatif de l énergie, en augmentant la facture énergétique en art de roduction, réduit celle de la valeur ajoutée. Pour cette raison, un renchérissement de l énergie induit, dans ces conditions, une hausse de la art des salaires dans la valeur ajoutée. Plus généralement, si ces élasticités de substitution ne sont as unitaires (ar exemle, avec une fonction de roduction du tye CES, dans laquelle l élasticité de substitution entre les facteurs est constante mais non unitaire), tout choc affectant le coût relatif d un facteur entraînera des modifications simultanément de la art des salaires dans la roduction et celle de la valeur ajoutée. Il imorte alors d analyser les effets des chocs séarément sur la art des salaires dans la roduction, uis sur la art de la valeur ajoutée dans la roduction. Pour ce qui est de la art des salaires dans la roduction, une modification du coût relatif d un facteur n entraînera as, de la art de la firme, une modification de la même amleur de la quantité relative de ce facteur emloyée dans le rocessus de roduction. On se lacera dans le cas traditionnellement retenu, et confirmé ar l estimation emirique (cf. infra), d une élasticité de substitution entre les facteurs inférieure à l unité. Dans ce contexte, tout choc affectant le coût d un facteur doit entraîner une déformationdanslemêmesensdelaartdes revenus de ce facteur dans la roduction, uisque les réajustements sur les quantités utilisées ne contrebalancent as intégralement ceux sur les rix. Si les seuls facteurs de roduction sont le travail et un agrégat caital-énergie (cf. encadré 3), une hausse des salaires entraîne ainsi une hausse de la art des salaires dans la roduction. Néanmoins, lorsque les rendements d échelle sont constants, il existe une relation entre le coût réel des facteurs, dite «frontière des rix des facteurs». Par conséquent, comme les taux d intérêt et les termes de l échange sont largement imosés à l économie française, les salaires réels sont, en définitive, déterminés à long terme ar les rix des autres facteurs : une hausse du coût d usage du caital ou du rix de l énergie conduit à la baisse des salaires réels et, du fait de l élasticité de substitution inférieure à l unité, à une diminution de la art des salaires dans la roduction. Pour ce qui est de la art de la valeur ajoutée dans la roduction, une modification à la hausse du rix de l agrégat caital-énergie induira une substitution vers le travail et la quantité d énergie requise our roduire une unité de roduction diminuera. Dans le cadre d une hausse du coût d usage réel du caital, la art de la valeur ajoutée dans la roduction augmentera. En revanche, lors d un renchérissement de l énergie, la art de la facture énergétique dans la roduction croîtra et celle, comlémentaire, de la valeur ajoutée diminuera. Finalement, au niveau de la art des salaires dans la valeur ajoutée, une hausse du coût d usage du caital induira une diminution de la art du travail, tant arce que la masse salariale ramenée à la roduction baissera, que arce que la art de la valeur ajoutée augmentera. À l inverse, l effet d un renchérissement de l énergie sur la art des salaires dans la valeur ajoutée est ambigu. Toutefois, il devient ositif dès que l élasticité de substitution est suffisamment roche de. En effet, dans ces conditions, la art des salaires dans la roduction est ratiquement constante et l augmentation de la facture énergétique réduit la valeur ajoutée, en art de roduction. Des résultats contrastés our les tests économétriques de co-intégration Les analyses qui récèdent suggèrent que la art des salaires dans la valeur ajoutée déend, à long terme, des coûts réels des facteurs de roduction, notamment du rix relatif de l énergie : our ce dernier, l analyse théorique vient confirmer le résultat de l aroche comtable, quant au rôle des chocs étroliers dans l évolution du artage de la valeur ajoutée. Plus récisément, dans le cadre d une élasticité de substitution inférieure à l unité mais roche de cette valeur, le coût d usage réel du caital de- ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 8

