BRUXELLES, 19 OCTOBRE 2011 DOSSIER DE PRESSE Evaluation du Pacte des Générations à la loupe : En tout petit, il est bien écrit «On vous prend pour des c» 1. Ce qu il s est passé en 2005 Le Conseil National du Travail a évalué les résultats du Pacte Des Générations six ans après sa mise en œuvre. Les slogans de l époque sur la nécessaire «solidarité» entre les générations nous laissaient déjà dubitatifs. Les chiffres exposés ci-dessous ne nous contredisent pas : «Pacte de solidarité entre les générations»? De quoi parle-t-on en fin de compte? On parle de mesures qui maintiennent les travailleurs âgés au travail et barrent de la sorte la route à l insertion des jeunes dans l emploi. Car, même s il n est pas sûr que tout emploi quitté soit reconduit, il est par contre sûr et certain que, en l absence de création d emplois, toute place qui ne se libère pas augmente automatiquement les difficultés de trouver un boulot pour ceux qui n en ont pas a. Le taux d emploi des 15-24 ans a chuté entre 2005 et 2010 en Belgique. Il se situe, pour 2010, à 22% en Wallonie, et à 16,6% en Région de Bruxelles-Capitale. Soit un recul de 0,3% et de 2,7% par rapport à 2005. Certains diront : «c est la faute à la crise!». Si cette affirmation n est pas complètement fausse, elle doit être tempérée par les statistiques disponibles : en 2008, donc avant la crise, et malgré toutes les mesures prises, le taux d emploi n avait pas évolué en Wallonie et peu augmenté à Bruxelles (où il partait d un niveau extrêmement bas). 1 Pas de surprise donc si le Conseil National du Travail indique que : «Si le taux d emploi des jeunes est resté à peu près stable jusqu en 2008, il a connu un net fléchissement en 2009 ( )». D où la question : le Pacte qu on nous a fait avaler de force en 2005 n était-il pas censé améliorer l insertion des jeunes dans l emploi? Les mesures de ce Pacte ont eu un effet NUL ou très limité sur l augmentation du taux d emploi des jeunes, même avant la crise. Sans parler, bien sûr, de la qualité plus que douteuse des emplois auxquels peuvent prétendre les jeunes (contrats à durée déterminée, temps partiel, intérim ). 1 Conseil National du Travail, Non paper 2011-25, Evaluation du Pacte des Générations, 27 septembre 2011.
b. Le taux de chômage des 15-24 ans a augmenté entre 2005 et 2010 en Belgique. S il a légèrement diminué en Wallonie, il a fortement augmenté à Bruxelles et se maintient à des niveaux intolérables : en Wallonie, c est un jeune de - 25 ans sur trois qui est au chômage et, à Bruxelles, ce sont deux jeunes sur cinq qui cherchent un emploi en vain. Taux d emploi en berne et taux de chômage qui fleurit Exactement le contraire de ce qu on nous avait promis avec ce Pacte! Alors, on fait quoi? On continue à foncer dans le mur? On continue de faire semblant de s attaquer au problème tout en s habituant au fait que le chômage des moins de 25 ans soit trois fois plus élevé que celui des plus de 25 ans? Ou on tombe enfin les masques, on sort de cette victimisation («C est la faute à la crise») et on (s ) avoue que le chômage des jeunes est un problème structurel? Si les mesures prônées actuellement sont inefficaces, il est temps que nos responsables politiques prennent leurs responsabilités et adoptent enfin LA méthode qui assurera l insertion réelle des jeunes dans l emploi : la création d emplois durables et de qualité pour toutes et tous.
2. Ce qu on nous prépare pour les années qui viennent Coupes sombres dans les services publics, destruction des droits sociaux, toujours plus de cadeaux fiscaux aux employeurs, maintien des plus âgés à l emploi via un nouveau Pacte des Générations Bref, on continue de se diriger vers un désastre social! Les propositions sur la table sont une véritable déclaration de guerre à l encontre des travailleurs et des droits qu ils ont conquis. Le formateur prétend penser aux jeunes et à leur avenir Il aurait dû leur demander leur avis avant! Les jeunes travailleurs débutent actuellement leur vie professionnelle dans un contexte de crise, crise créée, rappelons-le, par le système capitaliste. Après l annonce de licenciements collectifs de grande ampleur, du rachat de Dexia Banque sur fonds publics, de la faillite du holding Dexia le gouvernement voudrait en plus nous imposer des mesures antisociales : a. Restriction de l accès aux allocations d attente : Cette allocation minime reçue sur base des études est devenue nécessaire pour aider les jeunes dans leur recherche d emploi. Nombreux trajets, envoi de CV, vêtements La recherche d emploi n est pas gratuite malgré les aides des institutions de placement. Ce n est pas en mettant fin aux allocations d attente que les jeunes trouveront plus facilement un emploi, bien au contraire! b. Diminution des allocations de chômage et intensification de la chasse aux chômeurs : La dégressivité plus rapide et plus importante des allocations de chômage et une intensification de la chasse aux chômeurs ne feront qu accroître la pression sur les travailleurs. Le phénomène est malheureusement bien connu : en précarisant les chômeurs, ce sont les conditions de travail et les salaires de tous les travailleurs qu on tire vers le bas. Face à la menace de les remplacer par ces nombreux demandeurs d emploi, obligés de rechercher un travail inexistant, prêts à tout pour prendre leur place, les travailleurs disposent de peu de marge de négociation Tout bénéfice pour le patronat et les actionnaires! Les rares emplois disponibles seront donc de plus en plus précaires.