Encadré 3 EXPLICITATION THÉORIQUE DU PARTAGE DE LA VALEUR AJOUTÉE On se lace dans le cadre d un rogrès technique neutre au sens de Harrod, c est-à-dire n affectant que la roductivité du travail. On considère que les facteurs de roduction caital et travail sont substituables, mais, qu en revanche, l énergie est une consommation intermédiaire comlémentaire au caital. Ces hyothèses sont résumées dans une fonction de roduction du tye : Q a. e. t. L b. Min K,d. E L élasticité desubstitutionentrelefacteurtravailetl agrégat caital-énergieest. où Y est la roduction, L l emloi, K le stock de caital et E les consommations intermédiaires en énergie, rerésente le rogrès technique, et d le coefficient de comlémentarité entre caital et énergie. Dans la mesure où on modélise, ici, la roduction et non la valeur ajoutée, le calcul de la art des salaires dans la valeur ajoutée imlique que l on retranche à la roduction le coût des consommations intermédiaires énergétiques : Part des salaires dans la valeur ajoutée = w L Y E E où w est le salaire, le rix de roduction et E le rix de l énergie. Dans le cadre de concurrence monoolistique, la firme tient comte de l élasticité de la demande qui lui est adressée aurixqu elle ratique : Y Y n P P où Y et P sont la demande totale et le rix moyen, nombre de firmes sur le marché. l élasticité de la demande au rix ( ), n le Elle maximise alors, sous la contrainte de la fonction de roduction, son rofit : P Y Y w L c K E E où c est le coût d usage du caital. Si l on aelle le taux de mark-u de la firme sur ses coûts marginaux à l équilibre symétrique (où P P ), et si on définit c c d E comme le rix de l agrégat caital-énergie, l égalisation de la roductivité marginale de chaque facteur (travail et agrégat caital-énergie) à son coût réel (au taux de mark-u rès) ermet d exrimer la art des salaires dans la valeur ajoutée en fonction de tous les coûts réels des facteurs : w L Y E E. d. E a e t. w b.! Néanmoins, les rix des facteurs (salaire réel, coût réel d usage du caital et rix relatif de l énergie) ne sont as indéendants à l otimum et sont reliés ar la frontière des rix des facteurs : c! a e t. w! b. c! 82 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

vrait influencer négativement la art des salaires dans la valeur ajoutée, tandis que le rix relatif de l énergie jouerait ositivement. Toutes les variables d intérêt sont intégrées d ordre (cf. tableau 2) : l étude de la relation à long terme entre ces variables nécessite donc de recourir aux techniques économétriques de cointégration. L existence de la «frontière des rix des facteurs» conduit à considérer les salaires réels comme endogènes d un oint de vue économétrique, et ainsi à rechercher une relation entre art des salaires dans la valeur ajoutée, taux d intérêt réel et rix relatif de l énergie. Pour tester la résence d une relation de co-intégration, on a utilisé la méthodologie d Engle- Granger, qui consiste à régresser la art des salaires du cham des SQS hors GEN sur ses éventuels déterminants de long terme en niveau. Le test corresond alors à un test de racine unité sur le résidu de cette régression : si l on rejette la racine unité dans les résidus, la combinaison estimée de la art des salaires et des variables exlicatives est stationnaire et on accete alors la résence d une relation de co-intégration. En remontant du début des années 60 jusqu à 996 (2) et en travaillant sur données annuelles, on ne arvient as à mettre en évidence de relation de long terme entre la art des salaires dans la valeur ajoutée, le rix relatif de l énergie et le taux d intérêt réel (cf. tableau 3). Toutefois, quand on ne disose, comme ici, que d un nom- 2. Le dernier oint disonible, relatif à l année 997, suscetible d être révisé, n a as été intégré dans l estimation. Par ailleurs, on eut ainsi mieux évaluer l adéquation ou l inadéquation du niveau observé ar raort à celui rédit ar le modèle sur cette année. Encadré 3(fin) Ainsi, la art des salaires dans la valeur ajoutée nedéend in fine que du mark-u,ducoût d usage réel du caital c ", du rix relatif de l énergie E et de l élasticité de substitution : w L Y E E b d. E. c. b b c!. c w L Y Y E E Y Lenumérateur decetteexression corresondant à laart des salaires dans laroduction et le dénominateur à la art de la valeur ajoutée dans la roduction. Lorsque tend vers, on retrouve le résultat obtenu avec une fonction de roduction Cobb-Douglas, à savoir que la art des salaires dans la roduction est constante. Les rix relatifs du caital et de l énergie ne jouent alors sur la art des salaires dans la valeur ajoutée qu au travers de la quantité d énergie consommée ar unité de roduction et donc du ratio (valeur ajoutée sur roduction). On a alors : w L Y E E b d. E b c. Par ailleurs, si on aelle # le taux de déclassement du caital, r le taux d intérêt nominal, a anticiée et I le rix de l investissement, on eut écrire :. c I r a # l inflation Cette exression montre le rôle du taux d intérêt réel dans la détermination du artage de la valeur ajoutée. Lorsque le taux d intérêt réel,etdonclecoût d usage du caital, augmente, et si l élasticité de substitution est inférieure à l unité, la art des salaires dans la valeur ajoutée baisse, tant arce que la art des salaires dans la roduction diminue que arce que le oids de la valeur ajoutée dans la roduction augmente. Au contraire, et si l élasticité de substitution est roche de l unité, la art des salaires dans la valeur ajoutée augmente lorsque le rix relatif de l énergie augmente. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 83

bre réduit d observations, ce test est eu uissant : il conduit tro souvent à rejeter la relation de long terme. Cotis et Rignols (998), en utilisant des données trimestrielles du troisième trimestre 972 au deuxième trimestre 995, ont été amenés à acceter l existence d une telle relation entre art des salaires, taux d intérêt réel (3) et termes de l échange (leur statistique de test vaut - 4,27 contre une valeur critique à 5 % de - 3,62). Comte tenu de cette divergence des résultats, on a cherché à quantifier l amleur du rôle éventuel des coûts des facteurs dans le long terme sur données annuelles, en retenant comme relation celle dont la statistique est la lus roche du seuil d accetation du test de cointégration. En corrigeant des effets d endogénéité (Stock et Watson, 993), un imact chiffré du taux d intérêt réel et du rix relatif de l énergie a u être évalué (our une descrition détaillée du calcul, cf. annexe I). La relation estimée est de la forme : log art 0,358 0,0094[r] 2,5 0,0907[log E ] 4,37 où «art» est la art des salaires dans la valeur ajoutée des SQS hors GEN, r le taux d intérêt nominal long déflaté de l inflation en termes de rix de roduction (en oints) et E,lerixrelatif de l énergie. Les chiffres entre arenthèses corresondent aux statistiques de Student. L estimation ermet de déduire le niveau imlicite de l élasticité de substitution (cf. encadré 4), estimée ici entre 0,9 et. Cette valeur est conforme aux évaluations effectuées sur les autres économies industrialisées (Blanchard, 997). En revanche, elle diffère des estimations directes de l élasticité de substitution, obtenues avec les équations de demande de facteurs dans les modèles macroéconométriques, qui ne s avèrent, elles, as significatives (BdF et al., 996). 3.Letaux d intérêt est calculé, ar Cotis et Rignols, à artir de la demi-somme des taux d intérêt à court et long terme, ris sur une moyenne mobile d un an et demi dans le futur. Tableau 2 Test de stationnarité des variables étudiées Statistique de Student Valeur critique à 5% (our 50 observations) Ordre d intégration Part des salaires dans la valeur ajoutée -,45-2, 93 Termes de l échange () -, 45-2, 93 Prix relatif de l énergie -, 67-2, 93 Taux d intérêt réel (2) -, 58-2, 93. Raort des rix d imortation aux rix d exortation, dans toute la artie économétrique. 2. Taux longs auxquels les firmes actualisent théoriquement leurs rojets d investissement, le déflateur est le rix de roduction. Lecture : test de Dickey-Fuller augmenté, avec deux retards. L estimation est effectuée sur 962-996. Ainsi, our la art des salaires dans la valeur ajoutée, la statistique de test vaut -,45, alors que la valeur critique du test à 5%est de - 2,93. Par conséquent, on accete l hyothèse nulle d existence d une racine unité et conclut que la variable est intégrée d ordre. Cham : sociétés et quasi-sociétés, hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. Tableau 3 Test d existence d une relation de long terme Relation entre art des salaires dans la valeur ajoutée et... Statistique de test d Engle-Yoo Valeur critique À 5% À 0 % Test de l existence d une relation... le taux d intérêtréel et le rix relatif de l énergie - 3,29-4, - 3,73 Refusé... le taux d intérêtréel et les termes de l échange - 2,90-4, - 3,73 Refusé Lecture : test de stationnarité des résidus de la relation cherchée, estimée en niveau sur la ériode 96-996. Les statistiques de test sont non standard et déendent du nombre d observations et de variables dans la relation. Les valeurs critiques sont tabulées dans Engle-Yoo (987). Ainsi, our la remière relation testée, la statistique de test vaut - 3,29 et la valeur critique à 5%vaut - 4, : on accete l hyothèse nulle de test, qui corresond à la résence d une racine unité dans le résidu de la relation estimée. Cette conclusion corresond à un rejet de l existence d une relation de long terme. Cham : sociétés et quasi-sociétés, hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. 84 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