3. Il est temps de changer de cap! Depuis des années, «au nom de l emploi», les responsables politiques accordent sans cesse aux employeurs de nouvelles réductions d impôts et de cotisations sociales au détriment de notre système de solidarité. Et pour quel résultat? Prenons l exemple le plus récent : le plan Win-Win, introduit en janvier 2010, pour «faire face à la crise». Des mesures de ce type peuvent être utiles pour faire baisser très temporairement le taux de chômage, mais elles n en restent pas moins purement décoratives : sans contrôle et sans sanction pour les employeurs, les abus se multiplient. Qui irait payer un jeune quand il peut laisser l Etat s en charger? C est la Ministre de l Emploi démissionnaire elle-même qui assure la promotion de cette possibilité quand elle indique, par l entremise de son porte-parole, que les contrats Win-Win font partie d une série de mesures prises en faveur du patronat 2. Pour rappel, en 2007, les interlocuteurs sociaux s étaient accordés pour qu un minimum de 1,9% de la masse salariale soit consacré à la formation des travailleurs. Dans la majorité des secteurs, cette obligation n est pas respectée. 3 Si l on couple ces largesses publiques ( +- 7 milliards ) 4 au fait que le patronat ne respecte pas ces obligations en termes de formation des travailleurs, on peut s interroger sur la qualité d une démocratie dans laquelle un groupe très minoritaire ponctionne à l envi les deniers publics et se moque de ses propres engagements. Soyons clairs : quitte à subventionner des emplois à 80%, autant créer des emplois publics et durables dans lesquels les travailleurs auront droit à la formation qu ils méritent! Des mesures justes, solidaires, socialement et économiquement durables existent! Ayons le courage de les mettre en œuvre! 2 http://www.lesoir.be/actualite/belgique/2011-04-30/joelle-milquet-trouve-deplacee-l-attaque-du-patron-d-unizo-837427.php 3 Pour l année 2009, la moyenne des différents secteurs est de 1,59%. Conseil Central de l Economie, Rapport technique du Secrétariat sur les marges disponibles pour l évolution du coût salarial, Bruxelles, 9 novembre 2010, p.90. 4 http://www.danslapochedesactionnaires.be/
Conclusions - Au regard de la volonté de certains de proposer une nouvelle version du Pacte des Générations et, plus généralement, de ce que le volet d austérité socio-économique des négociations gouvernementales nous réserve, nous exigeons un changement radical de trajectoire. Au vu des chiffres exposés et des constats tirés, il nous semble plus qu urgent de dépasser les nombreux dogmes qui empêchent toute remise en question des mesures à prendre pour l emploi des jeunes. - Ainsi, si l on pense que depuis 30 ans, les gouvernements pratiquent des réductions de cotisations sociales et que cela n a jamais permis d enrailler le chômage structurel Qui veut continuer dans cette voie? L évaluation du Pacte des Générations nous indique que les jeunes sont plus exposés aux contrats temporaires». S agit-il d une vérité absolue? D un diktat imposé par une force supérieure mystique? Ou plutôt d une volonté patronale soutenue par les programmes et choix politiques (Win-Win, absence de contrôles de l abus d intérim, etc.)? La précarité est le produit d agendas qui se mettent en commun pour détruire nos droits. Elle n est certainement pas une fatalité. - La recherche effrénée de l augmentation du taux d emploi (sans aucun égard pour la qualité des emplois créés) et le maintien d un taux de chômage atroce (bien utile pour tuer dans l œuf toute velléité d amélioration des conditions de travail) sont des thèses que nous refusons. Qu elles viennent de décisions européennes ou bien de chez nous, il s agit de recettes de droite. Et l on a pu admirer, depuis la crise de 2008, à quel point la gestion des affaires prônée par la droite fonctionne à merveille - Rappelons simplement ici à nos responsables politiques qu il y a plus de salariés que de patrons dans la population (et dans leur électorat aussi, par conséquent). Et surtout, que les taux de chômage actuels et l absence de perspectives pour les jeunes menacent gravement la paix sociale. - Doit-on rire de dépit ou pleurer de rage quand on voit que l un des seuls budgets qui ne sera pas touché par l austérité est celui de la police? Une certaine classe commencerait à sentir la fin de règne approcher? - Nous exigeons un revirement complet dans l approche politique actuelle des mesures prises pour favoriser l emploi des jeunes. Rappelez-vous que ce n est pas en détruisant le futur qu on améliore le présent!