Entre la fin de la décennie 70 et le début des années 90, la hausse maximale des taux d intérêt réels a été de l ordre de 5 oints. Selon l estimation, ce mouvement aurait conduit à long terme à une baisse de la art des salaires dans la valeur ajoutée, légèrement inférieure à 3 oints (cf. tableau 4). Par ailleurs, suite aux deux chocs étroliers, le rix relatif de l énergie a doublé. Ce renchérissement aurait, quant à lui, entraîné une hausse de l ordre de 5 oints de la art des salaires dans la valeur ajoutée, our une art initiale d environ 60 %. Il s agit dans les deux cas d effets à long terme, qui n ont donc as eu forcément le tems de se roduire intégralement. À ce titre, les résultats résentés sont des majorants, qui sont loin d être négligeables néanmoins. De lus, même si la relation de co-intégration ne eut as être accetée ar le test d Engle- Yoo sur données annuelles, le calcul des statistiques de Student, qui suivent des lois standard arès correction des effets d endogénéité, conclut à la significativité des coefficients des rix relatifs de l énergie et du taux d intérêt réel. Enfin, ne as retenir d imact à long terme des coûts relatifs aurait conduit à garder une art des salaires dans la valeur ajoutée constante à cet horizon. Cette otique se serait avérée incomatible avec le résultat trouvé récédemment de la non-stationnarité de la art des salaires dans la valeur ajoutée. L ensemble de ces éléments a conduit à retenir l existence d un imact des coûts relatifs dans le long terme sur la art des salaires dans la valeur ajoutée française deuis une trentaine d années, et ceci en déit de la conclusion du test d Engle-Yoo sur données annuelles. Plusieurs éléments ourraient eut-être exliquer cette conclusion aaremment aradoxale des tests de co-intégration. Tout d abord, on ne disose que d un etit nombre d observations et tous les tests utilisés ici sont eu uissants à distance finie. Par ailleurs, il est très difficile d obtenir une mesure comlètement satisfaisante du coût d usage du caital tel qu il est erçu ar les firmes. Pour cela, il faudrait disoser des anticiations de rix qui ermettent d obtenir le taux d intérêt réel à l aide duquel sont aréciés les rojets d investissements. L aroche adotée consiste à faire une aroximation de l inflation anticiée ar l inflation constatée, ce qui est nécessairement très fruste. Il se eut que les évaluations de l imact du taux d intérêt réel soient quelque eu entachées d erreurs de mesure. Enfin, le assage du modèle théorique à la formulation estimée imlique une nécessaire simlification : le modèle a été log-linéarisé. Une telle oération ourrait aussi exliquer, en artie, les résultats des tests de co-intégration. Le rix de l énergie a eu un rôle réondérant sur les 30 dernières années Laformedelarelationdelongtermenerenseigne as sur l ensemble de la dynamique. À lus court terme, la art des salaires dans la valeur ajoutée ourrait évoluer selon des aramètres dont l influence s estome à un horizon lus long. Un modèle à correction d erreur a ermis de décrire cet ajustement, lus ou moins raide, de la art des salaires dans la valeur ajoutée à ses déterminants de long terme (cf. encadré 5). À cet égard et au vu de l analyse comtable, l évolution des termes de l échange eut conduire à une déformation temoraire du artage de la valeur ajoutée en faveur du facteur travail au travers de deux mécanismes. Le remier, direct, eut générer une évolution différente des Tableau 4 Évaluation de l imact de long terme des coûts relatifs des facteurs sur la art des salaires dans la valeur ajoutée 968-980 980-989 989-996 Mouvement des taux réels - 4 4 oints + 4 4 oints - 2 oint Imact sur la art des salaires + 2 2 oints - 2 2 oints + 4 oint Mouvement des rix relatifs de l énergie 20 % - 70 % - 5 % Imact sur la art des salaires + 6 oints - 3 2 oints - oint Fluctuation effective de la art des salaires + 6 oints - 8 oints - oint Cham : sociétés et quasi-sociétés, hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 85

rix à la consommation et des rix de valeur ajoutée, dans la mesure où le contenu en roduits imortés est lus fort our les biens de consommation, du moins à court terme. Le second asse ar le déficit d ajustement du salaire réel à la baisse de la roductivité aarente du travail consécutive aux chocs étroliers. L écart à court terme entre salaire réel et roductivité aarente du travail eut également être creusé, arallèlement aux chocs de termes de l échange, ar la relative inertie de l emloi à l évolution de la valeur ajoutée, qui est à la base du cycle de roductivité. En effet, lorsque l activité accélère, avec des effectifs qui ne se modifient que lentement, la roductivité aa- Encadré 4 LE CALCUL DE L ÉLASTICITÉ DE SUBSTITUTION IMPLICITE À L ESTIMATION ÉCONOMÉTRIQUE DE LA RELATION DE CO-INTÉGRATION Dans le cadre théorique d une fonction de roduction CES avec consommations énergétiques comlémentaires au caital (cf. encadré 3) et dans le cas simlificateur où la concurrence est arfaite ( 0 ), la art des salaires ne déend que du coût d usage du caital, du rix de l énergie et de l élasticité de substitution : log art r I log art. c I K Y E E art E E E E c K art b b. c d. E b c art des salaires dans la roduction art de la valeur ajoutée dans la roduction On a donc : log art c b. c art des salaires dans la roduction b d. E c art de la valeur ajoutée dans la roduction. Or, la condition du remier ordre se raortant au stock de caital donne : K Y b c. On obtient donc finalement : log art K c Y. Y Y E E art E E E E c K Néanmoins, dans l estimation économétrique, on ne $ log art disose que de qui vaut - 0,0094 lorsque le taux d intérêt est mesuré en oints, et donc $ r - 0,94 lorsque le taux est exrimé en ourcentage. c I r ṗ a #, On a donc finalement : 0,94 I K Y E E art E E E E c K Cela ermet de déduire la valeur imlicite de en considérant les valeurs moyennes de la art des salaires dans la valeur ajoutée et du ratio caital sur valeur ajoutée en valeur. En renant ainsi comme niveau moyen Y E E art 0,65 et 0,3, qui corresond à la valeur de ce ratio our l année 996 et le I K cham des SQS non agricoles - branches U2 à E E U0 - et 0,2, valeur sur le début de E E c K la décennie 90, toujours our les branches U2 à U0, on obtient une valeur de l élasticité de substitution de 0,94. En suosant les ratios ci-dessus constants, on déduit également un intervalle de confiance à 95 % our l élasticité de substitution de [0,74 ;,3], ce qui est, somme toute, relativement récis, comte tenu du nombre restreint d observations (34). Parallèlement, l élasticité de substitution eut également être déduite de la dérivée artielle : log art log E E E Y E E art E E E E c K E E Avec un ratio de 0, (valeur sur le début de la décennie 90), on arvient à une élasticité Y E E de substitution très rochedel unité. L intervalle de confiance à 95 % est ici [0,74 ;,29]. 86 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

rente du travail augmente, induisant, toutes choses égales ar ailleurs, une baisse de la art des salaires dans la valeur ajoutée. À l estimation, il aaraît qu à l horizon d une année, l emloi n a as encore comlètement réagi à l évolution de la valeur ajoutée uisqu une accélération de l activité contribue bien à baisser la art des salaires (cf. encadré 5). À l inverse, deux ou trois années arès un infléchissement ositif de l évolution de la valeur ajoutée, la art des salaires est oussée à la hausse. Le cycle de roductivité est alors vraisemblablement terminé et l emloi ajusté. De lus, il est robable que l accélération de la croissance génère, à cet horizon, une ression salariale rore à augmenter la art des salaires dans la valeur ajoutée. Les accords de Grenelle en 968 ont induit une hausse temoraire de la art des salaires dans la valeur ajoutée, rise en comte à l aide d une variable indicatrice. En outre, les taux d intérêt ne se sont as avérés significatifs dans la dynamique de court terme. Ce résultat n est as surrenant dans la mesure où ils interviennent dans les choix d investissement, donc nécessairement sur un horizon long. Au vu de la série effective de art des salaires dans la valeur ajoutée et de celle obtenue ar simulation dynamique de l équation sur la même ériode (cf. grahique VIII), l évolution globale est correctement retracée du début de la Grahique VIII Simulation dynamique de la art des salaires dans la valeur ajoutée Cham : société et quasi-sociétés hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. Encadré 5 UNE ÉQUATION ESTIMÉE DE L ÉVOLUTION DE LA PART DES SALAIRES DANS LA VALEUR AJOUTÉE La relation de long terme issue de l estimation de tye Stock-Watson est : log art 0,358 0,0094 r 0,0907 log E 2,5 4,37 où art est la art des salaires dans la valeur ajoutée des SQS hors GEN, r est le taux d intérêt nominal long déflaté de l inflation en terme de rix de roduction, mesuré en oints, E est le rix relatif de l énergie. L ajustement à la relation de long terme s écrit de la manière suivante (modèle à correction d erreur) : log art 0,27 log art 0,23 log art 2 0,36 2 log va 0,25 2 log va 2 0,27 2 log va 3 2,76,95 2,73,78 2,03 0,034 log E 0,048 d68 0,20 log art 4,22 4,86 3,0 0,358 0,0094 r 0,0907 log E où va est la valeur ajoutée del ensemble de l économie (), en volume, d68 : variable valant en 968, 0 our les autres années. Les t de Student sont indiqués entre arenthèses en dessous des coefficients. Estimation de 964 à 996, DW = 2,29, écart-tye =,66 %. La simulation dynamique de l équation estimée est rerésentée sur le grahique VIII de l article.. On considère que l accélération de la valeur ajoutée du cham total est une aroximation suffisante de celle du cham SQS hors GEN. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 87

Encadré 6 LE PRINCIPE DU CALCUL DE CONTRIBUTIONS DYNAMIQUES Le calcul de contributions dynamiques ermet, à artir d une descrition économétrique d une variable, de visualiser le oids resectif, dans le niveau ou le taux de croissance de cette variable, de ses différents déterminants. Ces contributions sont qualifiées de dynamiques, ar oosition aux contributions statiques obtenues ar simle décomosition comtable. Elles rennent exlicitement en comte la structure de retards de chacune des variables exlicatives. - une contribution, our i variant de à,delavariable Xi t :ex B i L log Xi A L t, - une contribution du résidu, qui corresond à la artie de log Y t qui n est exliquée ar aucune des variables Xi t :ex % t A L Si : - Y t est la variable exlicative, ici la art des salaires dans la valeur ajoutée, - X t,x2 t,..., X t les variables exlicatives, ici : X t : la variable indicatrice de 968 ; X2 t : la valeur ajoutée ; X3 t : le rix relatif de l énergie ; X4 t : le taux d intérêt réel ; % t :lerésidu économétrique. La relation estimée eut toujours se réécrire : A L log Y t c 0 i B i L log Xi t % t où L est l oérateur-retard et A L et B i L des olynômes de cet oérateur-retard. En inversant le olynôme A L, on obtient : () log Y t c 0 A L i B i et en niveau des variables : Y t ex c 0 x A L i A L L % t logxi t A L ex B i L A L log Xi t x ex t A L Contributions au niveau de la variable Y t Le niveau de la variable Y t se décomose donc de manière multilicative en : c - une contribution de la constante : ex 0, A L Contributions au taux de croissance de la variable Y t En différenciant la relation (), on obtient : logy t i B i L &% t & log Xi A L t A L On lit, de manière additive, les contributions des taux de croissance des différents déterminants au taux de croissance de la variable Y t. On rerésente, en général, uniquement les contributions dynamiques du taux de croissance de la art des salaires dans la valeur ajoutée qui ont le mérite d être additives. Elles sont, en effet, lus faciles à visualiser que des contributions dynamiques au niveau, elles, multilicatives. Néanmoins, ici, on voulait disoser à la fois d une rerésentation qui soit additive, mais qui mette en évidence l accumulation des effets dans le tems. On a donc choisi de construire les contributions au taux de croissance cumulées ar raort à une année deréférence, ici 973, antérieure à tous les chocs mis en évidence dans l étude (à l excetion évidemment de l année 968). Ainsi, sur le grahique IX de l article, - la courbe rerésente le taux de croissance de la art des salaires dans la valeur ajoutée deuis 973 : log Y t log Y 973 t j 973 & log Y j - les histogrammes rerésentent la contribution des différents facteurs exlicatifs à l écart de niveau de la art des salaires entre 973 et l année t,soit: t j 973 B i L & logxi A L j our i =2à 4. 88 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

décennie 70 jusqu en 996, même si l équation a tendance à légèrement sous-estimer la art des salaires dans la hase de hausse du milieu des années 70 et à la surestimer dans la hase de baisse de la décennie 80. Sur l année 997, qui ne fait as artie de la ériode d estimation, la simulation révoit une hausse de la art des salaires, là où la valeur observée fait état d une baisse d un oint environ. Afin d évaluer l imact relatif des différents aramètres dans l évolution de la art des salaires dans la valeur ajoutée, un calcul des contributions dynamiques a été effectué (cf. grahique IX ; our une exlication formalisée succincte du calcul des contributions dynamiques, cf. encadré 6). Plusieurs enseignements euvent être tirés de ce calcul de contributions. Tout d abord, les mouvements des rix de l énergie aaraissent comme les rinciaux déterminants de l évolution de la art des salaires dans la valeur ajoutée. Ainsi, à la suite du Grahique IX Contributions cumulées des différents aramètres au niveau relatif de la art des salaires dans la valeur ajoutée ar raort à l année 973 0 8 6 4 2 0-2 -4-6 Lecture : la courbe rerésente l évolution en oints de la art des salaires ar raort à son niveau de 973. Les différents histogrammes corresondent à la art de cette évolution exliquée ar chacun des différents déterminants du artage de la valeur ajoutée. Ainsi, our l année 977, le renchérissement du rix de l énergie ar raort à 973 contribue à rehausser de 5 oints la art des salaires, la baisse des taux d intérêt réels y contribue à hauteur de 2,5 oints. En revanche, le lus grand dynamisme de l activité en 977 ar raort à 973 contribue à baisser d environ oint la art des salaires. Finalement, et une fois tenu comte des résidus économétriques, on exlique que la art des salaires soit lus élevée de 4 oints en 977 ar raort à son niveau de l année 973. Cham : sociétés et quasi-sociétés hors grandes entrerises nationales. Source : Comtabilité nationale, Insee. remier choc étrolier, elle aurait été oussée à la hausse de rès de 5 oints, du seul fait du doublement du rix de l énergie. La seconde hausse de ce dernier, à la fin des années 70, aurait induit une augmentation sulémentaire de même amleur. Les effets du contre-choc étrolier auraient été lus raides, réduisant de rès de 6 oints, toutes choses égales ar ailleurs, la art des salaires en 5 ans, de 986 à 990. L effet des taux d intérêt, lus faible, est concentré sur la décennie 80 Parallèlement, les fluctuations des taux d intérêt réels auraient également contribué à faire évoluer la art des salaires dans la valeur ajoutée, mais dans une moins grande amleur. Ainsi, jusqu à la veille du second choc étrolier, la forte inflation aurait réduit les taux d intérêt réels et autorisé une hausse de la art des salaires. Sur la ériode 973-977, ces mouvements exliqueraient environ 2 oints de hausse de la art. Par la suite, le relèvement des taux nominaux aurait contribué, endant une dizaine d années, à faire baisser la art des salaires. Ainsi, jusqu en 989, la remontée constante des taux réels aurait joué négativement. Cette année-là, l effet aurait été le lus imortant : le niveau élevé des taux aurait exliqué lus de deux oints de baisse de la art des salaires ar raort au niveau de 973. Cette influence des taux d intérêt à la baisse sur la art des salaires aurait, en fait, été masquée ar la tendance à la hausse induite ar les rix de l énergie jusqu au milieu des années 80. Ceendant, ils auraient contribué au mouvement de baisse amorcé dès 982, alors même que les ajustements consécutifs au second choc étrolier auraient encore joué à la hausse sur la art des salaires dans la valeur ajoutée endant deux ans, jusqu en 984. Enfin, our ce qui concerne les années récentes et jusqu en 996, les mouvements de la art des salaires dans la valeur ajoutée seraient très atténués, ar raort à ceux des deux décennies récédentes. De lus, la majeure artie de ces fluctuations serait due aux évolutions conjoncturelles, au travers du cycle de roductivité. Les rix relatifs de l énergie n auraient lus contribué qu à réduire très légèrement la art des salaires, tandis que la détente rogressive des 4. Les rix de l énergie ont crû environ de 5 % en 996 et de 7%en 997 et les taux longs, en termes réels, ont baissé de 80 oints de base en 996 et de 00 en 997. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3 89

taux d intérêt aurait lutôt eu tendance à l orienter à la hausse, ces deux mouvements se contrebalançant globalement. Pour la dernière année disonible, 997, l équation retrace mal l évolution observée à artir des chiffres rovisoires de la Comtabilité nationale (cf. grahique VIII). Le calcul des contributions ermet de comrendre ce mésajustement. En effet, la remontée des rix de l énergie, tout comme la oursuite de la détente des taux réels longs (4), sont autant d éléments qui devraient lutôt ousser à la hausse la art des salaires dans la valeur ajoutée. Par ailleurs, le léger fléchissement de la rogression de l activité en 995 et 996 aurait également tendance à augmenter la art des salaires, en vertu du cycle de roductivité. Au total, aucun de ces éléments n exliquent la tendance à la baisse sur l année 997. Un remier élément exlicatif consisterait à arguer qu il s agit du seul oint qui ne rentre as dans la ériode d estimation, et en ce sens, on ourrait s attendre à ce qu il soit mal retracé. Cet argument équivaut à reconnaître qu on ne croit as, finalement, à la érennité de la rerésentation du artage de la valeur ajoutée faite ici. En fait, il n en est rien : quand on estime l équation d évolution du artage de la valeur ajoutée uniquement jusqu en 994, la simulation est satisfaisante sur les deux années suivantes et les contributions des différents aramètres analogues à celles du modèle estimé jusqu en 996 (cf. annexe II). Plus vraisemblablement, la montée en charge, sur les dernières années, des olitiques d aide à l emloi, qui assent essentiellement ar une baisse du coût du travail our les entrerises, ourrait être à l origine de cette baisse en 997 : elle ourrait avoir généré des modifications dans les délais d ajustement vers la relation de long terme. Il est ceendant imossible de tester cette hyothèse, eu égard au eu d observations ostérieures à la mise en lace de ces disositifs. De lus, l évolution esquissée en 997 est suscetible d être modifiée ar les chiffres définitifs de la Comtabilité nationale. * * * L ensemble de ces résultats souligne le rôle réondérant des chocs étroliers dans les imortantes fluctuations du artage de la valeur ajoutée sur les trente dernières années. Dans un remier tems, la modification très brusque des rix de l énergie et le ralentissement de la roductivité du travail ont induit une forte montée de la art des salaires. À lus long terme, l augmentation durable de la facture énergétique, dans la mesure où l élasticité de substitution entre travail et l agrégat caital-énergie serait inférieure mais roche de l unité, joue dans le même sens. Cette rédominance du rix de l énergie comme facteur exlicatif ne doit as our autant masquer l imact des taux d intérêt réels dans le artage de la valeur ajoutée. Même si les difficultés de mesure du coût d usage du caital rendent les tests délicats à interréter, un faisceau d éléments ermet de conclure au rôle artiel de la montée des taux d intérêt réels dans la baisse de la art des salaires sur les années 80, combiné au contre-choc étrolier sur la fin de la décennie. En dernier lieu, cette étude ermet de calculer, de manière indirecte, l élasticité de substitution entre le facteur travail et l agrégat caital-énergie : deux évaluations indéendantes font état d une élasticité comrise entre 0,9 et, conformes aux estimations effectuées sur d autres ays industrialisés. Ces chiffres doivent, néanmoins, être aréciés avec récaution : our remonter jusqu au début des années 60, le constat ne eut s effectuer qu à artir de données annuelles. On ne disose que d une trentaine de oints, ce qui eut conférer une certaine fragilité aux résultats. Ceendant, sur les dernières années disonibles, seule 997 résente un écart imortant entre la simulation et l observation. La montée des allégements de charges sociales, en contribuant à réduire la rogression du coût du travail deuis 993, ourrait avoir causé ce mésajustement. 90 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3

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ANNEXE I LE TEST DE SIGNIFICATIVITÉ DES VARIABLES ENTRANT DANS LA RELATION DE CO-INTÉGRATION Une méthode our recalculer des t de Student à comarer aux lois standards lorsque l on estime la relation de long terme (Stock et Watson, 993 ; Hamilton, 994). Princie de la méthode Soit y t, y 2 t ) un vecteur de variables co-intégrées toutes I, y t scalaire et y 2 t vecteur de dimension g. Elles satisfont un système du tye : s^ est l écart tye estimé de l équation (3) ar les MCO, z~ t est aroché ar un rocessus AR de la forme z ~ t ^ ^ i ) i z ~ t i e t (5), y t y 2 t z t y 2 t y 2 t u 2 t avec z t et u 2 t stationnaires. 2 i ^ i ^ avec ^ et ) i l écart-tye et les coefficients estimés du modèle (5). La méthode des moindres carrés ordinaires aliquée à l équation () donne des estimateurs convergents des aramètres (cette absence de biais n est due qu à la non-stationnarité des variables. Si elles sont stationnaires, cette roriété ne tient lus). Mais, du fait de l endogénéité des variables y 2 t, les t de Student suivent des lois non standards et les tests de significativité traditionnels ne euvent lus être utilisés. Pour corriger la corrélation entre z t et les u 2 t, Stock et Watson (993) ont roosé d introduire des termes avancés etretardés du rocessus u 2 t dans la relation (). Cela revient à estimer la relation de co-intégration en rajoutant armi les variables exlicatives des termes avancés et retardés de y 2. Onaalors: ' ' y t y 2 t ' i ' y 2 t y 2 t u 2 t avec z ~ t et u 2 t non corrélés. ( i &y 2 t i z ~ t 3 4 Les tests standards euvent être menés à artir du modèle réécrit sous la forme (3), sous réserve de corriger de l éventuelle autocorrélation des résidus z~ t. Plus récisément, our tester la significativité d une des variables de y 2 t dans la relation de co-intégration, la statistique habituelle de Student issue de la relation (3) doit être multiliée ar s^ ^, Alication à la art des salaires dans la valeur ajoutée Ici, on a estimé une équation avec un seul terme avancé et un seul terme retardé our chaque variable exlicative de la art des salaires dans la valeur ajoutée, à savoir le taux d intérêt réel et le rix relatif de l énergie : log art 0,358 0,065 0,0094 r 0,0907 log E 0,0026 0,026 0,0025 r 0,0037 r 0,0068 0,0027 0,0035 0,0035 r 0,0040 log E 0,02 log E 0,0054 E 0,030 0,029 0,027 u^ t où la somme des carrés des résidus (SSR ) vaut 0,0589 et la ériode d estimation est 962-995, ce qui corresond à 34 observations (T = 34). Les valeurs entre arenthèses corresondent aux écarts-tyes. La variance estimée vaut donc : s^ 2 T 9 SSR 0,0252 2. L évaluation de la statistique du test de significativité des coefficients nécessite l estimation d un rocessus autorégressif arochant le résidu estimé u^ t (on a ici retenu un AR 2 de la forme u^ t ) u^ t ) u^ 2 t 2 e^ t ): où u^ t 0,6742 u^ t 0,0359 u^ t 2 e^ t 92 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N 323, 999-3